La Vérité vous rendra libres
- michelfresneau0278
- 18 nov. 2015
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« VOUS CONNAITREZ LA VERITE ET
Essai de Michel FRESNEAUANGERS
LA VERITE VOUS RENDRA LIBRES » (Jean 8, 32) Et : « Quand Il viendra, l’Esprit de vérité, Il vous conduira à la Vérité toute entière*(Jean*16,13) Le grand obstacle à la vérité est aujourd’hui « le scepticisme » ! Il y a « une crise » de la vérité ; dire qu’il y a « une vérité » est arbitraire. C’est « un pari » au sens pascalien du terme (et sans doute mal compris), et c’est arbitraire … Jésus, en nous quittant, nous lègue un esprit, chargé de prendre sa suite : « Cependant, lorsqu’Il viendra, Lui, l’Esprit de Vérité, Il vous conduira à la vérité tout entière … » (Jean 16,13). Mais, sans doute, cela inciterait à entrer dans le Mystère de la Trinité, puisqu’il concerne justement la venue de l’Esprit Saint … Jésus, comme Il nous l’a dit « ne nous laisse pas orphelins ». Mais, notre scepticisme, justement, nous pousse à ne pas croire qu’avec Jésus, nous est donné une Révélation qui nous unit avec le ciel. Il nous laisse son Esprit. Grâce à Lui, tout relativisme est abrogé ! La notion de vérité est largement contestée à l’heure actuelle, et en même la notion de révélation ; c’est peut être que les générations qui nous ont précédé avaient une foi quelque peu aveugle ? … Prétendre dans notre monde qu’il peut y avoir une vérité semble du dernier impérialisme, et comme notre monde Occidental semble traumatisé par son passé colonialiste, il vaut mieux prétendre qu’il y a des vérités. Comment peut-on prétendre détenir la vérité : c’est encore de l’impérialisme ! Il n’y a sans doute qu’un seul et grave problème, c’est que le mercantilisme et le Christianisme sont arrivés ensemble souvent et qu’ils ont été assimilés l’un à l’autre ayant souvent le même champ d’action. Les Organisations, qu’elles soient Nationales ou Internationales, sont persuadées que pour maintenir la paix, il est sans doute préférable de se tenir dans un certain relativisme, où toutes les religions se valent. Pour les gens qui défendent cette position, il n’y aurait pas une vérité, mais des vérités, ce qui est source de subjectivisme (une tolérance, certainement mal-comprise!). En tout cela, c’est oublier que nous avons un avocat auprès du Père : l’Esprit Saint, le grand oublié toujours ! Le Christianisme n’est pas dépositaire de la vérité, même si le Christ a dit : « Je suis le chemin, la vérité, la vie » (Jean 14,6). Toutes les religions tendent vers cette vérité ; Saint Paul notait déjà qu’il y a une loi naturelle (Romains 2,15) qui doit nous conduire à la vérité tout entière. Jean, au chapitre 16 nous dit : « Quand Il viendra, Lui, l’Esprit de Vérité, il vous conduira vers la vérité tout entière » (Jean16,14). Chez Jean et en particulier dans le chapitre 15 de son Evangile, il semble nécessaire d’être « greffé à la vigne ». Pourtant, Saint Matthieu, dans le chapitre 25 de son Evangile, semble avoir une vision plus universaliste (son Evangile, au chapitre 25; a été appelé « Evangile des Païens) semble dire des choses différentes « Mais, Maître, quand est-ce que nous t’avons vu ? » … Jésus répond « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits, c’est à Moi que vous l’avez fait … » Contradictoire avec l’Evangile de Jean ? En apparence seulement sans doute … car, l’Evangile de Matthieu s’adresse à des gens qui n’ont aucun moyen d’entrée en contact avec la parole de Dieu. (Ce qu’on appelait autrefois un peu péjorativement « les païens » !) Ce que « l’esprit » exige de tous, c’est de « tendre » vers cette vérité ! « La vérité vous rendra libres », nous dit Jésus en Jean 8,32. Et quelques versets plus loin en Jean 8,36, Il nous dit : « Si donc le Fils vous rend libres, vous serez vraiment libres ». Qui pourrait mieux nous enseigner que « la vérité rend libre » sinon Jean Paul II ce fils d’un pays asservi par deux totalitarismes en un demi-siècle. Bien sûr pour lui la liberté est essentielle si on veut garder « un esprit vrai ». La vérité, c’est le Christ qui nous dit en Saint Jean (Jn 14,6) : « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie ». Il est la Vérité, c’est en ce sens qu’il nous avait dit plus tôt : « C’est le Fils qui vous rend libres … » C’est en ce sens que Benoît XVI nous a parlé de « liberté liée », et que Saint Paul, principalement dans l’Epître aux Romains (Rm 6,6) nous parle « d’esclavage d’amour ». L’amour nous lie et, c’est l’individualisme qui refuse de se lier … L’amour, et il en est de même pour la souffrance, sont au-delà de toute métaphysique et de toute philosophie ??? Certaines philosophies contemporaines veulent ériger la liberté en valeur, au même titre que la vérité …Ce en quoi s’insurge Jean Paul II, qui à la suite de toute une tradition de l’Eglise, montre que la liberté n’est qu’un moyen pour atteindre cette valeur plus haute qu’est la vérité : c’est tout le sujet de « Veritatis Splendor » (quelqu’un en plaisantant plus ou moins disait que la statue de la liberté aux U.S.A. devrait être contrebalancée sur la Côte Pacifique d’une statue de la responsabilité !). Mais, ne dénigrons pas cette liberté. Il faut l’avoir perdue pour se rendre compte à quel point elle est nécessaire ! Ce n’est pas dans l’oppression que les peuples sont heureux et sont capables de faire de grandes choses. La vérité et la liberté sont « un attelage » indissociable, nous dit Jean Paul II. St. Thomas d’Aquin disait : « Ecouter la vérité veut dire obéir à la vérité et croire à la vérité … ne va pas au dehors, cherche en toi-même la vérité réside dans l’homme intérieur, dans ton coeur.» (Traité sur l’Evangile de St. Jean) ; et aussi : « Ce n’est pas en effet par la marche que nous suivons le Christ, c’est par la foi » et « De la chaire de sa chute (la Croix), Jésus nous donne surtout la grande leçon de l’humilité … Il nous a donné la patience comme arme pour triompher du monde»Et « Le côté ouvert de Jésus devient une fente qui nous permet de voir le cœur de Dieu » (St. Thomas) Des philosophes actuels nous disent que la liberté est en soi une valeur. Pourtant, l’Eglise, en tout temps, affirmé que Dieu nous a laissé libres, justement pour que nous cherchions la vérité. Le Cardinal J.H.Newman, il y a quelques 130 ans, nous a dit : « L’honneur de l’homme est de chercher la vérité, et quand il l’a trouvée de lui rester fidèle … ». Mais, le monde actuel, et pas seulement notre monde Occidental, est victime de deux menaces très graves qui affecte notre tempsle scepticisme (le relativisme) et l’hédonisme. Le danger à l’heure actuelle est de considérer que la vérité n’existe pas, qu’elle est à rechercher sans cesse … Il faudrait atteindre un consensus entre croyants de diverses religions présentes sur notre sol … C'est-à-dire que la parole de Jésus : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie. » (Jean 14, 6) ne serait pas entièrement … vraie ? Jésus ne serait pas la Vérité ? Le Christianisme, pour beaucoup, et en particulier, des intellectuels qui « forment » l’opinion apparaît sectaire, voire intransigeant ? (Je pense à Monseigneur Lustiger s’élevant contre l’idée que la vérité humaine serait comme un gâteau dont les tranches seraient équivalentes : christianisme, judaïsme, islam, etc.) Dans son discours à Prague, Benoît XVI dénonçait le relativisme actuel : « L’idée d’une éducation inclusive, fondée sur l’unité de la connaissance basée sur la vérité doit être retrouvée. Cela est nécessaire pour contrecarrer la tendance si manifeste dans la société contemporaine à la fragmentation du savoir. Avec le développement massif de l’information et des technologies, la tentation existe de délier la raison de la recherche de la vérité. Détachée de l’aspiration humaine fondamentale vers la vérité, la raison commence à perdre son orientation : elle se flétrit, que ce soit sous l’apparence de la modestie en se contentant de ce qui est partiel et provisoire, ou bien, sous les dehors de l’assurance, en exigeant l’abandon de toute exigence … Le Relativisme qui s’ensuit, créé un contexte propice où de nouvelles menaces sur l’autonomie des institutions peuvent se cacher. Alors que le temps des interférences de la part de totalitarismes politiques est révolu, n’arrive t-il pas qu’à travers le monde, l’exercice de la raison et la recherche académique soient plus ou moins contraints de se soumettre aux pressions de groupes d’intérêts idéologiques ou de céder aux attraits d’objets utilitaristes ou pragmatiques à court terme ? » Peu avant sa condamnation à mort le Vendredi Saint, Jésus dit à Pilate : « Je suis né, je ne suis venu dans le monde que pour ceci : rendre témoignage à la vérité. » (Jean 18,37). A quoi répond Pilate : « Qu’est-ce que la vérité ? ». Dans ce mot désabusé de Pilate, s’exprime tout le scepticisme, tout le relativisme de notre monde contemporain (d’ailleurs, dans ce doute au sujet de la vérité s’inscrit déjà le relativisme quant à l’homme « Ecce homo » « Voici l’homme » ; c’est dans ce doute que s’inscrit toute justice vis-à-vis de l’homme), alors que la vérité, c’est Dieu et Jésus est venu nous la transmettre : « Je suis le Chemin, la Vérité, la vie » (Jean 14, 6) : c’est un drame de notre époque : « Il n’y a pas de Vérité, il n’y a que des vérités ! » Le mot du Père Jean Marie Petitclerc, éducateur de jeunes en difficulté stigmatise à leur suite la notion de tolérance, qui est tellement chère à nos penseurs contemporains : pour eux, c’est une vertu « neutre » qu’il faudrait plutôt remplacer par la notion de « respect » ! « Un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine, mais au contraire, au gré de leurs passions et l’oreille les démangeant, ils se donneront des maîtres en quantité et détourneront l’oreille de la vérité pour se tourner vers des fables … » (2 Timothée 4,34). L’Encyclique de Jean-Paul II ( Veritatis Splendor) a pour but essentiellement de rappeler aux Chrétiens- et aussi aux non-chrétiens- que l’essence de la morale repose sur l’accord de tous sur les 10 commandements. Il se réfère au dialogue de Jésus avec le Jeune Homme Riche chez Matthieu (Matthieu 19, 16 à 26). Il (le Jeune Homme) dit qu’il suit attentivement les prescriptions de la Loi. Jésus ajoute : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes et donne le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis, viens et suis-moi ». Le jeune homme s’en alla tout triste, car, nous dit l’Evangile, il avait de grands biens. Benoît XVI ne cesse de le répéter, à Subiaco déjà peu avant qu’il ne soit élu Pape, il disait que la formule popularisée par Kelsen : « Etsi Deus non daretur », qui est une formule de Droit International devrait être remplacée par « Veluti si Deus daretur », c'est-à-dire faire comme si la notion de Dieu était admise … D’ailleurs, la plupart des civilisations mondiales sont « déistes », (Pascal ne disait pas autre chose) Le scepticisme contemporain n’a pas d’armes contre les fondamentalismes religieux. « Saint Augustin se demandait : « Quid enim fortius desiderat anima quam veritatem ? » - Que désire l’âme plus fortement que la vérité ? Le visage humain d’une société dépend beaucoup de la contribution de l’éducation à maintenir vive cette demande… En effet, l’éducation concerne la formation intégrale de la personne y compris la dimension morale et spirituelle de l’être, en vue de sa fin ultime et du bien de la société dont elle est membre. Des lors, pour éduquer à la vérité, il convient avant tout de savoir qui est la personne humaine … C’est seulement par sa relation avec Dieu que l’homme comprend le sens de sa propre liberté. Et c’est la tâche de l’éducation de former à la liberté authentique. Celle-ci n’est pas l’absence de liens ou le règne du libre-arbitre, elle n’est pas l’absolutisme du « je ». L’homme qui se croit absolu, qui n’est dépendant de rien et de personne et qui croit pouvoir faire tout ce qu’il veut, finit par contredire la vérité de son propre être et par perdre sa liberté. Au contraire, l’homme est un être relationnel qui vit en relation avec les autres et avec Dieu surtout. La liberté authentique ne peut jamais être atteinte dans l’éloignement de Dieu. … Pour exercer sa liberté, l’homme doit alors dépasser l’horizon relativiste et connaître la vérité sur le bien et le mal « Au fond de sa conscience, l’homme découvre une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il doit au contraire obéir et dont la voix l’appelle à aimer, à faire le bien et à fuir le mal, à assumer la responsabilité du bien accompli et du mal commis. »(Gaudium et Spes, n°16). Pour cela, l’exercice de la liberté est profondément lié à la morale naturelle, qui est de caractère universel. » « Liberté, que de crimes on commet en ton nom ! » disait Madame Roland au moment de la Révolution Française (elle mourra sous l’échafaud.) On pourrait dire la même chose de la vérité… Que de pouvoirs se sont établis au nom de la liberté et de la vérité et sont devenus peu à peu sclérosés : cette soi-disant vérité devenant peu à peu dogmatisme. « Les idéologies se sont effondrées. Un nouveau danger se lève, celui d’une nouvelle alliance entre l’idéalisme démocratique et le relativisme éthique » (J.L Brugnès O.P., en introduction à Veritatis Splendor (édition Mame-Plon). Si Jean Paul II a consacré une Encyclique à la Morale (Veritatis Splendor), c’est qu’il sentait que cette morale était menacée sous tous les continents et par tous les régimes politiques et aussi par la soif de consommation, par les progrès technologiques : relativisme éthique et scepticisme qui remettent en question notre foi chrétienne, et notre croyance en « une vérité ». Si bien que la recherche de la vérité passe au second plan de nos valeurs ; pourtant, le Cardinal Newman avait dit : « L’honneur de l’homme est de chercher la vérité, et quand il l’a trouvé de s’y maintenir. »Le « consensus » de nos sociétés actuelles est premier, il induit la tolérance qui est devenue la première des vertus, reléguant au second rang la recherche de la vérité. D’ailleurs, la prétention des Chrétiens à détenir la vérité est intolérable et met en péril la notion même de démocratie. Quand Jésus dit : « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie », Il ne saurait être la vérité lui-même, mais, Il y conduit … n’est-ce pas qu’un nouvel arianisme se propage subrepticement ; n’est-ce pas nier que la vérité est venue vers nous et qu’elle est vivante. A l’heure où des prêtres anglicans rejoignent l’Eglise Catholique et celle où notre Pape canonise le Cardinal J.H. Newman chez lui à Birmingham, d’autres chrétiens font le chemin inverse … Vérité et liberté représentent un doublet, dichotomie apparente : devenue dualité. Jean Paul II à Fatima le 13-V-1990 « le risque est après la chute du marxisme d’idolâtrer la liberté en détruisant les racines de la morale chrétienne. » Il existe donc 2 dangers : 1) Dire que la liberté est "tout", qu’elle est une valeur en soi, qu’elle n’a plus à avoir aucune relation avec la vérité. La vérité ne serait-elle pas la source de tout totalitarisme ? Ce que le P. Tony Anatrella écrit : « la liberté n’existe pas en soi, elle se conquiert au fur et à mesure qu’on prend conscience de soi ». Et pourtant c’est le danger que dénonçait Jean Paul II à Fatima : liberté hors de toute référence à la vérité. (il existe une illusion de croire que la liberté est une valeur en soi, illusion entretenue par une référence constante à un certain mythe du « bon sauvage » et que notre malheur a été de connaître le monde « à travers » le christianisme et la notion de péché originel !) 2) L’autre danger, c’est le risque de dire la liberté n’existe pas ou si peu : tellement l’homme moderne est soumis (au moins dans notre monde occidental) et conditionné par les médias et le consumérisme. C’est aussi la tendance mise en avant par des sciences dites humaines (sociologie et psychologie). L’homme est déterminé ! Entre ces 2 tendances, l’Eglise (et beaucoup d’hommes non chrétiens de bon sens) dit : « l’homme est libre, et c’est même l’honneur de sa condition » Remplacer une libération illusoire et utopique par une révolution politique, liberticide, voilà le risque de nos sociétés actuelles : une démocratie sans valeur se transforme aisément en anarchie, laquelle à son tour pour échapper au désordre, se mue en totalitarisme.dualisme. On sépare pour mieux analyser, en vue de reformer l’unité, puis, peu à peu cette séparation devient opposition : dualité devient dualisme. Ainsi la liberté et la vérité se sont séparées. Alors que la première est faite pour arriver à la seconde. Une fois celle-ci atteinte, son rôle est de s’effacer … Jacques Maritain dans « la liberté selon Saint Thomas d’Aquin » fait remarquer que sous le nom de la liberté, on entend deux choses différentes :1) L’une concerne la liberté comme absence de contrainte : ainsi un oiseau est libre quand il n’est pas en cage, ce qui ne veut pas dire qu’il jouit du libre arbitre (pour l’homme, il s’agit essentiellement de ce que nous appelons : « liberté extérieure »)2) L’autre concerne la liberté comme absence de nécessité, ce qui est justement le libre arbitre (et là, pour l’homme, il s’agit essentiellement de « la liberté intérieure »). Pensons, par exemple, à la liberté des prisonniers d’opinion. VERITE – LIBERTE Attelage essentiel pour toute vie morale et donc pour toute vie personnelle, attelage problématique à l’heure actuelle, car autant on estime la liberté, autant on se méfie beaucoup de la vérité. Sans doute, le 20è siècle qui vient de passer a été le théâtre de trop d’idéologies qui s’avançaient masquées …nazisme et communisme, sans parler d’autres génocides qui ont suivis khmer et rwandais entre autres … d’autres qui les ont précédés : arménien ; si bien que, pour beaucoup de gens, « vérité » est un peu synonyme de dogmatisme, on s’en méfie lourdement …sans imaginer que la liberté livrée à elle même et désinsérée de toute vérité (ou de toute recherche de vérité) est elle même dangereuse, et la porte ouverte à toutes les aventures : l’anarchie ou/et le totalitarisme. Jean Paul II avait raison quant il était Karol Wojtyla et qu’il déclarait dès 1958 au père H. de Lubac que le relativisme était une crise très grave de notre monde contemporain. Depuis qu’il a accédé au pontificat, il n’a eu guère de cesse de le rappeler à toute occasion. « La force salvifique du vrai est contestée et l’on confie à la seule liberté déracinée de toute objectivité, la tâche de décider de manière autorisée de ce qui est bien et mal. Le relativisme devient dans le domaine théologique un manque de confiance dans la sagesse de Dieu ». (Discours à un congrès de théologie morale le 10-IV-1986) Plus tard, il a dit à Fatima le 13-V-1990 : « Il existe le danger de remplacer le marxisme par une autre forme d’athéisme qui en adorant la liberté tend à détruire la morale humaine et chrétienne ». Pourtant, ainsi qu’il l’écrivait dans Redemptor Hominis (au n°12) : « L’amour de Dieu ne peut se rencontrer que dans la liberté. Pour être fidèle à sa mission, l’Eglise doit se faire la « Gardienne de la liberté » humaine. La vraie liberté recherche la vérité et est liée par elle » Redemptor Hominis n°12. Autant la liberté peut être exacerbée par certaines tendances philosophiques qui la désinsèrent de tout lien avec la vérité, autant elle est presque annihilée dans d’autres courants scientifiques qui insistent sur notre déterminisme par des lois psycho-ou sociologiques. L’homme a tellement peur qu’il s’est réfugié dans un individualisme dont il n’arrive plus à sortir, il a tellement peur de retomber dans une certaine dépendance (hétéronomie : perte de liberté de son enfance) qu’il ne parvient pas à sortir de son autonomie ainsi il se réfugie dans une attitude adolescente sans parvenir vraiment à une véritable maturité. Il a peur d’être annexé … alors qu’il lui faudrait s’engager … phantasme adolescent. La vie adulte, dit Jean Paul II est une « théonomie participée », donc, ni une hétéronomie (comme dans l’enfance, qui serait une aliénation à l’âge adulte), ni une autonomie (comme le rêverait l’adolescence, mais, c’est un rêve !). Théonomie, parce que nous sommes liés à Dieu, et participée car elle est participation à la sagesse et à la providence de Dieu. (Veritatis Splendor 41). Nos contemporains, qui ne veulent pas entendre parler de vérité, qui leur rappelle trop de mauvais souvenirs devraient savoir sans doute que cette liberté désinsérée peut être elle-même source de très grands maux où cette liberté se mue en licence ou en libertinage, tyrannie du plaisir et de la spontanéité où les plus faibles sont vite lésés et qui finit en ... totalitarisme !« La vraie liberté est en l’homme un signe privilégié de l’image divine car Dieu a voulu le laisser à son propre conseil (cf. Siracide 15, 14) pour qu’il puisse lui-même chercher son libérateur, et en adhérant librement à lui, s"achever ainsi, dans une bienheureuse plénitude ». S’il existe un droit à être respecté dans son propre itinéraire de recherche de la vérité , il existe encore intérieurement l’obligation morale grave pour tous de chercher la vérité, et une fois qu’elle est connue d’y adhérer (Libertas Praestantissimus). C’est en ce sens que le Cardinal J.H. NEWMAN, éminent défenseur des droits de la conscience, affirmait avec force : « La conscience a des droits parce qu’elle a des devoirs ». (cité par Jean Paul II en V.S.) « Evangelium Vitae 21 : Quand on recherche les racines les plus profondes du combat entre la « culture de la vie » et la « culture de la mort », on ne peut s’arrêter à la conception pervertie de la liberté que l’on vient d’évoquer. Il faut arriver au cœur du drame vécu par l’homme contemporain, l’éclipse du sens de Dieu et du sens de l’homme … En EvangelimVitae 23 : L’éclipse du sens de Dieu et de l’homme conduit inévitablement au matérialisme pratique qui fait se répandre l’individualisme, l’utilitarisme et l’hédonisme. « L’auteur du Siracide rattache à la ressemblance de l’homme avec Dieu, non seulement leur domination du Monde, mais aussi les facultés spirituelles les plus caractéristiques telles que la raison, la capacité de discerner le bien du mal, la volonté libre,… » EV34« Dieu remplit les hommes de science et d’intelligence et leur fait connaître le bien et le mal » Si 17,-7 La capacité d’accéder à la vérité et à la liberté sont des prérogatives de l’homme du fait qu’il est créé à l’image de son créateur, le Dieu Vrai et Juste. EV34« Pour la formation de la conscience la redécouverte du lien constitutif qui unit la liberté à la vérité n’est pas moins déterminante : comme je l’ai dit bien des fois, séparer radicalement la liberté et la vérité objective empêche d’établir les droits de la personne sur une base rationnelle solide, et cela ouvre dans la société la voie au risque de l’arbitraire ingouvernable des individus ou au totalitarisme mortifère des pouvoirs publics. »Il est essentiel ensuite que l’homme reconnaisse l’évidence originelle de sa condition de créature qui reçoit de Dieu l’être et la vie comme un Don et une tâche : « c’est seulement en acceptant sa dépendance première dans l’être que l’homme peut réaliser la plénitude de sa vie et sa liberté, et en même temps respecter la vie et la liberté de toute autre personne ... Il est d’une sagesse importante de redécouvrir le lien inséparable entre la vie et la liberté. (EV 96) « Il n’y a pas de vérité véritable là où la vie n’est pas accueillie, ni aimée, et il n’y a pas de vie en plénitude, sinon dans la liberté » « Liberté et vérité ont un lien si fort qu’une liberté qui refuserait de se lier à la vérité tomberait dans l’arbitraire, et finirait par se soumettre elle-même aux passions les plus dégradantes et par s’autodétruire » Léon XIII dans Libertas Praestantissimus, cité par Jean Paul II, en Centesimus Annus n° 4. LA VERITEVERITE DANS L’ANCIENNE ALLIANCE . Les contacts de la civilisation hébraïque avec la civilisation grecque à Alexandrie datent du Vè siècle avant J.C., pourtant ce mot existait avant. Dans les psaumes, par exemple on trouve assez souvent ce terme : Au Psaume 14Seigneur, Qui séjournera sous te tente ? Qui habitera ta sainte montagne ?Celui qui se conduit parfaitement, qui agit avec justice et dit la vérité selon son cœur Au Psaume 25, verset 10Tous les sentiers de Yahweh sont Amour et Vérité, pour qui garde son alliance Au Psaume 35Dans les cieux, ton amour Seigneur, jusqu’aux nues, ta Vérité Au Psaume 39v 11 J’ai dit ton Amour et ta Vérité à la grande assembléev 12 Toi, Seigneur, ne retiens pas loin de moi ta tendresse. Que ton Amour et ta Vérité sans cesse me gardent Au Psaume 42, verset 3Envoie ta lumière et ta Vérité qu’elles guident mes pas, et me conduisent à ta montagne sainte, jusqu’en ta demeure (l’esprit du mot « liberté » est absent, mais le Psaume parle de « délivrer »)Au Psaume 44, verset 5Ton honneur, c’est de courir au combat, pour la justice, la clémence et la Vérité Au Psaume 50, verset 8Mais tu veux au fond de moi la Vérité Au Psaume 51, verset 5Tu (le fourbe) aimes le mal plus que le bien, et plus que la Vérité, le mensonge.Tu aimes les paroles qui tuent, langue perverse Au Psaume 56, verset 4Du ciel, qu’Il m’envoie le salut (mon adversaire a blasphémé)Que Dieu envoie son Amour et sa Vérité Au Psaume 60, verset 8Que le Roi trône à jamais devant la force de DieuAssigne à sa garde Amour et VéritéAu Psaume 84, verset 11Amour et Vérité se rencontrent, Justice et Paix s’embrassentLa Vérité germera de la terre et du ciel se penchera la justice Au Psaume 85Montre-moi ton cheminSeigneur, que je marche en suivant ta Vérité, unifie mon cœur pour qu’il craigne ton nom, au verset 15 :Toi Seigneur, Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, plein d’Amour et de Vérité Au Psaume 88Justice et droit sont l’appui de ton trôneAmour et Vérité précèdent ta force Au Psaume 95, verset 13Il jugera le monde avec justice et les peuples selon la Vérité Au Psaume 118, verset 151Toi, Seigneur, Tu es proche, tout dans tes œuvres est Vérité VERITE DANS LA NOUVELLE ALLIANCE Déjà dans l’Ancienne Alliance, la Vérité (et l’Amour) est un des attributs de Dieu. La Liberté prônée dans tous les premiers livres (même si on l’appelle pas sous ce terme) n’est qu’un moyen pour atteindre cette vérité. Dans LES EVANGILES Certainement le mot Vérité est présent ailleurs que dans celui de Saint Jean, cependant c’est dans celui-ci que le mot est aussi prégnant, fruit de sa contemplation :En Jean 1,14Et le Verbe s’est fait Chair et Il a habité parmi nous.La gloire qu’Il tient de son Père comme Fils unique , plein de grâce et de VéritéEn Jean 1,17 toujours dans le prologueLa Loi nous est venue par MoïseLa grâce et la Vérité sont venues par Jésus ChristEn Jean 3,21 (il s’agit de l’entretien de Jésus avec Nicodème)« … mais celui qui agit selon la Vérité vient à la Lumière afin que ses œuvres soient reconnues comme des œuvres de Dieu » En Jean 3,33 (Jésus au sujet de Jean Baptiste)Mais celui qui accepte son témoignage certifie par là que Dieu est la VéritéEn Jean 4, 23 (dans l’entretien de Jésus avec la Samaritaine)« Mais l’Heure vient où les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en Vérité »En Jean 4,24 (toujours avec la Samaritaine)Dieu est Esprit et ceux qui l’adorent, c’est en Esprit et en Vérité qu’ils doivent l’adoreren Jean 5,31 à 33 (après la guérison du paralysé de la piscine de Bezatha)Si je me rendais témoignage à moi-même, mon témoignage ne serait pas vrai. Il y a quelqu’un d’autre qui me rend témoignage et Je sais que le témoignage qu’Il me rend est vrai.Vous avez envoyé une délégation auprès de Jean Baptiste et il a rendu témoignage à la VéritéEn Jean 7,18Mais si quelqu’un cherche la gloire de Celui qui L’a envoyé, il est dans le vrai et il ne lui sera fait aucun malEn Jean 7,28Je ne suis pas venu de moi-même mais Celui qui M’a envoyé dit la VéritéEn Jean 8, 26D’ailleurs, Celui qui m’a envoyé dit la Vérité et c’est de Lui que j’ai entendu ce que je dis pour le monde.En Jean 8,32Jésus disait aux Juifs qui maintenant croyaient en lui : « Si vous demeurez fidèles à ma parole, vous êtes vraiment mes disciples, alors vous connaîtrez la Vérité, et la Vérité vous rendra libres »En Jean 8,34 Donc, si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres. En Jean 8,40En fait, vous cherchez à me faire mourir, moi qui vous ai dit la Vérité que j’ai entendue de DieuEn Jean 8,44Le Démon n’a jamais été dans la vérité parce qu’il n’y a pas en lui de vérité … mais moi, parce que je vous dis la Vérité, vous ne me croyez pas … si je dis la Vérité, pourquoi ne me croyez vous pas ?En Jean 14,6Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie. Personne ne va vers la Père sans passer par moiEn Jean 14,16Moi, Je prierai le Père et Il vous enverra un autre Défenseur : qui sera toujours avec vous : c’est l’Esprit de Vérité En Jean 15,26Quand viendra le Défenseur que Je vous enverrai d’auprès du Père, Lui, l’Esprit de Vérité qui procède du Père, Il rendra témoignage en ma faveur.En Jean 16, 7Pourtant, je vous dis la Vérité :c’est votre intérêt que je m’en aille, car si Je ne m’en vais pas, le Défenseur ne viendra pas en vous, mais si Je pars, Je vous l’enverraiEn Jean 16, 13Quand Il viendra lui, l’Esprit de Vérité, Il vous guidera vers la Vérité toute entièreEn Jean 17,17Consacre-les en la Vérité, Ta parole est VéritéEn Jean 17,19et pour eux, je me consacre moi-même afin qu’ils soient eux-mêmes consacrés par la VéritéEn Jean 18,37 (Jésus à Pilate lors de son interrogatoire)« Je suis né, Je suis venu dans ce monde pour ceci :Rendre témoignage à la Vérité. Tout homme qui appartient à la Vérité écoute ma voix Pilate lui dit : Qu’est ce que la vérité ? » (Le mot « vérité » est cité quelque chose comme 19 fois dans l’Evangile de Jean … autant dire qu’il est prégnant, et que, pour Jean, il est central. Le monde moderne est, en effet dominé par l’état d’esprit qui était déjà celui de Pilate : « Qu’est-ce que la vérité ? » au cours de l’interrogatoire de Jésus (Jean 18,38 )C’est la source d’ un scepticisme profond. On voit là qu’annoncer haut et fort la valeur première de la vérité –contre tout scepticisme , c’est défendre le droit à la vérité de tout homme en face de l’arbitraire des politiques, bref affirmer la liberté de conscience. Ce n’est pas sans conséquence : le juriste international Kelsen, à l’origine des textes fondateurs des grandes organisations internationales affirmait que les paroles de Pilate devaient être la base de ces Organisations, puisque beaucoup de pays qui y adhèrent ne sont pas de culture chrétienne … mais ces cultures croient en Dieu même si elles ne sont pas chrétiennes.) Dans les épîtres de Paul, le mot « vérité » est présent à plusieurs reprises. La « vérité de Dieu » est apportée par la foi au Christ, cette foi dépasse la Loi de l’ancienne alliance, susceptible d’ « endurcissement du coeur » (Romains 9,10 et 11) et s’étend à tous les peuples Dans l’épître aux Romains, ainsi que dans celle aux Galates, Saint Paul pourrait donner l’impression de « minimiser » l’importance de la loi par rapport à la foi … ?; certes NON et lui-même nous le dit dans l’épître aux Romains : « Suis en train de minimiser la loi. Certes NON … la loi est sainte. » (Romains 7,14) Il n’annihile pas la loi en défendant la foi en Jésus Christ ? D’ailleurs, il nous le redit plus tard dans la 1° épître à Timothée (1 Tim 1, 8à11) « Certes, la loi est bonne … elle n’a pas été instituée pour les justes ». Il souligne l’importance de la loi. L’Eglise, d’ailleurs ne nie pas cette importance de la loi elle qui récite tous les jours, par exemple le Psaume 119(118), où le mot de loi est répété plusieurs fois. Dans les chapitres 9, 10, 11 de l’Epître aux Romains, Paul fustige ses co-religionnaires juifs de la sclérose introduite dans la Torah ; il voit là l’autorisation donnée par Dieu de l’ouverture de l’Eglise aux « païens » (certains commentaires y voient la parabole de Jésus relative au Père miséricordieux).Plusieurs schémas s’ouvrent aux hommes :La loi que devraient adopter ceux qui vivent sans … loi, c'est-à-dire les anarchistes. On retrouve là les incitations de la 1° épître à Timothée La loi naturelle (Rm2, 14-15)que pratiquent ceux qui ne connaissent pas le Christianisme, à laquelle on peut rattacher la religion juiveEt enfin, la foi révélée en Jésus Christ. Saint Paul, loin de dénigrer la loi dit dans l’épître aux Romains que : « La charité est donc la loi dans sa plénitude » (Romains 13,10.) La fin de la loi est donc de lasser passer devant la Charité et donc la foi en Jésus Christ. Dans l’épître aux Galates, Paul fustige les Galates d’avoir abandonné leur foi au profit d’un retour à la loi prônée par des prédicateurs juifs … « Le Christ serait-il mort pour rien ? » Luc nous dit : « Quand le Seigneur reviendra, trouvera t-Il la foi sur la terre ? » (Luc 18,7) Dans les épîtres aux Corinthiens : En 1 Co 5,7Purifiez vous du vieux levain, car notre Pâque, le Christ, a été immolé. Ainsi donc, célébrons la fête, non pas avec du vieux levain, ni avec un levain de malice et de méchanceté mais avec des azymes de pureté et de vérité*en 1 Co 13,6La charité met sa joie dans la vérité*en 2 Co 13,8Car nous n’avons aucun pouvoir contre la vérité, nous n’en avons que pour la vérité Dans l’Epitre aux Colossiens (1, 4)Nous avons entendu parler de votre foi en Jésus Christ et de l’amour que vous avez pour tous les fidèles dans l’espérance de ce qui vous attend au ciel ; vous en avez déjà reçu l’annonce par la parole de vérité Dans l’Epitre aux Ephésiens *Ephésiens 4, 15-16Mais, vivant, selon la vérité et dans la charité, nous grandirons de toute manière vers Celui qui est la Tête, le Christ, dont le corps tout entier reçoit concorde et cohésion.*Ephésiens 4,21Mais, vous, c’est dans une prédication et en enseignement conformes à la vérité qui est en Jésus, à savoir qu’il vous faut abandonner votre premier genre de vie et dépouiller le vieil homme qui va se corrompant au fil des convoitises décevantes pour vous renouveler par une transformations spirituelle de votre jugement et revêtir l’Homme Nouveau qui a été crée selon Dieu, dans la justice et la sainteté de la vérité.*Ephésiens 5,24Mais à présent vous êtes lumière dans le Seigneur, conduisez-vous en enfants de lumière car le fruit de la lumière consiste à toute bonté, justice et vérité Dans la 2° Epitre aux Thessaloniciens 2,17Nous devons, quant à nous, rendre grâce à Dieu à tout moment à votre sujet, frères aimés du Seigneur parce que Dieu vous a choisis dès le commencement pour être sauvés par l’Esprit qui sanctifie et la foi en la Vérité. Dans les Epîtres à Timothée : en 1 Timothée 2,4…Lui (Dieu) qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la VéritéCar Dieu est Unique, Unique aussi le Médiateur (Jésus Christ) entre Dieu et les hommesen 1 Timothée 3,15l'Eglise du Dieu vivant colonne et support de la Véritéen 2 Timothée 4,34Car un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la saine doctrine … et détourneront l’oreille de la vérité pour se tourner des fables. Dans l’Epître à Tite 1,1… Moi, Paul, serviteur de Dieu, je m’adresse à toi, Tite, mon véritable enfant selon la foi qui nous est commune, moi qui suis apôtre de Jésus Christ, chargé de conduire ceux que Dieu a choisit vers la foi et la connaissance de la vérité Dans les Epîtres Catholiques, même insistance, c’est notre conduite éclairée par notre connaissance de Jésus Christ qui nous conduit à la Vérité. En 1 Jn 2,4Qui dit « Je le connais » alors qu’il ne garde pas ses commandements est un menteur et la vérité n’est pas en luiEn 1 Jn 3, 17Petits enfants, n’aimons ni de mots, ni de langue ; mais en acte et en vérité A cela nous saurons que nous sommes de la vérité, et, devant Lui, nous apaiserons notre cœurEn 1 Jn 4,9Nous, nous sommes de Dieu, qui connaît Dieu, nous écoute, qui n’est pas de Dieu, ne nous écoute pas c’est à quoi nous reconnaissons l’esprit de vérité et l’esprit de l’erreurEn 1 Jn 5,6Et c’est l'Esprit qui rend témoignage parce que l’Esprit est la Vérité Chez Saint Pierre : En 1 P 1,22En obéissant à la Vérité, vous vous êtes purifiés pour vous aimer sincèrement comme des frères En Saint Jacques : Jacques 1,18(Dieu) a voulu nous enfanter par une parole de Vérité pour que nous soyons comme les prémices des créatures.Jacques 5,19Mes frères, si l’un de vous s’égare loin de la Vérité et si quelqu’un l’amène à se convertir, alors, sachez le : celui qui ramène un pêcheur du chemin où il s’égarait se sauvera et couvrira une multitude de péchés. CONCILE VATICAN II La profondeur de vérité que cette Révélation manifeste, sur Dieu et le salut de l’homme resplendit pour nous dans le Christ, qui est à la fois le médiateur, et la plénitude de toute Révélation DEI VERBUM (Dei verbum : D.V.) Au n° 5 : « Pour exister, cette foi requiert la grâce prévenante et aimante de Dieu, ainsi que les secours intérieurs de l’Esprit Saint pour qu’il mène le cœur de l’homme et le tourne vers Dieu, ouvre les yeux de l’esprit et donne à tous « la douceur de consentir et de croire à la vérité » (2è Conc. d’Orange) » Cette tradition qui vient des Apôtres fait sous l’assistance du Saint Esprit des progrès dans l'Eglise : en effet, la perception des choses aussi bien que des paroles transmises s’accroît, soit par la contemplation et l’étude des croyants qui les méditent en leur cœur(cf. Luc 2,19 et 51), soit par la profonde intelligence qu’ils éprouvent des choses spirituelles, soit par la prédication de ceux-là qui avec la succession épiscopale, reçurent un charisme certain de vérité. Ainsi, l'Eglise tandis que les siècles s’écoulent, tend constamment vers la plénitude de la divine vérité jusqu’à ce que soient accomplies en elle les Paroles de Dieu. D.V. n°8 Au n° 9 : « La Saint Tradition et la Sainte Ecriture sont donc reliées et communiquent étroitement entre elles … en effet, le Sainte Ecriture est la Parole de Dieu en tant que, sous l’inspiration de l’Esprit Divin, elle est consignée par écrit ; quant à la Sainte Tradition, elle est la Parole de Dieu, confiée par le Christ, Seigneur, et par l’Esprit-Saint, aux apôtres, transmise intégralement à leurs successeurs, pour que illuminés par l’Esprit de Vérité, en la prêchant, ils la gardent, l’exposent et la répandent avec fidélité. D.V. n°9 Au n° 11 : « La Vérité divinement révélée, que contiennent et présentent tous les livres de la Sainte Ecriture, y a été consignée sous l’inspiration de l’Esprit-Saint … Dés lors, puisque toutes les assertions des auteurs inspirés doivent être tenues pour assertions de l’Esprit-Saint, il faut déclarer que les livres de l’Ecriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur, la Vérité, que Dieu pour notre salut a voulu voir consignée dans les Lettres Sacrées. Au n° 13 : « Dans le Sainte Ecriture, la Vérité et la sainteté de Dieu restant toujours sauves, se manifeste donc la condescendance merveilleuse de la Sagesse Eternelle « pour que nous apprenions l’ineffable bienveillance de Dieu et à quel point aussi dans ses soins prévenants pour notre nature, il a adapté son langage ». En effet, les paroles de Dieu, passant par les langues humaines ont pris la ressemblance du langage des hommes, de même que jadis le Verbe du Père Eternel ayant pris chair de notre chair, est devenu semblable aux hommes. » Au n° 19 : « Les Apôtres, après l’Ascension du Seigneur transmirent à leurs auditeurs ses propres paroles et ses propres actions, avec cette intelligence plus profonde des choses dont eux-mêmes, instruits par les événements glorieux du Christ et éclairés par la lumière de l’Esprit de la Vérité jouissaient. » Au n° 20 : « Le Seigneur Jésus, comme il l’avait promis fut présent à ses apôtres (après l’Ascension) (cf. Math 28,20) et Il leur envoya l’Esprit consolateur qui devait les introduire dans la Vérité (cf. Jn 16,13) » « Ainsi, la famille chrétienne proclame hautement à la fois les vertus du Royaume de Dieu et l’espoir de la vie bienheureuse. » « Par conséquent, les laïcs peuvent et doivent même à travers leurs occupations et leurs soucis temporels exercer une action précise pour l’évangélisation du monde. Certains d’entre eux suivant leurs moyens, apportent un concours de suppléance pour certains offices sacrés … mais à tous s’impose le devoir de coopérer à l’extension et au progrès du Règne du Christ dans le monde. C’est pourquoi les laïcs doivent chercher à connaître toujours plus profondément la Vérité révélée et demander instamment à Dieu le don de Sagesse. »Participant à l’intelligence divine, l’homme a raison de penser que par sa propre intelligence, il dépasse l’univers des choses … toujours cependant il a cherché et il trouve une Vérité plus profonde …La nature intelligente de la personne trouve et doit trouver sa perfection dans la sagesse. Celle-ci attire avec force et douceur l’esprit de l’homme vers la recherche et l’amour du vrai et du bien, l’homme qui s’en nourrit est conduit du monde visible à l’invisible. Gaudium et Spes n°15 (Gaudium et Spes : G.S.) Par fidélité à la conscience, les Chrétiens unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie publique. Car si l’homme existe, c’est que Dieu ne cesse de lui donner l’Etre, et l’homme ne vit pleinement selon la vérité que s’il reconnaît pleinement son amour et s’abandonne à son créateur G.S. n°19 Certains font un tel cas de l’homme que la foi en Dieu s’en trouve comme énervée, plus préoccupés qu’ils sont, semble-t-il d’affirmer l’homme que nier Dieu .G.S. n°19En réalité, le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe Incarné … Le Christ … manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. Il n’est donc pas surprenant que les vérités ci-dessus trouvent en Lui (Jésus Christ) leur point culminant. G.S. n°22Tous les hommes, d’autre part, sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Eglise et quand ils l’ont connue, de l’embrasser et de lui être fidèles. DIGNITATIS HUMANAE De même encore le Concile déclare que ce double devoir concerne la conscience et l’oblige, et que la vérité ne s’impose que par la force de la vérité elle-même qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de patience. Dignitatis Humanae n°1 Au n°2 de Dignitatis Humanae Tous les hommes parce qu’ils sont des personnes, c'est à dire des être doués de raison et de volonté libre et par suite pourvus de responsabilité personnelle sont pressés par leur nature et tenus, par obligation morale, à chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi d’adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette vérité. Au n° 3: « C’est pourquoi chacun a le devoir et par conséquent le droit, de chercher la vérité en matière religieuse, afin de se former prudemment un jugement de conscience droit et vrai … Mais la vérité doit être cherchée selon la manière propre à la personne humaine … la vérité une fois connue, c’est par un assentiment personnel qu’il faut y adhérer fermement. » MAGISTERE de JEAN PAUL II Ce serait une lourde tâche que de vouloir relever tout ce qu’à dit Jean Paul II à ce sujet …Déjà quand il était professeur de théologie morale à Lublin puis archevêque de Cracovie, ce lien entre ces 2 valeurs le préoccupait déjà. Et depuis son accession au Pontificat, il n’a cessé de consacrer une place importante à ce sujet. Dire que cela le préoccupe serait peu dire … Témoins les paroles qu’il a prononcé à Fatima et que nous avons déjà cité : « Le risque est celui d’une liberté désinsérée de toute vérité ». Les générations actuelles se méfient de toute vérité. Mais, toute vérité est-elle synonyme de dogmatisme ? Dégénère-t-elle toujours en totalitarisme ?Non, parce que nous croyons que Jésus, envoyé du Père, a dit « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie » (Jean 14,6). Donc cette Vérité est vivante. Toutes les œuvres, toute la vie de Jean Paul II veut nous épargner ce passé funeste ; mais il sait que la liberté « débridée » est aussi dangereuse … Nous allons choisir arbitrairement : Dans Redemptor hominis, sa première encyclique (1979): Au n°10 « L’homme qui veut se comprendre lui-même jusqu’au fond ne doit se contenter pour son être propre de critères et de mesures qui seraient immédiats, partiaux souvent superficiels, et même seulement apparents, mais il doit avec ses inquiétudes, ses incertitudes et même avec sa faiblesse et son péché, avec sa vie et sa mort, s’approcher du Christ. Il doit pour ainsi, entrer dans le Christ avec tout son être, il doit « s’approprier » et assimiler toute la réalité de l’Incarnation et de la Rédemption pour se retrouver soi-même. S’il laisse ce processus se réaliser profondément en lui, il produit alors des fruits non seulement d’adoration envers Dieu, mais aussi de profond émerveillement envers soi-même. Jésus Christ va à la rencontre de l’homme de toute époque, y compris la nôtre, avec les mêmes paroles : « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jean 8,32). Ces paroles contiennent une exigence fondamentale et en même temps un avertissement : l’exigence d’honnêteté vis à vis de la vérité comme condition d’une authentique liberté ; et aussi l’avertissement d’éviter toute liberté apparente, toute liberté superficielle et unilatérale, toute liberté qui n’irait pas au fond de la vérité sur l’homme et sur le monde. Aujourd’hui encore, après deux mille ans, le Christ nous apparaît comme celui qui apporte à l’homme la liberté fondée sur la vérité, comme celui qui libère l’homme de ce qui limite, diminue, et pour ainsi détruit cette vérité jusqu’aux racines même dans l’Esprit de l’homme, dans son cœur, sa conscience … Et lorsque Jésus Christ lui même comparut comme prisonnier devant le tribunal de Pilate et fut interrogé par celui-ci, ne répondit-il pas : « Je ne suis venu dans la monde que pour rendre témoignage à la Vérité ». Par ces paroles prononcées devant le juge à un moment décisif, il confirmait pour ainsi une nouvelle fois ce qu’il avait dit précédemment « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres ». Tout au long des siècles et des générations à commencer par le temps des apôtres, n’est-ce pas Jésus Christ lui-même qui a comparu tant de fois aux cotés d’hommes jugés à cause de la vérité ? Est-ce qu’il cesserait d’être toujours ce porte-parole et l’avocat de l’homme qui vit « en esprit et en vérité » ? L’Eglise, à son tour, malgré toutes les faiblesses qui font partie de son histoire humaine, ne cesse de suivre celui qui a dit : « l’Heure vient où les adorateurs adoreront le Père en esprit et en Vérité, car ce sont là les adorateurs tels que les veut le Père. Dieu est Esprit et ceux qui adorent, c’est en Esprit et Vérité qu’ils doivent adorer » (Jn 4, 23-24 Jésus à la Samaritaine) dans Redemptor Hominis n°12, (cité dans V.S.) Au n° 11 et 12: « Cependant, nous pouvons et nous devons d’ores et déjà parvenir à notre unité et la manifester : en annonçant le mystère du Christ, en montrant à la fois la dimension divine et humaine de la rédemption, en luttant avec cette persévérance inlassable pour cette dignité que chaque homme a atteinte et peut atteindre continuellement dans le Christ et qui est la dignité de la grâce de l’adoption divine et en même temps la dignité de la vérité intérieure de l’humanité. R.H. n°11Nous éprouvons en particulier un sens très vif de responsabilité envers cette vérité. l'Eglise, par institution du Christ, en est gardienne et maîtresse, étant précisément dotée d’une assistance particulière de l’Esprit-Saint, afin de pouvoir conserver fidèlement cette vérité et l’enseigner dans toute son intégrité. R.H. n°12 … La déclaration sur la liberté religieuse nous manifeste de manière convaincante que, en annonçant la vérité qui ne provient pas des hommes, mais de Dieu (« ma doctrine n’est pas de moi, mais de celui qui m’a envoyé » Jn 7,16), c'est à dire du Père, tout agissant avec toute la force de leur esprit, le Christ et ensuite ses Apôtres conservent une profonde estime pour l’homme R.H. n°12 Les 3 audiences de Jean Paul II du 17, 24 et 31 Août 1983, (pendant une année sainte) éclairant sur la manière de « traiter » la vérité personnellement, par notre conscience morale : « Discernez ce qui est bon, ce qui lui plaît (à Dieu), ce qui est parfait » Romains 12,1-2Cette conscience permet d’être « dans la vérité » pour faire la vérité, en effet comment vouloir aider les autres si on n’est pas soi-même « dans la vérité » ? La conscience est « le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec son Dieu » Gaudium et Spes n°16 Ce discernement de la vérité en nous comprend plusieurs stades :- discernement intérieur du Bien et Mal , mais « cet œil intérieur » ne doit pas rester à un stade universel mais s’engager personnellement.Sur quelles bases ? « La norme suprême elle-même de la vie humaine est la loi divine elle-même … par laquelle Dieu dans son dessein de sagesse et d’amour dirige et gouverne le monde entier et dispose les voies de la communauté humaine. C’est par la médiatisation de la conscience que l’homme obéit aux injonctions de la loi divine, c’est elle qu’il est tenu de suivre fidèlement en toutes ses activités pour parvenir à sa foi qui est Dieu » D.H. n°31 La conscience morale n’est pas un juge autonome de nos actes. Les critères de ses jugements, elle les puise dans cette loi divine, éternelle objective et universelle », dans cette Vérité immuable. C’est pour cette raison que le Concile dit que l’homme est « seul avec Dieu ». La conscience morale n’enferme pas l’homme en lui-même, mais l’ouvre à l’appel, à la voix de Dieu. C’est en ceci que réside la dignité de la conscience morale, dans le fait d’être le lien dans lequel Dieu parle à l’homme. La conscience n’est pas l’ultime instance (ce serait la source du subjectivisme), mais doit se conformer à la vérité immuable de la loi morale (elle peut se tromper, erreur invincible) Gaudium et Spes n°16 Il ne suffit donc pas de dire à l’homme « Obéis toujours à la propre conscience ». Il est nécessaire d’ajouter immédiatement et toujours « Cherche sans te lasser à connaître la vérité ». Si on n’apporte pas cette précision nécessaire, l’homme risquerait de trouver dans sa conscience une force destructrice, au lieu du Saint Lieu où Dieu lui révèle son vrai Bien.Il est nécessaire de former sa propre conscience. Le croyant sait qu’il peut trouver l’aide de l'Eglise et la grâce de pouvoir discerner ce qui est Bon. Dans l’audience du 24 Juillet 1983, Jean Paul II rappelle que le principal obstacle au cheminement de la personne est l’indifférence envers la vérité. Ceci va de pair avec un autre trouble actuel : le relativisme moral.« Former » sa conscience est une tâche fondamentale. La raison en est très simple, notre conscience peut se tromper. « Ainsi, nous ne serons plus des enfants ballottés par les flots, menées ici et là par tout vent de doctrine, joués par les homme et leur astuce à nous fourvoyer dans l’erreur » Ephésiens 4,14 L’apôtre Paul nous rappelle par ces mots le besoin d’être adultes dans la foi … en possession d’une conscience morale capable de guider nos choix en harmonie avec la « charité dans la vérité » (Ephésiens 4,15) quand la conscience est dominée par l’erreur, elle devient la cause du plus grand tort pour la personne humaine : elle empêche l’homme de se réaliser lui-même. Le cheminement vers une conscience morale même ne peut se faire si l’homme n’est pas libre de cette maladie mortelle aujourd’hui très répandue : l’indifférence envers la vérité. Comment pourrons-nous en effet avoir le souci que la vérité habite notre conscience si nous pensons qu’être dans la vérité ne constitue pas une valeur d’une importance décisive pour l’homme ? Peu à peu, l’homme « indifférent » adhérera à n’importe quelle idée personnelle ou à l’opinion de la majorité. « D’où provient cette grave maladie spirituelle ? Son origine première est l’orgueil … niant ainsi la transcendance de la vérité par rapport à notre intelligence créée et contestant par conséquent de devoir s’ouvrir à elle, de l’accueillir non comme une trouvaille personnelle, mais comme un DON qui lui est fait par la lumière incréée … nous avons indiqué le point de départ pour la formation de la conscience morale : l’amour de la vérité. La « conversion du cœur » est en fait le don le plus précieux de cet événement de grâce : la pénitence.Il faut aussi « une sorte de connaturalité » entre la personne humaine et le vrai bien. La grâce du sacrement de pénitence produit dans la personne cette « connaturalité » progressive toujours plus profond avec la vérité et avec le bien. l'Eglise, mère de ce sacrement, est « colonne et soutien de la vérité » (1 Timothée1,5)La fidélité au magistère de l'Eglise empêche la conscience morale de dévier de la vérité concernant le bien de l’homme. Dans l’audience du 31 Août 1983, Jean Paul II rappelle la définition de l’ethos de la Rédemption : l’homme renouvelé par l’Esprit rénové et recréé (par le Baptême) a reçu la grâce de « se revêtir du Seigneur Jésus Christ » (Romains 13,14), c'est à dire de se conformer de plus en plus au Christ. L’acte rédempteur a réellement changé l’être de la personne et son agir. Celui-ci (l’acte rédempteur) insère la personne humaine dans le Christ, le faisant participer de la filiation divine même du verbe. St Thomas d’Aquin écrit « Puisque le Christ a reçu dans son humanité la plénitude de la grâce du moment qu’Il est le Fils unique du Père, de Lui, la grâce reflue sur les autres, si bien que le Fils de Dieu fait homme rend les hommes fils de Dieu ». Cette profonde vérité conduit l’homme racheté à revêtir le Christ (Rm 13,4) et à avoir les mêmes sentiments que Lui (Ph 2,5). Le Christ n’est pas seulement un modèle à imiter, l’Esprit-Saint nous pousse également à agir dans le Christ et comme le Christ. La loi du Christ est inscrite en nos cœurs par l’action de l’Esprit. « Car nous n’avons pas reçu, nous l’esprit du monde, mais l’Esprit qui vient de Dieu afin de connaître tout ce qu’Il nous a donné » (1 Co 2,12) Intérieur à Dieu et demeurant dans la cœur de l’homme racheté, l’Esprit opère pour que nous puissions connaître tout ce que le Père nous a donné et que nous puissions consentir à ce don. Quel est le DON que nous a fait le Père ? Oh ! Tout est DON (le Christ, l’Esprit-Saint). l’Esprit nous pousse à réaliser notre être dans sa vérité la plus intime. Chacun de nous a été conçu, c'est à dire pensé et voulu dans le cœur de Dieu. L’Esprit connaît le projet de Dieu pour notre propre vie. « La nuit est avancée, le jour est proche » (Romains 13,2). S’il est vrai que chacun de nous a déjà été racheté, il est également vrai que la Rédemption n’est pas encore complète en nous.La nécessaire et immédiate conséquence de cette situation existentielle est que le croyant doit se revêtir du Christ, luttant contre le Mal, dans la mortification et le reniement de soi-même. L’ethos de la rédemption est un ethos caractérisé par une forte tension ascétique. C’est un ethos de lutte et de combat contre tout ce qui empêche le Chrétien de se revêtir du Seigneur Jésus Christ. C’est uniquement en menant ce combat spirituel que la « forme du Christ » peut pénétrer toutes les fibres de la personne humaine rachetée et sauvegarder la liberté de son adhésion au bien. En effet, la liberté du croyant court toujours le risque de se détruire elle-même si elle s’écarte de la pleine vérité du Christ. Grâce à l’ascèse, le lien de la liberté avec la vérité se trouve confirmé et rétabli avec une fermeté toujours plus grande. Dans Veritatis Splendor (6-08-1993) La splendeur de la vérité se reflète dans toutes les œuvres du Créateur … la vérité éclaire l’intelligence et donne forme à la liberté de l’homme. Au n°1 : « les hommes se sanctifient par l’obéissance à la vérité » 1 Pierre, 1,22L’homme est tenté en permanence de détourner son regard de Dieu … échangeant la vérité de Dieu contre le mensonge (Romains, 1,25) même la capacité de connaître la vérité se trouve obscurcie … l’homme cherche une liberté illusoire en dehors de la vérité elle-même. En V.S. n°2 La lumière de la face de Dieu brille en tout son éclat sur Jésus Christ … « plein de grâce et de vérité » Jean, 1,14Ainsi l’Eglise propose à tous … la réponse qui vient de la Vérité de Jésus Christ et de son Evangile. Les souverains pontifes ont soutenu, conforté, consolé avec la certitude de l’assistance de l'Esprit de la Vérité … Au point de départ de ces conceptions, (réprouvées par l'Eglise), on note l’influence plus ou moins masquée de courants de pensée qui en viennent à séparer la liberté humaine de sa relation nécessaire et constitutive à la vérité.V.S. 8 [Jésus] ouvre aux fidèles le livre des Ecritures et en révélant pleinement la Volonté du Père, Il enseigne la Vérité sur l’agir moral … avec une délicate attention pédagogique, il répond en conduisant le jeune homme (Mt 19,17) presque par la main , pas à pas vers la Vérité toute entière.V.S. 12 [Cette vie éternelle] ne se réalise parfaitement qu’après la mort, mais dans la foi, elle est dès à présent, lumière de vérité, source de sens, pour la vie … « De la même manière qu’il y a un ancien Testament, et que toute vérité cependant se trouve dans le Nouveau Testament, ainsi en est-il de la Loi : celle qui a été donnée par l’intermédiaire de Moïse est la figure de la vraie Loi » : « Donc la loi mosaïque est le prototype de la vérité » V.S. N° 15 citant St Ambroise.Jésus est l’accomplissement vivant de la Loi en tant qu’il en réalise la signification authentique par le Don total de lui-même : Il devient lui-même la Loi Vivante personnifiée, qui invite à sa suite, qui par son Esprit, donne la grâce de partager sa vie et son Amour même, et qui donne la force nécessaire pour témoigner par les choix et par les actes (Jn 13, 34 35) V.S. N° 15La merveilleuse profondeur de cette invitation [« Puis, viens et suis moi » Mat 19,21 »] sera pleinement perçue par les disciples après la Résurrection du Christ, quand l’Esprit-Saint les introduira dans la Vérité toute entière (cf. Jean 16, 13) V.S. N° 19« La Loi fut donnée par Moïse, la grâce et la Vérité sont venues par Jésus Christ » Jn 1, 17. De ce fait, la promesse de la vie éternelle est liée au don de la grâce, et le don de l’Esprit que nous avons reçu constitue déjà les « arrhes de notre héritage » (Eph 1, 14) V.S. n° 23De ce fait la Loi Nouvelle ne se contente pas de dire ce qui doit se faire, mais elle donne aussi la force de faire la Vérité (Jn 3, 21, entretien de Jésus avec Nicodème) V.S. n° 24Ainsi l'Eglise dans sa vie et son enseignement se présente « comme colonne et support de la Vérité » (1 Tim 3,15) et aussi de la Vérité dans l’agir moral … le magistère dans la fidélité à Jésus Christ estime qu’il est de son devoir de proposer son discernement … afin d’aider l’homme sur le chemin de la Vérité et de la liberté. V.S. n°27« l’Evangile est la source de toute Vérité salutaire et de toute règle morale » (Dei Verbum n°7). l'Eglise a gardé fidèlement ce qu’enseigne la Parole de Dieu, non seulement sur les Vérités à croire, mais encore sur l’agir moral, c'est à dire sur l’agir qui plaît à Dieu (1Thess 4,1) .. assistée de l’Esprit-Saint qui la conduit vers la Vérité toute entière (Jn 16,13), l'Eglise n’a cessé de scruter le mystère du Verbe Incarné. V.S. n°28« Car un temps viendra où les hommes ne supporteront plus la sainte doctrine, … et se donneront des maîtres en quantité et détourneront l’oreille de la Vérité pour se tourner vers des fables » 2 Timothée 4, 1-5 /V.S. n°30 En particulier, le droit à la liberté religieuse, et au respect de la conscience dans sa marche vers la Vérité est toujours plus ressenti comme le fondement des droits de la personne considérées dans son ensemble. V.S. n° 31. A l’affirmation du devoir de suivre sa conscience, on a indûment ajouté que le jugement moral est vrai par le fait même qu’il vient de la conscience de la personne qui a pour but d’appliquer la connaissance universelle du bien dans une situation déterminée et d’exprimer un jugement … Cette vision ne fait qu’un avec une éthique individualiste pour laquelle chacun se trouve confronté à sa vérité différente de la vérité des autres. V.S. n°32 S’il existe un droit à être respecté dans son propre itinéraire de recherche de la vérité, il existe encore antérieurement l’obligation morale grave pour tous de la chercher, et une fois qu’elle est connue d’y adhérer (Dignitatis Humanae n°2). C’est en ce sens que le Cardinal J.H. Newman, éminent défenseur des droits de la conscience affirmait avec, force « la conscience a des droits, parce qu’elle a des devoirs » mais, de cette façon, la nécessaire exigence de la vérité a disparu au profit d’un critère de sincérité et d’authenticité … au point que l’on en est arrivé à une conception radicalement subjective du jugement moral. V.S. n°32Comme, on peut le saisir d’emblée, la crise au sujet de la vérité n’est pas étrangère à cette évolution. Une fois perdue l’idée d’une vérité universelle quant au Dieu connaissable par la raison humaine , la conception de la conscience est elle aussi considérablement modifiée : la conscience n’est plus considérée dans sa réalité originelle c'est à dire comme un acte d’intelligence ; malgré leur diversité (tendances des courants subjectivistes et individualistes entre autres), ces tendances se rejoignent dans le fait d’affaiblir ou même de nier la dépendance de la liberté par rapport à la vérité … nous devons les examiner à la lumière de la dépendance fondamentale de la liberté par rapport à la vérité, exprimée de la manière la plus claire et la plus autorisé par les paroles du Christ «Vous connaîtrez la vérité et la réalité vous rendra libres » Jn 8, 32 V.S. 34…La faculté de déterminer le bien et le mal serait la prérogative de la conscience « libre » : la liberté humaine pourrait « créer des valeurs » et jouirait d’une primauté sur la vérité, au point que la vérité elle-même serait considérée comme une création de la liberté. Cette dernière revendiquerait donc une telle autonomie morale que cela signifierait alors pratiquement son absolue souveraineté. V.S. n°35 Une telle prétention d’autonomie [de l’homme] contredirait l’enseignement de l'Eglise sur la Vérité de l’homme : ce serait la mort de la liberté véritable. V.S. n°40 citant Gaudium et Spes n°47) L’hétéronomie (dépendance de l’homme vis à vis de Dieu) ne serait qu’une forme d'aliénation contraire à la sagesse divine et à la dignité de la personne humaine. V.S. n°41Certains parlent à ce titre de théonomie ou de théonomie participée, parce que l’obéissance libre de l’homme à la Loi de Dieu implique effectivement la participation de la raison et de la volonté à la sagesse Divine : en s’y soumettant, la liberté se soumet à la vérité de la création. V.S. n°41 La liberté de l’homme formée sur la modèle de celle de Dieu n’est pas supprimée par son obéissance à la Loi Divine, mais elle ne demeure dans la Vérité et elle n’est conforme à la dignité de l’homme que par cette obéissance comme l’écrit clairement le Concile (Gaudium et Spes n°17) «La dignité de l’homme exige de lui qu’il agisse selon un choix conscient et libre, mû et déterminé par une conviction personnelle, et non sous le seul effet de pensées instinctives ou d’une contrainte extérieure. L’homme parvient à cette dignité lorsque, se délivrant de toute servitude des passions, par le choix libre du bien, il marche vers sa destinée et prend soin de s’en procurer réellement les moyens par son ingéniosité » V.S. n°42 (citant G.S. n°17)Le concile Vatican II (dans Dignitatis Humanae) rappelle que « la norme suprême de la vie humaine est la Loi Divine elle-même éternelle, objective et universelle, par laquelle Dieu, dans son dessein de sagesse et d’amour, règle, dirige et gouverne le monde entier, ainsi que les voies de la communauté humaine. De cette Loi, qui est sienne, Dieu rend l’homme participant de telle sorte que, par une heureuse disposition de la providence, celui-ci puisse toujours davantage accéder à l’immuable vérité » V.S. n°43 (citant Dignitatis.Humanae,. n°3) Cette théorie morale (liberté qui se prétend absolue) n’est pas conforme à la vérité sur l’homme et à sa liberté. Elle contredit les enseignement de l'Eglise sur l’unité de l’être humain dont l’âme rationnelle est la forme du corps. L’âme est le principe d’unité de l’être humain, elle est ce pour quoi il existe comme un tout en tant que personne. V.S. n°48 C’est précisément grâce à cette « vérité » que la loi naturelle suppose l’universalité. En tant qu’inscrite dans la nature raisonnable de la personne, elle s’impose à tout être doué de raison et vivant dans l’histoire « Pour se perfectionner dans son ordre, la personne doit faire le bien et éviter le mal, veiller à la transmission et à la préservation de la vie, affiner et développer les richesses du monde sensible, cultiver la vie sociale, chercher la vérité, pratiquer le bien, contempler la beauté » V.S. n°51 (citant St Thomas d’Aquin) Ce quelque chose est précisément la nature de l’homme. Cette nature est la mesure de la culture et la condition pour que l’homme ne soit prisonnier d’aucune de ses cultures, mais pour qu’il affirme sa dignité personnelle dans une vie conforme à la vérité profonde de son être. V.S. n°51 Le lien qui unit la liberté de l’homme et la loi de Dieu se noue dans le « cœur » de la personne, c'est à dire dans sa conscience morale. « Au fond de sa conscience, écrit le concile Vatican II (G.S. 16), l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix qui ne cesse de le pousser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal résonne au moment opportun dans l’intimité de son cœur ». Fais ceci, évite cela, car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme. Sa dignité est de lui obéir : c’est elle qui le jugera. G.S. 16 (cf. Rm, 2,1-16) V.S. n°54La conscience n’est donc pas une source autonome et exclusive pour décider ce qui est bon et ce qui est mauvais : au contraire en elle, est profondément inscrit un principe d’obéissance à l’égard de la norme objective qui fonde et conditionne la conformité de ses décisions aux commandements et aux interdits qui sont à la base du comportement humain. V.S. n°60 (citant Dominum et Vivificantem n°13, Gaudium et Spes n°16 et Dignitatis Humanae n°3) La dignité de cette instance rationnelle et l’autorité de sa voix et de ses jugements découlent de la vérité sur le bien et le mal moral qu’elle est appelée à entendre et à exprimer. Cette vérité est établie par la « loi divine » norme objective et universelle de la moralité. Le jugement de la conscience ne définit pas la loi mais il atteste l’autorité de la loi naturelle… V.S. n°60. Ainsi dans le jugement pratique de la conscience qui impose à la conscience d’accomplir un acte déterminé se révèle le lien entre la liberté et la vérité … le degré de maturité de la conscience se mesure non par sa libération par rapport à la vérité objective en vue d’une prétendue autonomie des décisions personnelles, mais au contraire par une pressante recherche de la vérité et dans l’action, par la remise de soi à la conduite de cette conscience. V.S. n°61 Il est certain que pour avoir « une bonne conscience » (1 Timothée 1,5), l’homme doit chercher la vérité – comme dit l’apôtre Paul, la conscience doit être éclairée par l’Esprit-Saint (cf Romains 9,1), elle doit être pure (2 Timothée 1, 3), elle ne doit pas falsifier avec astuce la parole de Dieu, mais manifester clairement la vérité (cf 2 Corinthiens 4, 2) V.S. n°62L’autorité de l'Eglise qui se prononce sur les vérité morales, ne lèse donc en rien la liberté de la conscience des Chrétiens : D’une part la liberté de conscience n’est jamais une liberté affranchie « de la vérité » mais elle est toujours et seulement « dans la vérité ».D’autre part, le magistère ne fournit pas à la conscience chrétienne des vérités qui lui seraient étrangères, mais montre qu’au contraire les vérités qu’elle devrait déjà posséder en les déployant à partir de l’acte premier de la foi. V.S. n°64L’appel de Jésus « Viens et suis moi » montre le haut degré de liberté accordé à l’homme, et en même temps, il atteste la vérité, et la nécessité des actes de foi et des décisions … V.S. n°66 Peu avant il avait dit : on relève à juste titre que la liberté ne consiste pas seulement à choisir telle ou telle action particulière, mais elle est, au centre de ces choix, une décision sur soi et une façon de conduire sa vie pour ou contre le bien, pour ou contre la vérité, en dernier ressort, pour ou contre Dieu V.S. n°65Ordonner rationnellement l’acte humain vers le bien dans sa vérité, et rechercher volontairement le bien, appréhendé par la raison, cela constitue la moralité. Par conséquent, l’agir humain ne peut être estimé moralement bon seulement parce qu’il convient pour atteindre tel ou tel but recherché, ou simplement parce que l’intention du sujet est bonne. L’agir est moralement bon lorsqu’il indique et manifeste que la personne s’ordonne volontairement à cette fin ultime et que l’action concrète est conforme au bien humain tel qu’il est reconnu dans sa vérité par la raison. V.S. n°72L’élément primordial et décisif pour le jugement moral est l’objet de l’acte de l’homme lequel décide si son acte peut être orienté au bien et à la fin ultime qui est Dieu. Cette orientation est trouvée par la raison dans l’être même de l’homme, entendu dans sa vérité intégrale, donc dans ses inclinations naturelles. V.S. n°79 Il nous faut avant tout faire apparaître la splendeur fascinante de cette vérité qui est Jésus Christ lui-même. En lui qui est Vérité (cf. Jean 14,6), l’homme peut comprendre pleinement et vivre parfaitement, par ses actes bons, sa vocation à la liberté dans l’obéissance à la Loi divine, qui se résume dans le commandement de l’amour de Dieu et du prochain. Cela se réalise par le don de l’Esprit-Saint, Esprit de Vérité, de liberté et d’amour en Lui, il nous est donné d’intérioriser la Loi, de la percevoir, de la vivre comme le dynamisme de la vraie liberté personnelle. Cette Loi est « la Loi parfaite de la liberté » (Jacques 1, 25) V.S. n°83Le problème fondamental que les théories morales évoquées plus haut (lire : subjectivisme, pragmatisme et utilitarisme) posent avec une particulière insistance est celui du rapport entre la liberté de l’homme et la loi de Dieu, en dernier ressort, c’est le problème du rapport entre la liberté et la vérité. V.S. n°84 « Seule le liberté qui se soumet à la Vérité conduit la personne humaine à son vrai bien. Le bien de la personne est d’être dans la Vérité et de faire la Vérité. Ce lien essentiel entre vérité-bien-liberté a été perdu en grande partie par la culture contemporaine ; aussi, amener l’homme à le redécouvrir est aujourd’hui une des exigences propres de la mission de l'Eglise, pour le salut du monde. La question de Pilate « qu’est-ce que la vérité ? » jaillit aujourd’hui aussi de la perplexité désolée d’un homme qui ne sait plus qui il est, d’où il vient et où il va. Et alors nous assistons souvent à la chute effrayante de la personne humaine dans des situations d’autodestruction progressive. A vouloir écouter certaines voix, il semblerait que l’on ne doive plus reconnaître le caractère absolu et indestructible d’aucune valeur morale. Tous ont sous les yeux le mépris pour la vie humaine déjà conçue et non encore née ; la violation permanente de droits fondamentaux de la personne ; l’injuste destruction des biens nécessaires à une vie simplement humaine. Et même, il est arrivé quelque chose de plus grave : l’homme n’est plus convaincu que c’est seulement dans la vérité qu’il peut trouver le salut. La force salvifique du vrai est contestée et l’on confie à la seule liberté, déracinée de toute objectivité, la tâche de décider de manière autonome de ce qui est bien et de ce qui est mal. Ce relativisme, devient, dans le domaine théologique un manque de confiance dans la sagesse de Dieu qui guide l’homme par la loi morale. A ce que la loi morale prescrit, on oppose ce que l’on appelle des situations concrètes en ne croyant plus au fond que la loi de Dieu soit l’unique vrai bien de l’homme » Discours aux participants d’un congrès de Théologie Morale (10-III-1986) V.S. n°84 L’homme découvre que sa liberté est mystérieusement portée à trahir son ouverture au Vrai et au Bien et que trop souvent il préfère en réalité choisir des biens finis ; limités, et éphémères. Plus encore dans ses erreurs et dans ses choix négatifs, l’homme perçoit l’origine d’une révolte radicale qui le porte à refuser la Vérité et Dieu pour s’ériger en principe absolue de soi. « Vous serez comme Dieu » Gn 3,5.La liberté a donc besoin d’être libérée, le Christ en est le libérateur V.S. n°86Le corps crucifié de Jésus est la pleine révélation du lien indissoluble entre la liberté et la vérité. De même, sa Résurrection des Morts est la suprême exaltation de la fécondité et d’œuvre salvifique d’une liberté vécue dans la vérité. V.S. n°87 « Que la charité te rende esclave puisque la vérité t’a rendue libre » St Augustin V.S. n°87Selon la Foi Chrétienne et la doctrine de l'Eglise « seule la liberté qui se soumet à la vérité conduit la personne humaine à son vrai bien. Le Bien de la Personne est d’être dans la Vérité et de faire la Vérité ».L’opposition et même la séparation radicale entre liberté et la vérité sont la conséquence, la manifestation, et le résultat d’une dichotomie plus grave et plus néfaste, celle qui dissocie la foi de la morale. V.S. n°88Cette dissociation constitue l’une des préoccupations pastorales les plus vives de l'Eglise devant le processus actuel de sécularisation selon lequel des homme nombreux, trop nombreux, pensent et vivent « comme si Dieu n’existait pas » V.S. n°88Il est alors urgent que les Chrétiens redécouvrent la nouveauté de leur foi et la force qu’elle donne au jugement par rapport à la culture dominante et envahissante « Jadis, vous étiez ténèbres –nous avertit l’Apôtre Paul- mais à présent vous êtes lumière dans le Seigneur ; conduisez-vous en enfants de lumière, car le fruit de la lumière consiste en toute bonté, justice et vérité. Discernez ce qui plaît au Seigneur et ne prenez aucune part aux causes stériles des ténèbres ». Ephésiens 5, 8-11 en V.S. n°88Le caractère maternel de l'Eglise ne peut jamais être séparé de la mission d’enseignement qu’elle doit toujours remplir en épouse fidèle du Christ qui est la Vérité en personne … l'Eglise qui ne peut jamais renoncer au principe «de la vérité et de la cohérence, en vertu duquel elle n’accepte pas d’appeler bien ce qui est mal et mal ce qui est bien », doit toujours être attentive à ne pas briser le roseau froissé et la mèche qui fume encore (cf. Isaïe 42,3) V.S. n°95La fermeté de l'Eglise dans sa défense des normes morales universelles et immuables n’a rien d’humiliant. Elle ne fait que servir la vraie liberté de l’homme du moment qu’il n’y a pas de liberté, ni en dehors de la vérité, ni contre elle, on doit considérer que la défense catégorique, c'est à dire, sans édulcoration et sans compromis des exigences de la dignité personnelle de l’homme auxquelles il est absolument impossible de renoncer est la condition et le moyen pour que la liberté existe. V.S. n°96 Ainsi,le bien suprême et le bien moral se rejoignent dans la vérité : la vérité du Dieu Créateur et Rédempteur et la vérité de l’homme crée et racheté par lui.Ce n’est que sur cette vérité qu’il est possible de conduire une société renouvelée et de résoudre les problèmes complexes et difficiles qui l’ébranlent, le premier d’entre eux consistant à surmonter les différentes formes de totalitarisme pour ouvrir la voie à l’authentique liberté de la personne.« Le totalitarisme naît de la négation de la vérité au sens objectif du terme : s’il n’existe pas de vérité transcendante, par l’obéissance à laquelle l’homme acquiert sa pleine identité, dans ces conditions, il n’existe aucun principe sûr pour garantir des rapports justes entre les homme. Leurs intérêts de classe, de groupe, de nation, les opposent inévitablement les uns aux autres. Si la vérité transcendante n’est pas reconnue, la force du pouvoir triomphe, et chacun tend à utiliser jusqu’au bout les moyens dont il dispose pour faire prévaloir ses intérêts ou ses opinions, sans considération pour les droits des autres … Il faut donc situer la racine du totalitarisme moderne dans la négation de la dignité transcendante de la personne humaine, image de Dieu invisible et précisément pour cela de par sa nature même, sujet de droits que personne ne peut violer » Centesimus annus n°44 et Libertas praestentissimus de Léon XIII cité en V.S. n°99. C’est pourquoi le lien inséparable entre la liberté et la vérité qui reflète le lien essentiel entre la sagesse et la volonté de Dieu, possède une signification extrêmement importante pour la vie des personnes dans le cadre socio-économique et socio-politique comme cela ressort de la doctrine sociale de l'Eglise … de la théologie morale en particulier. Veritatis Splendor n°99 (citant Sollicitudo Rei Socialis n°41)Dans de nombreux pays, après la chute des idéologies qui liaient la politique à une conception totalitaire du monde - la première d’entre elles étant le marxisme – un risque non moins grave apparaît aujourd’hui à cause de la négation des droits fondamentaux de la personne humaine, et à cause de l’absorption dans le cadre politique de l’aspiration religieuse qui réside dans le cœur de tout être humain : c’est le risque de l’alliance entre la démocratie et le relativisme éthique qui retire à la convivialité civile toute référence morale sûre, et la prive, plus radicalement, de l’acception de la vérité. En effet « s’il n’existe aucune vérité dernière qui guide et oriente l’action politique, les idées et les convictions peuvent être facilement exploitées au profit du pouvoir. Une démocratie sans valeur se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois » V.S. n°101 cf. Centesimus annus n°46 C’est dans la Croix salvifique de Jésus, dans le don de l’Esprit-Saint, dans les sacrements qui naissent du côté transpercé de Jésus (cf. Jn 19, 34), que le croyant trouve la grâce et la force de toujours observer la Loi Sainte de Dieu, même au milieu de graves difficultés.Saint André de Crète dit : « En vivifiant la Loi par la grâce, Dieu a mis la Loi au service de la grâce dans un accord harmonieux et fécond » V.S. n°103« Mais quelles sont les « possibilités concrètes de l’homme » ? Et de quel homme parle-t-on ? De l’homme dominé par la concupiscence, ou bien de l’homme racheté par le Christ ? Car c’est de cela qu’il s’agit : de la réalité de la Rédemption par le Christ. Le Christ, nous a rachetés ! Cela signifie : Il nous a donné la possibilité de réaliser l’entière vérité de notre être, Il a libéré notre liberté de la domination de la concupiscence » V.S. n°103 Discours aux participants à un cours sur la procréation responsable (1er mars 1984). Tandis qu’est humaine l’attitude de l’homme qui, ayant péché, reconnaît sa faiblesse et demande miséricorde pour sa faute, inacceptable est au contraire l’attitude de celui qui fait de sa faiblesse le critère de la vérité sur le bien de manière à pouvoir se sentir justifié par lui seul, sans même avoir besoin de recouvrir à Dieu et à sa miséricorde. Cette dernière attitude corrompt la moralité de toute société …V.S. n°104 La déchristianisation qui affecte des communautés et des peuples entiers autrefois riches de foi et de vie chrétienne implique non seulement la perte de la vie, de foi ou en tout cas son insignifiance dans la vie, mais aussi et forcément, la déclin et l’obscurcissement du sens moral, et cela du fait que l’originalité de la morale évangélique n’est plus perçue, à cause de l’effacement des valeurs et des principes éthiques fondamentaux eux-mêmes. Les courants subjectivistes, utilitaristes et relativistes, aujourd’hui amplement diffusés ne se présentent pas comme de simples positions pragmatiques, comme des traits de mœurs, mais comme des conceptions fermes du point de vue théorique, qui revendiquent leur pleine légitimité culturelle. V.S. n°106Dans l’existence morale, on voit aussi à l’œuvre le service royal du chrétien :- plus il obéit avec l’aide de la grâce à la Loi Nouvelle de l’Esprit-Saint – plus il grandit dans la liberté à laquelle il est appelé en servant la vérité, la charité et la justice. V.S. n°107Dans le cadre de cette nouvelle évangélisation destinée à faire naître et à nourrir « la foi opérant par la charité », Galates 5,6 ; et en fonction de l’œuvre de l’Esprit-Saint, nous pouvons maintenant comprendre la place qui dans l'Eglise … revient à la réflexion que la théologie doit conduire sur la vie morale. V.S. n°108 Grâce à la présence permanente en elle (l'Eglise) de l'Esprit de Vérité (cf. Jn 14,16), « l’ensemble des fidèles … apporte aux vérités concernant la foi et les mœurs un consentement universel » V.S. n°109 (citant le concile Vatican II Lumen Gentium n°12)De par sa nature, la foi tend à l’intelligence, car elle ouvre à l’homme la vérité concernant sa destinée et la voie pour l’atteindre. Même si la vérité révélée surpasse notre discours et si nos concepts sont imparfaits face à sa grandeur à la fin du compte insondable (cf. Ep 3,19), elle invite pourtant notre raison – don de Dieu – pour percevoir la Vérité, à entrer dans sa lumière et devenir ainsi capable de comprendre dans une certaine mesure ce qu’elle croit. La science théologique recherche l’intelligence de la foi en réponse à la voix de la vérité … V.S. n° 109 Le fait que certains croyants agissent sans suivre les enseignements du Magistère ou qu’ils considèrent à tort comme moralement juste une conduite que les pasteurs ont déclarés contraire à la Loi de Dieu ne peuvent pas être un argument valable pour réfuter la vérité, les normes morales enseignées par l'Eglise. V.S. n°112 En effet, tandis que les sciences humaines comme toutes les sciences expérimentales développent une conception empirique et statistiques de « la normalité », la foi enseigne que cette normalité porte en elle les traces d’une chute de l’homme par rapport à sa situation originelle, c'est à dire qu’elle est blessée par le péché. Seule, la foi chrétienne montre à l’homme la voie du retour à « l’origine » (cf. Matthieu 19,8) Une voie souvent bien différente de celle de la normalité empirique … C’est l’Evangile qui dévoile la vérité intégrale sur l’homme et sur son cheminement moral … Il (l’Evangile) leur rappelle également la joie du pardon qui, seul, donne la force de reconnaître dans la loi morale une vérité libératrice. V.S. n°112 Jésus a montré au jeune homme riche l’esprit et la caractère radical de son appel par son invitation à marcher à sa suite dans la pauvreté, l’humilité et l’amour « Viens et suis moi ». La vérité de cette doctrine a été scellée dans le sang du Christ sur la Croix : elle est devenue, dans l’Esprit-Saint, la Loi Nouvelle de l'Eglise et de tout chrétien. V.S. n°114 C’est pour cela « annoncer l’Evangile sans la sagesse du langage » (1 Corinthiens 1,17) que la réponse de l'Eglise à la question de l’homme possède la sagesse et la puissance du Christ crucifié, la Vérité qui se donne. V.S. n°117 FIDES ET RATIO Cette vérité que Dieu nous révèle en Jésus Christ n’est pas en contradiction avec les vérités que l’on atteint en philosophant. Les deux ordres de connaissance conduisent au contraire à la vérité en sa plénitude. L’unité de la vérité est déjà un postulat fondamental de la raison humaine exprimée dans le principe de non-contradiction. La Révélation donne la certitude de cette unité, en montrant que le Dieu Créateur est aussi le Dieu de l’histoire du Salut…Cette unité de la vérité, naturelle et révèlée, trouve son identification vivante et personnelle dans le Christ ainsi que le rappelle l’Apôtre « la vérité qui est en Jésus » (Ephésiens 4,2 et Colossiens 1, 15-20). Il est la Parole Eternelle et en même temps Parole Incarnée. Fides et Ratio, n°34. La sagesse de la croix dépasse donc toutes les limites culturelles que l’on veut lui imposer et nous oblige à nous ouvrir à l’universalité de la vérité dont elle est porteuse. Quel défi est ainsi posé à notre raison et quel profit elle en retire si elle l’accepte ! La philosophie, qui déjà par elle-même est en mesure de reconnaître le continuel dépassement de l’homme vers la vérité, peut avec l’aide de la foi, s’ouvrir pour accueillir dans la « folie » de la Croix, la critique authentique faite à tous ceux qui croient posséder la vérité, alors qu’ils l’étouffent dans l’impasse de leur système. Le rapport entre la foi et la philosophie trouve dans la prédication du Christ crucifié et ressuscité l’écueil contre lequel il peut faire naufrage, mais au delà duquel il peut se jeter dans l’océan infini de la vérité. Il y a donc deux aspects de la philosophie chrétienne : - D’abord un aspect subjectif qui consiste dans la purification de la raison par la foi. En tant que vertu théologale, la foi libère la raison de la présomption, tentation typique à laquelle les philosophes sont facilement sujets. Déjà Saint Paul et les Pères de l'Eglise et plus proches de nous, des philosophes comme Pascal ou Kierkegaard l’ont stigmatisée. Par l’humilité, la philosophie acquiert aussi le courage d’affronter certaines questions qu’ils pourraient difficilement résoudre sans prendre en considération les données reçues de la Révélation. Il suffit de penser par exemple aux problèmes du mal et de la souffrance, à l’identité personnelle de Dieu et à la question du sens de la vie, ou plus directement, à la question métaphysique radicale : « Pourquoi y a t il quelque chose ? » -Il y a ensuite l’aspect objectif concernant le contenu : la Révélation propose clairement certaines vérités qui, bien que n’étant pas naturellement inaccessibles à la raison, n’auraient peut être jamais été découvertes par cette dernière si elle avait été laissée à elle-même. Dans cette perspective, se trouvent des thèmes comme celui d’un Dieu Personnel, libre et créateur, qui a une grande importance dans le développement de la pensée philosophique et en particulier pour la philosophie de l’être. A ce domaine appartient aussi la réalité du péché, telle qu’elle apparaît à la lumière de la foi qui aide à poser philosophiquement de manière adéquate le problème du mal. La conception de la personne, comme être spirituel est aussi une originalité particulière de la foi … Fides et Ratio, n°7. LE CATECHISME DE L’EGLISE CATHOLIQUE conserve les échos de Saint Augustin « la grâce du Christ ne se pose nullement en concurrente de notre liberté, quand celle-ci correspond au sens de la vérité et du bien que Dieu a placé au cœur de l’homme. Au contraire, comme l’expérience chrétienne en témoigne, notamment dans la prière, plus nous sommes dociles aux impulsions de la grâce, plus s’accroissent notre liberté intime, et notre assurance dans les épreuves, comme devant les pressions et les contraintes du monde extérieur. Par le travail et par la grâce, l’Esprit-Saint nous éduque à la liberté spirituelle pour faire de nous de libres collaborateurs de son œuvre dans son Eglise et dans le monde » C.E.C. n°1.742, cité par J.L Bruguès O.P. dans son précis de Théologie Morale p 151 tome 2, 2° volume. Pour Saint Augustin, le cœur de la morale est formée par l’association de la grâce et de la liberté et à ce titre, il a vraiment mérité le nom de docteur de la grâce. (S.T. Pinckaers Les fondements de la morale, p.215) La liberté humaine, une fois qu’elle a trouvé la vérité a pour tâche de « disparaître » d’où le mot souvent mal interprété « d’esclavage », qui se trouve pourtant déjà dans Saint Paul :« Vous le savez bien : en vous mettant au service de quelqu’un pour lui obéir comme esclave, vous voilà esclave de celui à qui vous obéissez : - soit du péché, qui est un chemin de mort - soit de l’obéissance à Dieu qui est un chemin de justice Rendons grâce à Dieu, vous qui étiez esclaves du péché … vous avez été libérés du péché, vous voilà esclaves de la justice » Rm 6, 16-18« L’Esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont encore peur, c’est un esprit qui fait de vous des fils » Rm 8,15« L’esclave qui a été appelé par le Seigneur est un affranchi du Seigneur, de même, l’homme libre qui a été appelé est un esclave du Christ » (1 Corinthiens 7, 22).« Oui, libre à l’égard de tous, je me suis fait l’esclave de tous » (1 Corinthiens 9,19)« Mais, là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Corinthiens 3,17) « Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres, alors tenez bon ne reprenez pas les chaînes de votre ancien esclavage … » Et en Galates 5,13 : « Or vous frères, vous avez été appelés à la liberté. Mais, que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme … » Le mot « esclavage » est souvent récusé par nos contemporains. Et pourtant, il faut l’interpréter correctement : c’est un esclavage, volontaire, d’amour. Il n’y a pas de 3è terme: esclavage de la chair (licence), ou esclavage d’amour, popularisé au XVIIIè siècle chez nous par Saint Louis-Marie Grignion de Montfort. Jésus le dit à Saint Pierre après la Résurrection (Jn 21,18) « Amen, amen, quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller où tu voulais, quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et c’est un autre qui te mettra la ceinture, pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller » LA LUMIERE EST UN SUJET TRES PROCHE DE LA VERITE, c’est pourquoi nous le traitons ici. La Lumière s’oppose aux ténèbres : c’est elle qui permet de discerner la vérité, alors que, dans le monde, si celui-ci n’y prend pas garde règne l’obscurité, d’où un combat des ténèbres et de la lumière; on peut très vite accuser Saint Jean de dualisme, puisqu’il souligne ces oppositions ! Mais, aussi, il empêche toute confusion, qui est un risque beaucoup plus prégnant à notre époque. (Notons que dans le premier récit de la Création dans la Genèse, la lumière précède la création du soleil : sans doute pour se démarquer des cultures voisines, mésopotamiennes et égyptiennes qui faisaient du soleil un Dieu : la lumière, dans le monde biblique, est avant tout quelque chose d’intérieur. Sa présence est très liée à la vérité. ) Chez Saint Jean : Dans le Prologue de Jean, chapitre 1, versets 4et 5 : « En Lui (le Verbe) était la Vie, et la Vie était la lumière du monde. La lumière lui dans les ténèbres, mais les ténèbres n’ont pas eu de prise sur Elle. » En 1, verset 6, (il parle de Jean Baptiste) : « Il n’était pas la lumière, mais le témoin de la lumière. » ; puis, au verset suivant : « Le Verbe était la lumière véritable, qui venant dans le monde illumine tout homme. » Au chapitre 3 (entretien avec Nicodème), en Jean 3, 19 : « Voici le jugement, la lumière est venue dans le monde et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière … en effet, quiconque fait le mal hait la lumière ; il ne vient pas à la lumière de peur que ses œuvres ne soient dévoilées. Mais celui qui fait la vérité vient à la lumière. » En Jean 5, 35-36 (discussion avec les Pharisiens après la guérison du grabataire de la piscine de Bezatha) : « Jean était la lampe qui brûle et qui luit ; et vous avez voulu vous réjouir une heure à sa lumière, mais Moi, j’ai un témoignage plus grand que celui de Jean … » En Jean 8,12, toujours avec les Pharisiens, après l’épisode de la femme adultère. De nouveau, Jésus leur parla et dit : « Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marche pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. » Au décours de la guérison de l’Aveugle-Né, (Jean 9,4) : « La nuit vient où personne ne peut travailler. Aussi longtemps que Je suis dans le monde, Je suis la lumière du monde. » Lors de la Résurrection de Lazare (en Jean 11, 9-10) : « N’y a-t-il pas douze heures dejour ? Si quelqu’un marche le jour, il ne trébuche pas parce qu’il voit la lumière de ce monde ; mais si quelqu’un marche dans la nuit, il trébuche, parce que la lumière n’est pas en lui. » Puis, en Jean 12, 35-36, Jésus leur dit : « La lumière est parmi vous pour un peu de temps encore. Marchez tant que vous avez la lumière, de peur que les ténèbres ne vous surprennent : celui qui marche dans les ténèbres ne sait pas où il va. Tant que vous avez la lumière, croyez en la lumière afin de devenir des fils de la lumière. » Citant Isaïe 6,9-10 (cité aussi par les synoptiques, mais dans un contexte différent- la parabole du semeur), Jean en 12,40, Jésus dit : « Il a aveuglé leurs yeux et il a endurci leur cœur, pour qu’ils ne voient pas des yeux et ne comprennent pas du cœur, qu’ils ne se convertissent pas et que je ne les guérisse pas. » et en 12,46 « Moi la lumière, Je suis venu dans le monde pour que quiconque croit en Moi ne demeure pas dans les ténèbres. » Dans sa première lettre, Saint Jean nous cite à plusieurs reprises le fait que « Dieu est lumière », c’est un des attributs qu’il donne à Dieu, comme il nous dit aussi que Dieu est la Porte ou qu’Il est Amour. En 1 Jean 1,5 : « Voici le message que Jésus Christ nous a fait entendre et que nous vous annonçons : Dieu est lumière, il n’y a pas de ténèbres en Lui. » En 1 Jean 1,7 : « Mais si nous marchons dans la lumière, comme Il est Lui-même dans la lumière, nous sommes en communion les uns avec les autres et le sang de Jésus Christ nous purifie de tout péché. » En 1 Jean 1,8 : « Si nous disons que nous n’avons pas de péché, nous nous égarons nous-mêmes, et la vérité n’est pas en nous. … nous faisons de Lui un menteur.» En 1 Jean 2,8à10 : « Et pourtant, ce commandement que je vous écris est nouveau. Il l’est vraiment en Jésus et en vous puisque les ténèbres sont en train de disparaître et que déjà brille la vraie lumière. Celui qui déclare être dans la lumière et qui a de la haine contre son frère est encore maintenant dans les ténèbres. Celui qui aime son frère demeure dans la lumière et il n’y a pas pour lui d’occasion de chute. » Mais, Saint Jean n’est pas le seul à souligner cette importance de la lumière :Chez Saint Paul également, nous avons cette notion de lumière nous conduisant à la vérité. Entre autres, Saint Paul fait de nous des « fils de lumière », formule qu’il emploie dans la 1° lettre aux Thessaloniciens (en 5,5) : « Mais, vous, frères, comme vous n’êtes pas dans les ténèbres, ce jour ne vous surprendra pas comme un voleur. En effet, vous êtes tous des fils de la lumière, des fils du jour. » Il signifie par là notre adoption filiale par Jésus-Christ. Dans l’épître aux Romains en 13, 11-12 : « C’est le moment, l’heure est venue de sortir de votre sommeil. Car le salut est plus près de nous maintenant qu’à l’époque où nous sommes devenus croyants. La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche. Rejetons les activités des ténèbres, revêtons-nous pour le combat de la lumière Dans l’épître aux Ephésiens (en 5, 8à14) : « Autrefois, vous étiez ténèbres ; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes devenus lumière ; vivez comme des fils de lumière. Or la lumière produit tout ce qui est bonté, justice et vérité, et sachez reconnaître ce qui est capable de plaire au Seigneur. Ne prenez aucune part aux activités des ténèbres, elles ne produisent rien de bon, démasquez-les plutôt. Ce que ces gens-là font en cachette, on a honte d’en parler. Mais quand ces choses-là sont démasquées, leur réalité apparaît grâce à la lumière, et tout ce qui apparaît devient lumière. C’est pourquoi l’on chante : Réveille-toi, ô toi qui dors Relève-toi d’entre les morts Et le Christ t’illuminera. » On voit que le phénomène de la lumière, l’opposition « ténèbre-lumière » n’est pas le monopole de Saint Jean ! La « lumière » est ce qui nous permet de mieux distinguer « l’erreur » de la « vérité » et donc d’accueillir la vérité et ainsi Jésus Lui-même. Jésus, à plusieurs reprises, magnifie cette lumière qui permet aux hommes de mieux distinguer la vérité (qu’Il est Lui-même), malheureusement les hommes ses contemporains (et nous-mêmes !) n’ont pas voulu Le et La recevoir. + Il peut sembler bon de voir pourquoi Saint Jean insiste tant sur la vérité : il la nomme 20 fois dans son Evangile et 8 fois dans sa première lettre (ainsi que une dizaine de fois dans les deux lettres suivantes … mais, certes, elles sont moins importantes). (Les Evangélistes Synoptiques semblent y attacher une moindre importance, mais c’est que d’une part, ils sont écrits plus précocement et que, d’autre part, ils s’attachent plus à la description des faits eux-mêmes.) Dans l’Evangile, il insiste dans le Prologue sur Jésus « plein de grâce et de vérité »Dans le dialogue avec la Samaritaine (en 4,23 et 4,24), Jésus nous dit que désormais nous adorerions « en Esprit et en Vérité », et dans son colloque avec les Pharisiens, en deuxième partie du chapitre 8, il fait la différence entre « l’esclavage » que maintient la religion des Pharisiens et la véritable libération que Lui apporte : « Mon témoignage est vrai » (8,17) En Jean 8,32, Jésus dit aux juifs qui avaient cru en Lui : « Je suis la vérité et la vérité vous rendra libres » Il répète aux Pharisiens : « Il (le diable) ne se tenait pas dans la vérité parce qu’il n’y a pas de vérité en lui … (Jésus) : Si je dis la vérité, pourquoi ne me croyez-vous pas ? » En Jean 14,6 : « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie : personne ne vient au Père sans passer par Moi » Du chapitre 13 à 16, le mot « vérité » apparaît 5 fois, surtout lorsque Jésus, pour rassurer les Apôtres de Son départ leur promet « un autre défenseur », le Paraclet, un avocat qui le défendra ; en Jean 16, 13, Jésus dira : « Cependant, lorsqu’il viendra, lui l’Esprit de Vérité, Il vous conduira vers la vérité tout entière. » Au chapitre 17, (discours d’adieu), des versets 17 à 19, Jésus dit : « Consacre-Moi dans la vérité ; ta parole est vérité … pour eux, Je Me consacre Moi-même afin qu’ils soient eux aussi consacrés dans la vérité. » Pendant le récit de la Passion, devant Pilate, Jésus est à nouveau amené à s’expliquer sur la foi en la vérité (Jean 18, 37) : « Je suis né, je suis venu dans le monde, afin de rendre témoignage à la vérité ; quiconque est de la vérité écoute ma voix ». Pilate lui répondit : « Qu’est-ce que la vérité ? » (on saisit là le caractère désabusé de Pilate ; faiblesse qui va l’amener à se faire « manœuvrer » par les notables. DANS LES EPITRES DE SAINT JEAN Dans la première lettre de Jean : nous retrouvons cette même passion qu’il met à défendre Celui qui Se définit comme la vérité elle-même, vivante. En 1 Jean 2, 4 : « Celui qui dit « Je le connais » et qui ne garde pas ses commandements est un menteur : la vérité n’est pas en lui. » En 2,21 : « Je ne dis pas que vous ignorez la vérité, mais je vous dis : « Vous la connaissez », et la vérité ne produit aucun mensonge. » En 1 Jean 3, 18-19 : « Mes enfants, nous devons aimer non pas avec des paroles et des discours, mais en actes et en vérité … en agissant ainsi, nous reconnaîtrons que nous appartenons à la vérité. » En 1 Jean 5, 6 : « C’est Lui, Jésus-Christ, qui est venu par l’eau et le sang, pas seulement l’eau, mais l’eau et le sang. Celui qui rend témoignage, c’est l’Esprit, car l’Esprit est la vérité. » En conclusion de l’Epître (1 Jean 5,20) : « Nous savons aussi que le Fils de Dieu est venu pour nous donner l’intelligence, pour nous faire connaître Celui qui est vrai, dans son Fils Jésus, c’est Lui qui est le Dieu vrai et la vie éternelle. » C’est la vérité qui nous donne la liberté ; mais est-ce dire que c’est l’adhésion à l’Evangile qui nous procure cette liberté ? Saint Louis-Marie Grignon de Monfort nous parle « d’esclavage d’amour » ; mais, peut-on être à la fois esclave et homme libre ? Il faut noter que l’esclavage recommandé par St Louis-Marie est « un esclavage libre », si on peut accoler ces 2 mots. Saint Paul dans l’épître aux Romains ne nous dit pas autre chose. Il est probable que l’homme qui veut être étranger à cet « esclavage d’amour » tombera dans ces déviations où la licence nous rend esclaves de tout asservissement, même de la sexualité !Coupures(p56) 48 bis Dans ses catéchèse – en particulier celle relatives « au cœur, au corps et à l’Esprit » et surtout celle du 14 janvier 1981, Jean Paul II reprend l’épître aux Galates au chapitre 5 et souligne que la liberté « reconquise » doit être subordonné à cet élément, dans lequel toute la loi s’accomplit , c’est à dire l’amour.« Seulement que cette liberté ne tourne pas en prétexte pour vivre selon la chair ; mais par la charité mettez au service les uns des autres » Gal5.13 Tout le n°19 de la 1ère encyclique de Jean Paul II, Redemptor Hominis serait à citer : « l'Eglise responsable de la vérité » Ainsi, à la lumière de la doctrine du Concile Vatican II, l'Eglise apparaît à nos yeux comme étant socialement sujet de responsabilité à l’égard de la vérité divine. C’est avec une profonde émotion que nous écoutons le Christ lui-même lorsqu’Il déclare : « La Parole que vous entendez, n’est pas la mienne, mais elle est celle du Père qui M’a envoyé » (Jn 14,24)Dans cette affirmation de notre Maître, ne doit-on pas voir cette responsabilité à l’égard de la vérité révélée, qui est « propriété » de Dieu seul puisque même Lui, « le Fils Unique », qui vit « dans le sein du Père », sent le besoin lorsqu’il la transmet comme prophète et maître, de souligner qu’il agit dans une fidélité entière à la source divine de la vérité ?C’est pourquoi il est nécessaire que l'Eglise, lorsqu’elle professe et enseigne la foi, adhère étroitement à la vérité divine et que cela se traduise par une attitude vécue de soumission conforme à la raison. Le Christ lui même, pour garantir la fidélité à la vérité divine a promis à l'Eglise l’assistance spéciale de l’Esprit de Vérité, il a transmis le don de l’infaillibilité à ceux aux quels il a confié la charge de transmettre cette vérité et de l’enseigner (Médico-techniques 28,19). « Vérité et liberté ont un lien si fort qu’une liberté qui refuserait de se lier à la vérité tomberait dans l’arbitraire, et finirait par se soumettre elle-même aux passions les plus dégradantes et par s’autodétruire. » Centesimus Annus 4, Jean Paul II citant Léon XIII « Libertas Praestantissimus »paroles privées de confiance réciproque, la capacité à construire en dialogue constructif, la possibilité de pardon que tant de fois on aimerait obtenir mais que l’on a de la peine à donner-, la charité réciproque, la compassion pour les plus faibles, comme également la disponibilité au sacrifice. » ( Benoît XVI, Message pour la Journée Mondiale de la Paix 2012) Dans l’intervention déjà mentionnée du Cardinal Bertone à La Havane, ce dernier note : « Ce n’est pas un hasard si le plus illustre représentant du positivisme juridique, Hans Kelsen, commentant la question évangélique de Pilate à Jésus : « Qu’est-ce que la vérité ? » écrivait qu’en réalité, cette question de l’homme politique pragmatique contenait en elle-même la réponse : la vérité est inaccessible, c’est pourquoi Pilate sans attendre la réponse de Jésus, s’adresse à la foule et demande à la foule : « Voulez-vous que je vous libère la roi des Juifs ? ». En agissant ainsi- conclut Kelsen- Pilate se conduit en parfait démocrate, c'est-à-dire qu’il confie le vrai et le juste à l’opinion de la majorité… » BENOIT XVI, dans son Magistère, insiste beaucoup sur cette vérité et le danger actuel de la voir dénaturée par un relativisme : par exemple, au Congrès des Facultés de Communication des Universités Catholiques le 23 mai 2008 : « En tant qu’éducateurs, aidez vos étudiants à nourrir et récompenser cette passion pour la vérité… Enseignez-leur que leur passion pour la vérité, qui peut être servie par un certain scepticisme méthodologique ne doit pas être déformée et devenir un relativisme cynique où toutes les instances de vérité et de beauté sont régulièrement refusées ou ignorées… » (l’article de l’Osservatore Romano paru le 3 juin 2008 s’appelle d’ailleurs : « la passion de la vérité interdit tout relativisme » ) C’est un des points centraux de son Magistère : la confusion très grave qui agite notre époque, et qui fait qu’elle est agitée par une frénésie d’acheter, qui lui fait oublier que l’essentiel est la recherche de la vérité, et « quand on l’a trouvé, disait Jean-Paul II reprenant les termes du Cardinal Newman, de s’y maintenir. » Jouir sans entrave ( licence-libertinisme ) , n’est-ce pas « larguer les amarres », se laisser dériver comme « un bateau ivre » ? Plantons alors « une ancre de miséricorde » : Marie qui nous emmènera à Jésus ; car comme le dit l’Epître aux Hébreux (Hé 6,19 ) : « Pour notre âme, cette espérance est sûre et solide comme une ancre fixée au-delà du Temple, dans le sanctuaire même où Jésus est entré pour nous en précurseur, Lui qui est devenu Grand Prêtre pour toujours selon le sacerdoce de Melkisédek. » Sinon nous nous laisserons égarer par « toutes sortes de doctrines »… Mgr. Mamberti, dans le discours cité à Rimini dit que nous avons mis la tolérance avant la vérité comme vertu première dans nos sociétés : « Benoît XVI encourage à un profond respect pour la foi de l’autre et à la disponibilité à rechercher, dans ce que l’on rencontre comme étranger la vérité qui peut aider chaque personne à progresser. Mais, en aucun cas, cela ne peut avoir lieu en renonçant à la vérité : au contraire, cela n’est possible qu’à travers cet approfondissement. En effet, le relativisme n’unit pas. Pas plus que le pur pragmatisme. Le renoncement à la vérité et à la conversion n’élève pas l’homme et ne le rapproche pas non plus des autres. » Il y a conflit très profond sur les valeurs à mettre en avant dans nos sociétés Occidentales : non pas mettre en premier, comme on le fait la tolérance, mais la recherche de la vérité « et une fois qu’on l’a atteinte , s’y tenir … », sinon nous tombons dans un système de Démocraties « molles » et « malades »…( je pense toujours à Claudel qui, paraît-il, fulminait quand on faisait l’éloge de la tolérance: « Tolérance, tolérance, tolérance ? On a fait des maisons pour cela- ces maisons de « tolérance » , on l’a oublié aujourd’hui, étaient des maisons de prostitution que la Loi Marthe Richard a fait supprimer après la guerre. Evidemment, et c’est en ce sens qu’il faut prendre la phrase de Claudel, notre société est malade d’avoir mis la tolérance avant la recherche de la vérité comme vertu première à atteindre… Mgr. Mamberti dit aussi, citant le Professeur Engelhardt ( Manuale di bioetica , 1999 , p.. 22 ) : « Si on ne réussit pas à démontrer l’immoralité de certaines lignes de conduite, alors l‘assistance médicale apportée par Albert Schweitzer à des indigènes au Gabon, et celle prêtée par des médecins dans les camps de concentration nous seront tout autant défendables … le comportement des individus moralement répugnants sera justifiable tout autant que celui des saints. » « La dignité de l’homme se fonde sur sa capacité de vérité. Absolutiser la tolérance est, en revanche, se retirer devant cette dignité. Absolutiser la tolérance, en effet, signifie la transformer en valeur suprême, mais cela met inévitablement la vérité au second plan et la relativiser. Le renoncement à la vérité, quant à lui, livre l’homme au calcul du plus fort, de l’utile ou de l’immédiat, en privant la personne de sa grandeur. » (Le Père J.M. Petitclerc, salésien et polytechnicien, s’occupe de jeunes en difficulté dans la banlieue Nord-Ouest de Paris : il dit que pour eux, le mot tolérance n’est pas assez fort ; est-ce qu’un jeune va dire à un autre jeune : « je te tolère », non, il le respectera. Lui et les jeunes ont remplacé le mot de « tolérance » par celui de « respect … les jeunes des banlieues ont plus besoin de respect que de tolérance ! ») Comme nous l’avons vu ailleurs, il y a un très grand risque dans nos sociétés de mettre la tolérance au premier rang, et la recherche de la vérité au second plan, et que nos démocraties se révèlent sans valeur ... (Rappelons-nous que Hitler est venu au pouvoir par des voies démocratiques en 1933, en pleine banqueroute de la République de Weimar ; et soulignons les mots du Professeur Engelhardt, cité plus haut … ). C’est pour dire que la voie démocratique n’est pas suffisante en elle-même, Nos régimes sont menés par la voie du « consensus », seul le compromis est possible ! La vérité n’est pas un objectif possible entre des gens qui ne croient pas la même chose !.. Il est certainement beaucoup plus simple de s’entendre entre chrétiens et « ceux qui cherchent… », ou qui révèrent un autre Dieu ; ces derniers pour les chrétiens, relèvent de la morale naturelle ; c’est pourquoi il serait meilleur de dire comme le préconisait Benoît XVI, avant son élection, « veluti si Deus daretur » (comme si Dieu existait ), plutôt que dire comme on l’a fait depuis plusieurs siècles « etsi Deus non daretur » ( comme si Dieu n’existait pas ), position préconisée par les Philosophes des Lumières ( et non défendue par Pascal, un siècle plus tôt, qui préconisait la première solution … le « pari pascalien » ) , Nos démocraties sont malades : nous avons vu plus haut, qu’elles n’ont pas empêché, et loin de là, Hitler de prendre le pouvoir ; le relativisme moral est le principal ennemi de la démocratie; au lieu de croire qu’une vérité est possible, « atteignable », elles ne vivent que par la recherche d’un « consensus », qui est la source même de ce relativisme. Nos démocraties vivent sur l’idée que professait Pilate devant Jésus dans une attitude désabusée : « Qu’est-ce que la vérité ? » : comme nous le rappelle Kelsen cité plus haut) ; le refus de toute vérité transcendante est à la base de nos démocraties. Et si nous changions le précepte hérité du Siècle des Lumières, si au lieu de « Etsi Deus non daretur » « comme si » Dieu n’existait pas, dire plutôt « Veluti si Deus daretur », ( comme si Dieu existait ) ?, comme le préconisait Benoît XVI à Subiaco, c’était la position préconisée par Pascal un siècle plus tôt. Nos démocraties sont « malades » ; Paul VI le disait déjà au n° 66 de Populorum Progressio (1969) ; et pourtant ce serait le moins mauvais des régimes d’après ce que disait Churchill pendant la dernière guerre ? Trois solutions pour une bonne gouvernance : - L’enseignement du Décalogue pour les peuples qui le reconnaissent (religion révélée)La loi chrétienne, si la nation a été « baptisée »La loi « naturelle » si elle ne l’est pas (Romains 2, 12)Et abandonner ce « Etsi Deus non daretur », source d’un laïcisme quelquefois violent, et adopter ce « Veluti si Deus daretur » Il y a une différence absolu entre « liberté extérieure » et « liberté intérieure » : Jésus n’a certainement jamais été aussi libre que complètement immobilisé à la Croix : seule persiste alors Sa Liberté Intérieure : rappelons ce que nous avons dit ailleurs de la liberté de l’oiseau en cage ; la propre de l’homme est sa liberté intérieure…une liberté purement extérieure n’est plus une liberté, mais licence ou libertinisme. Le monde moderne, après la chute du Mur de Berlin, et le monde post-communiste entre autres, ont redécouvert la liberté, mais ils ont « oublié » que celle-ci n’était pas isolée, mais jointe à d’autres valeurs qui sont le discernement du bien et du mal ( Jean-Paul II le souligne dans son dernier ouvrage Mémoire et Identité au n°7, page 48 ), d’où le risque très grand de le voir dégénérer en une voie plus subtile : celle de la soumission à la consommation et à une dévaluation de la sexualité… très vite on se laisse asservir par la drogue par exemple, cherchant un remède à ce malaise. Mais, la culture des pays de l’Est et Centrale, si elle n’ est pas aussi largement contaminée par le nihilisme qui règne dans nos pays de l’Ouest, risquent de subir ce contre-coup mercantiliste ! Il y a aussi un risque très grand dans nos sociétés de mettre la tolérance comme valeur première, avant la vérité ou la recherche de celle-ci. L’Occident se croit dans une civilisation post-chrétienne : il refuse l’héritage chrétien. Mais aussi, il y a un risque grave- la crise économique actuelle le confirme- de confondre la liberté avec le libéralisme (qui sont en fait opposés…), le Père Michel Schooyans en a fait le chapitre d’un de ses livres (préfacé par Jean-Paul II) : la Dérive Totalitaire du libéralisme (aux Editions Mame- Emmanuel, parue 15 ans avant la crise actuelle !) . La crise que l’économie subit est la confirmation des risques encourus… Il est aussi stupéfiant de penser que cette crise avait déjà été annoncée, il y a quarante ans par Paul VI dans Populorum Progressio ! Il préconisait, ainsi que Jean XXIII l’avait fait, que, au sein de l’O.N.U. , il existe un organisme de contrôle des activités financières et bancaires multinationales, comme il en existe pour les Etats et leur activité militaire… Benoît XVI, dans sa dernière encyclique sociale nous le rappelle. Il dit, en particulier, que le processus de mondialisation pourrait substituer les technologies aux idéologies … citant Paul VI et Octogesima Adveniens n° 29 (écrit en 1971, donc 18 ans avant la chute du mur de Berlin ! ) « Si l’on a pu parler d’un recul des idéologies, ce peut être un temps favorable pour une ouverture sur la transcendance concrète du christianisme. Ce peut être aussi le glissement plus accentué vers un nouveau positivisme : la technique universalisée comme forme dominante d’activité, comme mode envahissant d’exister, comme langage même, sans que la question de son sens ne soit réellement posée. » Le matérialisme « pratique » était déjà une menace ! Le danger annoncé par Paul VI s’est réalisé : le pouvoir de la techno-science ! La vérité et sa recherche (elles devraient être le fait et l’honneur de tout homme, ainsi que nous le dit le désormais Bienheureux Cardinal Newman, et même le fait des sociétés primitives), cette vérité devrait être première et précéder celle de tolérance. Or, nous savons que dans nos sociétés il en va autrement … Ici retentit le mot de Pilate, lors de l’interrogatoire de Jésus : « Mais, qu’est-ce que la vérité ? » (Jean 18,38), mais sans attendre la réponse nous dit le Cardinal Vingt Trois ! Ce problème de la vérité, soulignée par Jésus : « La vérité vous rendra libres » (Jean 8, 32) devrait être essentiel dans la vie dans la vie de tout homme. Nos sociétés Occidentales, elles qui célèbrent tellement la vérité, ont-elles vraiment conscience que c’est elle qui rend libre ? S’en écarter, c’est accepter le risque du libéralisme et de la licence. En notre époque d’hédonisme, c’est un risque majeur ... Le « Qu’est-ce que la vérité ? » de Pilate est la source du relativisme moral (scepticisne) qui tend à s’étendre partout sur le globe. Kelsen avait fait de ce relativisme la base des Organisations Internationales, après la Seconde Guerre Mondiale. Mais dans chaque peuple, même non-chrétien, il y a une aspiration vers plus de vérité. Il semble que toute notre civilisation (d’ailleurs plus seulement Occidentale, puisque nous « l’exportons » vers le Tiers-monde …) est largement influencée par une culture positiviste ou scientiste, sans notion de Bien ou de Mal, où justement la notion de Résurrection a disparu ! Alors, la Résurrection ? Est- ce qu’elle rend obsolète la recherche de ces autres peuples ? Y a t-il une césure insurmontable entre ces aspirations, et notre vision chrétienne des choses ? Saint Paul nous y aide quand dans l’Epître aux Romains (Rm 2,15), il souligne la notion de loi naturelle, c'est-à-dire pour les peuples qui ne connaissent pas Jésus Christ (ou mal). Notre Pape Benoît XVI insiste à de multiples reprises sur cette notion de morale naturelle. Saint Paul dans son Discours à l’Aréopage d’Athènes a essuyé les quolibets quand il a parlé de Résurrection. Moins d’un siècle plus tard, Justin (Saint Justin), après des recherches dans les philosophies de l’époque, puis sa conversion au christianisme, a montré que cette Résurrection n’était pas du tout incompatible avec la raison. Toute notre société Occidentale a été imprégnée par des idées issues du Positivisme, dans laquelle la Résurrection n’avait aucune part. Nous en vivons toujours. Le modèle économique actuel qui cherche à imprégner le monde actuel dérive du capitalisme anglo-saxon. Sa base est l’utilitarisme. Jean Paul II, qui était professeur de morale à l’université de Lublin, insiste fortement pour nous dire que cette philosophie n’est pas la philosophie chrétienne qui est une philosophie du don, et de la gratuité ; cette morale est donc en opposition directe avec la morale de l’évangile, Il faut lire ou relire son encyclique sur l’Esprit Saint (Dominum et Vivificantem). Mais, c’est sans doute l’utilitarisme qui inspire les Sociétés Internationales. Le libéralisme inspire sans doute la politique actuelle, mais le libéralisme et la liberté sont directement opposés, nous dit le Père M.Schooyans longtemps professeur au Brésil, puis à Louvain et un des inspirateurs de Jean Paul II pour Evangelium Vitae: le libéralisme, peut-être sans le chercher, appauvrit toujours plus les pauvres et les réduit au chômage et à la misère: Le monde évolue inextricablement sur cette lancée: la crise actuelle évoluant depuis 2008 n’est que le stigmate de celle-ci (aux U.S.A., par exemple, il y a désormais 46.000.000 de gens vivants au dessous du seuil de pauvreté et 14% de la population vivant dans des logements de fortune. Benoît XVI dans sa dernière Encyclique Sociale souligne toutes ces dérives. LIBERTE 1/ La liberté dans l’Ancien Testament (Il semble que les mots abstraits comme « liberté » soient plutôt le fruit de la culture spéculative grecque)Il n’est pas certain que le mot éxistait dans l’hébreu ancien, dans la première alliance on trouve le mot « libérer » à plusieurs reprises, dans les Psaumes par exemple. - libération de l’esclavage des Egyptiens en premier, ce qui constitue l’expérience primordiale d’Israël - libération de la servitude de nombreux cultes païens, dieux étrangers de la Mésopotamie souvent oppresseurs, exigeants - libération de superstitions, de magies abandonnées par le peuple d’Israël.Mais nous le savons, Israël aura du mal à se détacher de ces croyances étrangères, Dieu aura souvent besoin de le « rééduquer » …pour que paraisse la figure de Dieu vivant déjà mentionné en Job 19,25. Mais la liberté que Dieu donne à l’homme n’est pas une liberté absolue. Dans la parabole du Jardin d’Eden, Dieu donne à Adam et Eve de manger tous les arbres sauf un. Déjà au delà de cette liberté symbolique se profile le risque de se passer de Dieu et de rechercher une liberté illusoire qui risque de dégénérer en licence. Métatentation qui se retrouve à notre époque, disait Jean Paul II lors de son premier voyage en France, au séminaire d’Issy. Cette recherche constante de la liberté fait d’ailleurs la grande différence de la religion juive des religions avoisinantes. En Deutéronome 30, 15-19 déjà :« Vois, je te propose aujourd’hui vie et bonheur, mort et malheur … Je te propose la vie ou la mort ; la libération ou la malédiction .Choisis donc la vie pour que toi et ta postérité viviez »En Dt 30, 15-19 (cité en EV 28 …)« Ecoute les commandements que je te donne aujourd’hui : aimer le Seigneur ton Dieu, marcher dans ses chemins, garder ses ordres, ses commandements, ses décrets » Quand la conscience, cet œil lumineux de l’âme (cf Mat 6, 22-23) appelle bien le mal et mal le bien (Is 6,20), elle prend le chemin de la dégénérescence la plus inquiétante et de la cécité morale la plus ténébreuse. (EV24)Cette capacité de choix est inhérente à la révélation juive et, peu à peu se révèle, la notion de choix personnel, de rétribution en vie éternelle. Ezéchiel est le prophète qui a essentiellement parlé de notre responsabilité personnelle ; il a partagé le sort des Israélites déportés à Babylone ; ceux-ci ne comprenaient pas la perte du Temple de Jérusalem et pensaient que Dieu les avaient abandonnés ! Le souci d’Ezéchiel a été de leur prêcher une religion du cœur. De là, aussi, li a eu soin de démarquer la morale jusque là essentiellement sociale en une morale personnelle. A trois reprises, li souligne la responsabilité personnelle de tout homme par rapport à sa communauté ! Autrefois, on disait : « Les pères ont mangé des raisins verts et les dents des fils ont été agacées » ; c’était un proverbe ancien qu’ Ezéchiel relate (Ez 18,2). Il souligne la responsabilité de chaque homme devant le mal. Et ainsi, est née l’apparition de la morale personnelle et Dieu ne pouvait exonérer le peuple de la corruption croissante qui régnait la capitale de la Judée ; ainsi a-t-il souligné l’importance de la responsabilité personnelle. Dieu réside au cœur de chaque homme et non dans un Temple, fut-il le Temple de Jérusalem (Jésus le redira à la Samaritaine au chapitre 4 de l’Evangile de Saint Jean). Ezéchiel insiste sur la responsabilité personnelle de chacun, au risque de mettre « en veilleuse » « la responsabilité sociale » qui existe bien : les enfants héritent souvent des excès des parents que ce soit par exemple, l’alcool, la drogue ou d’autres accoutumances. Mais, c’était le devoir d’Ezéchiel de souligner notre responsabilité personnelle. Ezéchiel relate notre responsabilité personnelle en trois endroits, signe de l’importance qu’il y accorde : Ezéchiel 14,12 ; Ezéchiel 18,1 à 30 ; Ezéchiel 33, 10 à 20. Dans les Psaumes, bien qu’on ne retrouve pas le mot liberté, cependant le verbe libérer est souvent employé, pourtant la liberté est une notion essentielle dans le peuple juif, on peut même dire que c’est là qu’il se singularise au milieu des peuples voisins .Par exemple :* Dans le Psaume 16 :Lève-toi, Seigneur affronte-les, renverse-les par ton épée, libère-moi des méchants* Dans le Psaume 17, verset 20 :Le seigneur m’a libéré car il m’aime* Dans le Psaume 50, au verset 16 :Libère-moi du sang versé, Dieu, mon Dieu sauveur * Dans le Psaume 42Selon les traductions, le mot « liberté » est absent, mais se trouve aussi le mot « délivrer » est présent, en particulier dans les traductions hébraïques ; nous trouvons ce terme au verset 1 de ce Psaume. * Dans le Psaume 67, au verset 7 :« A l’isolé, Dieu accorde une maison ; aux captifs il rend la liberté, mais les rebelles vont habiter les lieux arides » C’est la traduction liturgique, mais le Bible de Jérusalem traduit par une paraphrase, comme quoi si l’idée existe bien depuis le début de la Bible (elle la fonde même, comme nous l’avons dit …), l’hébreu est une langue concrète – à la différence du grec, et il faut attendre Saint Jean, Saint Paul, Saint Jacques pour que ce mot apparaisse, et encore, s’agit-il de traductions en grec. * Dans le Psaume 30 (31) :En Toi, j’ai mon refuge, garde moi d’être humilié pour toujours.Dans ta justice libère-moi, écoute, et viens me délivrer.* Dans le Psaume 42, au verset 1 :Rends –moi justice, Ô mon Dieu.Défends ma cause contre un peuple sans foiDe l’homme qui ruse et trahit, délivre –moiDans le Psaume 123, bien que le mot « libérer » ne soit pas prononcé, le sens est là, comme le dit l’introduction du Psaume« Le filet s’est rompu, nous sommes libres, alléluia » Au verset 7 :« Comme un oiseau nous avons échappé au filet du chasseur, le filet s’est rompu, nous avons échappé »Tous les textes de l’Ancienne Alliance existent pour relever Israël de la servitude de l’esclavage, du polythéisme des peuples avoisinants, des pratiques divinatoires qui créent un véritable asservissement intérieur. Mais cette liberté est limitée, cadrée puisque dans le jardin d’Eden, Dieu permet à Adam et Eve de manger de tous les arbres sauf « Un » (Genèse 3), liberté limitée qui nous évite tous excès de libertinage, tout sentiment de toute puissance. Dans les prophètes, cette recherche du bien et du mal est bien sûr omniprésente, … « Recherchez le bien et non le mal afin que vous viviez et qu’ainsi Yahweh Sabaoth soit avec vous comme vous le dites » Amos 5, 14Dieu remplit les hommes de science et d’intelligence et leur fait connaître le bien et le mal. Si 17,7 2/ Liberté dans le Nouveau Testament o Dans les Evangiles, le seul à parler de la liberté est Saint Jean, au chapitre 8o Dans les épîtres de Saint Paul, ce sont surtout l’épître aux Romains et l’épître aux Galates, (mais ces 2 épîtres, écrites presque en même temps, se recoupent) ; ainsi que la 2è épître aux Corinthiens et dans les 2è épître à Timothée.o Dans les épîtres dites Catholiques, Saint Jacques en parle d’ailleurs pour se justifier face à Saint Paul au sujet de la prééminence des vertus théologales, ainsi que Saint Pierre et à nouveau Saint Jean. Dans l’évangile de Jean : Jean n’en parle qu’au chapitre 8, et encore la 2è moitié : diatribe de Jésus avec les pharisiens.8.32 « Il dit aux Juifs qui maintenant croyaient en lui : Si vous demeurez fidèles à ma parole, vous êtesvraiment mes disciples, et la vérité vous rendra libres »Les Pharisiens lui répliquent : « Nous sommes les descendants d’Abraham, et nousn’avons jamais été les esclaves de personne, comment peux-tu dire « vous deviendrez libres » ? »8.34 Jésus leur répondit : « Amen, Amen, je vous le dis : tout homme qui commet le péché est esclave du péché. L’esclave ne demeure pas pour toujours dans la maison …8.36 Donc, « si c’est le Fils qui vous rends libres, vous serez vraiment libres. »8.44 « (Le démon) il n’a jamais été dans la vérité, parce qu’il n’y a pas en lui de vérité, … ,8.45 mais, moi, quand je dis la vérité vous ne me croyez pas » Saint Paul, dans plusieurs endroits, nous parle de liberté : Le texte essentiel est sans doute celui de la seconde Lettre aux Corinthiens ( 2 Co 3, 17) dans laquelle Paul nous dit : « Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » Dans l’épître aux Romains, Paul nous parle de l’Esprit, la grâce qui nous libère de l’esclavage du péché et de la chair.en 6.6 Notre être ancien a été fixé sur le bois de la Croix, pour que, nous ne soyons plus esclaves du péché car celui qui est mort est affranchi du péchéen 6.16 Vous le savez bien, en nous mettant au service de quelqu’un pour lui obéir comme esclaves, vous voilà esclaves de celui à qui vous obéissez :- soit du péché qui est un chemin de mort- soit de l’obéissance à Dieu qui est un chemin de justiceen 6.20 Quand vous étiez esclaves du péché, vous étiez libres par rapport aux exigences de la justiceen 6.22 mais maintenant que vous avez été libérés du péché et que vous êtes devenus esclaves de Dieu vous y récoltez la Sainteté et cela aboutit à la vie éternelle.en Rom 8.2, Car l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus, m’a libéré, moi qui était sous la loi du péché et de la mort.8.15 L’Esprit que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont peur. C’est un Esprit qui fait de vous des Fils.8.20 Pourtant elle (la Création) a gardé l’espérance d’être, elle-même libéré de l’esclavage, de la dégradation inévitable pour connaître la liberté, la gloire des enfants de Dieu.Dans les epîtres aux Corinthiens:en 1 Co 7,22En effet, l’esclave qui a été appelé par le Seigneur est un affranchi du Seigneur, de même l’homme libre qui a été appelé est un esclave du Christ.en II Co 3.17 Quand on se convertit au Seigneur, un voile tombeOr le Seigneur , c’est l’Esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. Mais c’est en Galates, et surtout, au début du chapitre 5, que Paul nous parle de la liberté : En Gal 5.1Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres, Alors, tenez bon, ne vous remettez pas sous les chaînes de votre ancien esclavage Et en Gal 5.13Or vous, frères, vous avez été appelé à la liberté mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme, au contraire, mettez vous par amour au service les uns des autresDans les épîtres dites « Catholiques » : Jacques, dans son épître, nous parle deux fois de « loi de liberté », ce qui pourrait sembler contradictoire ?? Apparemment seulement puisque la liberté chrétienne n’existe que sur le socle de certaines lois, celle du Décalogue pour les Juifs et les Chrétiens ; ce n’est donc pas une liberté absolue, celle-ci pourrait dégénérer en licence…en Jacques 1,25L’homme qui se penche sur la Loi parfaite, celle de la liberté, et qui s’y tient, celui qui ne l’écoute pas pour l’oublier, mais l’applique dans ses actes, heureux est-il d’agir ainsi.En Jacques 2,12-13 Parlez et agissez comme des gens qui doivent être jugés par une loi de liberté, car le jugement est sans miséricorde pour celui qui n’a pas fait miséricorde, mais la miséricorde se moque du jugement. Pierre en ses Lettres, qui sont pour certains les premières encycliques, parle à plusieurs reprises de cette liberté :En 1 P 1,18-19Vous le savez , ce qui vous a libéré de la vie sans but que vous meniez à la suite de vos pères, ce n’est pas l’or et l’argent, car ils seront détruits, c’est le sang précieux du Christ, l’Agneau sans défaut et sans tâcheEn 1 P 2,16Soyez des hommes libres sans dissimuler votre méchanceté derrière cette liberté, soyez plutôt les esclaves de Dieu.En 2 P 3,19Ils (les faux prophètes) leur promettent la liberté, alors qu’eux-mêmes sont esclaves de la pourriture : car l’homme est esclave de ce qui le domine 1/ cette liberté n’est pas pesante puisque le Christ nous a libéré. Mais ne nous remettons pas « sous le joug d’un ancien esclavage », comme nous le dit Paul. 2/ Saint Jacques dans son épître, comme nous l’avons vu, parle en adjoignant 2 termes apparemment contradictoires : loi de liberté. Mais ce n’est pas très loin de ce que dit Saint Paul dans l’épître aux Romains : esclavage dans la liberté. On peut dire que cette liberté ne repose que sur un certain code : c’est le Code de l’Alliance, cette liberté ne s’élève qu’à partir de Lois données au Sinaï, sinon cette liberté a toutes les chances de dégénérer… (Dans une Catéchèse, Benoît XVI le 26 Novembre 2008 note: « Envisagée dans cette perspective, la place centrale de la justification sans les œuvres, objet primordial de la prédication de Paul, n’entre pas du tout en contradiction avec la foi agissant dans l’amour ; au contraire, elle exige que notre foi elle-même s’exprime dans une vie selon l’Esprit. On a souvent vu une opposition sans fondement entre la théologie de Saint Paul et celle de Saint Jacques qui dans sa Lettre écrit : « En effet, comme le corps qui ne respire plus est mort, la foi qui n’agit pas est morte » (2,26). En réalité, alors que Paul est avant tout préoccupé de démontrer que la foi dans le Christ est nécessaire et suffisante, Jacques place l’accent sur les relations de conséquence entre la foi et les œuvres (cf. Jc. 2, 24) 3/ Bien sûr, cette liberté n’est pas secondaire, si Dieu nous a fait libres, c’est pour que nous ayons la possibilité de le choisir, cette liberté qui est une prérogative de l’homme, d’abord dans la Première alliance, puis dans la Seconde, semble être absente dans les autres religions. D’autres part, notre foi (en Jésus Christ) n’élimine pas la Loi, qui est un passage obligé, comme il l’a été pour le peuple juif, et qui l’est pour nous actuellement. (ce que malheureusement beaucoup oublient aujourd’hui… )La Liberté dans les Pères de l’Eglise Nous ne citerons que Saint Augustin puisque Jean Paul II l’a cité à plusieurs reprises, dans Veritatis Splendor d’abord, puis dans Evangelium Vitae.« La première liberté, c’est de ne pas commettre de crimes … suivre les dix commandements …- quand un homme s’est mis à renoncer à les commettre et c’est le devoir de tout homme de ne pas les commettre, il commence à relever la tête vers la liberté – mais ce n’est qu’un commandement de liberté, ce n’est pas la liberté parfaite » cité dans V.S. n°13 et EV n°75« Pourquoi, demande-t-il, n’est-ce pas la liberté parfaite ?C’est une liberté partielle et un esclavage partiel. Ce n’est pas encore la liberté totale, la pure liberté parce que ce n’est pas encore l’éternité … Du fait par conséquent qu’il nous est resté une certaine faiblesse, j’ose dire que dans la mesure où nous servons Dieu, nous sommes libres, et que dans la mesure où nous servons la loi du péché, nous sommes encore esclaves. ». La Liberté dans l’enseignement de l’Eglise L’Eglise a été constante dans cet enseignementUne des encycliques où ce sujet est abordé est « Libertas Praestantissimus » de Léon XIII (20-VII 1888) « Mais cette raison humaine ne pourrait avoir force de loi si elle n’était l’organe et l’interprète d’une raison plus haute, à laquelle notre esprit et notre liberté doivent obéissance »Notre liberté, même essentielle parce qu’elle est un don de Dieu lui-même est pourtant limitée. « Tu pourras manger de tous les arbres du jardin, sauf un » dit Genèse, chapitre 3. Dans Vatican II La liberté humaine est soulignée en plusieurs passages : Gaudium et Spes, Ad Gentes et Dignitatis Humanae entre autres Dans Gaudium et Spes, en particulier,Au numéro 4 :« Jamais les hommes n’ont eu comme aujourd’hui un sens aussi vif de la liberté, mais en même temps, surgissent de nouvelles formes d’asservissement social et psychique ».au n°6 paragraphe 6 :Ces peuples (en développement) surtout si ils sont attachés à leurs traditions les plus anciennes, ressentent en même temps le besoin d’exercer leur liberté d’une façon plus adulte et plus personnelleAu n°9 :Ainsi le monde moderne apparaît à la fois comme puissant et faible, capable du meilleur comme du pire et le chemin s’ouvre devant lui, de la liberté ou de la servitude.Au n°13 :Etabli par Dieu dans un état de justice, l’homme séduit par le malin dès le début de l’histoire a abusé de sa liberté en se dressant contre Dieu et en désirant parvenir à ses fins hors de Dieu.GS 13,2Mais le Seigneur en personne est venu pour restaurer l’homme dans sa liberté, et sa force, le rénovant intérieurement en jetant dehors le « prince de ce monde » Jean 12.3GS 17Mais c’est toujours librement que l’homme se tourne vers le bien. Cette liberté, nos contemporains l’estiment grandement et ils la poursuivent avec ardeur. Et ils ont raison. Souvent cependant ils la chérissent d’une manière qui n’est pas droite, comme la licence de faire n’importe quoi, pourvu que cela plaise, même le mal – mais la vraie liberté est en l’homme un signe privilégié de l’image de Dieu. Car Dieu a voulu laisser « l’homme à son propre conseil » Sir 13.14, pour qu’il puisse de lui-même chercher son créateur, et en adhérent librement à lui, s’achever dans une bienheureuse plénitude. La dignité de l’homme exige donc de lui qu’il agisse selon un choix conscient et libre, mû et déterminé par une conviction personnelle et non sous l’effet de pensées instinctives ou d’une contrainte extérieure. L’homme parvient à cette dignité lorsque se délivrant de toute servitude des passions par le choix libre du bien ; il marche vers sa destinée et prend soin de s’en procurer réellement les moyens par son ingéniosité. Ce n’est toutefois que par le secours de la grâce divine que la liberté humaine, blessée par le péché peut s’ordonner à Dieu, d’une manière effective et intégrale.GS 21,6Pour les croyants l’Eglise réclame la liberté effective et la possibilité d’élever aussi dans le monde le temple de DieuCe message de l’Evangile, loin de diminuer l’homme, sert à son progrès en répandant lumière, vie et liberté et en dehors de lui (l’Evangile) rien ne peut combler le cœur humain.GS 20,1Ceux qui professent un athéisme de cette sorte (c’est-à-dire désir d’autonomie humaine à un point tel qu’il fait obstacle à toute dépendance à l’égard de Dieu) soutiennent que la liberté consiste en ceci que l’homme est pour lui-même sa propre fin … à cette libération, s’opposerait par la nature même la religion.GS 22 (21)L’Eglise déplore les différences de traitements que certaines autorités civiles établissent injustement entre croyants et incroyants … Dans Dignitatis Humane (DH) Au n°1Tous les hommes sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Eglise, et quand ils l’ont trouvée, de l’embrasser et de lui être fidèles.En DH 2Le Concile Vatican II déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être soustraits à toute contrainte … de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience, ni empêché d’agir, dans de justes limites selon sa conscience …Les hommes sont aussi tenus à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette véritéDH 3C’est donc faire injure à la personne humaine et à l’ordre établi par Dieu pour les êtres humains, que de refuser à l’homme le libre exercice de la religion sur le plan de la société dès lors que l’ordre public est sauvegardé.DH 8Aujourd’hui, l’homme est exposé à toutes sortes de pressions et court le danger d’être frustré de son libre jugement personnel, mais nombreux sont ceux qui sous prétexte de liberté rejettent toute sujétion, et font peu de cas de l’obéissance requise.DH 9Ce que le Concile du Vatican déclare sur le droit de l’homme à la liberté religieuse à pour fondement la dignité de la personne … qui plus est, cette doctrine de la liberté a ses racines dans la Révélation Divine … en effet bien que la Révélation n’affirme pas explicitement le droit à l’immunité de toute contrainte extérieure dans le domaine religieux, elle découvre dans toute son ampleur la dignité de la personne humaine, elle montre en quel respect le Christ a tenu la liberté de l’homme dans l’accomplissement de son devoir de croire en la parole de Dieu.DH 13Elle est sacrée, en effet, cette liberté dont le Fils Unique de Dieu a doté l’Eglise qu’Il a acquise par son sang … Dans ad Gentes : Au n°5La mission de l’Eglise s’accomplit donc par l’opération au moyen de laquelle, obéissant à l’ordre du Christ et mue par la grâce de l’Esprit-Saint et la charité, elle devient en acte plénier présente à tous les hommes et à tous les peuples, pour les amener, par l’exemple de sa vie , par la prédication, par les sacrements, et les autres moyens de sa grâce, à la foi, à la liberté, à la paix du Christ … au n°8En toute vérité, dans l’histoire humaine même, au point de vue temporel, l’Evangile fut un ferment de liberté et de progrès Et en revenant en arrière : dans Gaudium et Spes au n°41, aucune loi humaine ne peut assurer la dignité personnelle et la liberté de l’homme comme le fait l’Evangile du Christ. Cet Evangile annonce et proclame la liberté des enfants de Dieu, rejette tout esclavage qui en fin de compte provient du péché. « Le Christ, en effet, a réalisé et manifeste la liberté qui trouve sa plénitude dans la charité, la liberté grâce à laquelle nous sommes au service les uns des autres » Dans VATICAN II, la déclaration Gaudium et Spes au n° 22 dit : « Le mystère de l’homme ne s’éclaire vraiment que dans le mystère du Verbe Incarné … Nouvel Adam, le Christ dans la Révélation même du mystère du Père et de son Amour manifeste pleinement l’homme à lui-même et lui découvre la sublimité de sa vocation. ». Jean Paul II, qui a été à ce Concile un des portes paroles puissants des Pays satellites alors de l’Union Soviétique (25 ans avant la chute du Mur de Berlin) est un grand acteur de l’importance de la liberté et de la liberté religieuse entre autres. La déclaration DIGNITATIS HUMANAE (1964) sur la liberté religieuse est essentielle : la liberté religieuse n’est pas une liberté parmi d’autres, elle est le sommet et la base de toutes les autres libertés. Au n° 2 : « En vertu de leur dignité, tous les hommes parce qu’ils sont des personnes, c'est-à-dire douées de raison et de volonté libre, et, par suite, pourvues d’une responsabilité personnelle, sont pressés par leur nature même et tenus par obligation morale à chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette vérité. Or, à cette obligation, les hommes nels jouissent outre la liberté psychologique, de l’immunité à l’égard de toute contrainte extérieure » (Karol Wojtyla en 1976, préchant à Paul VI, le mur de Berlin n’est tombé « qu’en » 1989) L’acte final de la Conférence sur la Sécurité en Europe (OSCE) à Helsinki, en 1974, a été une des sources de la chute du régime soviétique : ce dernier ne pensait pas que la détermination du Vatican à ce que soit insérée la mention de la liberté religieuse avait une importance quelconque … LA CONGREGATION POUR LA DOCTRINE DE LA FOI, sous la direction du Cardinal Ratzinger, a publié en Mars 1986, une instruction sur « la liberté chrétienne et la libération » Au n° 73, elle dit : « Le commandement suprême de l’amour conduit à la pleine reconnaissance de la dignité de chaque homme, créé à l’image de Dieu. De cette dignité découlent des droits et des devoirs naturels. A la lumière de l’image de Dieu, la liberté, prérogative essentielle de la personne humaine, est manifestée dans toute sa profondeur. Les personnes sont les sujets actifs et responsables de la vie sociale. Au fondement, qui est la dignité de l’homme, sont intimement liés le principe de solidarité et le principe de subsidiarité. En vertu du premier, l’homme doit contribuer avec ses semblables au bien commun de la société, à tous ses niveaux. Par là, la doctrine de l’Eglise est opposée à toutes les formes de l’individualisme social ou politique. En vertu du second, ni l’Etat, ni aucune société ne doivent jamais se substituer à l’initiative et à la responsabilité des personnes et des communautés intermédiaires au niveau où elles peuvent agir, ni détruire l’espace nécessaire à leur liberté. Par là, la doctrine sociale de l’Eglise s’oppose à toutes les formes de collectivisme. DANS L’ENSEIGNEMENT DE JEAN PAUL II Son Encyclique initiale (REDEMPTOR HOMINIS, mars 1979) est fortement marquée par cette entrave à la liberté qu’il a vécu à Cracovie et qui était sensible dans tous les pays de l’Est (l’Occident ne l’a pas vécu avec autant d’acuité); il insiste beaucoup sur cette liberté de culte. Au n° 12 : « C’est pourquoi l’Eglise de notre temps accorde une grande importance à tout ce que le Concile Vatican II a exposé dans la déclaration sur la liberté religieuse… Nous sentons profondément le caractère engageant de la vérité que Dieu nous a révélée…L’Eglise, par institution du Christ, en est gardienne et maîtresse, étant précisément dotée d’une assistance particulière de l’Esprit-Saint, afin de pouvoir conserver fidèlement cette vérité et l’enseigner dans toute son intégrité ( cf. Paul VI , Evangelii Nuntiandi, n° 6 ). En accomplissant cette mission, regardons le Christ lui-même, Lui qui est le premier Evangélisateur… La déclaration sur la liberté religieuse nous manifeste de manière convaincante, que en annonçant la vérité qui ne provient pas des hommes, mais de Dieu (« ma doctrine n’est pas de moi, mais de Celui qui M’a envoyé » - Jean 7,16 -, c'est-à-dire du Père), tout en agissant avec la force de leur esprit, le Christ et ensuite les Apôtres, conservent une profonde estime pour l’homme, pour son intelligence, sa volonté, sa conscience et sa liberté… » Plus loin au n° 17 : « Parmi ces droits, on compte à juste titre la liberté religieuse, à côté du droit à la liberté de conscience. Le Concile Vatican II a estimé particulièrement nécessaire l’élaboration d’une déclaration plus étendue sur ce thème. C’est le document qui s’intitule « Dignitatis Humanae » : on y trouve exprimées non seulement la conception théologique du problème, mais encore la conception qui part du droit naturel, c'est-à-dire d’un point de vue « purement humain » sur la base des prémisses dictées par l’expérience même de l’homme, par sa raison et par le sens de sa dignité. Certes, la limitation de la liberté religieuse des personnes et des communautés n’est pas seulement une douloureuse expérience pour elles, mais elle atteint avant tout la dignité même de l’homme, indépendamment de la religion que ces personnes ou ces communautés professent ou de la conception du monde qu’elles ont. … « La limitation de la liberté religieuse et sa violation sont en contradiction avec la dignité de l’homme et avec ses droits objectifs. » « (L’Eglise) ne demande aucun privilège, mais le respect d’un droit élémentaire. La réalisation de ce droit est l’un des tests fondamentaux pour vérifier le progrès authentiquede l’homme en tout régime, dans toute société, système ou milieu. » Enfin, au n°21, « A notre époque, on estime parfois de manière erronée que la liberté est à elle-même sa propre fin, que tout homme est libre quand il s’en sert comme il veut, et qu’il est nécessaire de tendre vers ce but dans la vie des individus comme dans la vie des sociétés. La liberté, au contraire, est un grand don seulement quand nous savons en user pour tout ce qui est vraiment bien. Le Christ nous enseigne que le meilleur usage de la liberté est la charité, qui se caractérise dans le don et le service. C’est par une telle « liberté que le Christ nous a rendu libres » (Gal 5,1 et 8 ) et qu’Il nous libère toujours… La pleine vérité sur la liberté humaine est inscrite en profondeur dans le mystère de la Rédemption. » On comprend mieux certainement actuellement ce combat de Jean-Paul II pour la liberté religieuse : « Redemptor Hominis » est sa première encyclique, écrite quelques mois après son élection au siège de Pierre ; il a été confronté en Pologne à deux dictatures, dont l’obsession était de déraciner la foi chrétienne. Dans DOMINUM et VIVIFICANTEM (18-05-1986) Au n° 60 : « Lorsque sous l’influence du Paraclet, les hommes découvrent cette dimension divine de leur être et de leur vie, comme personnes ou comme communautés, ils sont en mesure de se libérer des divers déterminismes qui résultent principalement des fondements matérialistes de la pensée, de la praxis et de ses méthodes. A notre époque, ces éléments ont réussi à pénétrer jusqu’au cœur de l’homme, dans le sanctuaire de la conscience où sans cesse l’Esprit Saint fait entrer la lumière et la force de la nouvelle vie selon la « liberté des enfants de Dieu ». La maturité de l’homme dans cette vie est entravée par les conditionnements et par les pressions qu’exercent sur lui les structures et les mécanismes dominants dans les divers secteurs de la société. On peut dire que dans bien des cas, les facteurs sociaux, loin de favoriser le développement et l’expansion de l’esprit humain finissent par l’arracher à la vérité authentique de son être et de sa vie…et par le soumettre au « Prince de ce monde ». …Seul le grand Jubilé de l’an 2000 contient un message de libération et permet aux personnes de se libérer de déterminismes anciens et nouveaux, en agissant dans la plénitude de la vraie liberté de l’homme ainsi découverte. En effet, comme l’écrit Saint Paul, « là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Co 6,17). Cette révélation de la liberté et donc de la véritable dignité de l’homme acquiert une particulière éloquence pour les chrétiens et pour l’Eglise persécutés, soit dans les temps anciens, soit actuellement, car les témoins de la Vérité deviennent alors une preuve vivante de l’action de l’Esprit de Vérité… Ainsi, ils affirment davantage encore la grandeur de l’homme fait à l’image et à la ressemblance de Dieu, grandeur que le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu met en pleine lumière, car, dans « la plénitude du temps », Il est entré dans l’histoire par l’Esprit Saint et Il s’est manifesté homme véritable, Lui qui est premier-né de toute créature, Lui « par qui tout existe et par qui nous sommes » (1 Co 8 ,6) Dans SOLLICITUDO REI SOCIALIS (30-12-1987) Au n° 15 : « Il convient d’ajouter ici que, dans le monde d’aujourd’hui, il existe bien d’autres formes de pauvreté… La négation ou la limitation des droits humains- par exemple le droit à la liberté religieuse, le droit de participer à la construction de la société, la liberté de s’associer, ou de constituer des syndicats, ou de prendre des initiatives en matière économique- n’appauvrissent-elles pas la personne humaine autant sinon plus que la privation des biens matériels ?... En bref, de nos jours le sous-développement n’est pas seulement économique, il est également culturel, politique et tout simplement humain… il faut se demander si la réalité si triste d’aujourd’hui n’est pas le résultat, au moins partiel d’une conception trop étroite, à savoir surtout économique du développement. » Dans REDEMTORIS MISSIO (7-12-1990) Toutes les formes de l’activité missionnaire sont marquées par la conscience que l’on favorise la liberté de l’homme en lui annonçant Jésus-Christ. L’Eglise doit être fidèle au Christ, dont elle est le corps et dont elle poursuit la mission. Il est nécessaire qu’elle suive la même route que le Christ, la route de la pauvreté, de l’obéissance, du service, de l’immolation de soi jusqu’à la mort dont il est sorti victorieux par sa résurrection.( Redemptoris Missio n°39 citant Ad Gentes n°5 et Lumen Gentium n°8 ) L’Eglise doit donc tout faire pour déployer sa mission dans le monde et atteindre tous les peuples, elle en a aussi le droit, qui lui a été donné par Dieu pour la mise en œuvre de son plan. La liberté religieuse, parfois encore limitée ou restreinte est la condition et la garantie de toutes les libertés qui fondent le bien commun des personnes et des peuples. D’autre part l’Eglise s’adresse à l’homme dans l’entier respect de sa liberté : la mission ne restreint la liberté, elle la favorise. L’Eglise propose, elle n’impose rien, elle respecte les personnes et les cultures et elle s’arrête devant l’autel de la conscience. L’erreur consiste en une conception de la liberté humaine qui la soustrait à l’obéissance de la vérité et donc au devoir de respecter les droits des autres hommes.Le sens erroné de la liberté se trouve alors dans un amour de soi qui va jusqu’au mépris de Dieu et du prochain dans un amour qui conduit à l’affirmation illimitée de l’intérêt particulier et ne se laisse arrêter par aucune obligation de justice. Centesimus Annus n° 17 (cf Libertas prestantissimus n°10) Nous arrivons au centre de la vérité évangélique sur la liberté. La personne se réalise par l’exercice de sa liberté dans la vérité, on ne peut comprendre la liberté comme la faculté de faire n’importe quoi : elle signifie le don de soi. De plus, elle veut dire discipline intérieure du don. Dans la notion du don ne figure pas seulement l’initiative libre du sujet, mais aussi la dimension du devoir. Tout cela se réalise dans la « communion des personnes ».RM 39 Dans CENTESIMUS ANNUS (1-05-1991) Jean-Paul II insiste beaucoup sur l’enseignement de Léon XIII et en particulier sur le devoir des états de respecter la liberté religieuse : « Il convient d’évoquer en particulier l’encyclique Libertas praestentissimum dans laquelle était rappelé le lien constitutif de la liberté humaine avec la vérité, lien si fort qu’une liberté qui refuserait de se lier à la vérité tomberait dans l’arbitraire et finirait par se soumettre elle-même aux passions les plus dégradantes et par s’autodétruire. D’où viennent, en effet, tous les maux que veut combattre Rerum novarum… » et plus loin « A ces droits, Léon XIII en ajoute un autre, toujours à propos de la question ouvrière, que je désire rappeler étant donné son importance : le droit d’accomplir librement ses devoirs religieux… Il affirme la nécessité du repos dominical, afin de rappeler à l’homme la pensée des biens célestes et du culte que l’on doit à la majesté divine. De ce droit, qui s’enracine dans un commandement fondamental, personne ne peut priver l’homme « il n’est permis à personne de violer impunément cette dignité de l’homme que Dieu lui-même traite avec un si grand respect »… et plus loin dans le n°9 toujours « On ne se tromperait pas en voyant en germe, dans cette affirmation claire, le principe du droit à la liberté religieuse, qui est devenu depuis lors l’objet de nombreuses Déclarations et Conventions internationales solennelles, sans oublier les déclarations Conciliaires… » ( n° 9 ) Plus loin au n° 17 : « Quand on lit l’encyclique ( Rerum novarum. ) en la reliant à tout le riche enseignement de Léon XIII, on voit qu’au fond, elle montre les conséquences d’une erreur de très grande portée sur le terrain économique et social. L’erreur- comme on l’a dit- consiste en une conception de la liberté humaine qui la soustrait à l’obéissance à la vérité et aussi au devoir de respecter les droits des autres hommes. Le sens de la liberté se trouve alors dans un amour de soi qui va jusqu’au mépris de Dieu et du prochain, dans un amour qui conduit à l’affirmation illimitée de l’intérêt particulier et ne se laisse arrêter par aucune obligation de justice. » ( cf. Léon XIII, Libertas praestantissimus n° 10 ) Au n° 37 : « A l’origine de la destruction insensée du milieu naturel ( là, le Pape parle de l’écologie ) , il y a une erreur anthropologique, malheureusement répandue à notre époque. L’homme, qui découvre sa capacité de transformer, et en un sens de créer le monde par son travail, oublie que cela s‘accomplit toujours à partir du premier don originel des choses fait par Dieu. Il croit pouvoir disposer arbitrairement de la terre, en la soumettant sans mesure à sa volonté, comme si elle n’avait pas une forme et une destination antérieurs que Dieu lui a données, que l’homme peut développer, mais qu’il ne doit pas trahir. Au lieu de remplir son rôle de collaborateur de Dieu dans l’œuvre de la création, l’homme se substitue à Dieu et, ainsi finit par provoquer la révolte de la nature, plus tyrannisée que gouvernée par lui … En cela, on remarque avant tout la pauvreté et la mesquinerie du regard de l’homme, plus animé par le désir de posséder les choses que de les considérer par rapport à la vérité… » Au n° 39 : « On peut résumer tout cela (tentatives pour détruire la famille ), en réaffirmant une fois encore, que la liberté économique n’est qu’un élément de la liberté humaine. Quand elle se rend autonome, quand l’homme est considéré plus comme un producteur ou un consommateur de biens que comme un sujet qui produit et consomme pour vivre, alors elle perd sa juste relation avec la personne humaine et finit par l’aliéner et l’opprimer. » Au n° 41 : « Il est nécessaire de rapprocher le concept d’aliénation de la vision chrétienne des choses et d’y déceler l’inversion entre les moyens et la fin … en effet, c’est par le libre don de soi que l’homme devient authentiquement lui-même (G.S. 24) et ce don est rendu possible est rendue possible parce que la personne est essentiellement « capable de transcendance »… En tant que personne, il peut se donner à une autre personne ou à d’autres personnes et, finalement à Dieu… l’homme est aliéné quand il refuse de se transcender et de vivre l’expérience du don de soi et de la formation d’une communauté humaine authentique orientée vers sa fin dernière qui est Dieu… L’homme ne peut pas être libre s’il se préoccupe seulement ou surtout de l’avoir et de la jouissance, au point de ne plus être capable de maîtriser ses instincts et ses passions, ni de les utiliser ou de les maîtriser par l’obéissance à la vérité. L’obéissance à la vérité de Dieu et de l’homme est pour lui la condition première de la liberté et lui permet d’ordonner ses besoins, ses désirs et les moyens de les satisfaire suivant une juste hiérarchie, de telle sorte que la possession des choses soit pour lui un moyen de grandir. » Au n° 44 : « Il faut ajouter que le totalitarisme naît de la négation de la vérité au sens objectif du terme : s’il n’existe pas de vérité transcendante, par l’obéissance à laquelle l’homme acquiert sa pleine identité, dans ces conditions, il n’existe aucun principe sûr pour garantir des rapports justes entre les hommes. Leurs intérêts de classe, de groupe ou de nation les opposent inévitablement les uns avec les autres. Si la vérité transcendante n’est pas reconnue, la force du pouvoir triomphe, et chacun tend à utiliser jusqu’au bout les moyens dont il dispose pour faire prévaloir ses intérêts ou ses opinions sans considération pour les droits des autres. Alors l’homme n’est respecté que dans la mesure où il est possible de l’utiliser aux fins d’une prépondérance égoïste. Il faut donc situer la racine du totalitarisme moderne dans la négation de la dignité transcendante de la personne humaine, image visible du Dieu invisible et, précisément pour cela, de par sa nature même, sujet de droits que personne ne peut violer, ni l’individu, ni le groupe, ni la classe, ni la nation, ni l’Etat. La majorité d’un corps social ne peut pas non plus le faire, en se dressant contre la minorité pour la marginaliser, l’opprimer, l’exploiter, ou pour l’anéantir. » (Léon XIII, Libertas praestantissimus, n°10) Au n° 46 : « Une démocratie sans valeurs se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois, comme le montre l’histoire… et plus loin …L’Eglise n’ignore pas le danger du fanatisme ou du fondamentalisme, de ceux qui au nom d’une idéologie qui se prétend scientifique ou religieuse, estiment pouvoir imposer aux autres leur conception de la vérité et du bien. La vérité chrétienne n’est pas de cette nature. N’étant pas une idéologie, la foi chrétienne ne cherche nullement à enfermer dans le cadre d’un modèle rigide la changeante réalité sociale et politique et elle admet que l’histoire de l’homme se réalise dans l’histoire de manières diverses et imparfaites. Cependant l’Eglise, en réaffirmant constamment la dignité transcendante de la personne, adopte comme règle le respect de sa liberté. Mais la liberté n’est pleinement mise en valeur que par l’accueil de la vérité : en un monde sans vérité, la liberté perd sa consistance et l’homme est soumis à la violence des passions et à des conditionnements apparents ou occultes. Le chrétien vit la liberté (cf. Jean 8,51-52) et il se met au service de la liberté, il propose constamment, en fonction de la nature missionnaire de sa vocation, la vérité qu’il a découverte. Dans le dialogue avec les autres, attentif à tous les éléments de la vérité qu’il découvre dans l’expérience de la vie et la culture des personnes et des nations, il ne renoncera pas à affirmer tout ce que sa foi et un sain exercice de la raison lui ont fait connaître.» Au n° 47 : « Parmi les droits que les peuples doivent reconnaître, il faut rappeler le droit à la vie, dont fait partie intégrante le droit de grandir dans le sein de sa mère dès la conception : puis le droit de vivre dans une famille unie et dans un climat social favorable au développement de sa personnalité ; le droit d’épanouir son intelligence et sa liberté par la recherche et la connaissance de la vérité ; le droit de participer au travail de mis en valeur de la terre et d’en tirer subsistance et celle de ses proches ; le droit de fonder librement une famille, d’accueillir et d’élever des enfants, en exerçant de manière responsable sa sexualité. En un sens, la source et la synthèse de ces droits, c’est la liberté religieuse, entendue comme le droit de vivre dans la vérité de sa foi et conformément à la dignité transcendante de sa personne. »(le gros risque de nos jours est , nous y reviendrons, de désinsérer la liberté de la vérité, et d’en faire une valeur en elle-même, comme certains courants philosophiques actuels tentent de le faire ;Jean-Paul II en avait bien conscience… ) Dans VERITATIS SPLENDOR (6-08-1993) La liberté dans Veritatis Splendor est souvent abordée, puisque Jean Paul II justement veut rappeler la doctrine de l’Eglise sur l’articulation Vérité-Liberté. « La perfection exige la maturité dans le don de soi à quoi est appelée la liberté de l’homme. La liberté et la loi de Dieu ne s’opposent pas, au contraire, elles s’appellent mutuellement » (V.S. n°17) « Le lien qui existe entre la liberté de l’homme et la loi de Dieu se noue dans le cœur de la personne, c’est à dire dans sa conscience morale » (V.S. 54) Une liberté qui prétend être absolue finit par traiter le corps humain comme un donné brut dépourvu de signification et de valeur morale, tant que la liberté ne l’a pas pris dans son projet. V.S. 48 La liberté de conscience du Chrétien n’est jamais « une liberté affranchie » de la vérité, mais elle est toujours seulement « dans la vérité »; et d’autre part, le magistère ne fournit pas à la conscience des vérités qui lui seraient étrangères, mais il montre au contraire les vérités qu’elle devrait posséder en les déployant à partir de l’acte premier de la foi. V.S. n°64 Dans les paroles de Saint Paul, nous trouvons une semblable exaltation de la liberté humaine. « Vous, mes frères, vous avez été appelés à la liberté » Ga 5.13. Mais l’apôtre ajoute immédiatement un sérieux avertissement « seulement, que cette liberté ne donne pas prétexte à satisfaire la chair » on entend ici l’écho de ce qu’il avait dit plus haut « c’est pour que nous soyons vraiment libres que le Christ nous a libérés. Donc, tenez bon et ne vous remettez pas sous le joug de l’esclavage » Ga 5.1 L’apôtre Paul nous invite à la vigilance, la liberté est soumise à l’esclavage. V.S. 66 Saint Grégoire de Nysse :« La naissance du Saint Esprit est le résultat d’un choix libre, et nous sommes ainsi en un sens nos propres parents » V.S. 71. « Seule la liberté qui se soumet à la vérité conduit la personne à son vrai bien. Le bien de la personne est d’être dans la vérité et de faire la vérité ». Ce lien entre vérité-bien-liberté a été perdu en grande partie par la culture contemporaine, aussi amener l’homme à le redécouvrir est aujourd’hui une des exigences propres à la mission de l’Eglise pour le salut du Monde. La force salvifique du vrai est contestée et l’on confie à la seule liberté déracinée de toute objectivité la tâche de décider de manière autonome de ce qui est bien et de ce qui est mal. Ce relativisme devient dans le domaine théologique, un manque de confiance dans la sagesse de Dieu, qui guide l’homme par la loi morale. Jean Paul II – Discours à un congrès de Théologie Morale 10-3-1996, cité en V.S. 84 La réflexion relationnelle et l’espérance quotidienne montrent la faiblesse qui affecte la liberté de l’homme. C’est une liberté véritable mais finie. Elle n’a pas sa source absolue et inconditionnée en elle-même, mais dans l’existence dans laquelle elle se situe, et qui pour elle constitue à la fois des limites et des possibilités ; c’est la liberté d’une créature, c’est un Don qu’il faut accueillir comme un germe et qu’il faut faire mûrir de façon responsable. V.S. 86En Jésus-Christ, l’attachement à la vérité et l’adoration de Dieu se présentent comme les racines les plus intimes de la liberté. En outre, Jésus révèle par sa vie même et non seulement par ses paroles que la liberté s’accomplit dans l’amour c’est à dire le don de soi. Lui qui a dit « Nul n’a plus grand amour que celui de donner sa vie pour ses amis » marche librement vers sa passion. V.S. 87 Saint Augustin a dit :« Dans la maison du Seigneur, l’esclavage est libre. L’esclavage est libre, lorsque ce n’est pas la contrainte mais la charité qui sert, que la charité te rende esclave puisque la vérité t’a rendu libre. Tu es en même temps esclave et homme libre, esclave car tu l’es devenu, homme libre car tu es aimé de Dieu, ton créateur ; bien plus, tu es libre, car tu aimes ton créateur. Ne cherche pas à être libéré en t’éloignant de la maison de ton libérateur » V.S. 87Le corps crucifié de Jésus est la pleine révélation du lien indissoluble entre la liberté et la vérité. De même sa Résurrection est la suprême exaltation de la fécondité et de la force salvifique d’une liberté vécue dans la vérité. V.S. 87 (fin) La fermeté de l’Eglise n’a rien d’humiliant. Elle ne fait que servir la vraie liberté de l’homme, condition et moyen pour que la liberté existe. V.S. 96 V.S. 103 L’espace spirituel de l’espérance est toujours ouvert pour l’homme avec l’aide de la grâce divine et avec la coopération de la liberté humaine. « Mais quelles sont les possibilités concrètes de l’homme ? Et de quel homme parle-t-on ? De l’homme dominé par la concupiscence ou bien de l’homme racheté par le Christ ? Car c’est de cela qu’il s’agit : de la réalité de la Rédemption par le Christ. Le Christ nous a rachetés ! Cela signifie : il nous a donné la possibilité de réaliser l’entière vérité de notre être. Il a libéré notre liberté de la domination de la concupiscence.Plus le Chrétien obéit avec l’aide de la grâce à la Loi Nouvelle de l’Esprit-Saint ,plus il grandit dans la liberté à laquelle il est appelé en servant la vérité, la charité et la justice. V.S. 107 Dans « LA LETTRE AUX FAMILLES » ( Gratississimus Sane, 2-02-1994) Le dessein de l’utilitarisme fondé sur une liberté orientée dans un sens individualiste, c’est à dire, une liberté sans responsabilité, constitue l’antithèse de l’amour, même si l’on y voit l’expression de la civilisation humaine dans son ensemble ; quand cette notion de liberté est acceptée dans la société, faisant aisément cause commune avec les formes les plus diverses de la faiblesse humaine, elle se révèle vite comme un menace systématique et permanente pour la famille. On pourrait mentionner à ce propos, de nombreuses conséquences néfastes, repérables statistiquement, même si beaucoup d’entre elles demeurent cachées dans les cœurs des hommes et des femmes comme des blessures douloureuses qui saignent. L. aux F. n°14 Dans EVANGELIUM VITAE ( 25-08-1995 ) Dans Evangelium Vitae, Jean Paul II souligne à plusieurs reprises ce lien indissoluble entre vérité et liberté Au n°19 : « On ne peut nier que cette culture de mort dans son ensemble révèle une conception de la liberté totalement individualiste qui finit par être la liberté des plus forts s’exerçant envers les plus faibles près de succomber. » Et toujours au n°19 :« … et c’est parce qu’Il veut confier ainsi l’homme à l’homme que Dieu donne à tout homme la liberté qui comporte une dimension relationnelle essentielle. C’est un grand don du créateur car la liberté est mise au service de la personne et son accomplissement par le don d’elle-même et l’accueil de l’autre : au contraire, sa dimension individualiste est absolutisée, elle est vidée de son sens premier, sa vocation et sa dignité même sont démenties. Il est un autre aspect encore plus profond à souligner : la liberté se renie elle-même, elle se détruit, et se prépare à l’élimination de l’autre quand elle ne reconnaît plus son lien constitutif avec la vérité. Chaque fois que la liberté, voulant s’émanciper de toute tradition, et de toute autorité se ferme même aux évidences premières d’une vérité objective et commune fondement de la vie personnelle et sociale, la personne finit par prendre pour unique et indiscutable critère de ses propres choix non plus la vérité sur le bien et le mal, mais seulement son opinion subjective et changeante, ou même ses intérêts égoïstes et ses caprices. (EV 19 fin)Quand on recherche les racines les profondes du combat entre « la culture de la vie » et « la culture de la mort », on ne peut s’arrêter à la conception pervertie de la liberté que l’on vient d’évoquer.Il faut arriver au cœur du drame vécu par l’homme contemporain, l’éclipse du sens de Dieu et du sens de l’homme. (EV 21) L’éclipse du sens de Dieu et de l’homme conduit inévitablement au matérialisme pratique qui fait se répandre l’individualisme, l’utilitarisme et l’hédonisme. (EV 23). (C’est la phrase-clé de l’encyclique : le consumérisme actuel tend à faire perdre le sens de Dieu.) L’auteur de Siracide rattache la ressemblance de l’homme avec Dieu, non seulement leur domination sur le monde mais aussi les facultés spirituelles les plus caractéristiques de l’homme telles que la raison, la capacité de discerner le bien du mal, la volonté libre. (EV 34) La capacité d’accéder à la vérité et la liberté sont des prérogatives de l’homme du fait qu’il est crée à l’image de son créateur, le Dieu vrai et juste (EV 34) C’est la proclamation du rapport extraordinaire de Jésus avec chaque homme qui permet de reconnaître en tout visage humain, le visage du Christ, c’est la manifestation du « don total de soi » comme devoir et comme fin de la réalisation plénière de la liberté. (EV 81) Pour la formation de la conscience, la redécouverte du lien constitutif qui unit la liberté et la vérité n’est pas moins déterminante. Comme je l’ai dit bien des fois, séparer radicalement la liberté de la vérité objective empêche d’établir les droits de la personne sur une base rationnelle solide et cela ouvre dans la société la voie au risque de l’arbitraire ingouvernable des individus ou au totalitarisme mortifère des pouvoirs publics (Centesimus Annus, n°17) Il est essentiel ensuite que l’on reconnaisse l’évidence originelle de sa condition de créature qui reçoit de Dieu l’être et la vie. C’est seulement en acceptant sa dépendance première dans l’être que l’homme peut réaliser la plénitude de sa vie et sa liberté, et en même temps respecter intégralement la vie et la liberté de toute autre personne.… Il n’y a pas de vie en plénitude sinon dans la liberté. (EV 96) La liberté religieuse est la condition de toute autre liberté, après ; l’O.N.U. l’a bien compris lorsque en 1948, elle l’a placée dans les droits essentiels des peuples avec le droit à la vie. La liberté religieuse n’est pas le patrimoine exclusif des croyants ; il s’adresse à tout homme ; c’est un élément incontournable d’un état de droit : on ne peut le nier sans porter atteinte à tous les autres droits puisque elle en est la synthèse et le sommet. Les Accords d’Helsinki en 1975 en ont fait un droit incontournable ; le Saint Siège a été ferme pour défendre ce droit, et cette fermeté n’a sans doute pas été étrangère à la chute du système soviétique. Ce travail pourrait être dédié à Chivaz Batti, ministre des affaires interreligieuses au Pakistan et assassiné pour sa foi ; et aussi à Azia Bibi, mère de famille du même pays, chrétienne et condamnée à mort pour avoir « blasphémé ». Quatre vingt pour cent des cas d’intolérance religieuse concerne des chrétiens ; mais ils ne sont pas les seuls à vivre cette intolérance : par exemple, des musulmans sont attaqués par des bouddhistes en Birmanie ; des Bouddhistes Tibétains le sont en Chine… Je profite de cette occasion pour signaler la persécution des populations Montagnardes dans la péninsule indochinoise ; Radio Vatican parlait même de génocide. La liberté religieuse est comme le « papier tournesol » qui permet de vérifier le respect de tous les autres droits » (Jean Paul II, è la Conférence de l’O.S.C.E. le 10 Octobre 2003) Au n° 18 de la Déclaration des Droits de l’Homme de l’O.N.U. en 1948, il est déclaré : « Toute personne a droit à la liberté de pensée de conscience et de religion : ce droit implique le droit de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, seule ou en commun,tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. » Après la première session de Vatican II, Jean XXIII publiait « Pacem in Terris » ; au n° 12, il souligne l’importance d’honorer Dieu : « Chacun a le droit d’honorer Dieu suivant la juste règle de la conscience et de professer sa religion dans la vie privée et publique. Lactance le déclare avec clarté : « Nous recevons l’existence pour rendre à Dieu qui nous l’accorde, le juste hommage qui lui revient, pour le connaître lui seul et ne suivre que Lui. Cette obligation de piété filiale nous enchaîne à Dieu et nous relie à Lui, d’où son nom de religion » (Divini Institutionis). A ce sujet, notre prédécesseur d’immortelle mémoire Léon XIII, affirmait : « Cette liberté véritable, réellement digne des enfants de Dieu, qui sauvegarde la noblesse de la personne humaine, prévaut contre toute violence et toute injuste tentative ; l’Eglise l’a toujours demandée, elle n’a rien eu de plus cher. Constamment, les Apôtres ont revendiqué cette liberté-là, les apologistes l’ont justifiée dans leurs écrits, les martyrs en foule l’ont consacré de leur sang. » (Libertas Praestantissimus) Le grand Document du Concile Vatican II sur liberté religieuse est la Constitution « Dignitatis Humanae » ; on en trouve aussi des éléments dans la Constitution « Nostra Aetate » (pour les religions non-chrétiennes). Au n° 1 de la Constitution « Dignitatis Humanae » : La dignité de la personne humaine est, en notre temps, l’objet d’une conscience toujours plus vive (Jean XXIII, Pacem in Terris du 11 avril 1963 ; Pie XII, radiomessage du 24 décembre 1944) … tous les hommes sont tenus de chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Eglise ; et quand ils l’ont connue, de l’embrasser et de lui être fidèles. De même encore, le Concile déclare que ce double devoir concerne la conscience de l’homme et l’oblige, et que la vérité ne s’impose que par la force de la vérité elle-même qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de puissance. Or, puisque la liberté religieuse que revendique l’homme dans l’accomplissement de son devoir de rendre un culte à Dieu concerne son immunité de toute contrainte dans la société civile, elle ne porte aucun préjudice à la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral de l’homme et des associations à l’égard de la vraie religion et de l’unique Eglise du Christ. Au n° 2 : « Le Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être soustraits à toute contrainte de la part, tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit obligé d’agir contre sa conscience, ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres. Il déclare, en outre, que le droit à la liberté religieuse a son fondement dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la parole de Dieu et la raison elle-même (Jean XXIII, Pacem in Terris ; Pie XII, Radiomessage du 24 décembre 1942 ; Pie XI, Mit brennender Sorge, 14 mars 1937 ; Léon XIII, Libertas praestantissimus) Ce droit de la personne humaine à la liberté religieuse dans l’ordre juridique de la société doit être reconnu de telle manière qu’il constitue un droit civil. En vertu de leur dignité, tous les hommes, parce qu’ils sont des personnes, c'est-à-dire doués de raison et de volonté libre, et , par suite, pourvus d’une responsabilité personnelle, sont pressés, par leur nature même, et tenus, par obligation morale de chercher la vérité celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler toute leur vie selon les exigences de cette vérité. Or, à cette obligation, les hommes ne peuvent satisfaire, d’une manière conforme à leur propre nature, que s’ils jouissent, outre de la liberté psychologique, de l’immunité à l’égard de toute contrainte extérieure. Ce n’est donc pas sur une disposition subjective de la personne, mais sur sa nature même qu’est fondé le droit à la liberté religieuse. Au n° 3 : « Tout ceci est plus clairement manifeste encore si l’on considère que la norme suprême de la vie humaine est la loi divine elle-même, éternelle, objective et universelle, par laquelle Dieu, dans son dessein de sagesse et d’amour, règle, dirige et gouverne le monde entier, ainsi que les voies de la communauté humaine … C’est pourquoi chacun a le devoir, et par conséquent le droit, de chercher la vérité en matière religieuse, afin de se former prudemment un jugement de conscience droit et vrai, en employant les moyens appropriés. Mais la vérité doit être cherchée selon la manière propre à la personne humaine et à sa nature sociale, à savoir par une libre recherche, par le moyen de l’enseignement ou de l’éducation, de l’échange et du dialogue par lesquels les uns exposent aux autres la vérité qu’ils ont trouvé ou pensent avoir trouvée, afin de s’aider mutuellement dans la quête de la vérité ; la vérité, une fois connue, c’est par un assentiment personnel qu’il faut y adhérer fermement. Mais c’est par sa conscience que l’homme perçoit les injections de la foi divine ; c’est elle qu’il est tenu de suivre fidèlement en toutes ses activités, pour parvenir à sa fin qui est Dieu. Il ne doit donc pas être contraint d’agir contre sa conscience. Mais il ne doit pas être empêché non plus d’agir selon sa conscience, surtout en matière religieuse. De par son caractère même, en effet, l’exercice de la religion consiste avant tout en des actes intérieurs volontaires et libres par lesquels l’homme s’ordonne directement à Dieu : de tels actes ne peuvent être ni imposés ni interdits par aucun pouvoir politique purement humain (Jean XXIII, Pacem in Terris ; Paul VI, Radiomessage du 22 décembre 1964). Mais la nature sociale de l’homme requiert elle-même qu’il exprime extérieurement ces actes internes de religion, qu’en matière religieuse il ait des échanges avec d’autres, qu’il exprime sa religion sous une forme communautaire. C’est donc faire injure à la personne humaine et à l’ordre même établi par Dieu pour les êtres humains que de refuser à l’homme le libre exercice de la religion sur le plan de la société, dès lors que l’ordre public juste est sauvegardé. En outre, par nature, les actes religieux par lesquels, en public ou en privé, l’homme s’ordonne à Dieu en vertu d’une décision personnelle, transcendent l’ordre terrestre et temporel des choses. Le pouvoir civil, dont la fin propre est de pourvoir au bien commun temporel, doit donc, certes, reconnaître et favoriser la vie religieuse des citoyens, mais il faut dire qu’il dépasse ses limites s’il s’arroge le droit de diriger ou d’empêcher les actes religieux. Au n° 4 : « La liberté ou immunité de toute contrainte en matière religieuse qui revient aux individus doit aussi leur être reconnue lorsqu’ils agissent ensemble. Des groupes religieux, en effet, sont requis par la nature sociale tant de l’homme que de la religion elle-même. Dès lors, donc, que les justes exigences de l’ordre public ne sont pas violées, ces groupes sont en droit de jouir de cette immunité afin de pouvoir se régir selon leur propres normes, honorer d’un culte public la divinité suprême, aider leurs membres dans la pratique de leur vie religieuse et les sustenter par un enseignement, promouvoir enfin les institutions au sein desquelles leurs membres coopèrent à orienter leur vie propre selon leurs principes religieux … Les groupes religieux ont aussi le droit de ne pas être empêchés d’enseigner et de manifester leur foi publiquement, de vive voix et par écrit … La liberté religieuse demande, en outre, que les groupes religieux ne soient pas empêchés de manifester librement l’efficacité singulière de leur doctrine pour organiser la société et vivifier toute l’activité humaine. La nature sociale de l’homme, enfin, ainsi que le caractère même de la religion, fonde le droit qu’ont les hommes, mus par leur sentiment religieux, de tenir des réunions ou de constituer des associations éducatives, culturelles, caritatives et sociales. Au n° 5 : « Chaque famille, en tant que société jouissant d’un droit propre et primordial a le droit d’organiser librement sa vie religieuse sous la direction des parents. A ceux-ci revient le droit selon leur propre conviction religieuse, de la formation à donner à leurs enfants … En outre, les droits des parents se trouvent violés lorsque les enfants se trouvent contraints de suivre des cours ne répondant pas à la conviction religieuse des parents ou lorsque est imposée une forme d’éducation d’où toute éducation religieuse est exclue. Au n° 6 : « Le bien commun de la société – ensemble des conditions de vie sociale permettant à l’homme de parvenir plus pleinement et plus aisément à sa propre perfection – consistant au premier chef dans la sauvegarde des droits et des devoirs de la personne humaine (Jean XXIII, Mater et Magistra, 15 mai 1962 ; Pacem in Terris, 11 avril 1963) le droit de veiller au droit à la liberté religieuse incombe tant aux citoyens qu’aux groupes sociaux, aux pouvoirs civils, à l’Eglise et aux autres communautés religieuses, de la manière propre à chacun, en fonction de ses devoirs envers le bien commun. C’est pour tout pouvoir civil un devoir essentiel que de protéger et promouvoir les droits inviolables de l’homme. (Jean XXIII, Pacem in Terris ; Pie XII, radiomessage du 1° janvier 1941) Au n° 7: « C’est dans la société humaine que s’exprime le droit ) la liberté en matière religieuse ; aussi, son usage est soumis à certaines règles qui le tempèrent. Dans l’usage de toute liberté, doit être observé le principe moral de la responsabilité personnelle ou sociale : la loi morale, oblige tout homme et groupe socialà tenir compte, dans l’exercice de leurs droits, des droits d’autrui, de leur devoir envers les autres et du bien commun de tous. A l’égard de tous, il faut agir avec justice et humanité. Au n° 8 : « De nos jours, l’homme est exposé à toutes sortes de pressions et court le danger d’être frustré de son libre jugement personnel. Mais nombreux sont, d’autre part ceux qui, sous prétexte de liberté, rejettent toute sujétion et font peu de cas de l’obéissance requise. C’est pourquoi le Concile fait appel à ceux qui ont mission d’éduquer les autres, pour les exhorter à former des hommes qui, dans la soumission à l’ordre moral, sachent obéir à l’autorité légitime et aient à cœur la liberté authentique des hommes qui, à la lumière de la vérité, portent sur les choses un jugement personnel, agissent en esprit de responsabilité et aspirent à tout ce qui est vrai et juste, en collaborant volontiers avec d’autres. C’est donc un des fruits et un des buts de la liberté religieuse que d’aider les hommes que d’agir avec une plus grande responsabilité dans l’accomplissement de leur devoir au cœur de la vie sociale. Du n°9 au n° 14, « Dignitatis Humanae » étudie la Liberté Religieuse à la lumière de la Révélation, montrant que le Christ, puis son Eglise ont apporté la liberté aux hommes. En conclusion, au n° 15, le document exprime : « Il est manifeste qu’aujourd’hui, l’homme souhaite pouvoir librement professer sa religion, en privé ou en public, bien plus que la liberté religieuse est maintenant proclamée dans la plupart des Constitutions comme un droit civil et qu’elle est solennellement reconnue par des documents internationaux. (Jean XXIII, Pacem in Terris) Mais il est des régimes, où bien que la liberté de culte religieux soit reconnue dans la Constitution, les Pouvoirs Publics eux-mêmes s’efforcent de détourner les citoyens de professer la religion, et de rendre la vie des communautés religieuses difficile et précaire. Saluant avec joie les signes favorables qu’offre notre temps, mais dénonçant avec tristesse ces faits déplorables, le Saint Concile demande aux catholiques, mais prie aussi instamment tous les hommes d’examiner avec le plus grand soin à quel point la liberté religieuse est nécessaire, surtout dans la condition présente de la famille humaine. Il est, en effet, manifeste que les peuples sont aujourd’hui portés à s’unir toujours davantage ; que des relations plus étroites s’établissent entre populations de culture et de religion différentes ; que s’accroît la conscience prise par chacun de sa responsabilité personnelle. Pour que des relations pacifiques et la concorde s’instaure et s’affermissent dans l’humanité, il est donc nécessaire qu’en tous lieux, la liberté religieuse soit sanctionnée par une autorité juridique efficace et que soient respectés les devoirs et les droits suprêmes qu’ont les hommes de mener leur vie religieuse dans la société. Un autre document de Vatican II concernant la liberté religieuse est « Nostra Aetate », qui expose la situation des religions non-chrétiennes dans des pays autrefois majoritairement chrétiens ; ce phénomène n’a fait que s’accentuer dans les décades qui ont suivi Vatican II, tellement qu’on peut parler de « culture post-chrétienne » et de la nécessité d’une « nouvelle évangélisation ». Au n° 1 : « Les hommes attendent des différentes religions la réponse aux énigmes cachées de la condition humaine qui, hier comme aujourd’hui troublent profondément le cœur humain : Qu’est-ce que l’homme ? Quel est le sens et le but de sa vie ? Qu’est-ce le bien et qu’est-ce que le péché ? Quels sont l’origine et le but de la souffrance ? Quelle est la voie pour parvenir au vrai bonheur ? Qu’est-ce que la mort, le jugement et la rétribution après la mort ? Qu’est-ce enfin que le mystère dernier et ineffable qui entoure notre existence, d’où nous tenons notre origine et vers lequel nous tendons ? Au n° 2 : « L’Eglise Catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. Elle considère avec un respect sincère ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoique elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. Toutefois, elle annonce, et elle est tenue d’annoncer sans cesse, le Christ qui est « la voie , la vérité et la vie » (Jean 14,6) dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié tous les hommes. Elle exhorte donc ses fils pour que, avec prudence et charité, par le dialogue et par la collaboration avec ceux qui suivent d’autres religions, et tout en témoignant de la foi et de la vie chrétienne, ils reconnaissent ; préservent et feront progresser les valeurs spirituelles, morales et socio-culturelles qui se trouvent en eux. Au n° 5 : « Nous ne pouvons pas invoquer Dieu, Père de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains des hommes créés à l’image de Dieu. La relation de l’homme à Dieu le Père et la relation de l’homme à se frères humains spnt tellement liiés que Saint Jean a pu écrire : « Qui n’aime pas ne connaît pas Dieu » (1 Jn 4 , 8). Par là est sapé le fondement de toute théorie ou de toute politique qui introduit entre homme et homme, entre peuple et peuple, une discrimination en ce qui concerne la dignité humaine et les droits qui en découlent. L’Eglise réprouve donc, en tant que contraire à l’esprit du Christ, toute discrimination opérée envers des hommes en fonction de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de leur religion. En conséquent, le Concile, suivant les traces des Saints Apôtres Pierre et Paul, adjure aisément les fidèles du Christ « d’avoir au milieu des nations une belle conduite » (1 Pierre 2,12) et de vivre en paix avec tous les hommes, de manière à être vraiment des fils de leur Père qui est dans les cieux. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique va reprendre beaucoup de ces éléments dans son enseignement; entre autres, du numéro 2104 au n° 2109 : Au n° 2104 : « Tous les hommes sont tenus de chercher la vérité surtout en ce qui concerne Dieu et son Eglise ; et quand ils l’ont connue de l’embrasser et de lui être fidèles. » (Dignitatis Humanae n° 1). Ce devoir découle de la « nature même des hommes » (au n°2). Il ne contredit pas un « respect sincère » pour les diverses religions qui apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes » (Nostra Aetate n° 2), ni l’exigence de la charité qui presse les chrétiens « d’agir avec amour, prudence, patience envers ceux qui se trouvent dans l’erreur ou dans l’ignorance de la foi » (Dignitatis Humanae n° 14). Au n° 2105 : « Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme individuellement et socialement. C’est « la Doctrine Catholique traditionnelle sur le devoir moral des hommes et des sociétés à l’égard de la vraie religion et de l’unique Eglise du Christ » (Dignitatis Humanae n° 1). En évangélisant sans cesse les hommes, l’Eglise travaille à ce qu’ils puissent « pénétrer d’esprit chrétien les mentalités et les mœurs, les lois et les structures des communautés où ils vivent » (Apostolicam Actuositatem n° 13). Le devoir social des chrétiens est de respecter et d’éveiller en chaque homme l’amour du vrai et du bien. Il leur demande de faire connaître le culte de l’unique vraie religion qui subsiste dans l’Eglise Catholique et Apostolique. (Dignitatis Humanae n° 1). Les Chrétiens sont appelés à être la lumière du monde (Apostolicam Actuositatem n° 13). L’Eglise manifeste ainsi la royauté du Christ sur toute la Création et en particulier sur les sociétés humaines. (Léon XIII, encyclique Immortale Deï ; Pie XI, encyclique Quas Primas) Au n° 2106 : « Qu’en matière de liberté religieuse, nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience, ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience en privé comme en public, seul ou associé à d’autres. » (Dignitatis Humanae n° 2). Ce droit est fondé sur la nature même de la personne humaine dont la dignité la fait adhérer librement à la vérité divine qui transcende l’ordre temporel. C’est pourquoi, « il persiste même en ceux qui ne satisfont pas à l’obligation de chercher la vérité et d’y adhérer. » (D.H. n° 2) Au n° 2108 : « Le droit à la liberté religieuse n’est ni la permission morale d’adhérer à l’erreur, ni un droit supposé à l’erreur (Léon XIII, Libertas Praestantissimus et Pie XII, discours du 6 Décembre 1955), mais un droit naturel de la personne humaine à la liberté civile, c'est-à-dire l’immunité de contraintes extérieures, dans de justes limites, en matière religieuse, de la part du pouvoir politique. Ce droit naturel doit être reconnu dans l’ordre juridique de la société de telle manière qu’il constitue un droit civil. » (Dignitatis Humanae n° 2) La liberté religieuse s’enracine dans la dignité et donc dans la nature même de chaque homme, de la personne humaine. Elle est insuppressible, inaliénable et inviolable. Dans sa première encyclique, Jean Paul II, ( Redemptor Hominis, de mars 1979 ) qu’il a promulgué quelques mois après son élection, il s’oppose aux totalitarismes ; il vient de Pologne et après que celle-ci ait beaucoup souffert de l’oppression nazie, cette dernière n’est pas encore libérée du joug marxiste. Au n° 17, il parle de la liberté religieuse, que notre monde de l’Ouest aurait tendance à minimiser « Parmi ces droits, on compte à juste titre le droit à la liberté religieuse, à côté du droit à la liberté de conscience. Le Concile Vatican II a estimé particulièrement important l’élaboration d’une déclaration plus étendue sur ce thème. C’est le document qui s’intitule Dignitatis Humanae : on y trouve exprimée non seulement la conception théologique du problème, mais encore la conception qui part du droit naturel, c'est-à-dire d’un point de vue « purement humain », sur la base des prémisses dictées par l’expérience même des hommes … Certes la limitation de la liberté religieuse des personnes et des communautés n’est pas seulement une douloureuse expérience pour elles, mais elle atteint avant tout la dignité même de l’homme … la limitation de liberté religieuse et sa violation sont en contradiction flagrante avec la dignité de l’homme et avec ses droits objectifs.… Cette situation (de l’homme contemporain) est grevée de préjugés et d’injustices de tout genre. Si nous nous abstenons d’entrer dans les détails en ce domaine … c’est avant tout parce que, unis avec ceux qui souffrent de la discrimination et de la persécution au nom de Dieu, nous sommes guidés par la foi en la force Rédemptrice de la Croix du Christ. Cependant, en vertu de ma charge, je désire, au nom de tous les croyants du monde entier, m’adresser à ceux dont dépend de quelque manière l’organisation de la vie sociale et politique, en leur demandant instamment de respecter les droits de la religion et de l’activité de l’Eglise. On ne demande aucun privilège, mais le respect d’un droit élémentaire. Le respect de ce droit est l’un des tests fondamentaux pour vérifier le progrès authentique de l’homme en tout régime, dans toute société, système ou milieu. Le professeur Dalla Torre : « La liberté religieuse est la première et la mère de toute liberté, car elle les contient : liberté de pensée, de réunion, d’association … là où elle est niée, les autres le sont aussi. Au niveau mondial, la liberté religieuse est sans doute l’une des plus niées… la liberté religieuse est souvent affirmée verbalement,mais peu protégée et défendue dans la réalité ; reléguer la religion dans la sphère privée est également une forme d’oppression, car les citoyens qui professent une foi religieuse ou les institutions religieuses qui représentent ces citoyens ne sont pas reconnus comme tels et ne peuvent donc pas faire partie du débat public… Dans le monde Occidental, on assiste à une diminution continue du droit à liberté religieuse… Alors que dans le passé, il existait un athéisme contre la religion, on a tendance aujourd’hui en Occident, à avoir de la religion une idée superstitieuse, mythique ou liée à des contes d’enfants … Le fait d’avoir cité le respect de la liberté religieuse dans une Charte Constitutionnelle ne suffit pas si l’on ne met pas en place des instruments visant à faire respecter ces droits. La Déclaration des Nations Unies oblige les Etats, mais ne donne pas à la personne lésée la possibilité de recourir à un juge comme c’est le cas, par exemple, dans la Déclaration Européenne des Droits de l’Homme. » Le même Jean Paul II dans « Centesimus Annus », encyclique qu’il a promulguée en 1981, pour le Centenaire de « Rerum Novarum » nous redit que la liberté religieuse n’est pas une liberté au même rang que les autres : « La source et la synthèse de ces droits, c’est la liberté religieuse entendue comme le droit de vivre dans la vérité de sa foi et conformément à la dignité transcendante de la personne » (au n° 47). Le premier droit énoncé dans l’encyclique de Jean Paul II est le droit à la vie, depuis sa conception jusqu’à sa fin naturelle, ainsi donc, l’illicéité de toute forme d’avortement ou d’euthanasie. Le respect de la dignité personnelle exige la reconnaissance de la dimension religieuse de l’homme, qui n’est pas une exigence simplement « confessionnelle », mais bien une exigence qui trouve sa racine indestructible dans la réalité même de l’homme. (Christi fideles Laici, n° 39. La reconnaissance effective du droit à la liberté de conscience et à la liberté religieuse est un des biens les plus élevés et l’un des devoirs les plus graves de chaque peuple qui veuille vraiment assurer le bien de la personne et de la société. (id.) Dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique, au n° 1907, Jean Paul II nous dit : « Le bien commun suppose avant tout le respect de la personne en tant que telle. Les pouvoirs publics sont tenus de respecter les droits fondamentaux et inaliénables de la personne humaine … le bien commun réside dans les conditions d’exercice des libertés naturelles qui sont indispensables à l’épanouissement de la vocation humaine : « Ainsi : droit d’agir selon la droite règle de sa conscience, droit à la sauvegarde de la vie privée et à la juste liberté, y compris en matière religieuse. » Dans le Compendium de la Doctrine Sociale, au n° 50 : L’Eglise se place concrètement au service de Dieu avant tout en annonçant et en communiquant l’Evangile du salut et en constituant de nouvelles communautés chrétiennes. En outre, elle sert le Royaume de Dieu quand elle répand dans le monde des « valeurs évangéliques » qui sont l’expression du Royaume et aident les hommes à accueillir le plan de Dieu. Il est donc vrai que la réalité commencée du Royaume peut se retrouver au-delà des limites de l’Eglise, dans l’humanité entière, dans la mesure où celle-ci vit « les valeurs évangéliques » et s’ouvre à l’action de l’Esprit qui souffle où il veut (cf. Jn 3,8), mais il faut ajouter aussitôt que cette dimension temporelle du Royaume est incomplète si elle ne s’articule pas avec le Règne du Christ, présent dans l’Eglise et destiné à la plénitude eschatologique. Il en découle en particulier que l’Eglise ne se confond pas avec la communauté politique et n’est liée à aucun système politique. (Gaudium et Spes n° 76). La communauté politique et l’Eglise, chacune dans son propre domaine, sont en effet indépendantes et autonomes l’une de l’autre et sont toutes deux, bien qu’à des titres divers, « au service de la vocation personnelle des mêmes hommes » (id.). Il est même possible d’affirmer que la distinction entre religion et politique et le principe de la liberté religieuse constituent une acquisition spécifique du christianisme, d’une grande importance sur le plan historique et culturel. Au n° 553 : « La promotion de la dignité humaine implique avant tout le droit inviolable à la vie … Le respect de la dignité personnelle exige, en outre, la reconnaissance de la dimension religieuse de l’homme, qui n’est pas une exigence seulement « confessionnelle », mais bien une exigence qui trouve sa racine indestructible dans la réalité même de l’homme. La reconnaissance effective du droit à la liberté de conscience et à la liberté religieuse est un des biens les plus elevés et l’un des devoirs les plus graves de chaque peuple qui veuille vraiment assurer le bien de la personne et de la société. Dans le contexte culturel actuel, l’engagement à défendre la famille revêt une urgence particulière. Jean Paul II, le 10 Octobre 2003 aux parlementaires de l’O.S.C.E. de la Conférence déjà mentionnée disait : « Sa défense est la pierre de touche pour vérifier tous les autres droits ». Autant dire que ce n’est pas un droit du même niveau que les autres ! Le Cardinal Tarcisio Bertone, au Colloque tenu à Milan le 19 Octobre 2007, (O.R.l.f. du 6 novembre 2007, n°45) sur « la liberté religieuse » dit : « Le défi sans doute le plus radical consiste dans la négation du fondement même de la liberté religieuse, c'est-à-dire l’ouverture de la personne à la transcendance … La liberté a donc besoin d’un fondement qui lui permette de se développer sans toutefois mettre en danger la dignité humaine et la cohésion sociale. Ce qui confère à la tolérance sa valeur, est le caractère sacré de la conscience humaine. Celle-ci tend toujours au bien et à la vérité. Par rapport à celles-ci, la tolérance représente toujours une valeur secondaire … La dignité de l’homme se juge toujours sur sa capacité de vérité. Rendre absolue la tolérance signifie au contraire se retirer devant cette dignité … Le dialogue interreligieux devra donc privilégier le respect mutuel. La plus grande tolérance consiste donc dans le respect de la vérité ; en se fondant sur ce respect, la liberté religieuse s’ouvre aux exigences de la raison humaine qui est précisément capable de vérité. Une religion « sécularisée » toutefois finit par avoir un « visage » tellement marquée « par les rides » des incohérences humaines qu’il ne réussit plus à faire transparaître le divin ! Comme le dit Benoît XVI : « L’Eglise ne peut ni ne doit prendre part au débat public, néanmoins elle ne peut ni ne doit non plus rester à l’écart dans la lutte pour la justice. » S’opposer à la christianophobie est un impératif, Mgr. Mamberti est intervenu au Meeting de Rimini, en 2008, le vendredi 29 août 2008 ; il a parlé à la suite des attentats contre les chrétiens dans l’Etat de l’Orissa en Inde. … Bien sûr, nous savons tous que les défis contre la liberté religieuse ne se trouvent pas seulement en dehors du « jardin » de « notre maison Occidentale », bien que l’une de ses structures portantes soit précisément la liberté, entendue comme besoin fondamental de la personne. La culture occidentale aujourd’hui risque toutefois d’opposer la liberté à la vérité et à la justice. La liberté, en revanche, a besoin d’un fondement qui lui permette de se développer sans mettre à risque la dignité humaine et la cohésion sociale. Un tel fondement ne peut être que transcendant, parce que seul celui-ci est assez « élevé » pour permettre à la liberté de s’étendre au maximum et, dans le même temps, assez « solide » pour pouvoir l’orienter et la qualifier en toute circonstance. Seul la foi dans l’Absolu transcendant est une garantie contre les faux absolus terrestres. Là où Dieu est considéré comme une grandeur secondaire que l’on peut temporairement ou durablement mettre de côté, au nom de choses plus importantes, alors précisément ces choses considérées plus importantes échouent. La conclusion tragique de toutes les idéologies politiques, même de signes opposés, le démontrent amplement. …Dans les documents de l’Eglise et en particulier dans Vatican II, la liberté religieuse est un droit subjectif insuppressible, inaliénable et inviolable, avec une dimension privée et une autre publique ; une dimension individuelle, une autre collective et enfin une dimension institutionnelle. … Tant dans le cadre des Nations Unies que dans celui de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), le Saint Siège ne se lasse jamais de souligner que le modèle du droit à la liberté religieuse se trouve dans l’égale dignité de toutes les personnes humaines. Par conséquent pour promouvoir cette dignité de manière intégrale, on doit combattre avec efficacité aussi bien ce qu’on appelle la christianophobie que l’islamophobie ou l’antisémitisme. … Comme on le voit, la discrimination et l’intolérance envers les chrétiens représentent des problématiques particulièrement importantes, au niveau humain, politique et social ainsi que religieux. Elles doivent être affrontées avec le même déterminisme que celle du combat contre l’antisémitisme et l’islamophobie, si l’on veut résoudre chacune de ces questions qui restent malheureusement de grande actualité. Concernant l’Eglise Catholique, il suffira de rappeler qu’en 2007, vingt et un missionnaires ont été tués. … Comme l’a rappelé le 7 Janvier 2008, le Pape Benoît XVI au Corps Diplomatique : « Pour être vrai, ce dialogue doit être clair évitant relativisme et syncrétisme, mais animé d’un respect sincère pour les autres animé d’un esprit de conciliation et de fraternité. » (O.R.L.F., n°1 du 8 Janvier 2008). Le dialogue interreligieux ne sert donc pas à « niveler » les différences et, par conséquent, à mettre fin à leur incompatibilité et à leur prétention à la vérité ... mais en aucun cas, cela ne peut avoir lieu en renonçant à la vérité, au contraire, cela n’est possible qu’à travers son approfondissement. En effet, le relativisme n’unit pas. Pas plus que le pur pragmatisme. Le renoncement à la vérité et à la conviction n’élève pas l’homme et ne le rapproche pas non plus des autres ... C’est grâce au Saint Siège que l’acte final de la Conférence d’Helsinki cite expressément la liberté religieuse au nombre des droits fondamentaux … Engelhardt en est arrivé à dénoncer le paradoxe suivant : « Si l’on ne réussit pas à démontrer l’immoralité de certaines lignes de conduite, alors l’assistance médicale apportée par Albert Schweitzer et celle apportée dans les Camps Nazis seront tout autant défendables. » (Manuele di Bioetica) La dignité d l’homme se fonde sur sa capacité de vérité. Absolutiser la tolérance est se retire devant cette dignité. Absolutiser la tolérance, en effet signifie la transformer en valeur, mais cela met nécessairement la vérité au second plan et la relativise. Le renoncement à la vérité, quant à lui, livre l’homme au calcul du plus fort, de l’utile ou de l’immédiat, en privant la personne de sa grandeur. … Si l’on ne veut pas vivre de manière responsable, en effet, on ne peut pas se soustraire à l’obligation de rechercher la vérité sur Dieu, en tant que fin ultime de l’homme. Le droit à la liberté religieuse, par conséquent, présuppose le devoir de rechercher la vérité sur Dieu avec une volonté exempte de coercitions et une raison exempte de préjugés Une saine laïcité comprend la distinction entre religion et politique, entre Eglise et Etat, sans que cela fasse de Dieu une hypothèse privée, ni exclue la communauté Ecclésiale de la vie publique … Cette liberté,en effet, est porteuse de valeurs éthiques capable de féconder de féconder la démocratie et d’engendre la culture… La liberté religieuse aide à l’exercice du Credo religieux de chaque personne. Toutefois, la foi chrétienne offre une liberté plus profonde que la simple liberté religieuse. Ubi fides, ibi libertas disait Saint Ambroise. Et comme une sorte de commentaire, Don Giussani nous a enseigné que la liberté est l’idée forte de l’homme chrétien. Le Christ se révèle comme l’accomplissement de notre liberté. Toutefois, Il ne se dévoile pas avant que nous le cherchions librement. Le Christ se révèle comme l’accomplissement de notre liberté. Benoît XVI, à la messe du Mercredi des Cendres 2008, nous dit: «Ce n’est pas la présence de Dieu qui aliène l’homme, mais son absence. » En 2008 (le 28 juin), dans sa Lettre Encyclique « Caritas in Veritate », il a un chapitre sur « la liberté religieuse » ; ce deviendra un des leitmotiv de son pontificat. « Il y a un autre aspect de la réalité d’aujourd’hui lié de façon très étriote au développement : c’est la négation du droit à la liberté religieuse. Je ne me réfère pas seulement aux luttes et aux conflits qui, dans le monde, ont des motifs religieux, même si parfois les raisons religieuses ne servent qu’à couvrir des raisons d’un autre genre, en l’occurrence la soif de pouvoir et de richesse. Comme mon Prédécesseur Jean Paul II l’avait publiquement dit et déploré à plusieurs reprises et ainsi que je l’ai fait moi-même, de fait aujourd’hui on tue souvent en invoquant le saint nom de Dieu Les violences freinent le développement authentique et empêche la marche des peuples vers un plus grand bien-être socio-économique et spirituel. Cela s’applique au terrorisme fondamentaliste, qui engendre douleur, dévastation et mort, bloque le dialogue entre les nations et détourne d’importantes ressources de leur usage pacifique et civil. Il faut néanmoins ajouter que outre le fanatisme religieux qui, en certains milieux, empêche l’exercice du droit à la liberté religieuse, la promotion programmée de l’indifférence religieuse ou de l’athéisme pratique de la part de nombreux pays s’oppose elle aussi aux exigences du développement des peuples, en leur soustrayant l’accès aux ressources spirituelles et humanitaires. Dieu est le garant du véritable développement de l’homme dans la mesure où l’ayant créé à son image, Il en fonde aussi la dignité transcendante et alimente en lui la soif d’être « plus ». L’homme n’est pas un atome perdu dans un océan de hasard, mais il est une créature de Dieu, à qui Il a voulu donner une âme immortelle et qu’il aime depuis toujours. Si l’homme n’était que le fruit du hasard et de la nécessité, ou bien s’il devait réduire ses aspirations à l’horizon restreint des situations dans lesquelles il vit, si tout n’était qu’histoire et culture et si l’homme n’avait pas une nature destinée à être transcendée dans une vie surnaturelle, on pourrait parler de croissance et d’évolution, mais pas de développement. Quand l’Etat promeut, enseigne ou même impose des formes d’athéisme pratique, il soustrait à ses citoyens la force morale et spirituelle indispensable pour s’engager en faveur du développement humain intégral et il les empêche d’avancer avec un dynamisme renouvelé dans leur engagement pour donner une réponse humaine plus généreuse à l’amour de Dieu. Il arrive aussi que les pays économiquement développés ou émergents exportent vers les pays pauvres, dans le contexte de leurs rapports culturels, commerciaux et politiques cette vision réductrice de la personne et de sa destinée. C’est le dommage que le « surdéveloppement » inflige au développement authentique quand il s »accompagne d’un « sous-développement moral » (Paul VI en Populorum Progressio n°19), au n°19 de Caritas in Veritate. Benoît XVI a consacré le traditionnel message du I° Janvier pour la Journée Mondiale de la Paix en 2010, à la liberté religieuse : « La liberté religieuse, chemin vers la paix » (ce message suivait un lâche attentat contre une Eglise de Bagdad le 31 Octobre 2010) Il nous dit citant son Encyclique Caritas in Veritate: «C’est en effet dans la liberté religieuse que se trouve l’expression de la spécificité de la personne humaine, qui peut aussi ordonner sa vie personnelle et sociale selon Dieu : à Sa lumière se comprennent pleinement l’identité, le sens et le but de la personne. Nier ou limiter de manière arbitraire cette liberté signifie cultiver une vision réductrice de la personne humaine, mettre dans l’ombre le rôle public de la religion signifie engendrer une société injuste, puisque celle-ci n’est pas en harmonie avec la vraie nature de la personne humaine, cela signifie rendre impossible l’affirmation d’une paix authentique et durable pour toute la famille humaine » Plus loin, « Le respect des éléments essentiels de la dignité de l’homme, tels que le droit à la vie et le droit à la liberté religieuse, est une condition de la légitimité morale de toute norme sociale ou politique » … « il existe un lien infrangible entre liberté et respect car, « la loi morale oblige tout homme et tout groupe social dans l’exercice de leurs droits, des droits d’autrui, de leurs devoirs envers les autres et du bien commun de tous » … C’est pour cela que chaque personne a le droit sacré a une vie intègre aussi du point de vue spirituel. Sans la reconnaissance de son être spirituel, sans l’ouverture au transcendant, la personne humaine se replie sur elle-même, et elle n’arrive pas à trouver des réponses aux interrogations de son cœur sur le sens de sa vie et à conquérir des valeurs et des principes éthiques durables. Elle ne peut donc même pas réussir à expérimenter une authentique liberté et à développer une société juste. » (Caritas in Veritate)… « La dignité transcendante de la personne est une valeur essentielle de la sagesse judéo-chrétienne, mais grâce à la raison, elle peut être reconnue par tous. Cette dignité comprise comme une capacité de transcender la propre matérialité et de rechercher la vérité, doit être reconnue comme un bien universel indispensable pour la construction d’une société orientée vers la réalisation et la plénitude de l’homme. Le respect des éléments essentiels de la dignité de l’homme, tels que le droit à la vie et le droit à la liberté religieuse , est une condition de la légitimité morale de toue norme sociale et politique. » Au n° 3 : « La liberté religieuse est à l’origine de la liberté morale. En effet, l’ouverture à la vérité et au bien, l’ouverture à Dieu, qui est enracinée dans la nature humaine, confère une pleine dignité à chaque personne et elle est garante d’un respect mutuel et plénier entre les personnes. C’est pourquoi la liberté religieuse doit être comprise non seulement comme une absence de coercition, mais d’abord comme une capacité d’ordonner ses choix selon la vérité. Il existe un lien infrangible entre liberté et respect, car « la loi morale oblige tout homme et tout groupe social à tenir compte, dans l’exercice de leur droits, des droits d’autrui, de leurs devoirs envers les autres et du bien commun de tous.» (Dignitatis Humanae) … Une liberté ennemie ou indifférente à l’égard de Dieu finit par se nier elle-même et ne garantit pas le plein respect de l’autre. « L’illusion que l’on puisse trouver dans le relativisme moral la clé d’une coexistence pacifique est en réalité l’origine des divisions et de la négation de la dignité des êtres humains. On comprend alors qu’il soit nécessaire de reconnaître une double dimension dans l’unité de la personne humaine : la dimension religieuse et la dimension sociale. A cet égard, il est inconcevable que des croyants « doivent se priver d’une partie d’eux-mêmes- de leur foi- afin d’être des citoyens actifs ; il ne devrait jamais être nécessaire de nier Dieu pour jouir de ses droits. » (Discours de Benoît XVI à l’O.N.U.) Au n°5 : On pourrait dire que, parmi les droits et les libertés fondamentales enracinés dans la dignité humaine, la liberté religieuse jouit d’un statut spécial. Quand la liberté religieuse est reconnue, la dignité de la personne humaine est respectée à sa racine même, et l’éthos et les institutions des peuples se consolident. A l’inverse, quand la liberté des peuples est niée, quand on essaie d’empêcher de professer sa religion ou sa foi et de vivre en conformité avec elle, la dignité humaine est lésée et de cette manière se trouvent menacées la justice et la paix, lesquelles se fondent sur l »ordre social juste qui s’édifie à la lumière de la Vérité Suprême et du Souverain Bien… Elle ne devrait pas rencontrer d’obstacles si elle désire, éventuellement, adhérer à une autre religion ou n’en professer aucune. En ce domaine, la réglementation internationale se révèle emblématique et est un exemple essentiel pour les Etats en ce qu’elle ne permet aucune dérogation à la liberté religieuse, sauf l’exigence légitime de l’ordre public pénétré par la justice. (Dignitatis Humanae n° 1). La réglementation internationale reconnaît ainsi aux droits de nature religieuse le même status que le droit à la vie et à la liberté personnelle, car ils appartiennent au noyau essentiel des droits de l’homme, à ces droits universels et naturels que la loi humaine ne peut jamais nier. La liberté religieuse n’est pas le patrimoine exclusif des croyants, mais de la famille tout entière des peuples de la terre. C’est l’élément incontournable d’un Etat de droit ; on ne peut pas la nier sans porter atteinte en même temps à tous les droits et aux libertés fondamentales puisqu’elle en est la synthèse et le sommet. Au n°6 ; Une liberté sans relation n’est pas une liberté achevée …La mise en relation est une composante décisive de la liberté religieuse qui pousse les communautés des croyants à pratiquer la solidarité en vue du bien commun. Dans cette dimension communautaire, chaque personne reste unique et absolument originale, tout en se complétant et en se réalisant pleinement. Au n° 7 : L’instrumentalisation de la liberté religieuse pour masquer des intérêts occultes, comme par exemple la subversion de l’ordre établi, l’accaparement de ressource ou le maintien du pouvoir de la part d’un groupe, peut provoquer des dommages énormes aux sociétés. Le fanatisme, le fondamentalisme, les pratiques contraires à la dignité humaine ne peuvent jamais trouver une justification, encore moins si cela est accompli au nom de la religion. La profession d’une religion ne peut pas être instrumentalisée, ni imposée par la force. Il faut donc que les Etats et les diverses communautés humaines n’oublient jamais que la liberté religieuse est une condition de la recherche de la vérité et que la vérité ne s’impose pas par la violence, mais par « la force de la vérité elle-même » (D.H. 1). En ce sens, la religion est une force positive et propulsive pour la société elle-même. Au n° 8 : On ne peut oublier que le fondamentalisme religieux sont des formes spéculaires et extrêmes du refus du légitime pluralisme et du principe de laïcité. Tous deux, en effet, absolutisent une vision réductrice et partiale de la personne humaine, favorisant dans le premier cas, des formes d’intégralisme religieux et dans le second de rationalisme. … Ces réalités ne peuvent être abandonnées à l’arbitraire du législateur ou de la majorité, car comme l’enseignait Cicéron « la justice consiste en quelque chose de plus qu’un simple acte productif de la loi et de son application. Elle implique de reconnaître à chacun sa dignité. (De inventione) Au n° 9 : Le patrimoine de principes et de valeurs exprimés par une religiosité authentique est une richesse pour les peuples et leur ethos. Ce patrimoine parle directement à la conscience, et à la raison des hommes et des femmes ; li leur rappelle l’impératif de la conversion morale, les incite à cultiver la pratique des vertus et à se rapprocher les uns des autres avec amour, sous le signe de la fraternité, en tant que membres de la grande famille humaine. (Benoît XVI au Royaume Uni , le 17 Septembre 2010) Au n° 11 : Pour l’Eglise, le dialogue entre les fidèles des diverses religions représente un instrument important pour collaborer au bien commun avec toues les communautés religieuses. L’Eglise, elle-même, ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans les diverses religions. « Elle considère avec un respect sincère ces manières ces manières d’agir et de vivre, ces règles et ces doctrines qui, quoiqu’elles diffèrent en beaucoup de points de ce qu’elle-même tient et propose, cependant apportent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. » (Vatican II , Nostra Aetate n° 2 ) Le chemin ainsi indiqué n’est pas celui du relativisme ou du syncrétisme religieux. L’Eglise, en effet, annonce sans cesse le Christ qui est « la voie, la vérité et la vie » (Jn 14,6) dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans laquelle Dieu s’est réconcilié toutes choses (Nostra Aetate, id.). Cela n’exclut pas cependant le dialogue et la recherche commune de la vérité dans divers milieux vitaux, car comme le dit Saint Thomas d’Aquin « Toute vérité, qui que ce soit qui la dise, vient de l’Esprit Saint » (Super Evangelium Joannis 1,3) Au n° 12 : La politique et la diplomatie devraient prendre en compte le patrimoine moral et spirituel offert par les grandes religions du monde pour reconnaître et affirmer des vérités, des principes et des valeurs qui ne peuvent être niées sans nier en même temps la dignité de la personne humaine … Cela veut dire déstructurer des idéologies politiques qui finissent par supplanter la vérité et la dignité humaine et veulent promouvoir des pseudo-valeurs sous le couvert de la paix, du développement et des droits humains,cela veut dire favoriser un engagement constant pour fonder la loi positive sur les principes de la loi naturelle (Benoît XVI à Chypre, le 4 Juin 2010). Tout cela est nécessaire et est cohérent avec le respect de la dignité de la personne humaine, respect garanti par les Peuples de la terre dans la Charte des Nations Unies de 1945 qui présente des valeurs et des principes moraux universels de référence pour les normes, les institutions, les systèmes de coexistence au niveau national et international. Au n° 13 : En dépit des enseignements de l’histoire et de l’engagement des Etats, des Organisations Internationales au niveau mondial et local, en dépit des Organisations non gouvernementales et de tous les hommes et femmes de bonne volonté qui, chaque jour, se dépensent pour la sauvegarde des droits et des libertés fondamentaux, on constate aujourd’hui encore, dans le monde des persécutions, des discriminations, des actes de violence et l’intolérance liée à la religion. En Asie et en Afrique en particulier, les principales victimes sont les membres des minorités religieuses, auxquelles il est interdit de professer librement leur religion ou d’en changer, par des intimidations, par la violation des droits et libertés fondamentaux et des biens essentiels, allant jusqu’à la privation de la liberté personnelle ou même de la vie. Il existe en outre, des formes plus élaborées d’hostilité envers la religion qui dans les pays occidentaux, se manifeste souvent par le reniement de l’histoire et des symboles religieux … La défense de la religion passe par la défense des droits et des libertés des communautés religieuses. Que les leaders des grandes religions du monde et les responsables des Nations renouvellent donc leur engagement pour la promotion et la sauvegarde de la liberté religieuse, en particulier pour la défense des minorités religieuses qui ne représentent pas une menace pour l’identité de la majorité, mais représentent au contraire un enrichissement culturel réciproque et une opportunité de dialogue ! Au n° 15 : … La paix est un don de Dieu et en même temps un projet à mettre en œuvre, jamais complètement achevé. Une société réconciliée avec Dieu est plus proche de la paix, qui n’est pas seulement l’absence de guerre, qui n’est pas le simple fruit d’une prédominance militaire ou économique, ni encore moins de ruses mensongères ou d’habiles manipulations. La paix, en fait, est le résultat d’un processus de purification et d’élévation culturelle, morale et spirituelle de chaque personne et de chaque peuple, processus dans lequel la dignité humaine est pleinement respectée. LIBERTE LIEE « Liberté liée », nous dit Benoît XVI au cours du chemin de Croix 2005 qu’il a présidé ; à la 11° station, il nous dit : « Aide-nous à nous laisser lier étroitement à toi. Aide-nous à démasquer les fausses libertés qui veulent nous éloigner de Toi. Aide-nous à accepter Ta liberté liée et à trouver dans ce lien avec Toi la vraie liberté » Mais n’est-ce pas des termes contradictoires ? Est-ce encore la liberté ? Pour le commun des mortels, la liberté ne saurait supporter des entraves ! Mais, la liberté dans certains cas a justement besoin de « glissières de sécurité » ; pour grandir, il lui faut être « tutorisée »et le comportement humain a besoin d’être « émondé », comme la vigne dans la Parabole ? Par exemple, le mariage, qui semble un frein, permet au contraire à l’amour humain un développement plus important ; de même, pour utiliser un langage plus terre à terre, le Code de la Route a lui-même des règles… Pour nous, la liberté dont nous jouissons paraît illimitée. Mais, rappelons-le, elle peut être la source d’un nouvel asservissement, de nouveaux esclavages. Alors, « cette liberté liée » ? « La Vérité vous rendra Libres », nous a dit Jésus (Jean 8,32). Plus loin, dans le même Evangile, Il nous dit : « Je Suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jean 14,6). Est-ce un nouvel asservissement qui nous est proposé ? Il ne semble pas ! La liberté n’est pas que pure illusion ! Pourtant Benoît XVI nous parle d’une liberté liée. Jean Paul II lorsqu’il parle de la souffrance peut nous aider dans cette compréhension (dans Salvifici Doloris): le rapport de la souffrance ou des épreuves très dures qu’elle vit, avec celles du Christ en Croix peut ne pas être saisie d’emblée ou même refusée : ce n’est que progressivement que la personne rattache sa propre souffrance à celle du Christ : il en est sans doute de même en ce qui concerne la liberté : « la vérité peut ne pas nous rendre libres » sur le coup, et surtout, nous pouvons ne pas rattacher immédiatement cette liberté acquise au Christ. La notion d’esclavage est à prendre avec prudence ; en effet, il n’a pas le même sens dans la 2° partie du chapitre 8 de St Jean (discussion de Jésus avec les Scribes et les Pharisiens) et dans le chapitre 6 de l’épître aux Romains de St Paul : pour St Paul, il faut passer de l’esclavage du péché à un autre esclavage : celui du Christ. Pour Saint Jean, cet esclavage concerne les scribes et les pharisiens que leurs coutumes asservissent. Quand Benoît XVI parle d’une liberté liée, sans doute se réfère t-il à ce dernier esclavage. Jésus, dans la partie de l’évangile de St Jean que nous avons cité oppose nettement l’esclavage que donne l’observance rigide des préceptes de la Synagogue (613 !) avec la liberté que donne la foi (c’est le sujet des chapitres 9,10,11 de l’épître aux Romains) Donc, il ne s’agit pas du tout du même esclavage : pour St Paul, il s’agit surtout de passer de l’esclavage de la chair et du sang (péché qui mène à la mort) à l’esclavage (obeïssance) à Dieu, qui est un chemin de justice (Rm 6,17) Certainement, la liberté que donne la foi au Christ est un engagement de toue la personne ; en ce sens peuvent paraître paradoxales les paroles de Jésus à Pierre après la Résurrection (Jean 21,18) : « En vérité, en vérité, Je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains, un autre te mettra ta ceinture et te conduira où tu ne voudrais pas aller. » La liberté peut facilement dégénérer si elle n’est pas rattachée au Christ en licence sur le plan personnel « Que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme » (Galates 5,6), -ou en libéralisme, qui est l’antithèse de la liberté, au plan économique et qui aboutit souvent dans l’écrasement des plus faibles (capitalisme sauvage). Quand on parle de « liberté liée », on pense certainement de « liberté liée au Christ ». Saint Jacques dans son Epître parle à deux reprises de « loi de liberté » : est-ce contradictoire ? Il y a bien sûr un paradoxe ; Jean Paul II le souligne dans la Lettre aux Familles Montfortaines, et il l’avait aussi dit dans une Homélie à Czestochowa lors de son premier voyage en Pologne, en 1979 ;il reprend les termes par lesquels le Cardinal Wysinski avait consacré la Pologne au Cœur Immaculé de Marie en un Divin Esclavage en 1966, année du Millénaire de la Pologne baptisée « l’acte parle de la « servitude » et contient un paradoxe semblable à celui des paroles de l’Evangile selon lesquelles il faut perdre sa vie pour la sauver (cf. Matthieu 10,39)),L’amour,en effet, constitue l’accomplissement de la liberté, mais en même temps l’appartenance, fruit parfait de son essence. Toutefois, ce fait de « ne pas être libre » dan l’amour n’est pas perçu comme un esclavage, mais comme une affirmation de liberté et comme un accomplissement. L’acte de consécration dans l’esclavage indique donc une dépendance singulière et une confiance sans limites. En ce sens, l’esclavage (la non-liberté) exprime la plénitude de la liberté de la même manière, l’Evangile parle de la nécessité de perdre sa vie pour la trouver dans sa plénitude. » (à Jasna Gora, le 4 Juin) ; Paradoxe et contradiction apparente entre l’esclavage d’amour et notre liberté. Le Père Lethel, O.F.M., postulateur des Saints Louis-Marie Grignon de Montfort et de Sainte Thérèse de Lisieux nous que la différence est minime entre « le divin abandon » de Thérèse et « l’Esclavage d’Amour » de Louis-Marie … Au n° 18 du « Traité de la Vraie Dévotion », Louis Marie nous dit : « Dieu fait homme à trouvé sa liberté à se voir emprisonné dans son sein (celui de Marie) ». En note, le Traité nous demande d’être esclave avec des chaînes d’amour. (au n° 38 , P. 41) L’expression, nous l’avons vu ailleurs, « loi de liberté » employée par Saint Jacques dans son Epître peut sembler paradoxale (Jacques 1,25 et 2,19) ; pourtant, cette liberté n’est pas absolue, nous l’avons vu : elle peut dégénérer en licence ! Saint Paul, dans sa 1° lettre à Timothée, rappelle que la foi n’abolit pas la loi, et que si dans sa Lettre aux Romains, il nous avait dit que, si la foi préexiste à la loi depuis Abraham, cette foi, nous dit-il dans sa Première Epître à Timothée, n’élimine pas la loi, qui existe pour les « débauchés, les pervers … etc » (1 Tm 1,9et10) La vérité est une valeur première, la liberté n’est qu’une valeur seconde, entièrement relative à cette vérité. Quand la liberté prétend s’arroger des qualités absolues qui appartiennent à la vérité, elle perd son attraction vers elle. ; on peut la comparer à ces électrons dits « libres » justement qui perdent toute attraction vers le noyau ; ils sont « libres » et complètement anarchiques. C’est le drame de ces libertés qui ne se réfèrent plus à rien et qui deviennent esclaves de tendances, de plaisir au départ, mais qui deviennent un véritable asservissement. Liberté liée ? liberté « liée », « liée » bien sûr parce que ce n’est pas celle d’une liberté sans loi qui est anarchiste, qui devient très vite la liberté des plus forts et qui écrase les « petits » !. Si Jésus nous demande de prendre « son joug », c’est parce que « son joug est léger ». En Matthieu 11,29, Il nous dit : « Prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car Je suis doux et humble de cœur. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger ». Sans nul doute, veut-il nous éviter des fardeaux plus lourds à porter ! En Jacques cité plus haut (Jacques1,24-25), celui-ci nous dit : « Au contraire, l’homme qui se penche sur la loi parfaite, celle de la liberté et qui s’y tient, celui qui ne l’écoute pas pour l’oublier, mais l’applique dans ses actes, heureux sera-t-il d’agir ainsi ! » Jésus nous dit aussi pus avant dans Matthieu (Matthieu 10,38) : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. Celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n’est pas digne de moi ». Une traduction ancienne parlait de haine,mais il s’agit là d’un aramaïsme pour souligner seulement la nécessité de se défaire de certains liens familiaux, si l’on veut que le service de Dieu prime tout ! De là, le terme « liberté liée » employé par Benoît XVI. Mais, « liberté liée » est-ce encore la liberté ? Pour nous, la liberté serait quelque chose qui serait sans entrave … mais liée ? « tutorisée », si l’on peut dire ; la notion d’engagement semble être une limitation de cette liberté ? Si l’on réfléchit bien, la fécondité naît de cette « autolimitation » : limitation du mariage ou limitation de l’engagement religieux. C’est la parabole de la vigne que nous enseigne Jésus (Jean 15); elle doit émondée pour porter beaucoup de fruits ; cet émondage correspond à tous les petits sacrifices que chacun doit faire. Les « glissières de sécurité » sont indispensables à une bonne conduite ; nous l’admettons facilement, de même le Code de la Route. Mais il est de plus en plus difficile de passer d’un monde matériel à un monde spirituel ! Jésus pouvait « échapper » à sa Passion s’il était resté en Transjordanie ; mais a-t-il été moins libre en se livrant aux Juifs et aux Romains ? Le jardin de Gethsémani a été pour Lui le lieu d’un combat intense ; l’Ecriture parle d’Agonie. C’est cette liberté liée qui nous délivrera de cet « individualisme, de cet utilitarisme, de cet hédonisme » que nous avons vu plus haut. Dans cette « liberté liée » dont nous parle Benoît XVI, il faut faire la distinction entre « liberté extérieure » et « liberté intérieure » : comme le souligne le Père Marie-Dominique Philippe, Jésus a la Croix dépouillé de toute sa liberté extérieure (qui est limitée) a acquis une liberté intérieure infinie … Là, sans doute, trouve t-on la signification du terme « esclavage d’amour » employé par St. Louis Marie Grignon de Montfort, terme auquel certains de nos contemporains sont allergiques en faisant remarquer que le temps de l’esclavage est terminé ! Mais, il précise bien qu’il s’agit d’un « esclavage d’amour », donc une remise libre de sa liberté. Notons aussi que dans l’Hymne aux Philippiens, Saint Paul parle également d’esclavage, (les diverses traductions emploient, d’ailleurs, aussi bien le terme serviteur que celui d’esclave, comme si le mot d’esclave faisait peur ou semblait dépassé), mais, le fait que ce soit « un esclavage d’amour » change tout ! (Mais, rappelons aussi qu’au temps de Paul, il n’existait pas de serviteur : on ne pouvait partir, on était esclaves à vie (voir la Lettre à Philémon du même Paul) Le mot liberté peut être illusoire, et Saint Paul dans la Lettre aux Romains (au chapitre 6) signale que les hommes qui sont esclaves de leur passions, se croient libres alors qu’ils sont esclaves de leur passion et voués à la mort. Le mot « liberté liée » signifie remise de sa propre liberté entre les mains d’un autre, c'est-à-dire entre les mains du Père. C’est un nouvel esclavage, mais qui celui-là est volontaire. En Matthieu 11,30, Jésus nous dit : « Prenez sur vous mon joug, et mettez vous à mon école, car Je suis doux et humble de cœur … » Il nous dit de prendre son joug, mais où est la liberté dans tout cela ? Le fait de prendre librement son joug est un acte de liberté. C’est là propre au Christianisme. Mgr. Francisco Follo à l’U.N.E S.C.O le 14.X.2008 pour le 60° anniversaire de la Déclaration des Droits de l’Homme déclarait : « Religare (qui a donné religion, vient du latin signifiant « lier, unir » Le terme « liberté liée » est apparemment une contradiction dans les termes, mais c’est une liberté qui est liée ontologiquement à la nature humaine et à sa liberté ». D’autres cultures (asiatiques, par exemple) l’avaient bien compris ; dans le mariage, par exemple (la monogamie représentait une limitation volontaire de la liberté), mais, c’était déjà une réponse aux 3 concupiscences exprimées par St. Jean (1 Jn 2, 16) - nous avons vu que cette limitation volontaire est en fait un enrichissement. Dans Gaudium et Spes, n° 17 (cité p.167 de Signe de Contradiction de Karol Wojtyla, retraite prêchée à Paul VI, au Vatican) : « La vraie liberté est en l’homme un signe privilégié de l’image divine. Car Dieu a voulu le laisser à son propre conseil pour qu’il puisse de lui-même chercher son Créateur et adhérer librement à Lui, s’achever dans une bienheureuse plénitude. La dignité de l’homme exige donc de lui qu’il agisse selon son choix conscient et libre, mû et déterminé par une conviction personnelle et non sous le seul effet de poussées instinctuelles ou de contrainte extérieure … la liberté humaine blessée par le péché peut s’ordonner à Dieu d’une manière effective et intégrale. » Liberté liée : comme nous l’avons dit : « Son joug est léger et son fardeau léger ». Oui, léger si on considère les autres fardeaux que la vie nous réserve ! En Romains 8, 14 et seq.) , Saint Paul nous promet « l’adoption filiale ». Jean nous dit à la fin de son Evangile (Jean 20,17) : « Je monte vers Mon Père et votre Père, vers Mon Dieu et votre Dieu », Il distingue bien les 2 termes : Jésus est venu nous procurer « l’adoption » qui nous permettra de Le rejoindre. Ces deux Apôtres font donc « éclater » cette filiation divine (en même temps, ils font « éclater » l’unicité du seul Dieu pour lequel s’était battu le monothéisme hébreux … Ce n’est pas seulement Jean qui nous parle de la présence de Dieu le Père et de l’Esprit Saint, ce sont aussi les Evangiles Synoptiques : Matthieu et Luc nous enseignent le Notre Père ; ce sont eux qui racontent la jubilation de Jésus qui s’adresse à Son Père. Marc, lors de l’Agonie à Gethsémani, fait dire à Jésus : « Abba, Père ».Les 4 Evangélistes nous parlent de l’intervention du Père et de l’Esprit lors du Baptême de Jésus … Saint Pierre, lors de son récit de la Transfiguration nous parle de l’intervention du Père et de l’Esprit (2 P 2, 22) Cette « adoption filiale » nous libère de la servitude occasionnée par une licence à tout vent : l’Arbre de la Croix nous conduit à l’Arbre de Vie. Au n° 138 du Compendium de la Doctrine Sociale : « Dans l’exercice de la liberté, l’homme accomplit des actes moralement bons, constructifs de sa personne et de la société quand il obéit à la vérité, c’est à dire quand il ne prétend pas être le Créateur et le Maître absolu de cette dernière, ainsi que des normes éthiques ». Au n°1741 du Catéchisme de l’Eglise Catholique: « La liberté de l’homme a besoin d’être libérée. Le Christ par la force de son mystère pascal libère l’homme de l’amour désordonné de soi » Liberté liée concerne l’attachement au Christ une fois que l’on s’est libéré de tous les attachements pervers qui nous entravent. En Matthieu 16,41, juste avant la Transfiguration, Jésus demande à ceux qui veulent le suivre de « renoncer à soi-même … ». C’est là, sans doute, « laa liberté liée », liée parce que attachée au Christ ! Mais, il ne faut pas croire que ce mouvement succède à un détachement : cette dépendance peut nous aider à nous libère de certaines dépendances. Croire le contraire, c’est s’exposer à des vues élitistes, dont la gnose (et le Nouvel Age) est le principal exemple … pas de libération sans Croix (qui n’est pas forcément sanglante) Il y a un instant où la liberté bascule … il faut se donner, se livrer. Jésus l’a vécu ; Il nous montre le chemin, ce qui pourrait sembler du masochisme. Au chapitre 10 de l’Evangile de Saint Jean et à la fin de l’Evangile du Bon Pasteur, alors que Jésus prend résolument la route de Jérusalem, (Il aurait pu rester en Transjordanie !) en Jean 10, 17-18, Il dit : « C’est pour cela que le Père M’aime, parce que je donne Ma Vie pour la reprendre. Personne ne me l’enlève, mais Je la donne de Moi-même ; J’ai le pouvoir de la donner et de la reprendre. Ce commandement, je l’ai reçu de Mon Père. » Le mot « esclavage » prend dès lors tout son sens : c’est un esclavage d’amour. Cette liberté liée est une liberté donnée au Christ : ce n’est plus l’esclavage de nos instincts. Son joug est sans commune mesure avec nos libertés illusoires. C’est Jésus qui parle : « Seigneur du Ciel et de la Terre, Je proclame Ta louange ; ce que Tu as caché aux sages et aux savants, Tu l’as révélé aux tout petits. Oui, Père, Tu l’as voulu ainsi en Ta bonté. Tout m’a été confié par Mon Père, personne ne connaît le Fils sinon le Fils et celui à qui le Fils veut bien le révéler » ; seuls, les versets suivants sont propres à Matthieu et sont absents chez Luc « Venez à Moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau et Moi, Je vous soulagerai. Prenez sur vous Mon Joug et devenez Mes disciples, car Je suis doux et humble de cœur et vous trouverez le repos. Oui Mon joug est facile à porter et Mon fardeau léger » (Matthieu 11,28-29) En Gaudium et Spes, au n°17’ il nous est dit : « Mais la vraie liberté est un signe privilégié de l’image de Dieu ». C’est parce que Dieu est un être libre qu’il nous faut l’imiter ! C’est en ce sens qu’il faut comprendre « liberté liée ». Cela nous semble paradoxal, parce que nous avons toujours tendance à oublier que Dieu Lui-même est libre et libre de nous aimer ! Nous avons beaucoup de mal parce que nous avons été « formaté» par plusieurs siècles de « rationnalisme » ôtant à Dieu tout sentiment ! Et pourtant, Il est une personne. C’est le fruit d’un arianisme qui reprend de son actualité « Ce fardeau léger » doit nous éviter des fardeaux plus lourds, c'est-à-dire une liberté apparente, sans lien, qui finit par être le pire des esclavages. Cet esclavage ne nous dispense pas de maux inéluctables de la vie : la souffrance et la mort. Liberté liée : on a à l’esprit le mot « esclavage » qu’emploie Saint Paul dans l’épître aux Romains au chapitre 6 (Rm 6,15 à 23): il nous demande, ne l’oublions pas d’abandonner d’autres esclavages, ceux-la beaucoup plus « toxiques » ! Il nous demande de nous « lier » à Jésus-Christ ; c’est le sens de liberté liée, et que cette liberté ne soit pas liée est la source de tous les « esclavages » et pas seulement ceux de la chair, mais aussi des esclavages moins matériels, ceux du pouvoir, de la possession et du savoir, comme les appelle Saint Jean dans sa 1° lettre (1 Jn 2,16) Saint Paul, ailleurs, identifie notre liberté avec le lien que nous avons avec Jésus-Christ ; ce qui pourrait rassurer ceux que le mot « esclavage » dérange : En 2 Corinthiens 3,17 : « Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » Et en Galates 5,1 : « Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres » et plus loin, il nous supplie de ne pas nous remettre sous de nouveaux esclavages. Plus avant, il nous avait dit : « C’est pour la liberté que le Christ nous a libérés » (Galates 4, 31) Saint Jean dans son Evangile nous avait dit au chapitre 8 (Jn 8,34) : « Si le Fils vous rend libre, vous serez vraiment libres ». L’expression « liberté liée » pose quelque problème parce que « qu’est-ce que cette liberté si elle est liée ? N’est-ce pas deux termes contradictoires ? Pour revenir sur cette expression, il faut revenir au fait que cette liberté liée est encore une liberté, car Jésus sachant depuis presque le début de son ministère que l’on cherchait à le mettre à mort, est quand même allé à Jérusalem : son message, c’est celui-ci : la liberté doit être libérée de beaucoup d’asservissements.(C’est aussi apparemment contradictoire que la loi de liberté que nous avons vu dans l’Epître de Saint Jacques). Pour revenir sur cette expression, notons que Jésus aurait pu ne pas aller à Jérusalem et rester dans les pays « païens », et échapper aux Juifs qui défendaient l’orthodoxie ! Il savait qu’on cherchait à le faire mourir depuis longtemps déjà …Cette position ne supprime pas la liberté de Jésus, au contraire, son choix est libre, décidé en pleine connaissance des risques encourus, c’est en ce sens que l’on peut parler de liberté liée ! « C’est pour cela que le Père m’a aimé, parce que je donne Ma Vie afin de la reprendre. Personne ne Me l’enlève, mais Je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner et le pouvoir de la reprendre … » (Jean 10,17-18) (cette position n’est pas le propre, ni de Jésus, ni des disciples qui l’ont suivi puisqu’on le retrouve dans des cultures non-chrétiennes: il y a un lien entre liberté - bien - vérité : des personnes sont prêtes au martyr même si elles ne sont pas chrétiennes pour défendre une vérité: Saint Paul le reconnaît dans l’Epître aux Romains au chapitre 2 (2,14-16) : il y a une morale naturelle chez les peuples dits païens, même chez ceux considérés d’une grande culture comme les civilisations chinoises et indiennes que ne connaissait pas St Paul … Saint Matthieu, à la fin de son chapitre 25 nous parle de ces peuples qui n’ont pas connus l’Evangile (dit l’Evangile des païens) et du Jugement à la Fin des Temps (Mat 21 à 35). Il y a une morale qui dépasse largement le Monde Judéo-Chrétien : le terme morale naturelle peut être ambigu dans la mesure qu’on pourrait croire que cette morale ne nécessite pas d’éducation et qu’elle naît toute seule dès le berceau : les Organisations Internationales sont là pour nous prouver le contraire et certaines grandes civilisations, par exemple Chinoises et Indiennes, sont anciennes et Paul ne les a pas connues … L’Instruction de la Commission pour la Doctrine de la Foi en 1987 (dirigée alors par le Cardinal Ratzinger) parle de « la liberté chrétienne et de la libération », ce qui souligne le besoin de la liberté d’être libérée : cette exhortation fait suite à une Instruction concernant les mouvements de « libération », principalement en Amérique Latine ; mais, la liberté doit être libérée sur tous les continents, et les communautés de base se sont développées partout : la liberté doit se libérer de tous les esclavages. Jean Paul II nous l’avait dit dans « Veritatis Splendor » : la liberté a besoin d’être libérée. Saint Jean, à la fin du chapitre 8 de son Evangile, décrit la discussion entre Jésus et les Pharisiens quant à l’esclavage auquel ils (nous) sont soumis, et ainsi les (nous) libérer. En effet, l’application stricte de la LOI peut conduire à l’esclavage par celle-ci, s’il lui manque l’amour. C’est tout le sujet des chapitres 9,10 et 11 de l’Epître aux Romains de Saint Paul. En note certaines éditions notent que c’est aussi le sujet de la Parabole du Père Miséricordieux dans l’Evangile de Saint Luc (Luc 15, 15 à 32) : le fils prodigue est jalousé par le fils qui a toujours été fidèle … Jésus veut signaler par là que la loi doit toujours s’accompagner de l’amour sinon elle se sclérose. Dieu aime aussi ses fils perdus ! Liberté liée, j’y reviens encore, car liberté lie est-ce encore la liberté ? La liberté est liée parce qu’elle agit en fonction de la vérité ; elle est liée de cette façon à elle. Jésus aurait très bien pu, comme nous l’avons déjà dit rester en Transjordanie et échapper ainsi aux dignitaires juifs qui voulaient sa mort ( « il vaut mieux qu’un seul homme meure … ». Jésus savait très bien qu’on cherchait à le faire mourir … Alors, est-ce du « masochisme » de ne pas esquiver cette mort ? Mais, la liberté est indexée à la vérité : indexée est un terme adéquat parce que dans « indexée », il y a « index » et la liberté nous indique la vérité à suivre : il y a un lien intrinsèque entre les 2. Les prisonniers d’opinion le savent bien quand leur bourreau leur demandent de trahir la vérité en échange d’une liberté physique, souvent illusoire ! En Luc qui nous dit en 9,51 ; « Jésus prit résolument la route de Jérusalem » ; dans d’autres traductions qui épousent sans doute mieux le texte initial « Il durcit son visage » ; c’est dire qu’il savait très bien ce que signifiait : « Monter à Jérusalem … » La liberté est au service de vérité, c’est en cela qu’elle est liée. La vérité est un bien supérieur ; on ne peut pas la trahir sans trahir son identité. La relativiser (Qu’est-ce que la vérité ? demandait Pilate), c’est devenir esclave d’un consensus majoritaire. (Le relativisme est une véritable dictature et « la tolérance » risque de devenir … intolérante ! Ce que dénonçait le Cardinal Ratzinger, quand il était Archevêque de Munich, quelques jours après la mort de Paul VI, dénonçant les maux auxquels ce dernier avait dû s’affronter « la télécratie » dictature de la télévision et « démoscopie », dictature des sondages (et Internet était encore dans les limbes …) Je reviens sur les paroles que Jésus a dites à Pierre : « Amen, amen, Je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture et tu allais où tu voulais, mais quand tu seras devenu vieux, un autre te mettras la ceinture et te conduiras où tu ne voulais pas aller.» (Jean 21,18). C’est aussi le thème du livre du roman de Henrik .Sinkiewicz « Quo vadis ? Pierre fuyant Rome au cours de persécutions est rattrapé par quelqu’un, qui se révèle être le Christ lui-même, pour l’inciter à revenir à Rome, où il subira le martyre). De même, Saint Cyprien fuyant les persécutions de Carthage, cherchant une certaine clandestinité dans les campagnes, revient à Carthage pour ne pas abandonner ses fidèles et subira le martyre lui aussi, avec eux. Saint Pierre a fait l’expérience que « Sa liberté était liée » et qu’avec l’âge et les responsabilités « un autre lui met la ceinture » En ce sens, on peut mettre en avant la nécessité du « décentrement de soi » : « Celui qui veut Me suivre, qu’il renonce à lui-même » (Luc 9,23) (les traductions des Bibles de Jérusalem et de la Traduction Liturgiqu, en ce qui concerne le texte de l’Epître aux Romains de St. Paul au chapitre 6 (versets15 à 23) diffèrent d’ailleurs : la traduction liturgique emploie le mot « esclavage », aussi bien en ce qui concerne « les esclavages » qu’il faut quitter, c'est-à-dire la chair et les passions, que celui qu’il faut suivre, c'est-à-dire Jésus ; la traduction de Jérusalem, par contre , ne parle jamais « d’esclavage » pour ce qui concerne la sequela chriti, mais d’asservissement volontaire,de servitude : détail, peut être, mais peut-être, important ;un asservissement à la justice !) Jean Paul II, et après lui, Benoît XVI, nous disent, au sujet du développement de l’agnosticisme et du relativisme dans nos sociétés : « Une culture sans vérité n’est pas une garantie, mais plutôt un risque pour la liberté. » Jean-Paul II, discours à la rencontre mondiale des Professeurs d’Université à Vilnius, ORlf n°37 du 12-07-2000. Au centre de ce conflit, intervient sans aucun doute, la place des religions non-chrétiennes dans les démocraties et aussi le phénomène de l’incroyance… c’est ici que se place la notion de droit naturel, nécessaire pour ne pas entrer en barbarie (nous venons de le dire): bien sûr, toutes les organisations internationales sont confrontées au droit, même si elles ne sont pas chrétiennes, il y a un droit dans les pays musulmans, hindouistes, bouddhistes, indépendant de toute Révélation Judéo-Chrétienne, mais, bien sûr, il y a une ambiguïté à lever sur le mot naturel : ce qui est naturel est déjà le fruit de l’éducation, bien sûr, ce ne veut pas dire inné … Il y a des lois morales qui ne sont pas le résultat du Décalogue, et qui peuvent être découvertes par toute civilisation. BENOIT XVI, nouvellement élu, a enrichi ce discours sur cette liberté, qui est notre passage obligé, liberté qui nous différencie de toute gent animale ; son message est répercuté par ses collaborateurs : Le Cardinal Tarcisio Bertone à l’Université de La Havane, ORlf du 5 Mars 2008 n°9 ) déclarait, citant le Cardinal Ratzinger , peu de temps avant d’être élu Pape: « Le relativisme moral soutient qu’une affirmation éthique ne serait vraie que dans le contexte d’une culture déterminée. Il n’y aurait donc pas de convictions ni de principes éthique meilleurs que d’autres, et personne n’aurait le droit de dire ce qui est bien et ce qui est mal. » … et plus loin : « Le subjectivisme éthique porté à l’extrême conduit à la situation paradoxale de devoir admettre l’immoralité comme moralement bonne… » « La logique de ce dynamisme conduit à ce que Benoît XVI a appelé la dictature du relativisme…Il est donc nécessaire de renverser l’axiome du relativisme éthique et de postuler avec force l’existence d’un ordre de vérité qui transcende les conditionnements personnels, culturels et historiques et qui possède une validité permanente. Cet ordre est celui que la philosophie appelle « loi naturelle »… « De même que la société souffre lorsque la religion est reléguée au domaine privé, ainsi la société et les institutions civiles sont appauvries lorsque la législation- en violation avec la liberté religieuse- promeut l’indifférence religieuse, le relativisme et le syncrétisme religieux, les justifiant même parfois à travers une conception erronée de la tolérance. Au contraire, tous les citoyens bénéficient de la reconnaissance de traditions religieuses dans lesquelles tous les peuples sont enracinés, et avec lesquelles, les populations s’identifient généralement de façon particulière. » (Discours de Jean-Paul II à l’OSCE le 10 octobre 2003) que le Cardinal Bertone cite. … Le Cardinal Bertone poursuit : « La tentative portée à l’extrême, de façonner les choses humaines en se passant totalement de Dieu nous conduit toujours davantage au bord de l’abîme, vers la mise à l’écart total de l’homme. Nous devons alors renverser l’axiome des Philosophes des Lumières et dire même : celui qui ne parvient pas à trouver la voie de l’acceptation de Dieu devrait quoiqu’il en soit tenter de diriger sa vie veluti si Deus daretur (comme si Dieu existait ).Cela est déjà le conseil que Pascal donnait à ses amis non-croyants, c’est le conseil que nous voudrions donner à nos amis qui ne croient pas . Ainsi, personne n’est limité dans sa propre liberté… » ( J.Ratzinger, à Subiaco, le 1° Avril 2005) . On sait que toute la civilisation moderne s’est bâtie, cependant sur la notion que, pour assurer la paix sociale, après les conflits entre catholiques et protestants et au Siècle des Lumières, il fallait faire « etsi Deus non daretur », c'est-à-dire, comme si Dieu n’existait pas, c’est ce que prônait Hugo Grotius au XVI° siècle… Depuis, Benoît XVI répète sans cesse que c’est l’absence de Dieu qui aliène l’homme, et non l’inverse (par exemple à la Messe du Mercredi des Cendres 2008). Alors qu’il n’était pas encore Pape et que Jean-Paul II vivait ses derniers jours, le Cardinal Ratzinger médita le traditionnel Chemin de Croix de la Semaine Sainte 2005 ; à la onzième Station (Jésus est cloué à la Croix), le Cardinal dit au Christ (… et à nous !) : « Aide-nous à nous laisser lier étroitement à toi. Aide-nous à démasquer la fausse liberté qui veut nous éloigner de Toi. Aide-nous à accepter ta liberté liée et à trouver, dans ce lien étroit avec Toi, la vraie liberté. ». La vraie liberté est intérieure, le Christ nous en apporte la démonstration la plus éclairante (sa liberté est la plus grande lorsqu’il est complètement immobilisé par les hommes) L’exemple, sans doute le plus frappant, de ceci est celui de Saint Pierre qui « perd » sa liberté lorsqu’il devient responsable de l’Eglise : « Pais mes brebis. Amen, amen, je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te liera ta ceinture … » (Jean 21, 18) C’est aussi affirmer que toute liberté ne libère pas l’homme ; elle peut, au contraire, être source d’asservissement : la drogue ou la sexualité, par exemple. Plus tard, alors qu’il est Pape, il confie aux séminaristes de l’Institut Pontifical du Latran, le 20-II-2009 : « La liberté se réalise paradoxalement par le service… la licence est le résultat d’une liberté livrée à elle-même ; le moyen terme entre liberté et vérité est le service (qu’on pourrait aussi appeler d’autres noms : charité, don). … Au Siècle des Lumières, il n’y avait pas, croyait-on, d’autre voie possible que de se soumettre à un Dieu tyran ; ou bien, pour être vraiment libre, chercher l’indépendance vis-à-vis de ce Dieu. C’est ce que croyaient ces philosophes. Mais est-on bien sûr que Dieu est un tyran ?... La dépendance fatale ne serait telle que si le Dieu Créateur était un tyran et non un être bon… Si, au contraire, ce Créateur nous aime et que notre dépendance signifie être dans l’espace de son amour, dans ce cas, la dépendance signifie précisément liberté. » Dans l’Ecriture, au moins, 3 passages sont essentiels pour bien cerner ce que nous dit le Nouveau Testament de la liberté, 1) La première est en Saint Jean, dans son Evangile, dans la seconde partie du chapitre 8, diatribe que Jésus a avec les Pharisiens concernant la liberté « la vérité vous rendra libres » (Jean 8,32), puis : « Si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres » (Jean 8, 36) 2) La seconde concerne l’Epître aux Galates chez Saint Paul, au premier verset du chapitre 5, puis au verset 15, il nous dit très justement que la liberté acquise peut dégénérer en licence. 3) La troisième est dans l’épître aux Romains (Romains 8,18-21) montre bien cet avènement de la liberté : « J’estime , en effet, que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler en nous, car la Création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu : si elle fut assujettie à la vanité- non qu’elle l’eut voulue, mais à cause de celui qui l’y a soumise, c’est avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. » Dans la 1° aux Corinthiens (1 Co 9,19), il nous dit : « Oui, libre à l’égard de tous, je me suis fait l’esclave de tous » Dans la 2° épître aux Corinthiens (2 Co 3,17), il avait dit aussi : « Quand on se convertit au Seigneur, un voile tombe. Or, le Seigneur, c’est l’Esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. » Mais aussi, dans l’Epître de Saint Jacques (Jacques 2,12-13) : « Parlez et agissez comme des gens qui vont être jugés par une loi de liberté, car le jugement est sans miséricorde pour celui qui n’a pas fait miséricorde, mais la miséricorde se moque du jugement. » (Jacques cite Osée 3,3) Le Cardinal Julian Herranz souligne dans son article de l’ORlf du 17 Mai 2005, n° 20 : « Jean-Paul II : structure morale de la liberté » : « Tout le Magistère social de l’Eglise est guidé avant tout par la nécessité de défendre les consciences des chrétiens et de l’humanité tout entière contre le mal intrinsèque de deux grandes utopies idéologiques, devenues également deux systèmes politiques à l’échelle mondiale : l’utopie totalitaire de la justice sans liberté et l’utopie libertaire de la liberté sans vérité. En effet Jean-Paul II avait déjà dit à l’Université de Vilnius « Des totalitarismes de tendances opposées et des démocraties malades ont bouleversées l’histoire de notre siècle. ». Si la première utopie, celle de la justice sans vérité est en voie d’extinction , par contre, la seconde, celle de la liberté sans vérité est malheureusement en phase d’expansion croissante dans le monde démocratique. Celle-ci qui a mûri dans le contexte philosophique de relativisme agnostique a trouvé un puissant instrument législatif dans le strict positivisme juridique. »… plus loin, il cite à nouveau Jean-Paul II : « Il est urgent que nous oeuvrions afin que le véritable sens de la démocratie, conquête authentique de la culture, soit totalement préservé. Sur ce thème apparaissent, en effet, des dérives inquiétantes, lorsque l’on assimile la démocratie à une pure procédure, ou lorsque l’on pense que la vérité exprimée par la majorité suffit « tout court » à déterminer le caractère moral d’une loi. En réalité, la valeur de la démocratie se maintient ou disparaît en fonction des valeurs qu’elle incarne et promeut. Le fondement de ces valeurs ne peut se trouver dans des majorités d’opinion provisoires et fluctuantes, mais seulement dans la reconnaissance d’une loi morale objective. » « Ailleurs, Jean-Paul II écrit dans « Entrez dans l’Espérance » : la condamnation de Dieu de la part de l’homme ne s’appuie pas sur la vérité, mais sur l’abus de pouvoir, sur la conjuration sournoise… Et ne répétons-nous pas cette conjuration également dans les parlements démocratiques, lorsque, par exemple, à travers une loi promulguée en toute régularité, l’on condamne à mort l’homme qui n’est pas encore né ? »… « En effet, il faut constater avec Jean-Paul II que dans la seconde moitié du XX° siècle l’agnosticisme religieux et le relativisme moral et juridique, fruits amers de l’immanentisme philosophique ont façonné et modelé une société démocratique « malade », très largement matérialiste et permissive, détachée non seulement des réalités transcendantes, mais également des exigences de la morale naturelle. » « La liberté, nous dit Jean-Paul II, possède une logique interne qui la qualifie et l’ennoblit, elle est ordonnée à la vérité et elle se réalise dans la recherche et la mise en œuvre de la vérité. Séparée de la vérité sur la personne humaine, elle se dégrade en licence dans la vie individuelle, et dans la vie politique, en arbitraire des plus forts et en arrogance du pouvoir. C’est pourquoi, loin d’être une limitation ou une menace pour la liberté, la référence à la vérité de l’homme- vérité universellement connaissable par la loi morale inscrite dans le cœur de chacun- est réellement une garantie de l’avenir de la liberté. » (1995, Discours à l’ONU, ORlf du 10 octobre 1995, n° 41) En ce sens, a dit Jean-Paul II « La loi naturelle dans la mesure où elle réglemente les relations inter-humaines, vaut comme « droit naturel » et, comme telle, exige le respect des personnes dans le respect du bien commun. Une conception authentique du droit naturel entendue comme protection de la dignité éminente et inaliénable de tout être humain, est garante de l’égalité et donne un contenu véritable aux « droits de l’homme » qui constituent les fondements des Déclarations Internationales. Les Droits de l’homme, en effet, doivent avoir pour référence ce que l’homme est par nature, en vertu de sa propre dignité, et non ce qui est l’expression de choix subjectifs, faits par ceux qui jouissent du pouvoir de participer à la vie sociale ou par ceux qui obtiennent le consentement de la majorité. » et plus loin « cette référence à la vérité de l’homme sur laquelle doit reposer la loi, « loin d’être une limitation ou une menace pour la liberté » constitue en réalité « la garantie de l’avenir de la liberté » Etant donnée, en effet, la place centrale de la personne dans le droit (on pense par exemple à la « Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ») et étant donné que la personne humaine est ce qu’elle est- et non pas ce qu’une majorité ou l’autre d’opinions pense qu’elle soit-, on en déduit que la loi réellement juste ne peut pas reposer sur une vérité de convention ou d’opinion, mais doit nécessairement tenir compte de la vérité ontologique de la personne humaine : sa nature d’être, non pas uniquement animal et instinctif, mais intelligent, libre et possédant une dimension transcendante et religieuse de l’esprit qui ne peut pas être ignorée ou bafouée par la loi. » (Discours de Jean-Paul II à l’Académie Pontificale pour la Vie, le 27-II-2002) « Jean-Paul II, en développant ce qu’il avait écrit au n°101 de Veritatis Splendor sur le risque de l’alliance entre démocratie et relativisme éthique : « Si après la chute des systèmes totalitaires, les sociétés se sont senties libres, presque simultanément est apparu un problème de fond, celui de l’usage de la liberté…le danger de la situation dans laquelle on se trouve aujourd’hui consiste dans le fait que dans l’usage de la liberté, on prétend faire abstraction de la dimension éthique, c'est-à-dire de la considération du bien et du mal moral . Une certaine conception de la liberté, qui trouve à présent un vaste écho dans l’opinion publique, détache l’attention de l’homme des responsabilités éthiques. Ce sur quoi l’on s’appuie aujourd’hui est la seule liberté. On dit : ce qui importe, c’est d’être libres, détachés de tout remords et de tous liens, afin de pouvoir agir selon nos propres jugements, qui en réalités ne sont souvent que des caprices. Cela est clair : un libéralisme de ce genre ne peut être qualifié de primitif. Son influence est potentiellement dévastatrice. » (Mémoire et identité) « En évoquant les pressions politiques sur certains Parlements afin qu’ils reconnaissent les unions homosexuelles comme une forme alternative de famille, Jean-Paul II se demande, « L’on peut et même l’on doit se demander si n’est pas ici à l’œuvre une nouvelle idéologie du mal, peut être plus sournoise et cachée qui tente d’exploiter, contre l’homme et la famille jusqu’aux droits de l’homme eux-mêmes. Pourquoi tout cela a-t-il lieu ? Quelle est la racine de ces idéologies post-philosophie des Lumières ? La réponse en définitive est simple, cela a lieu parce qu’on a rejeté Dieu comme Créateur, et donc comme source de la discrimination entre ce qui est bien et ce qui est mal. On a refusé la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue comme êtres humains, c'est-à-dire la notion de nature humaine comme « présupposé réel », que l’on a remplacé « par un produit de la pensée » librement formé et librement modifiable selon les circonstances. » (Mémoire et identité) « Il ne fait aucun doute que nous nous trouvons actuellement à un carrefour de l’histoire où est devenue particulièrement importante et urgente la nécessité de bien mettre au clair quelle est la réalité de la personne humaine… » Mgr. Mamberti dit : « Nous ne devons pas nous cacher du fait que dans la société mondialisée d’aujourd’hui le contact avec les « différences » peut créer une incommunication de fond et la tentation d’imposer l’espace public comme « neutre ». Toutefois, si l’on veut étendre au maximum la liberté de tous …, il faut se reconnaître publiquement dans un code éthique commun. Mais pour que cela arrive pleinement, il est indispensable de reconnaître la dimension publique de la liberté religieuse. Cette liberté, en effet, est porteuse de valeurs éthiques, capable de féconder la démocratie et d’engendrer la culture. » Alexis de Tocqueville disait : « Le despotisme n’a pas besoin de la religion, mais la liberté et la démocratie, si. » (cité par Mgr.Mamberti au Colloque de Rimini 2.008 ) Le même Mgr. D.Mamberti prononce le 29 Août 2008 au même meeting de Rimini (ORlf du 24.IX.2008) : « La dignité de l’homme se fonde sur sa capacité de vérité. ». Il cite Saint Ambroise ubi fides, ibi libertas. Benoît XVI dans le Message de la Journée Mondiale de la Paix 2.012 (O.R.l.f. du 22-12-2011, pages 9-10) : « C’est seulement dans sa relation avec Dieu que l’homme comprend le sens de sa propre liberté. Celle-ci n’est pas l’absence de liens ou le règne du libre-arbitre, elle n’est pas l’absolutisme du « je ». L’homme qui se croit absolu, qui n’est dépendant de rien et qui croit pouvoir faire tout ce qu’il veut finit par contredire la vérité de son propre être et par perdre sa liberté. Au contraire, l’homme est un être relationnel qui est en relation avec les autres et avec Dieu surtout. (C’est la notion même de personne, note du rédacteur). La liberté authentique ne peut jamais être atteinte dans l’éloignement de Dieu. La liberté est une valeur précieuse, mais délicate,elle peut être mal comprise et mal utilisée « Aujourd’hui, un obstacle extrêmement menaçant pour l’œuvre d’éducation est constituée par la présence massive dans nos sociétés et notre culture de ce relativisme, qui en ne reconnaissant rien comme définitif ne laisse comme ultime ressource que son propre moi avec ses désirs , et sous l’apparence de la liberté devient une prison pour chacun, séparant l’un de l’autre et réduisant chacun à se retrouver enfermé dans son propre « moi ». Dans un tel horizon relativiste, une véritable éducation n’est donc pas possible, en effet sans la lumière de la vérité, toute personne est condamnée à un moment ou à un autre, à douter de la bonté de sa vie même et des relations qui la constituent, de la valeur de son engagement pour constituer quelque chose de commun avec les autres » (Benoît XVI, le 6-6-2.005 à Saint Jean de Latran) Et toujours dans ce Message : Pour exercer sa liberté, l’homme doit alors dépasser l’horizon relativiste et connaître la vérité sur lui-même et la vérité sur le bien et le mal. « Au fond de sa conscience, l’homme découvre une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il doit obéïr au contraire et dont la voix l’appelle à aimer, à faire le bien et fuir le mal, à assumer la responsabilité du bien accompli et du mal commis » (Gaudium et Spes n° 16). Pour cela, l’exercice de la liberté est profondément lié à la loi morale naturelle qui est de nature universelle. Elle exprime la dignité de chaque personne pour les bases de ses droits et devoirs fondamentaux, et par conséquent et en dernière analyse, du vivre ensemble juste et pacifique entre les personnes. Le juste usage de la liberté est donc central pour la promotion de la justice et de la paix. LE MAL Pourquoi mal seul et non pas bien-mal ? Parce que c’est une fausse dichotomie. Nous verrons que dans la religion chrétienne, ce n’est pas ce dualisme qui a cours ; le mal n’est pas opposé au bien, bien qui est une des caractéristiques de Dieu même … et pourtant, nous sommes, même chrétiens depuis longtemps, attachés à ce dualisme …nous avons même du mal à évacuer ce dualisme ! Ne serait-ce pas pour cela que beaucoup de gens pensent : « Jésus, OUI ; l’Eglise, NON ». En fait, le dualisme est une tentation toujours récurrente et il est difficile de s’en abstraire complètement, même si l’on se croit chrétien ! Xavier Lacroix dans la préface du livre du Père Pascal Ide « le corps à cœur » nous dit « que c’est une forme toujours renaissante » ; même Saint Augustin, pourtant grand pourfendeur de philosophies dualistes n’échappe pas à cette déviation, alors nous ! Dieu n’a pas fait le mal ; Il a permis seulement que le mal s’introduise dans la création ; c’est le mal moral, conséquence de la liberté qu’Il nous a donnée ; c’est la différence avec le mal physique auquel l’homme ne peut rien et où n’entre pas en cause la liberté de l’homme et sa responsabilité de celui-ci … (mais, actuellement, on voit que la distinction entre les deux est souvent moins évidente ; la responsabilité de l’homme dans les tsunamis ou les catastrophes nucléaires n’est certainement pas nulle !). La liberté est certainement un grand don que Dieu a fait à l’homme, mais, c’est aussi un très grand risque : c’est que par la liberté qu’Il lui a accordé, l’homme se rebelle contre Lui, se tournant vers le mal (le 3° chapitre de la Genèse) et se détournant du bien. Dieu, innocent de tout mal (Jacques 1,13) a pris le risque de la révolte contre Lui-même …. De même qu’un père de famille peut subir la révolte d’un de ses enfants. L’homme est libre et c’est là sa dignité. La révolte de Lucifer est née de la prééminence que Dieu accorde à l’homme et c’est la jalousie de Lucifer qui en est la cause. Dieu Lui-même a imposé une limite au pouvoir de son propre Amour : notre liberté. Paul VI, dans une Catéchèse, l’exprime bien : « Le mal n’est pas seulement une déficience, mais une efficience, un être vivant, spirituel, perverti et pervertisseur, terrible, mystérieuse, effrayante … , cela contre ceux qui voudraient que le mal soit seulement un concept philosophique, une sorte d’ablation du bien : mais non, le mal est vivant. » (Audience Générale du 15 Novembre 1975) Saint Paul l’exprime bien quand il nous dit en Romains 7,15 : « Je fais le mal que je ne veux pas et je ne fais pas le bien que je voudrais. » Saint Augustin, après lui, dans les Confessions (Conf. VII,2) : « Je cherchais d’où venait le mal, et je ne trouvais pas d’explication ! ». Il ne s’agit pas uniquement d’un concept philosophique ! C’est pourquoi, lors des cérémonies de Baptême, il y a trois exorcismes pour débuter. Le mal lui-même s’est peu à peu dissocié ; voyons comment … Mal , douleur , souffrance … Les trois mots sont facilement confondus et pourtant , au fil du temps , leur sens s’est peu à peu précisé … Mais , l’équation mal , douleur et souffrance a la vie dure , et il perdure souvent encore au XXI° siècle ( les contemporains de Jésus , qui vivaient pourtant quelques 5 siècles après la déportation à Babylone ne l’avaient pas eux aussi tous compris – il suffit de voir les diatribes entre Jésus et les Pharisiens et le récit de la « guérison » de l’Aveugle-né -; pourtant les grands prophètes de la déportation avaient bien souligné, et eux les premiers , la différence essentielle entre le mal et la souffrance ). Il faut d’emblée préciser que le mal n’implique pas forcément une responsabilité personnelle : les désastres de la nature, par exemple (« le mal physique » , comme l’appelle Jean Paul II ) ; mais il est aussi « un mal moral », comme il dit encore, où la responsabilité de l’homme est impliquée : c’est le lieu de la faute ou du pêché, où la liberté (et la responsabilité ) de l’homme est impliquée … mais aussi, là où le mal et la souffrance peuvent être absolument opposés, c’est en cas de guerre, par exemple, où le mal et la souffrance peuvent être dus à des adversaires, ce que les civilisations anciennes suspectaient, évidemment, mais sans pouvoir le théoriser. (le meilleur exemple est bien sûr celui de Jésus à la Croix ) Nous y reviendrons … Il y a la fausse asymétrie du Bien et du Mal dans les Eglises Chrétiennes. Autant, cette dualité existe au sein d’autres religions ; je pense entre autres aux religions orientales, telle qu’elle existe dans d’anciennes religions iraniennes ( Zoroastrisme ), dont sont issues manichéisme et catharisme, cette opposition n’existe pas dans la religion chrétienne : le mal a son origine en Dieu qui est tout puissant , « toléré » pourrait-on dire, mais il n’y a pas deux principes égaux ; au lieu de l’affrontement « bien-mal », l’Eglise admet l’affrontement « mal-grâce », ces deux termes soulignent l’inégalité du mal et du pouvoir du Christ, comme l’explique Saint Paul surtout dans l’Epître aux Romains ( Romains, ch. 5 à 7,par exemple) Mais, il n’est pas si simple de se démarquer du dualisme : même si nous sommes de « bons » chrétiens, nous devons toujours envisager la tentation d’y être sans cesse replongé …. Nous avons toujours beaucoup de difficulté à nous en abstraire ! Nous lui donnons toujours trop d’importance. Nous avons vu plus haut ces « formes toujours renaissantes du dualisme ». Les religions iraniennes ne sont pas loin ! Il faut pourtant rappeler les abîmes du mal qu’a connu notre XX° siècle, je pense, par exemple, a l’expulsion des juifs du Ghetto de Varsovie : une photo célèbre montre un soldat nazi menaçant un jeune garçon de son fusil le faisant quitter le Ghetto les mains en l’air. Une autre image me vient à l’esprit, celle racontée par Elie Wiesel, lui-même déporté dans un Camp de la Mort : en représaille pour la fuite d’un prisonnier, les nazis avaient pendu plusieurs détenus devant d’autres; le dernier à mourir est un jeune adolescent qui bouge encore. Elie Wiesel entend un autre détenu dire tout bas « où est Dieu dans tout ça ? » … Elie Wiesel perçoit à l’intérieur de lui une voix disant : « Il est là au bout d’une corde ! ». Les Allemands, eux-mêmes, au cours de cette guerre, ont été confronté à cette horreur du mal : je pense à ceux qui ont dû faire la guerre sur le front de l’Est. Autre image : celle d’un jeune garçon-soldat dans l’ex-Zaïre : il voit revenir un camion plein de corps ; parmi les corps des morts, il reconnaît celui de son meilleur ami: dans son désespoir, il se sert de l’arme qu’il avait pour tirer autour de lui avant de diriger l’arme contre lui. On pourrait bien sûr multiplier les exemples à l’infini ; le mal est omniprésent ; alors serait-il aussi puissant que le bien ? Ce n’est pas la doctrine de l’Eglise ; depuis que Jésus est apparu dans le monde, le mal n’a pas le dernier mot : revenons encore à l’enseignement de Paul aux Romains : le mal et le bien n’ont pas la même mesure, le mal est défait par la grâce, c’est le thème de toutes les épîtres aux Romains et aux Galates ! Jésus dit que la grâce est une chose que « nous ne méritons pas » quelle que soit notre volonté ; le « pélagianisme » est une hérésie condamnée par l’Eglise. Si , au moment de la déportation à Babylone, les grands prophètes ( Jérémie , Ezéchiel , le Second Isaïe …) ont eu la conscience très nette que mal et douleur ( souffrance ) étaient des choses souvent opposées dans leur cause ( on peut penser également que les civilisations avoisinantes le suspectaient aussi ), cette mentalité n’était pas entrée dans le courant des mœurs en milieu Israëlite ; le livre de Job avait essayé en vain d’ inverser cette tendance … autant dire que différencier mal et souffrance ( ou mal et douleur ) n’est pas une chose naturelle . (mais le Livre de Job n’a été écrit qu’après le retour d’Exil … ) ? Le grand Isaïe disait : « Malheur à ceux qui appellent le bien mal, et mal le bien » (Is 5,20) : est-ce plus tranché que nos croyances présentes, mais est-ce aussi un moyen d’échapper à nos confusions actuelles ? Jésus y est revenu 550 ans plus tard, parce que ces notions n’étaient certainement pas encore courantes ; en Jean 9,2, lors de la guérison de l’Aveugle-Né, Ies apôtres interrogent Jésus : « Est-ce lui qui a péché, ou bien ses parents ? » ; Jésus répondit : « Ni lui, ni ses parents, mais c’est pour que la volonté de Dieu se manifeste ». Il avait répondu de même lors de la chute de la tour de Siloé ou le massacre des Galiléens (en Luc 13, 1 à 11) … Ces réflexions qui auraient dû être courantes depuis la déportation à Babylone en fait ne l’étaient pas, les pharisiens à qui il incombait la tâche d’instruire le peuple le faisaient mal et vont accuser cet aveugle « d’être tout entier plongé dans le péché » ( pas étonnant que le peuple d’Israël soit comme des brebis sans berger ! ) . Donc, Jésus enseigne formellement « la non-imputabilité » du mal, terme peut-être compliqué mais qui invite à ne pas rechercher de cause à la souffrance, et surtout de ne pas rendre inutilement coupables des proches ou la personne elle-même ( mais maintenant encore , il n’est pas certain que ces notions soient admises par tous ). N’accusons pas Dieu du mal qui existe comme cause de toute souffrance « La vraie compagne du mal, c’est la souffrance » nous dit le Cardinal Danneels, et aussi « Dieu n’est pas la cause du mal : Il en est la victime » … bien sûr, on pense à Jésus en l’occurrence. Je ne résiste pas au désir de citer ce qu’écrit le Père Henri Bissonnier dans « la Souffrance et le Souffle », quant à la distinction entre la souffrance et le mal :« Cela dit, répétons que ce qu’il nous paraît capital de souligner, c’est que la souffrance n’est pas le « mal ». Je dirais volontiers que la souffrance caractérise le vécu qui résulte de la conscience d’un mal. De cette précision qui semble de nature à éviter bien des équivoques et des discussions aussi tumultueuses que stériles comme des affirmations aussi péremptoires que simplistes, il résulte non seulement que la notion de souffrance ne doit pas être confondue avec celle de mal, mais qu’il convient de le reconnaître et de le dire : la souffrance , même d’un simple point de vue philosophique peut être un bien . Elle peut l’être du moins au regard des conséquences susceptibles d’en résulter. Par exemple, cette conscience de la présence d’un mal et le vécu pénible qui en découle, qu’elle provoque , peuvent amener précisément à comprendre de lutter contre le mal décelé . Le moins que l’on puisse dire est qu’en soi la souffrance n’est ni bonne ni mauvaise et que tout dépend de l’usage que l’on en fait. Je me suis réjoui d’en recevoir une sorte d’approbation en voyant clairement affirmée et soulignée cette distinction entre mal et souffrance dès le début de la très importante lettre de Jean-Paul II Salvifici Doloris. C’est pourquoi je ne saurais mieux que de reproduire ici les paroles mêmes de ce texte : « On peut dire que l’homme souffre quand il éprouve un mal quel qu’il soit . Dans le vocabulaire de l’Ancien Testament, le rapport entre souffrance et mal se présente clairement comme une identité. En effet, ce vocabulaire ne possédait pas de mot spécifique pour désigner « la souffrance », aussi définissait-il comme « mal » tout ce qui était « souffrance » . Seule la langue grecque – et avec elle le Nouveau Testament (et les traductions grecques de l’Ancien Testament ) – se sert du verbe « paschô » = « je suis affecté de …J’éprouve une sensation , je souffre » et grâce à ce terme ; la souffrance n’est plus directement identifiable au mal ( objectif) , mais elle désigne une situation dans laquelle l’homme éprouve le mal et en l’éprouvant, devient sujet de souffrance… » et plus loin : « L’homme souffre à cause du mal qui est un certain manque, une limitation ou une altération du bien …L’homme souffre en raison d’un bien auquel il ne participe pas , dont il est en un sens dépossédé ou dont il s ‘est privé de lui-même. » Jean-Paul II conclut alors : « Ainsi donc, dans la conception chrétienne, la réalité de la souffrance s’explique au moyen du mal qui d’une certaine façon, se réfère toujours à un bien.» D’abord, la séparation nette entre le premier terme (le mal ) et les deux autres est devenu patent , et net à partir de la déportation des Juifs à Babylone . Cette distinction est donc ancienne. Auparavant, la langue hebraïque n’avait qu’un seul terme pour désigner ces trois significations ; mais, au contact des civilisations mésopotamiennes , elle s’est rendu compte que : -d’une part, même si apparemment elle ne semblait pas avoir de pensée tellement différente des autres civilisations, en ce qui concerne la morale et l’eschatologie , pourtant elle était plus consciente que ces civilisations, que certaines situations étaient plus injustes que d’autres ; sans doute , la conscience personnelle de l’Israëlite était plus avivée ? -d’autre part, elle s’est rendu compte avec plus d’acuité que l’on pouvait être très pauvre et cependant être très proche de Dieu. Le prophète Jérémie, par exemple, en a été un exemple patent (et beaucoup sont restés inconnus sont dans son cas !). Et le Peuple d’ Israël s’est mis à réfléchir au Retour d’Exil sur la rétribution personnelle. Job, qui est très certainement une histoire fictive, est une longue méditation sur des « châtiments » (perte de la santé et de l’aisance matérielle) qui semblent immérités. Seule la civilisation d’Israël a donné à la pauvreté un sens positif, qui n’existait dans aucune autre civilisation. (Mais, bien sûr , le mal et la souffrance existaient dans les autres civilisations . ) Ainsi , le mot « mal » donnait une connotation morale qui n’existe pas dans les deux autres termes … Nous verrons la distinction que fait Jean-Paul II entre mal physique et mal moral … Dans les civilisations de l’Est méditerranéen, les civilisations mésopotamiennes, hittites ou égyptiennes se doutaient certainement qu’il y avait une différence entre mal et souffrance, mais elles n’en avaient pas la clé ; seule la culture hébraïque l’avait cette clé, car elle avait de l’estime envers la pauvreté et l’humilité. La notion de pauvreté, à la différence des Grecs, n’a jamais été une situation méprisée chez les Hébreux ; bien au contraire, elle apparaissait comme une voie privilégiée pour aller vers Dieu (voyons les Psaumes, par exemple). Pour les Juifs, et eux seuls, la pauvreté aussi bien que l‘humilité , était une qualité précieuse dans la voie spirituelle … Chez les Grecs , la pauvreté n’est pas une valeur ( pas plus que l’humilité, d’ailleurs, elle est réservée aux esclaves … ) – on pourrait dire qu’ils l’ont « oubliée » - On a été obligé de « fabriquer » un nouveau mot pour en rendre compte : tapeînosis lorsqu’on a voulu traduire la Bible hébraïque en grec ( version des Septante ) : traduction du mot anaw (anawim au pluriel ) . Jésus n’est pas venu diviniser la pauvreté, Il est venu confirmer une vertu reconnue chez les Juifs, au moins après l’Exil à Babylone. Jésus soulignera cette distinction. Là encore, Il n’est pas venu abolir, mais accomplir .Mais, ces notions n’étaient pas encore complètement acceptées dans le peuple juif! Pour preuve l’interrogatoire des apôtres au sujet de la guérison de l’Aveugle-Né (l’Evangile de Jean au chapitre 9- Jean 9,2), Il interroge ses Apôtres : « A votre avis, est-ce lui qui a péché ou est-ce ses parents ? » - « ? ? ? » - « Ni lui, ni ses parents, reprend-il, c’est pour que la volonté de Dieu se manifeste. » Ni les Apôtres, ni les Pharisiens ne pensaient que la raison d’un déficit ne pouvait être recherché ailleurs que chez les ascendants ou lui-même … Jésus est venu appuyer ce qui avait été pressenti avant lui : confirmer que la pauvreté et l’humilité étaient des valeurs (elles sont présentes dans l’Ancienne Alliance, entre autres dans les Psaumes, nous l’avons vu ), et aussi qu’il ne fallait pas nécessairement chercher un coupable devant une douleur . Il avait répondu de même au sujet de la chute de la tour de Siloë ou le meurtre des Galiléens par Pilate en Luc 13, 1 à 11. (il faut s’abstenir de rechercher des responsables à tout prix .. c’est tout le mérite de la médecine grecque d’avoir étudié les symptômes des maladies sans leur donner de connotation morale .) C’étaient des notions qui étaient le fruit de la réflexion du peuple juif au cours de la déportation à Babylone, mais ces notions n’étaient pas passées partout, et le peuple juif gardait les mêmes croyances que les peuples voisins … Les Pharisiens, qui étaient (ou auraient dû être) les penseurs de ce monde juif vont eux-mêmes accuser cet ex-aveugle « Tu es tout entier plongé dans le péché… » Les Israëlites étaient ainsi « comme des brebis sans berger … » (Matthieu 9,36 et Luc 10,2). Les Pharisiens eux-mêmes, qui auraient dû être les mieux placés pour savoir ces choses là ne les enseignaient pas ou ne les avaient pas intégrées. Jésus enseigne formellement la non-imputabilité du mal, (ne pas rechercher une cause à la souffrance, ne pas rechercher de coupable) . Victimes mais non coupables ! Alors que la tendance est toujours de chercher des coupables à tout. C’est la grande source des progrès de la médecine grecque d’avoir séparé la médecine de la morale : on ne cherche plus de cause ou de responsable au mal : elle s’est détachée de toute recherche morale et s’est concentrée sur l’analyse des faits objectifs. Petite HISTOIRE DU MAL La distinction entre Mal , Douleur , Souffrance est très ancienne comme nous venons de le voir …La séparation Mal-Souffrance (douleur ) est vieille de quelques 2.500 ans ; celle entre douleur et souffrance est beaucoup plus récente ( et plutôt conventionnelle , puisque dans le langage courant , on n’en tient pas tellement compte ): pour les scientifiques la « douleur » exprime surtout les phénomènes objectifs ( neuro-anatomiques ) , mais là-aussi , il y a des déficits qui ne sont pas douloureux, ils n’entraînent pas de douleur, par contre ; ils entraînent une souffrance, par exemple certains syndromes neurologiques ( maladies de Parkinson ou d’Alzheimer, et bien d’autres dégénérescences …) . Quand on dit que la douleur est la « partie objectivable » des syndromes, c’est à dire la partie réservée à la médecine, ce n’est pas tout à fait vrai … (la souffrance existe aussi en médecine) … elle n’est pas seulement la souffrance d’une mère au contact de son enfant malade ou celle d’un prisonnier isolé. (C’est peut être la distinction entre passion et compassion illustrée par Marie à la Croix, la passion est la douleur physique, la compassion, la souffrance partagée ?) La preuve que les choses ne sont pas du tout simple, c’est qu’un des ouvrages pourtant majeurs de Jean-Paul II « Salvifici Doloris », (et si mal connu !) s’appelle dans sa traduction française « Le sens chrétien de la souffrance humaine », alors qu’en Latin et dans d’autres langues latines, c’est « la douleur salvifique ». D’autre part, nous l’avons noté ailleurs, on parle de souffrance fœtale, alors que le fœtus est dépourvu de conscience (apparente) et que l’on pourrait penser que la conscience est nécessaire pour parler de souffrance. (Et même, la douleur, en médecine, est un sujet à controverse, puisque un certain nombre de maladies, nous l’avons vu, ne sont pas douloureuses, tout en étant invalidantes: l’entourage en souffre bien que la douleur soit absente … ) Petite THEOLOGIE DU MAL Pour ce qui est du mal, Jean-Paul II, dans ses catéchèses sur le Credo (Audiences du 4 et du 11 Juin 1986 ) fait la différence entre mal physique et mal moral (nous l’avons vu plus haut) . Le premier – le mal physique – est indépendant de la volonté de l’homme par exemple en cas de calamités naturelles ou de maladies ( mais , il est souvent difficile d’écarter toute responsabilité humaine , ainsi ,par exemple de pluies torrentielles détruisant des logements de fortune construits avec la complicité de promoteurs malhonnêtes… ) . Le second – le mal moral – est directement causé par le péché de l’homme , et celui-là , Dieu ne le veut absolument pas ( par exemple: détournement de fond , agression physique , commercialisation des personnes , etc) . Mais, Dieu le supporte , c’est la conséquence de notre liberté . Le Catéchisme de l’Eglise Catholique (désormais : C.E.C.) sur plusieurs paragraphes nous enseigne sur le « mal comme source de Providence ». Comme nous l’avons signalé plus haut, une fausse symétrie fait croire que « bien et mal » s’affrontent à parts égales ; ceci ne serait vrai que si la religion chrétienne était des religions « dualistes » qui ont souvent été celles de l’Est Méditerranée. Or « bien et mal » ne s’affrontent pas également : Dieu permet le mal, mais il ne le souhaite pas ; Il ne peut empêcher sa survenue, l’empêcher serait limiter la liberté de l’homme ! Le mal n’a pas d’existence indépendante de Dieu : Il le permet seulement. Au n° 309 du C.E.C. : « Si Dieu le Père Tout-Puissant, Créateur du monde ordonné et bon, prend soin de toutes ses créatures, pourquoi le mal existe-t-il ? A cette question aussi pressante qu’inévitable, aussi douloureuse que mystérieuse, aucune réponse rapide ne suffira. C’est l’ensemble de la foi chrétienne qui constitue la réponse à cette question : la bonté de la création, le drame du péché, l’amour patient de Dieu qui vient au devant de l’homme par ses Alliances, par l’Incarnation rédemptrice de Son Fils, par le don de l’Esprit, par le rassemblement de l’Eglise, par la force des Sacrements, par l’appel à une vie bienheureuse à laquelle les créatures libres sont appelées à consentir, mais à laquelle elles peuvent aussi d’avance par un mystère terrible, se dérober. Il n’y a pas un aspect du message chrétien qui ne soit pour une part une réponse au mystère du mal. Au n° 310 : « Pourquoi Dieu n’a-t-il pas créé un monde aussi parfait qu’aucun mal ne puisse y exister ? Selon sa puissance infinie, Dieu pourrait toujours créer quelque chose de meilleur (St. Thomas d’Aquin) Cependant dans sa sagesse et sa bonté infinie, Dieu a voulu librement créer un monde en « état de cheminement » vers sa perfection ultime. Ce devenir comporte dans le dessein de Dieu la destruction de certains êtres. Avec le bien physique existe donc aussi le mal physique … Au n° 311 du C.E.C. « Les Anges et les Hommes, créatures intelligentes et libres, doivent cheminer vers leur destinée ultime par choix libre et amour de préférence. Ils peuvent donc se dévoyer. En fait, ils ont péché. C’est ainsi que le mal moral est entré dans le monde … Dieu permet seulement ce mal moral respectant la liberté de sa créature : « Car le Dieu Tout-Puissant, puisqu’Il est souverainement bon ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses œuvres s’Il n’était pas assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même » (Saint Augustin) Au n° 312 du même C.E.C. : « Ainsi avec le temps, on peut découvrir que Dieu dans sa Providence toute puissante peut tirer un bien des conséquences d’un mal même moral causé par ses créatures « Ce n’est pas vous , dit Joseph à ses frères, qui m’avez envoyé ici, c’est Dieu … le mal que vous aviez dessein de me faire, le dessein de Dieu l’a tourné en bien, afin de sauver la vie d’un peuple nombreux (Genèse 45,8; 50,20). Du mal moral le plus grand qui ait jamais été commis, la rejet et le meurtre du Fils de Dieu, causé par les péchés de tous les hommes, Dieu, par la surabondance de Sa Grâce, a tiré le plus grand des biens : la Glorification du Christ et notre Rédemption. Le mal n’en devient pas pour autant un bien : « Tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu. » (Rm 8,28) Au n° 313 : « Et Saint Thomas More, peu avant son martyre, console sa fille : «Rien ne peut arriver que Dieu ne l’ait voulu. Or tout ce qu’Il veut, si mauvais que cela puisse paraître, est cependant ce qu’il y a de meilleur pour nous » Au n° 314 : « Nous croyons fermement que Dieu est le Maître du monde et de l’histoire. Mais les chemins de sa Providence nous sont souvent inconnus. Ce n’est qu’au terme, lorsque prendra fin notre connaissance partielle, lorsque nous verrons Dieu « face à face » (1 Co 13,12) que les voies nous serons pleinement connues, par lesquelles, même à travers les drames du mal et du péché, Dieu aura conduit sa création jusqu’au repos de ce sabbat définitif, en vue duquel il a créé le ciel et la terre. » Plus loin au n° 1040 : « Nous connaîtrons le sens ultime de toute l’œuvre de la création et de toute l’économie du salut et nous comprendrons les chemins admirables par lesquels sa Providence aura conduit toute chose vers sa fin ultime. Le Jugement Dernier révèlera que la justice de Dieu triomphe de toutes les injustices commises par ses créatures et que son Amour est plus fort que la mort. » Dans ce long extrait du C.E.C., nous voyons, entre autres, que l’homme peut malheureusement « échapper » à toute signification du mal, mais Jean Paul II, puis Benoît XVI, nous proposent la limite imposée au mal : la miséricorde. D’une part, dans le Christ, Fils de Dieu fait homme, le Père révèle que la souffrance possède une valeur salvifique. Dans la faiblesse du Christ acceptée par amour, le mal ne peut prévaloir. Jean Paul II dans « Mémoire et Identité » dit au n° 70 (cité par le Cardinal Ruini à la 7° station du Chemin de Croix 2.010) « La limite imposée au mal, dont l’homme est le fauteur ou la victime, c’est en définitive la divine miséricorde » Citons, à cet égard, les paroles de Benoît XVI au cours de son homélie pour les trois ans passés depuis le décès de Jean Paul II : « … .Le Serviteur de Dieu Jean Paul II avait connu et vécu personnellement les terribles tragédies du XX° siècle, et il se demanda pendant longtemps ce qui pouvait freiner la montée du mal. La réponse ne pouvait se trouver que dans l’amour de Dieu. Seule la divine Miséricorde est en effet en mesure d’imposer une limite au mal ; seul l’amour tout puissant de Dieu peut vaincre la violence des méchants et le pouvoir destructeur de l’égoïsme et de la haine. » (Homélie du 2 avril 2008) Le mal ( la souffrance ) continue de nous atteindre , le croyant est éprouvé comme l’or qui subit l’épreuve du feu , il nous apprend par elle la patience de la foi ( 1 Pierre 1, 6-7 , citant Siracide 2,5 ) . Mais, dans cette sagesse de Dieu , « contre elle , le mal ne saurait prévaloir » ( Sagesse 7,30 ) , la confiance est essentielle : « Le Seigneur est mon Pasteur …passerais-je un ravin de ténèbres , je ne crains aucun mal » ( Ps 23, 1 et 4 ) . La Providence divine se révèle ainsi comme le cheminement de Dieu à côté de l’homme. Dans Gaudium et Spes , le Concile Vatican II disait : « C’est par le Christ et dans le Christ que s’éclaire l’énigme de la douleur et de la mort , qui hors de l’Evangile nous écrase » « Si le Seigneur a d’un côté permis le péché, il a, de l’autre, avec son amoureuse sollicitude paternelle, prévu les voies de la réparation, de la rédemption, de la justification et du salut à travers l’amour. La liberté, en effet ; est ordonnée à l’amour ; sans liberté il ne peut y avoir d’amour. » (Jean-Paul II) En Matthieu 6,33 (dans le Discours sur la Montagne), Jésus nous avait dit : « Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et tout le reste vous sera donné par surcroît. » Entre le Mal et l’Amour, l’Amour a toujours le dernier mot (dans l’Epître aux Romains, Paul nous dit que le péché et la grâce n’ont pas la même mesure, des versets 15 à 19 du chapitre 5) Le problème du mal n’a pas son origine avec le Christ, évidemment ; il lui est bien antérieur ; Lui-même a dit : « Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » Il n’a rien annoncé de neuf, mais pourtant Il a fait toutes choses nouvelles (cf. 1 Jean 2, 7-8 « Mes bien aimés, ce que je vous écris n’est pas un commandement nouveau… » ) Le mal s’est « décanté » de la douleur et de la souffrance, ainsi que nous l’avons dit, à partir de l’Exil à Babylone (le Code d’Hammourabi plus ancien –quelques 2.500 ans avant J.C. -, contemporain de la Première Civilisation Babylonienne, avait une haute notion de la souffrance, mais elle n’avait pas théorisé en la matière). Les civilisations avoisinantes avaient certainement conscience que mal et souffrance n’avaient pas même signification … au cours d’affrontements guerriers, par exemple, le mal (ou la mort) étaient dans un camp ; la souffrance était dans l’autre, toutes les armées le savaient. L’ANCIENNE ALLIANCE Dans la Bible elle-même, le même mot a longtemps désigné, et le mal, et la souffrance (ou la douleur) Ce n’est qu’avec la traduction grecque de la Septante que des mots différents sont apparus. Mais auparavant, les grands Prophètes de l’Exil à Babylone (Ezéchiel, Jérémie, celui que l’on appelle le Second Isaïe) , et plus tard, lors du retour à Jérusalem, les réflexions de Job , souligneront la distinction fondamentale entre le mal et la souffrance . Jésus est venu entériner cette distinction … pas complètement avalisée en Israël, puisque les Pharisiens eux-mêmes brutaliseront l’Aveugle-Né guéri (Jean 9,2) en lui disant qu’ « il était tout entier dans le péché depuis sa naissance ! » . Cette mentalité est loin d’avoir disparu, maintenant encore. « Nous avons tous chevillé en nous que le mal et la souffrance sont liés à la faute. » (Père M.J. Le Guillou) Les Judéens pensaient que Jérusalem était hors d’atteinte de toute armée étrangère, puisque Dieu Lui-même y avait fait sa demeure : la Cité érigée par David était la Demeure de l’Arche d’Alliance et le Siège du Temple de Yahweh … même les menaces babyloniennes semblaient illusoires, et que, plusieurs décades auparavant, le Seigneur avait fait fuir Sennachérib et l’armée assyrienne). Dieu lui-même la protégeait certainement … certes, Isaïe quelques 150 ans plus tôt avait prédit : « Ce peuple m’honore des lèvres Mais son cœur est loin de moi Vain est le culte qu’ils me rendent Les doctrines qu’ils enseignent ne sont que des préceptes humains » (Isaïe 29,13, cité par Marc 7, 6-7). Ces avertissements seront peu suivis ; Jérusalem sera prise, l’Arche disparue, le Temple détruit par les armées de Nabuchodonosor. Alors, pour Israël commencera une période de doute : Dieu lui-même semble avoir pris le parti de ses ennemis ! La déportation à Babylone a certainement été l’objet « d’un retour sur soi » : Dieu ne nous a pas abandonné, Il veut que nous changions ! Ezéchiel, Jérémie, le second Isaïe vont renouveler la conscience du peuple, ou au moins d’un petit « reste ». De la réflexion des Scribes, va naître une nouvelle réflexion sur le mal. Il est certain que la réflexion sur le mal tient une très grande place dans la Bible : comme nous l’avons vu, ce problème était majeur dans toutes les civilisations environnantes, mais seul Israël a su « décrypter » sa signification (Dieu l’a aidé avec sa Révélation) Dans les nombreux livres qui traitent de ce sujet, isolons-en certains: par Exemple, le Livre de Jérémie (nous aurions pu prendre le Livre d’Ezéchiel, puisqu’ il est aussi un des grands prophètes de la Déportation) Et un livre poétique (et sapientiel) : celui de Job Nous verrons ensuite la réponse que Jésus donne au mal. JEREMIE est un des grands prophètes de l’Ancien Testament. Certes, il a commencé à prophétiser une cinquantaine d’années avant l’Exil, mais il a vécu les premières années de cet Exil : alors qu’il prêchait la soumission (temporaire) à Nabuchodonosor, les rois de Juda préconisaient une alliance avec l’Egypte, il était donc considéré comme traître par ces dirigeants … ( il pensait que Nabuchodonosor était temporairement le plus puissant en Orient, et que l’Egypte ne pouvait s’opposer à lui … ) ; le meurtre de l’ intendant de Nabuchodonosor à Jérusalem, après la prise de celle-ci, a conduit certains des compatriotes de Jérémie à l’emmener en Egypte où il est mort ( alors qu’il avait toujours déconseillé cette alliance avec l’Egypte ! ) . Il n’a sans doute pas connu la Déportation à Babylone. A deux reprises, comme un rappel, Jérémie va avoir une Consécration de Dieu de son Appel, il va vouloir se dérober, mais en vain (comme Jonas…). On va le prendre pour un prophète de malheur, alors qu’il cherchera seulement à prévenir Israël. Jérémie sera celui qui a découvert la religion du cœur. Avec lui, Dieu écrira avec le Saint-Esprit sur nos cœurs » (Jérémie 31,33, cité en Hébreux 8,8) JOB, au contraire de Jérémie, a été écrit quelque 150 ans plus tard et ainsi bien après le retour de l’Exil. C’est un personnage fictif, non juif (on peut admirer là l’universalisme du peuple juif) ; c’est la mise par écrit d’une longue tradition de réflexion du Proche et Moyen Orient qui dura plusieurs siècles et qui s’est transmise oralement. Job est une longue méditation sur le mystère du mal. Job est un « juste », affligé brutalement de toutes sortes de maux, dont la perte de ses biens matériels (qui étaient fort grands) et celle de ses enfants … c’est une parabole ; cette perte est incompréhensible pour lui ; c’est une méditation sur le sort de beaucoup, qui sont moins nantis ( par la misère, la maladie ou le handicap … ) Dieu ne les aimerait-il pas, les aurait-il oubliés ? Trois amis de Job ( puis un quatrième revenant à la charge ) essaient de lui faire croire que, s’il souffre autant, c’est qu’il a dû commettre une faute qui lui est demeurée cachée … ce que Job nie, aucune faute qu’il aurait commise ne mériterait pareil châtiment. Mais l’homme aura un défenseur « Je sais, moi, que mon Défenseur est vivant, que ce dernier surgira de la poussière » (Job 19,25-26).Le mal sert donc à dévoiler le fond du mystère de Dieu, nous faire entrer dans l’intime de son être qui est vérité et miséricorde. En réalité, la souffrance n’est là pour Job que comme pédagogie de Dieu n’interrompant pas son dessein de miséricorde. A la fin, Dieu lui donne raison, et le rétablit dans ses biens. Ce qui est important, c’est que c’est sans doute la première fois dans l’antiquité, qu’est mise officiellement par écrit ce principe de non-rétribution sur terre des mérites de l’homme. EZECHIEL, avant lui, au moment de l’Exil à Babylone avait souligné que notre responsabilité était personnelle devant le mal (jusqu’à lui, la société dans laquelle il vivait était, elle, responsable, ce qui, bien sûr, déresponsabilisait l’homme ) : « Convertissez-vous et détournez-vous du péché, qu’il ne soit plus pour vous occasion de mal, débarrassez-vous de tous les péchés que vous avez commis, faites-vous un cœur nouveau et un esprit nouveau . Pourquoi vouloir mourir, maison d’Israël ? Je ne prends pas plaisir à la mort de qui que ce soit, Oracle du Seigneur Yahweh ; convertissez-vous et vous vivrez. » (Ezéchiel 14,12-23, 18, et 33, 10-20 ) Les réflexions nées lors de l’Exil vont aboutir à souligner la dissociation du mal et de la souffrance. Ces réflexions seront entérinées dans d’autres livres de la Bible, entres autres, Qohélet (l’Ecclésiaste ) et les Psaumes. Qohélet n’a pas craint d’affirmer que la théorie de la rétribution- Dieu rétribue immédiatement les justes et les injustes, ici-bas - est incompatible avec l’expérience . (ce qu’avait déjà souligné le livre de Job ) Le Psaume 34 (33) nomme plusieurs fois le problème du mal - il est d’ailleurs cité dans la première lettre de Pierre ( 1P 3, 10-12 ) « Qui veut, en effet, aimer la vie et voir des jours heureux, doit garder sa langue du mal et ses lèvres des paroles fourbes, S’éloigner du mal et faire le bien, chercher la paix et la poursuivre, Car le Seigneur a ses yeux sur les justes et tend l’oreille à leurs prières Mais le Seigneur tournera sa face contre ceux qui font le mal ».Ce psaume, qui date d’avant la Déportation à Babylone, ne fait pas directement la différence entre mal et souffrance comme nous l’avons défini ; cependant, il lui ouvre la porte, de même le Psaume 22 (21), que le Christ citera lors de sa Crucifixion. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? ». Ce sera la seule parole du Christ en Croix donnée par Matthieu et Marc. LA NOUVELLE ALLIANCE Le CHRIST ne répond pas directement à la question de la signification du mal, parce qu’il s’agit là du mystère de Dieu. Jésus déplace notre regard de l’origine du mal à sa fin, et oriente plutôt vers la conversion. Autrement dit, le Christ veut utiliser le péché, la maladie et le mal, pour orienter tout homme vers Dieu. Il est venu annoncer aux hommes la nécessité de la conversion, du retournement des cœurs : le mal doit être l’occasion d’une metanoïa, d’une conversion. La rencontre du mal, c’est vraiment la rencontre avec le péché. De la rencontre avec le mal, jaillissent la résurrection et la gloire. Dans la Mort, le Christ triomphe de notre mort en Ressuscitant. L’homme doit donc choisir, soit écouter la Parole de Dieu ; soit se centrer sur soi-même qui correspond à une fermeture vis-à-vis de Dieu (cette tentation a été bien exprimée par Dostoïevski avec le « Grand Inquisiteur » dans les Frères Karamazov, c’est aussi la tentation à laquelle succomberont tous les régimes totalitaires ; Dostoïevski, par la voix d’Ivan Karamazov, dit aussi que le plus grand scandale est la souffrance d’un enfant …). La rencontre avec le mal, c’est d’abord souffrir, c’est souffrir du péché. Cette individualisation du mal va aller de pair avec une plus grande individualisation du péché. Lors de la Passion, le Christ ne va pas souffrir le mal, du péché, sans lendemain ; trois jours après, Sa Mort sera suivie de sa Résurrection : Il l’avait annoncée, les Apôtres s’en sont souvenus ; dans les trois annonces de la Passion que relate chacun des Synoptiques, cette annonce de la Passion est suivie de l’annonce de la Résurrection. Cette Résurrection sera sa Glorification. Le Seigneur a laissé le péché aller jusqu’au bout de sa logique, c'est-à-dire, jusqu’à tuer Dieu. Le Christ passe par la Croix pour parvenir au triomphe suprême, triomphe qui se réalise au travers d’une mort infâme, affrontée en pleine lucidité. Le Christ laisse triompher le mal en apparence , mais en l’absorbant dans son OUI d’obéïssance et d’amour adressé à son Père. Le Ressuscité n’anéantit pas le Crucifié. Les plaies du Ressuscité sont un rappel incessant de sa mort. Si le Ressuscité n’est pas le Crucifié, notre foi est vaine, nous dit Saint Paul. Nous sommes appelés à partager cette Passion de Jésus, mais, au cœur de ces réalités, c’est à la miséricorde que revient le véritable triomphe. Après la Résurrection, les Apôtres, tout en restant dans le monde, ne sont plus dans le monde : « Je ne Te prie pas de les enlever du monde, mais de les garder du mauvais » (Jean 17,15 ) . Les persécutions à eux non plus ne seront pas épargnées. Le fondement de la morale chrétienne est tout simplement : le Christ Ressuscité ; il ne s’agit pas d’une évasion du monde, mais d’une vie cachée en Dieu, car notre foi nous fait découvrir que le cœur de notre vie n’est pas ce qui se voit. « Vous vous êtes dépouillés du vieil homme avec ses agissements, et vous avez revêtu le nouveau, celui qui s’achemine vers la vraie connaissance en se renouvelant à l’image de son Créateur ; là, il n’y a plus que le Christ, qui est tout et en tout » ( Colossiens 3,3-9 ). La morale chrétienne consiste à regarder le Christ, à se nourrir de sa vie pour parvenir à reproduire son comportement, c’est la nourriture du chrétien, l’Eucharistie, qui opère cette transformation. Saint Paul déclare dans la seconde lettre aux Corinthiens : « Le Seigneur m’a déclaré : Ma grâce te suffit, Ma puissance se déploie dans la faiblesse » puis « Car, lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » ( 2 Corinthiens 12, 9 et 10 ). Auparavant, il avait dit : « Ce trésor, nous le portons dans des vases d’argile pour que cet excès de puissance soit de Dieu et ne vienne pas de nous » ( 2 Corinthiens 4,7 ) La seule réponse au scandale du mal, c’est la Résurrection du Christ ; nous sommes tous morts avec le Christ, pour ressusciter avec Lui. Nous sommes des fils adoptifs, Comme Il nous l’a promis, capables de dire au Père : « Abba » (Romains 8,15 et Galates 4,4).Dans notre pauvreté, Il nous a adoptés. La mort du Christ en Croix, c’est la mort du péché, c’est aussi la mort de la mort. Comme le dit la Liturgie Orthodoxe : « Le Christ a détruit la mort ; par sa mort, Il a donné la vie ». La Résurrection est comme le noyau formateur de ce monde en fusion, qui l’entraîne vers la glorification. (Père Marie-Joseph Le Guillou, Du scandale du mal à la rencontre du Ressuscité, éditions St Paul) Saint Pierre nous dit la même chose, dans sa première lettre : « Dans la mesure où vous participez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous, afin que lors de la révélation de sa Gloire, vous soyez dans la joie et l’allégresse. Heureux si vous êtes outragés pour le Nom du Christ, car l’Esprit de Gloire, l’Esprit de Dieu repose sur vous » (1 Pierre 4,13-14). Auparavant, il avait dit : « C’est bien à cela que vous êtes appelés- c’est-à-dire à supporter la souffrance …Dans son Corps, il a porté nos péchés sur le bois de la Croix, afin que nous puissions mourir à nos péchés et vivre pour la justice. C’est par ses blessures que vous avez été guéris. Vous étiez errants comme des brebis ; mais, à présent, vous êtes revenus vers le berger qui veille sur vous » (1 Pierre 2, 24-25) Petite SOCIOLOGIE DU MAL On peut se demander - et en fait c’est une certitude – si nos sociétés marchandes ne favorisent pas ce « relativisme moral » , favorisant la consommation par le biais d’un matérialisme pratique , qui est sans doute une fuite ou une méconnaissance de valeurs plus hautes . En fait , ce qui est certain , c’est que la valeur suprême , même si elle n’est pas toujours reconnue , ou si on s’en défend , serait l’argent ( même si le monde vit pour lui sans le savoir ) . Jésus nous disait cependant : « Vous ne pouvez servir deux maîtres … »Ce second maître (Mammon) agit sur nos capacités à discerner le Bien du Mal. : « Malheur à celui qui appelle le Bien, Mal, et le Mal, Bien Qui fait des ténèbres, la lumière, et de la lumière, les ténèbres. » C’est le grand Isaïe qui le disait déjà 7 siècles avant notre ère (Isaïe 5,20) C’est un des symptômes de la grande confusion régnante, ce n’est donc pas nouveau … « La racine commune de toutes ces tendances est le relativisme éthique, qui caractérise une grande part de la culture contemporaine. Beaucoup considèrent que ce relativisme est une condition de la démocratie, parce que seul il garantirait la tolérance, le respect mutuel des personnes et l’adhésion aux décisions de la majorité, tandis que les normes morales, tenues pour objectives et source d’obligation, conduiraient à l’autoritarisme et à l’intolérance. Mais, la problématique du respect de la vie fait précisément apparaître les équivoques et les contradictions accompagnées de terribles conséquences concrètes qui se cachent derrière cette conception. … Lorsque une majorité parlementaire ou sociale décrète la légitimité de la suppression de la vie humaine non encore née, même à certaines conditions, ne prend-elle pas une décision « tyrannique » envers l’être humain le plus faible et sans défense. La conscience universelle réagit à juste titre devant ces crimes contre l’humanité dont notre siècle a fait la triste expérience … Au n°24 de la même encyclique (Evangelium Vitae), Jean Paul II nous dit : « Quand la conscience, cet œil lumineux de l’âme (cf. Mt 6 ,22-23) appelle « bien, le mal et mal, le bien » (Isaïe 5,20), elle prend le chemin de la dégénérescence la plus inquiétante et de la cécité morale la plus ténébreuse ». De même, en Jérémie : « Ainsi parle Yahweh Maudit l’homme qui se confie en l’homme : qui fait de la chair son appui et dont le cœur s’écarte de Yahweh Il est comme un chardon dans la steppe, il ne ressent rien quand arrive le bonheur. Il se fixe aux lieux brûlés du désert, terre salée où nul n’habite … Béni soit l’homme qui se confie en Yahweh, et dont Yahweh est la foi Il ressemble à un arbre planté au bord des eaux qui tend ses racines vers le Courant. Il ne redoute rien quand arrive la chaleur Son feuillage reste vert, et dans une année de sécheresse, il est sans inquiétude et ne cesse pas de porter du fruit … Moi, Yahweh , je sonde le cœur , je sonde les reins pour rendre à chacun selon sa conduite , selon le fruit de ses œuvres . » (Jérémie 17, 6-8) Et, Matthieu, citant Isaïe (Is 6, 9-10 ) dit en 13, 14-16 ( au moment du Discours sur la Montagne, et après la Parabole du Semeur, repris par Marc et par Jean en 12,54 ): « Vous aurez beau entendre, vous ne comprendrez pas ; vous aurez beau regarder , vous ne verrez pas, C’est que l’esprit de ce peuple s’est épaissi Ils se sont bouché les oreilles, ils ont fermé les yeux De peur que leurs yeux ne voient, que leurs oreilles n’entendent, que leur esprit ne comprenne, qu’ils ne se convertissent et que Je ne les guérisse » Plus loin, il cite encore Isaïe (Isaïe 29,12 ) avant la deuxième multiplication des pains « sur la surdité » du cœur. Jérémie avait dit la même chose à la population de Jérusalem, mais en vain : le peuple sera déporté à Babylone. Tout n’est pas aussi simple : la limite au lieu d’être franche en dehors de nous , passe au dedans de nous … Là commence le risque de confusion … La confusion entre le bien et le mal est sans doute le plus grand écueil de notre temps (il l’a sans doute aussi été pour les civilisations précédentes) Le curé de Saint Denis de la Chapelle (dans le XVIII° arrondissement de Paris ) employait une comparaison évocatrice en parlant des « Montres Molles » de Salvador Dali . Il avait la conviction que la foi du Français n’est pas disparue, qu’elle est seulement « assoupie » sous les coups du consumérisme. Mais, la naissance à un état de civilisation passe par là … Les commentaires de Joseph Ratzinger au Chemin de Croix du Colisée (Vendredi Saint 2.004, quelques jours avant la mort de Jean-Paul II), à la 8° station (Jésus rencontre les femmes de Jérusalem ), nous éclairent sans doute : « Ecouter Jésus alors qu’Il fait des reproches aux femmes de Jérusalem qui le suivent et qui pleurent sur Lui nous fait réfléchir. Comment le comprendre ? Ne s’agit-il pas des reproches adressés à une pitié sentimentale qui ne devient pas conversion et foi vécue ? (dans l’introduction, il nous avait dit que cette pitié valait tout de même mieux que l’insensibilité prônée par les stoïciens… ) Il ne sert à rien de pleurer sur les souffrances de ce monde, avec des paroles et par des sentiments, alors que notre vie continue toujours égale à elle-même. C’est pourquoi le Seigneur nous avertit du danger dans lequel nous sommes nous-mêmes. Il nous montre la gravité du péché et la gravité du jugement. Malgré tous nos discours effrayés devant le mal et la souffrance des innocents, ne sommes-nous pas trop enclins à banaliser le mystère du mal ? En définitive, de l’image de Dieu et de Jésus, nous ne retenons peut-être que l’aspect doux et aimable , alors que nous avons évacué tranquillement l’aspect du jugement ? Nous nous demandons si Dieu peut encore prendre notre faiblesse au tragique. Car nous ne sommes que des hommes ! Mais en regardant les souffrances du Fils, nous voyons toute la gravité du péché, nous voyons qu’il doit être expié jusqu’à la fin pour être vaincu. Le mal ne peut pas continuer à être banalisé devant l’image du Seigneur qui souffre. A nous aussi, le Seigneur déclare : ne pleurez pas sur moi, pleurez sur vous-mêmes …car si l’on traite ainsi l’arbre vert, que deviendra l’arbre sec ? » «Tu nous appelles à sortir de la banalisation du mal dans laquelle nous nous complaisons ,de manière à pouvoir continuer notre vie tranquille . Tu nous montres la gravité de notre responsabilité, le danger d’être trouvés coupables et stériles le Jour du Jugement. Aide-nous à ne pas nous contenter de marcher à côté de Toi, ou d’offrir seulement des paroles de compassion ». Le cancer qui mine notre civilisation (il en a miné d’autres avant) est plutôt celui du relativisme : tout se vaut, ou plutôt tout a le droit de s‘exprimer. Le plus grand danger du monde actuel est la confusion du bien et du mal, c'est-à-dire un scepticisme vis-à-vis des valeurs. Ce relativisme débouche sur une frénésie de consommation. Ce « consumérisme » va agir telle une drogue, source d’un matérialisme pratique qui n’a que peu à voir avec d’autres matérialismes, ceux-la théoriques. La société occidentale a inondé la planète avec des biens de consommation et l’illusion que les biens matériels sont indispensables au bonheur de l’être … illusion, car elle débouche sur une morale individualiste qui finit par être la loi du plus fort et ou les faibles et les handicapés, pour ne pas parler des enfants pas encore nés ou les adultes « improductifs » sont marginalisés, sinon exclus … ce qui, bien sûr, est le contraire de ce à quoi tendent les démocraties. L’indifférentisme est le pire des maux. Cette indifférence vis-à-vis de la vérité mène sans doute à l’intolérance (par paresse ?) : la tolérance devient intolérante, aussi paradoxal que cela puisse paraître, lorsque la pensée risque de « quitter les clous ».C’est un grand mal pour nos sociétés occidentales, car il pousse n’importe quel groupe extrémiste (de droite comme de gauche), à prendre le pouvoir. Un livre du Père Michel Schooyans (agrémenté d’une lettre de Jean- Paul II) se nomme « dérive totalitaire du libéralisme » montre que l’issue actuelle de l’évolution économique si l’on n’y prend pas assez garde est une dérive totalitaire, le libéralisme se transformant en une dictature (économique ?) ; en effet, malgré les racines communes, « libéralisme » et « liberté » ne s’identifient pas et sont même opposés. Le premier est l’héritier des idées de Thomas Hobbes (1588-1679), anglais, agnostique, et matérialiste, sinon athée, ajusté plus tard par la pensée de Adam Smith, écossais, (1723-1790) , ce dernier « prônait le travail puisque celui-ci créait des richesses que l’homme allait économiser » . Sir John Keynes (1883- 1946), lui, économiste de cette première moitié du XX° siècle, a renversé la morale, en montrant qu’il fallait pousser à la consommation sans se préoccuper d’une éventuelle solvabilité. Exit toute morale, évangélique en particulier et même toute exaltation du travail. Le matérialisme est devenu « roi » (rédigé avant la crise bancaire de 2008). C’est la loi du plus fort. La haine est une forme extrême du mal … surtout apparemment irrationnelle. Elle apparaît dès les premières pages de la Bible : meurtre d’Abel par Caïn, jalousie d’Ismaël et d’Isaac, rivalité d’Esaü et Jacob, jalousie des autres fils de Jacob envers Joseph … Marguerite Léna (numéro spécial 216 de Christus sur la Haine, Oct. 2006) dit que Max Scheler, s’il a finement analysé le Ressentiment (l’Homme du Ressentiment de Max Scheler chez Gallimard) en disqualifiant les positions de Nietszche. Ce dernier en faisait une conséquence de la morale chrétienne. Scheler démontre que ces notions que Nietszche combattait sont en fait celles de la philosophie des Lumières et non celles du christianisme. Marguerite Léna dit qu’il n’a pas été au bout de sa pensée, et qu’il faut sans doute compléter ces pensées en soulignant que dans la haine, il y a une composante qui n’est pas seulement morale : de là vient sa permanence, son irréductibilité, son absence d’objet propre. La crise la plus récente et qui n’est sans doute pas finie, est la «crise des banlieues » (on peut en rapprocher aussi la crise des jeunes palestiniens dans les attentats-suicides) … D’ailleurs, le film inspirant ces crises des banlieues ne s’appelle t-il « la Haine » ? C’est sans doute une forme de désespoir devant un avenir apparemment bouché … Marguerite Léna dit que « la foi chrétienne n’est pas une morale, mais la rencontre avec le Christ ressuscité ». Elle souligne que la seule arme à opposer à la haine est … l’absence d’armes, c'est-à-dire l’amour évangélique, « amour désarmé. » La haine, sans objet, révèle son véritable visage « celui du menteur et homicide depuis le commencement », et son véritable objet : elle est méconnaissance, et déni du Père, cette haine « sans raison », c’est la haine tout court, celle qui ne naît pas en réaction à une injustice subie.» ? Jésus cite à trois reprises le Psaume 34 (35) « Sans raison, ils m’ont tendu leur filet, creusé pour moi une fosse (v.7) … ils se rient de ma chute, ils s’attroupent, des misérables s’attroupent contre moi, des gens inconnus qui déchirent à grands cris (v.15) … qu’ils n’aient plus à rire de moi, ceux qui me haïssent injustement. Et ceux qui me détestent sans raison, qu’ils cessent leur clin d’œil ! (v. 19 ) » . On pressent alors que le seul antidote à opposer à la haine est un amour lui-aussi « sans raison » : dans les limites de la simple raison, la haine véritable est tout simplement absurde : aussi, «la résistance à la haine ne peut s’opérer qu’à travers la prière, car elle requiert un amour plus fort que la haine, un amour lui aussi sans raison. En se taisant devant le grand prêtre, en se taisant devant Pilate, Jésus convoque à son procès, jusqu’à la fin de l’histoire, les juifs et les païens. » Jésus, lors de sa Passion, n’a plus que son Silence à opposer aux Juifs qui l’accusent et aux Romains « Jesus autem tacebat », et aussi aux invectives de la foule hurlante qui réclame la libération de Barabbas. Cette impuissance sera maximale à la Croix. Dieu immobilisé est sujet à tous les quolibets. Ce destin sera plus tard celui de tous les Apôtres, puis celui de tous les disciples du Christ. Leur persécution sera la règle commune. Les Apôtres l’avaient annoncé dans les Evangiles, (Matthieu au chapitre 24, Marc au chapitre 13 et Luc au chapitre 21). Jean, quant à lui, en parle au chapitre 15 : Aux versets 18 et 19, il nous dit : « Si le monde a de la haine contre vous, sachez qu’il en a eu contre moi. Si vous apparteniez au monde, le monde vous aimerait, car vous seriez à lui. Mais, vous n’appartenez pas au monde, puisque Je vous ai choisis en vous prenant dans le monde : voilà pourquoi le monde a de la haine contre vous » Puis deux versets plus loin : « Celui qui a de la haine contre Moi a de la haine aussi contre Mon Père … ainsi s’est accomplie cette Parole écrite dans leur Loi : ils m’ont haï sans raison (Psaumes 34,19 et 68,5) » Jean, dans la seconde partie de son Chapitre 15 de son Evangile nous parle de la haine Paul en Ephésiens souligne cette présence de cette haine (Eph 2, 14-17) : (La haine est malheureusement un évènement « incontournable » de la vie de tout chrétien : elle l’est en particulier en Asie où dans certains pays, il ne fait pas bon être chrétien, Pakistan, entre autres ; le martyre est souvent la seule issue !) « Mais maintenant en Jésus-Christ, vous qui étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang de Jésus. C’est Lui, le Christ qui est notre Paix : des deux, Israël et les païens, Il a fait un Seul Peuple : par Sa Chair crucifiée, Il a fait tomber ce qui les séparait, le mur de la haine, en supprimant les prescriptions juridiques de la loi de Moïse. Il voulait ainsi réconcilier les uns et les autres en faisant la paix, et créer en Lui un seul Homme Nouveau. Les uns et les autres, réunis en un seul corps, Il voulait les réconcilier avec Dieu par la Croix : en sa personne, Il a tué la Haine » En deçà de cette haine qui est cette forme extrême du mal, plusieurs stades la précèdent :le scandale qui constitue un arrêt de notre évolution morale, arrêt devant une forme de mal qui nous désarçonne … d’où une suspension plus ou moins longue, un arrêt quelquefois très douloureux … un être scandalisé a besoin d’être aidé pour sortir de sa solitude.- il y a une attitude subséquente devant le mal, c’est celle de la révolte Le scandale, qui immobilise toujours, a besoin d’être dépassé. Cette révolte est l’objet de toute l’œuvre de Camus, par exemple. Ce scandale peut aussi être une réaction de panique et d’angoisse, qui peut conduire à la révolte ; mais aussi, au contraire, au désespoir et au suicide. La révolte veut dépasser le scandale, elle veut avoir raison. Il est dur, en effet, de rester dans la scandale … on se jette alors dans la révolte ou l’on tombe dans le désespoir … on ne peut pas dire que toute révolte est illégitime, mais il faut bien prendre garde avant de la déclarer nécessaire, à cause de l’anarchie à laquelle elle conduit, anarchie qui risque d’entraîner un désordre encore plus grand que celui contre lequel on se révoltait. (Camus a écrit « l’homme révolté » : mais cette révolte est stérile si elle n’est pas dépassée par une foi … ) L’attitude devant le mal ne peut être philosophique : la philosophie est désarçonnée devant le mal, elle n’a pas d’explication (alors qu’elle en a pour le bien) L’attitude devant le mal est une attitude théologique : seule la Croix du Christen donne la réponse. Le Christ, par son mystère divin assume le Mystère du Mal, et se tient face à son Père comme le seul responsable de tous les hommes. Seul le Christ peut nous permettre de dépasser et d’assumer le scandale, en laissant de côté la révolte et le désespoir. Dieu permet la faute parce qu’il a un respect extraordinaire de la liberté de sa créature. Au cœur du mal, le problème de la liberté est présent. En définitive, le mal premier est l’orgueil, car l’orgueil relève de la volonté libre de l’ange (Lucifer), ou de l’homme : le problème du mal et le problème de la liberté sont inséparables. Seul l’Amour de Dieu peut nous faire comprendre, ou du moins nous montrer que le Mal n’est pas absurde, qu’il y a un dépassement : Lui seul peut nous faire saisir qu’il existe un lien entre la liberté et le mal. A la Croix, à travers Sa Chair, Sa Sensibilité, son Cœur humain, le Christ veut nous faire comprendre la gravité de la faute et que celle-ci Lui permet de nous témoigner encore plus d’amour. C’est pour cela que l’unique lumière est pour nous le mystère de la Croix : la Croix liée à la Gloire, c'est-à-dire à la victoire de l’amour dans le mystère de la Croix et de la Résurrection. (Père Marie-Dominique Philippe, « Vérité, Liberté, Amour »Collection Alethéia, Fayard) Au terme de cette « dissection » du mal, il faut le redire : le bien et le mal n’ont pas le même pouvoir. Ce serait accepter les thèses d’un nouveau manichéïsme, d’un nouveau catharisme, d’un nouveau dualisme : toute autre est la position de l’Eglise. Ce n’est pas ce que nous dit Saint Paul, dans l’Epître aux Romains, par exemple : le mal et la bien ne sont pas les deux faces de la même médaille ( il les appelle « le péché » et « la grâce » ) : ceux-ci ne sont pas du même ordre . En Romains 5, 15, par exemple, il nous dit : « Mais le don gratuit de Dieu (c'est-à-dire la grâce) et la faute n’ont pas la même mesure. » L’ESCLAVAGE EST LE CONTRAIRE DE LA LIBERTE On pourrait se demander : « Est-ce seulement le destin du peuple juif qui s’est libéré de l’oppression en Egypte ? NON, c’est un « paradigme », c’est notre destin à nous tous … Le Peuple juif » a mis quarante ans dans le désert à se libérer d’habitudes contractées en Egypte ; ce sont souvent des habitudes que nous-mêmes avons contractées et il nous faut bien du temps pour nous libérer de certaines habitudes. Mais, beaucoup de personnes préfèrent l’asservissement volontaire.Par exemple, le Cardinal Ratzinger, quand il était Archevêque de Munich, s’élevait contre l’esclavage que pouvait apporter la télévision –et Internet n’existait pas encore !) Dans « Evangelium Vitae au n° 31, Jean Paul II nous dit : « La libération de l’esclavage est le don d’une identité, la reconnaissance d’une dignité indestructible et le début d’une vie nouvelle ou la découverte de Dieu et découverte de soi vont de pair. Cette expérience de l’Exode est fondatrice et exemplaire. Israël comprend que chaque fois qu’il est menacé dans son existence, il lui suffit de recourir à Dieu avec une confiance renouvelée pour trouver en Lui un secours efficace. « Je t’ai modelé, tu es pour Moi un serviteur Israël » (Isaïe 44,21, c'est-à-dire lors de la Déportation à Babylone). Donc « cette conquête » de la liberté s’identifie à la libération des esclavages ; Paul nous dit , surtout dans l’épître aux Romains, que le Christ nous libère de tous les esclavages. « Ils (les dévoyés) leur promettent la liberté, alors qu’eux-mêmes sont esclaves de la pourriture, car, l’homme est esclave de ce qui le domine », nous dit Saint Pierre dans sa Seconde Epître (2 P 2,19) ; en fait, la liberté est une conquête permanente, jamais terminée ! Même ceux qui croient l’avoir atteinte définitivement se trompent, il en est de même pour d’autres valeurs, comme par exemple la démocratie ! Il semble y avoir antagonisme profond entre « esclavage » et « liberté ». En est-on bien sûr ? Saint Paul nous dit qu’il faut nous libérer de tous les esclavages ; dans l’épître aux Romains, et dans celle aux Galates, il voit le risque (mortel) que ses compatriotes, en observant étroitement la loi en sont devenus esclaves. C’est le thème des deux épîtres susnommés : la foi doit dépasser la loi. Le chapitre 6 de l’Epître aux Romains nous parle abondamment de l’esclavage et de la liberté. Dans ce chapitre 6, le Baptême nous introduit dans la vie du Christ. Le Baptême nous fait renoncer aux œuvres du Démon Ces œuvres s’expriment sur trois champs :le mondesoi-mêmeet par l’œuvre même du Démon, caché dans les 2 précédentes. Ces 3 actions nous mènent à un véritable esclavage par nos passions. Paul, dans le chapitre 6 de l’épître aux Romains nous demande de quitter nos anciens esclavages, nos anciennes passions, pour nous livrer entièrement à Jésus-Christ, c'est-à-dire l’esclavage de la Croix. Le mot semble dur : épouser l’esclavage du Christ. Notons, entre autres, que Saint Louis-Marie Grignon de Montfort ne dit pas des choses différentes dans son traité sur « Traité de la vraie dévotion en Jésus-Christ. » Au n° 71 de ce Traité, il nous dit de bien faire la différence entre « serviteur » et « esclave ! 1° Un serviteur ne donne pas tout ce qu’il est et tout ce qu’il possède … mais, l’esclave se donne tout entier. 2° Le serviteur exige des gages … mais, l’esclave ne peut rien exiger. 3° Le serviteur peut quitter son maître quand il voudra … mais, l’esclave n’est pas en droit de quitter son maître quand il voudra. 4° Le maître du serviteur n’a sur lui aucun droit de vie ou de mort … mais, le maître de l’esclave a, par les lois,droit de vie et de mort sur lui, en sorte qu’il peut le vendre à qui il voudra ou le tuer. 5° Enfin, le serviteur n’est que pour un temps au service de son maître, et l’esclave pour toujours. Précédemment, au n° 70, il avait dit : il y a 3 sortes d’esclavageesclavage de nature (pour toute créature, bonne ou mauvaise)esclavage de contrainte (celle des mauvais anges qui veulent assimiler les créatures à leurs agissements.esclavage de volonté qui est, elle, délibérée. Au n° 72 ; « Il n’y a rien parmi les hommes qui nous fasse plus appartenir à un autre que l’esclavage ; il n’y a rien aussi parmi les Chrétiens qui nous fasse plus appartenir à Jésus Christ et à sa Sainte Mère que l’esclavage de volonté, selon l’exemple de Jésus Christ qui a pris la forme d’esclave pour notre amour:Formam servi accipiens, et la Sainte Vierge qui s’est dite la servante et l’esclave du Seigneur. L’Apôtre (Paul) s’appelle, par honneur, servus Christi. L’esclavage que recommande Saint Paul n’est que le décalque de ce que recommande les autres Evangélistes quant à la suite du Christ : la « sequela Christi ». Matthieu en 11,29-30 nous dit : « … prenez sur vous mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur. » Le joug est une Croix plutôt douce au regard des autres Croix et c’est plutôt un instrument pour nous indiquer une direction. Que l’on pense aux mors que l’on met dans la bouche des chevaux ou celle des bœufs. Mais, bien sûr cette imitation de Jésus-Christ peut aller jusqu’au sacrifice de la Croix. Paul, dans l’Epître aux Romains, au chapitre 8 (8,21) nous dit : « Pourtant, elle (la Création) a gardé l’Espérance d’être elle aussi libérée de l’esclavage, de la dégradation inévitable pour connaître la liberté, la Gloire des Enfants de Dieu. » (La traduction de la Bible de Jérusalem ne parle pas d’esclavage.) On croit devenir plus libres en s’affranchissant de toute morale … qu’elle soit sexuelle ou économique … ? Mais, c’est une fausse liberté qui nous conduit très vite à un nouvel esclavage : esclavage par la sexualité ou d’autres plaisirs (licence), esclavage par de nouveaux pouvoirs, souvent économiques, auxquels on se soumet (libéralisme, dénoncé par exemple par Mgr. Schooyans dans Dérive Totalitaire du Libéralisme.)Alors, ne vaut-il pas mieux se soumettre au Christ et à sa Croix ? Le mot esclavage qu’emploie Saint Paul dans la Lettre aux Romains (au chapitre 6) peut en choquer certains ? Est-ce là être libres ? Le même mot esclavage est employé par Saint Louis-Marie Grignion de Montfort quand il nous parle d’esclavage d’amour ; Matthieu (lui seul d’ailleurs) au chapitre 19 (19,12) parle d’eunuques qui se sont rendus tels pour le Royaume des Cieux. En plusieurs endroits du Nouveau Testament, il est question, il est question du mot « esclave », voire « eunuques ». Par exemple en Matthieu (Mat 19,12), l’Evangéliste nous dit (et Marc ne cite pas ce passage, alors qu’il traite aussi de l’indissolubilité du mariage …) : « Il y a des eunuques qui se sont rendus tels pour le Royaume de Dieu. » (Il s’agit de la continence volontaire). En Romains (Ro 6, 17à22) : « Mais, aujourd’hui, vous vous êtes libérés du péché et asservis à Dieu ». Saint Paul nous dit à plusieurs reprises qu’il faut abandonner l’esclavage de nos passions qui mènent à la mort, et accueillir l’esclavage de la Croix du Christ. En Philippiens (Ph 2,7), l’hymne nous demande de devenir esclaves du Christ (la kénose du Christ). Notons que les Traductions du mot sont différentes selon les différentes Bibles : Serviteurs dans la Traduction Liturgique, esclaves selon la Traduction de la Bible de Jérusalem, qui semble plus exacte … (le mot esclave choque certains de nos contemporains, mais malheureusement, il y a encore des esclaves) (Dans la Consécration à Marie de Saint Louis-Marie Grignon de Montfort, le mot esclavage a quelquefois été traduit par servitude , or c’est dénaturer l’esprit de Montfort, lui qui a tant souligné la différence entre serviteur et esclave, ainsi que nous l’avons vu plus haut) On pourrait se demander : « Pourquoi le Christ est-il aussi indispensable pour obtenir la vie éternelle ? Pourquoi celle-ci serait-elle fermée à des civilisations non-chrétiennes ? » La réponse, c’est sans doute St. Paul qui nous la donne quand il évoque « la morale naturelle » dans le 2°chapitre de l’épître aux Romains (Rm 2, 14-15) : c'est-à-dire que ceux qui ne connaissent pas le Christ (ou ont une très mauvaise image du Christianisme, ce qui est malheureusement souvent le cas). Jean Paul II au n° 103 de Veritatis Splendor nous dit : « Le Christ nous a rachetés ; Il a libéré notre liberté de la servitude de la concupiscence.» Qu’est-ce que cela veut-il dire : libérer notre liberté ; en outre, « concupiscence » a une connotation trop sexuelle. Pourtant, Saint Jean, dans sa Première lettre, parle des 3 « concupiscences » qui souillent le cœur de l’homme (1 Jn 2,4), et ces 3 tentations ne concernent -et de loin- pas que le sexe : tentations du pouvoir, du savoir et de l’avoir, contre lesquelles Jésus a lutté lors des Tentations au Désert. Vatican II dans la Constitution Gaudium et Spes (au n° 2) nous dit : « L’homme est tombé certes sous l’esclavage du péché, mais le Christ, par la Croix et la Résurrection a brisé le pouvoir du Malin et l’a libéré pour qu’il soit transformé selon le dessein de Dieu ». Donc, il y a un balancement entre liberté et esclavage. Saint Paul dans l’épître aux Galates nous le redit : « Ne vous mettez pas sous un nouvel esclavage ! » (Gal 5,1) Est-ce que les hommes veulent se libérer de tout esclavage ? Sans doute non. Le livre transcrit par Michel de Montaigne de son ami disparu trop tôt La Boétie « Traité sur la Servitude Volontaire » montre que : non ! Saint Paul nous le dit : « Ne vous remettez pas sous le joug d’un nouvel esclavage » comme nous venons de le voir dans l’Epître aux Galates. Cet esclavage est bien souvent inconscient, c’est pourquoi nous nous y prêtons aussi facilement : Certaines traductions du livre de Saint Louis-Marie Grignon de Montfort (le Traité de la Vraie Dévotion) traduisent le mot « esclavage » par le mot « serviteur » : mais, ce n’est pas du tout la même chose ! Le serviteur est à gages et peut partir quand il le désire ; « l’esclave » est lié à son maître qui ne lui doit rien comme salaire, n’a pas la possibilité de partir quand il veut et échappe à toute juridiction une fois qu’il est au service de son maître (au n° 71 du Traité) … C’est un paradoxe qui est bien souligné par Jean Paul II dans une homélie qu’il a faite à Jasna Gora-Csestochowa lors de son premier voyage dans son pays après avoir été élu au Siège de Pierre (1978 – le Mur de Berlin n’est pas encore tombé ; il le sera 11 ans plus tard). C’est une année Jubilaire, la fin d’un Jubilé en l’honneur du 9° Centenaire de la Consécration de la Pologne à la Vierge par le Roi Casimir. Le 4-VI-1970 , à Jasna Gora, il disait : « L’Acte de Consécration de la Pologne parle de « servitude » et contient un paradoxe semblable à celui des paroles de l’Evangile selon lesquelles il faut perdre sa vie pour la trouver (cf. Matthieu 10,39 « Qui veut garder sa vie la perdra, qui perdra sa vie à cause de Moi la gardera »). L’amour, en effet, confirme l’accomplissement de la liberté, mais en même temps l’appartenance, c'est-à-dire le fait de ne pas être libre dans l’amour n’est pas perçu comme un esclavage, mais bien comme une affirmation de liberté et comme son accomplissement. L’Acte de Consécration dans l’esclavage indique donc une dépendance singulière et une confiance sans limites. En ce sens, l’esclavage de la non-liberté exprime la plénitude de la liberté de la même façon que l’Evangile parle de la nécessité « de perdre sa vie pour la trouver dans sa plénitude.» La tendance de l’homme est de préférer « se lier ». « Il faut libérer la liberté », disait Jean Paul II. Jésus en Saint Jean nous dit : « La vérité vous rendra libres » (Jean 8,32). Jésus en Jean 8,32 à 37 dénonce ces Pharisiens, qui ont enchaîné la vérité dans des commandements (632 préceptes ! inapplicables par le commun des mortels) et leur dit : « la vérité vous rendra libres ». Autant dire que ces notables ne sont plus libres, mais esclaves de leur loi. D’ailleurs, les gens ne les suivent plus et sont devenus « comme des brebis sans berger ». Alors que la vérité est faite pour (nous) rendre libres ! (Jn 8,32). Ces notables sont « devenus esclaves de la loi » Ne triomphons pas trop vite ; même nous, pratiquants de l’Evangile, nous sommes toujours enclins à nous soumettre à une loi qui nous aliène, et notre liberté est toujours à regagner à chaque moment ! Bien sûr, les esclavages dont nous avons à nous libérer ne sont pas les mêmes que ceux de ceux qui n’ont pas d’espérance et se pensent voués à une vie purement terrestre, mais Paul dans l’épître aux Galates nous prévient de « ne pas nous mettre sous un nouvel esclavage » (Galates 5,1)! Saint Paul dans l’épître aux Romains (Rm 8, 18-21) nous donne le lien qui peut exister entre esclavage et liberté : « J’estime qu’il n’y a pas de commune mesure entre les souffrances du temps présent et la gloire que Dieu va bientôt révéler en vous. En effet, la création aspire de toutes ses forces à voir cette révélation des Fils de Dieu, car la Création a été livrée au pouvoir du néant, non parce qu’elle l’a voulu, mais à cause de celui qui l’a livré à ce pouvoir. Pourtant, elle a gardé l’espérance d’être aussi libérée de l’esclavage, de la dégradation inévitable pour connaître la liberté, la gloire des enfants de Dieu. » A la fin de l’Evangile de Jean (Jn 21,18), Jésus fait remarquer à Pierre : « En vérité, en vérité, Je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, et tu allais où tu voulais ; quand tu auras vieilli, tu étendras les mains et un autre te ceindras et te mènera où tu ne voudrais pas » Ce semble être une contradiction apparente … Nous pouvons déjà soupçonner une réponse en voyant les fruits de certaines limitations apparentes de la liberté, fruits du mariage, de la profession religieuse, par exemple ou de certaines professions et source de très grande fécondité … la contradiction est seulement apparente entre esclavage et liberté ! Il y a « des esclavages d’amour », Saint Louis- Marie Grignon de Montfort insistait beaucoup sur ceci, nous y reviendrons. (il disait, par exemple, « paradoxalement, ce « lien de charité » cet « esclavage d’amour », rend l’homme pleinement libre en lui conférant la véritable liberté des enfants de Dieu (cf. Traité de la vraie Dévotion, n° 169) Au n° 70 du même traité, il nous disait : « Il y a trois sortes d’esclavageun esclavage de natureun esclavage de contrainteet un esclavage de volonté.Toutes les créatures sont esclaves de Dieu en la première manière Domina est terra et plenitudo ejus (Au Psaume 23,2 : Au Seigneur est la terre et tout ce qu’elle informe)Les démons et les damnés en la secondeLes justes et les Saints en la troisième. L’esclavage de volonté est le plus parfait et le plus glorieux à Dieu qui regarde le cœur et qui s’appelle le Dieu du Cœur (1 Samuel 16,7 ; Proverbes 23,26 ; Psaume 72,26) ou de la volonté amoureuse parce que par cet esclavage, on fait choix, par-dessus toutes choses de Dieu et de son service, quand même la nature ne nous obligerait pas. Au n° 71 : « Il y a une totale différence entre serviteur et l’esclave1°) Un serviteur ne donne pas tout ce qu’il est et tout ce qu’il possède et tout ce qu’il peut acquérir par autrui ou par soi-même à son maître, mais l’esclave se donne tout entier, tout ce qu’il possède et tout ce qu’il peut acquérir à son maître sans aucune exception.2°) Le serviteur exige des gages pour les services qu’il rend à son maître, mais l’esclave ne peut rien exiger quelque assiduité, quelqu’industrie, quelle force qu’il ait à travailler.3°) Le serviteur peut quitter son maître quand il voudra, ou du moins quand le temps de son service sera expiré, mais l’esclave n’est pas en droit de quitter son maître quand il voudra.4°) Le maître du serviteur n’a sur lui aucun droit de vie ou de mort, en sorte que s’il le tuait comme une de ses bêtes de charge, il commettrait un homicide injuste ; mais, le maître de l’esclave a par les lois, droit de vie et de mort sur lui ; en sorte qu’il peut le vendre à qui il voudra ou le tuer, comme il ferait sans comparaison de son cheval.5°) Enfin, le serviteur n’est que pour un temps au service de son maître, les esclaves pour toujours. On dira : mais quel rapport avec le problème qui nous préoccupe, c'est-à-dire les servitudes qui altèrent la liberté de l’homme ? Ces servitudes sont de plus fréquentes, surtout maintenant que l’informatique s’est mise de la partie, mais aussi la religion chrétienne a beaucoup reculé en face de la séduction exercée par les médias. Il faut insister pour affirmer que la réponse des chrétiens doit s’adapter à toutes ces sollicitations nouvelles. On pourrait aussi se demander quel est le lien entre l’esclavage d’amour de Louis-Marie et les esclavages par addiction qui sont le lot commun maintenant ? Ce lien est que ceux qui sont victimes d’une dépendance ne peuvent être délivrés que par Jésus et sa Sainte Mère. La recherche de la sainteté n’est pas un choix facultatif : le Concile Vatican II nous l’a rappelé et c’est l’Enseignement constant de l’Eglise. Le mot « liberté » doit aussi être explicité …Nous avons vu que le terme « se lier » semble être une atteinte à notre liberté. C’est une croyance seulement superficielle, voire mortifère, car là justement est la source de toute fécondité. Les slogans qui fleurissaient dans les années 68-70, comme « Il est interdit d’interdire » ont fait long feu, car c’est encore une interdiction (idem, actuellement, pour tolérance, qui devient facilement … intolérante.) « Liberté liée » ?? Les deux termes ne sont ils pas contradictoires? De même ce que dit Saint Jacques dans son Epître : « Loi de liberté » ? En Luc 9,51, il nous est dit : « Jésus prit résolument la route de Jérusalem (où Il se savait menacé). Notre liberté pour s’exercer pleinement doit être « liée », sinon elle risque vite de dégénérer en licence, ce sera l’esclavage de nos passions. Jésus nous invite « à renoncer à soi même » (Luc 9,51). Les 3 esclavages cités par Saint Louis-Marie sont le parallèle des 3 situations décrites par Jésus (Matthieu seul en parle, Marc qui raconte le début de cet épisode ne cite pas ce passage) « Il y a des eunuques qui le sont de naissance, d’autres qui le sont par la main des hommes et enfin, il en est qui le sont volontairement », ce n’était pas dans la mentalité d’Israël où l’idéal était d’avoir une progéniture. C’est pourquoi Jésus emploie ce mot d’eunuque, terme en partie méprisé dans le monde Israëlien, situation que pourtant Jésus avait choisi. (Matthieu 19,12) Il s’agit de se remettre totalement à Jésus, en répondant à l’amour avec lequel il nous a aimés le premier. Quiconque vit dans cet amour, peut dire comme Saint Paul, « ce n’est plus moi qui vit mais le Christ qui vit en moi » (Galates 2,20). C’est encore ce que dit Saint Paul au chapitre 6 de l’épître aux Romains. L’esclavage est une contrainte imposée pour aliéner la liberté. En principe , l’esclavage a été aboli , tout au moins dans ses formes institutionnelles au XIX° siècle …( loi Victor Schöelcher en France vers les années 1850 – la Révolution Française l’avait aboli, Napoléon l’a rétabli) . Auparavant, Toussaint Louverture, un esclave noir, avait libéré les esclaves, et créé la première république émancipée aux Antilles. Aux Etats-Unis, c’est seulement vers 1860 que l’esclavage a été aboli ; il a fallu une Guerre de Sécession ! Mais, bien que l’esclavage soit officiellement aboli, il demeure même dans nos pays Occidentaux ! Il existe même quasi officiellement dans certains pays, par exemple la Mauritanie. Il n’y a pas de différence profonde entre misère et pauvreté, seulement une différence de degré …. Dans la pauvreté, se trouve une sécurité qu’on ne trouve pas dans la misère. Dans la pauvreté, il y a une certaine sécurité, soit parce qu’on a un travail fixe, soit parce que l’on a des compétences professionnelles qui nous promettent d’en espérer un ; (je pense à l’instant à la survie de la Sainte Famille en Egypte : Joseph avait une compétence reconnue …). Donc, il y a conservation de la liberté. Dans la misère , au contraire , on n’est jamais assuré du lendemain , ni s’il y aura quelque chose à manger … Les chefs de famille sont « obsédés » de jour en jour de quoi ils vont nourrir leur famille : le plus souvent , il n’y a pas de salaire assuré . C’est souvent le fait de mères célibataires avec plusieurs enfants. Il y a là un véritable esclavage. Benoît XVI, dans son Chemin de Croix 2006, nous parle « d’un monde divisé en villes et bidonvilles ». Bidonvilles est le signe de la précarité et le symbole de masses qui fuient la précarité des campagnes pour … retrouver cette précarité aux bords des Mégapoles du Tiers-Monde (mais qui existe aussi dans nos pays riches) Son Message pour le début de l’Année 2015, le Pape François le consacre à l’Esclavage (Journée Mondiale de la Paix du 1° janvier 2015) : « Non plus esclaves, mais frères » ; il y dit : « L’esclavage est un crime de lèse-humanité » … « Aujourd’hui encore des millions de personnes- enfants, hommes femmes de tout âge- sont privés de liberté et contraints de vivre dans des conditions assimilables à celle de l’esclavage (bien que celui-ci ait été aboli officiellement par l’O.N.U.) Il cite dans ce Message les nombreuses personnes asservies : -entre autres, celles qui sont asservies, mêmes mineures, dans des travaux dégradants ou exténuants. - les migrants, souffrants de la faim et privés de liberté, dépouillés de leur bien, souvent abusés physiquement et sexuellement, détenues dans des pays d’accueil dans des conditions inhumaines. - les personnes contraintes à se prostituer Celles exploitées pour le trafic d’organes Les enfants enrôlés comme enfants-soldats ou les filles esclaves sexuelles de combattants Ceux qui sont contraints à la mendicité Les personnes contraintes au trafic de drogueenfin tous ceux captifs ou victimes de groupes terroristes, asservies comme esclaves sexuelles, dépouillées de tout bien ou même tuées. Au n° 4, il nous dit : « Aujourd’hui, comme hier, à la racine de l’esclavage, il y a une conception de la personne humaine, qui admet de la traiter comme un objet … la personne humaine est privée de sa liberté, commercialisée, réduite à être la propriété de quelqu’un, elle est traitée comme un moyen, non comme une fin. Mais, d’autres causes peuvent expliquer les formes contemporaines de l’esclavage. Parmi celles-ci, je pense surtout à la pauvreté, au sous-développement - les personnes contraintes de se prostituer - celles contraintes à la mendicité ou la vente de stupéfiants - celles exploitées en vue du trafic d’organes - les garçons enrôlés dans les conflits armés ou les filles qui deviennent « esclaves sexuelles » -au manque d’accès à l’éducation (l’analphabétisme constitue, en effet, une cause majeure de mariages de plus en plus précoces chez les filles, cf. l’article de Lucetta Caraffa dans le « Livre noir de la persécution des Chrétiens ») Et à de faibles opportunités de travail. D’autres causes de l’esclavage sont les conflits armés et le terrorisme … Il faut noter aussi les migrants victimes de passeurs qui les dépouillent de tout bien, souvent abusés et privés de leur Carte d’Identité et détenus dans des conditions indignes … (le problème de la migration est un problème de plus en plus préoccupant : depuis 20 ans 20.000 personnes se sont noyées en Mer Méditerranée, et l’afflux de migrants déborde désormais les pays d’Afrique et touche aussi les pays comme l’Irak et la Syrie, victimes d’une guerre civile féroce !) A la base de cela, est la corruption de personnes qui sont prêtes à tout pour s’enrichir « Cela arrive quand au Centre du Système Economique se trouve le Dieu Argent et non l’homme, la personne humaine … quand la personne est déplacée et déplacée et qu’arrive le Dieu Argent se trouve le renversement des valeurs. D’aures sources de l’esclavage sont les conflits armés et le terrorisme. Au n° 6, François nous dit : « Nous devons reconnaître que nous sommes en face d’un phénomène mondial qui dépasse les compétences d’une seule communauté ou nation … je lance un appel à tous les hommes et les femmes de bonne volonté et à tous ceux qui de près ou de loin, y compris au plus haut niveau des institutions sont témoins du fléau de l’esclavage contemporain à ne pas se rendre complices de ce mal, à ne pas détourner le regard face aux souffrances de leur frêres et sœurs en humanité, privés de liberté et de dignité … Nous savons que Dieu demandera à chacun d’entre nous : « Qu’as-tu fait de ton frère ? » (Genèse 4,2). La mondialisation de l’indifférence … requiert que nous nous fassions des artisans d’une mondialisation de la solidarité et de la fraternité. » Mais, à côté de cette précarité et souvent liée à elle, d’autres précarités, qui sont de véritables esclavages : - esclavage domestique dans certains pays , où cela a lieu quasi officiellement ( malgré l’abolition de l’esclavage … ) , comme en Mauritanie , mais aussi discrètement dans nos pays dits développés , y compris chez nous en France , concernant des femmes ou des enfants . - esclavage sexuel de femmes qu’on trompe avec des mirages et qui n’ont plus les moyens de revenir chez elles ( et qui se retrouvent dans l’enfer de la prostitution .) - esclavage d’enfants qu’on fait travailler très tôt à des rythmes infernaux (par exemple : 14 heures par jour, et 7 jours sur 7 : on pense en particulier à ces enfants qui tissent des tapis au Pakistan ou au Maroc) - esclavage d’enfants qui sont enlevés à leur famille pour servir comme soldats …ou de « femmes » pour les combattants de guerre civile , aussi bien en Asie qu’en Afrique. (Près de 2,45 millions d’enfants et de femmes dans le monde sont exploitées dans l’agriculture, les mines ou le commerce sexuel. Si ce phénomène affecte d’abord les pays pauvres, aucune région du monde n’est épargnée) L’esclavage est la négation de toute liberté , par contrainte . Cet esclavage a pris comme symbole la déportation des noirs en Amérique. A Ouidah , au Bénin , un monument a été inauguré il y a quelques années pour se souvenir de ces captifs : « la porte du non-retour » : c’est de là sur une plage de l’Atlantique qu’étaient emmenés vers Salvador de Bahia au Brésil , les captifs vendus aux Portugais : ceux-ci les emmenaient esclaves et les revendaient au Brésil , ( les Portugais avaient alors des comptoirs à Ouidah , sur la Côte Atlantique du Bénin ) ;de même avec d’autres pays comme la France , l’Angleterre ou les Pays-Bas … qui ont servi d’intermédiaire pour dépeupler d’autres pays comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire ou l’Angola. Un second esclavage les attendait à leur arrivée outre-Atlantique : le travail dans les plantations. Aux U.S.A. , la libération des Noirs se fit longtemps attendre , et il fallut la guerre de Sécession ; au XIX° siècle ( le président Lincoln) , pour que ce problème trouve une solution légale … nous savons que pour les esclaves noirs , la libération du Peuple Juif d’Egypte est devenu un symbole : « Josuah fit the battle of Jericho » Mais , nous savons aussi que tout un état d’esprit ( ségrégationniste ) persista , il faudra l’action d’un Martin-Luther King pour que ce poids s’atténue vers 1960 aux U.S.A.( et nous savons qu’il dure encore ) ; la « libération » du peuple hébreu d’Egypte a servi d’exemple à d’autres peuples pour se « libérer ». Les Israélites , à leur libération d’Egypte , auront une première conscience de leur esclavage , mais beaucoup d’hébreux regretteront leur état antérieur ( « les oignons d’Egypte ! » ) , et mourront dans le désert .Nous sommes tous appelés à la liberté , elle s’apprend , et Israël en a fait l’expérience : tous les hommes devront en faire l’expérience à leur suite … la Terre Promise est à ce prix. ( Nous sommes tous attachés à nos servitudes , nous en libérer est toujours un problème ! Mais, notre liberté est un « socle », c’est notre nature, et toute aliénation de celle-ci est un esclavage …) Moïse mettra 40 ans à traverser ce désert , alors que 40 jours auraient théoriquement suffi , « Ce peuple a la nuque raide » , et parmi ceux qui auront quitté l’Egypte , la plupart mourra dans le désert ; Moïse , lui-même , n’y échappera pas puisque il contemplera seulement la Terre Promise « de l’extérieur » , et mourra au Mont Nébo , en vue de cette Terre Promise . Josué prendra sa suite pour y faire entrer le Peuple d’Israël. Dans le Deutéronome , écrit plusieurs siècles plus tard , mais riche d’enseignement pour Israêl et redécouvert avant une autre déportation ( à Babylone , cette fois ) , au chapitre 7 , ( Dt 7, 8-9 ) , il est dit : « Tu es un peuple consacré au Seigneur ton Dieu ; c’est toi qu’il a choisi pour être son peuple particulier , parmi tous les peuples de la terre . C’est par amour pour vous , et par fidélité au serment fait à vos pères , que le Seigneur vous a fait sortir par la force de sa main , et vous a délivré de la maison d’esclavage et de la main du pharaon , roi d’Egypte . Vous saurez donc que le Seigneur votre Dieu est le vrai Dieu , le Dieu fidèle qui garde son Alliance et son amour pour mille générations , à ceux qui l’aiment et gardent ses commandements. »Et, après Babylone, suivra un nouvel exode, et le retour inespéré à Jérusalem . Dans la seconde partie du chapitre 8 de l’évangile de Saint Jean : Jésus complètera cette promesse : le peuple qui aurait dû être l’héritier des promesses a failli, et l’héritage s’est élargi à tous les peuples de la terre. (c’est le sujet des chapitres 9,10 et 11 de l’épître aux Romains de Saint Paul) Il nous donne en plusieurs endroits l’assurance que « la Vérité nous rendra libres » (Jean, 8,32). Puis, « Si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres. » (Jean 8,36) Jésus nous révèle au cours d’une discussion avec les Pharisiens la réalité de cette liberté : Les pharisiens : « Nous sommes les descendants d’Abraham , nous n’avons jamais été les esclaves de personne . Comment peux-tu dire : vous deviendrez libres ? »Jésus leur répondit : « Amen, amen, je vous le dis : tout homme qui commet le péché est esclave du péché , l’esclave ne demeure pas pour toujours dans la maison ; le fils, lui , y demeure pour toujours. Donc si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres » (Jn 8,36). Les Juifs n’ont pas compris que la liberté est à conquérir toujours, qu’elle n’est jamais acquise une fois pour toutes, que eux-mêmes les Juifs peuvent transformer la Loi en chose morte … Il y a donc deux libertés : une liberté extérieure ( celle des oiseaux , par exemple , la vje dans une cage marque une absence de liberté pour eux ) , et notre liberté intérieure qui ne peut jamais être réduite , même au prix d’un emprisonnement les prisonniers politiques, Mgr Nguyen van Thuan, par exemple, le savent . D’autres peuvent en témoigner dans des régimes d’extrême droite, Miguel-Angel Asturias ou Maïté Girtamer par exemple. Le Christ à la Croix est le meilleur exemple de cette liberté intérieure) Jésus apprendra , même aux pharisiens ( entretien avec Nicodème : chapitre 3 de Saint Jean ) qu’il y a une nouvelle naissance liée à la grâce ( maintenant , nous nommons cette nouvelle naissance : le Baptême). Ce qui était en germe dans la religion trouvera son accomplissement en Jésus : « Je ne suis pas venu abolir, mais accomplir » (Jn 3, 17 et 12,47). Les pressentiments du Peuple Juif depuis la Déportation à Babylone sont confirmés et précisés par Jésus quant à la vérité de cette Vie Eternelle. Saint Paul reprendra ces affirmations : Dans l’épître aux Romains au chapitre 6 , il précise : « Ne le savez-vous donc pas : nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ , c’est dans la mort que nous avons été baptisés . Si par le Baptême dans sa mort, nous avons été mis au tombeau avec Lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle. »( Rm 6,3 ) , puis en Romains 6,6 , il nous dit « Nous le savons , l’homme ancien qui est en nous a été fixé à la Croix avec Lui , pour que cet être de péché soit réduit à l’impuissance et qu’ainsi nous ne soyons plus esclaves du péché Car , celui qui est mort est affranchi du péché. » (Traduction Liturgique)( Le Baptême nous libère de cette capacité de pécher : un Homme Nouveau est né , nous sommes re-nés ) En Rom 6,16-18 « Vous le savez bien : en vous mettant au service de quelqu’un pour lui obéir comme esclaves , vous voilà esclaves de celui à qui vous obéissez : soit du péché qui est un chemin de mort , soit de l’obéissance à Dieu qui est un chemin de justice .Mais rendons grâce à Dieu : vous qui étiez esclaves du péché, vous avez maintenant obeï de tout votre cœur à l’enseignement de base auquel Dieu vous a soumis ; vous avez été libéré du péché , vous êtes devenus les esclaves de la justice . » En Rom 8,20-21 « Car la création a été livrée au pouvoir du néant , non qu’elle l’a voulu , mais à cause de celui ( c’est à dire le démon ) qui l’a livré à ce pouvoir . Pourtant , elle a gardé l’espérance d’être elle-même délivrée de l’esclavage de la dégradation inévitable , pour connaître la liberté la gloire des enfants de Dieu . » Tout le thème de l’Epître est là : Jésus nous a libéré de la servitude héritée du péché originel, de cet esclavage inévitable …. Mais Saint Paul ne souligne pas la même chose que Saint Jean quand il parle d’esclavage : Saint Paul parle de l’esclavage de la chair, alors que Saint Jean souligne des rites religieux qui « enferment » au lieu de libérer. Saint Paul nous dit encore à la suite de la citation de l’épître aux Romains que nous venons de citer: « La création tout entière crie sa souffrance, elle passe par les douleurs d’un enfantement qui dure encore. Elle n’est pas la seule ; nous crions nous mêmes notre souffrance : nous avons commencé par recevoir le Saint Esprit, mais nous attendons la délivrance de notre corps. » On réalise que tout le thème de l’Epître est là : passer d’un esclavage à une soumission au Christ. (L’esclavage peut choquer certains lorsqu’il s’agit du Christ ? Changer un esclavage pour un autre esclavage ? Mais c’est un esclavage librement accepté, c’est un esclavage libre, un esclavage d’amour : ces termes qui peuvent sembler contradictoires « liberté et esclavage » , « esclavage et amour » : c’est un esclavage d’amour , qui nous permet d’échapper à l’esclavage – bien réel celui-là – de nos passions ) Dans les Epîtres aux Corinthiens, c’est surtout la première qui nous parle de l’esclavageEn 1 Co 7,21-22 : « En effet, l’esclave qui a été appelé est un affranchi du Seigneur ; de même, l’homme libre qui a été appelé est un esclave du Christ ;le Seigneur a payé le prix de votre rachat , ne devenez pas les esclaves des hommes . » (On retrouve là les thèmes que nous avons vus au chapitre 6 de l’Epître aux Romains)En 1 Co 9,27 « Mais, moi Paul, je traite durement mon corps, et je le réduis en esclavage , pour ne pas être moi-même disqualifié après avoir annoncé la Bonne Nouvelle . »En 1 Co 12,13 « Tous, Juifs ou païens, esclaves ou hommes libres nous avons tous été baptisés dans l’unique Esprit pour former un seul corps. Tous, nous avons été désaltérés par l’unique Esprit. » Dans la seconde, il n’est pas question là d’esclavage, mais de liberté ;En 2 Co 3 ,17 « Car le Seigneur est l’Esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté »(Bien sûr, là il est question de liberté, mais celle-ci n’est, une fois encore , que l’envers de cet esclavage dont nous parlons ) Dans l’épître aux Galates aussi, nous avons cette même incitation : En Galates 2,4-5 « … Il y avait pourtant les faux-frêres ( à Jérusalem ) , ces intrus qui s’étaient infiltrés comme des espions pour voir quelle liberté nous avions dans le Christ- Jésus et nous ramener ainsi à l’esclavage … »En Galates 4, 2 à 9 : « De même , nous aussi , quand nous étions des petits enfants , nous étions en situation d’esclaves sous la domination des forces qui régissent ce monde , mais lorsque les temps furent accomplis ; Dieu a envoyé son Fils . Il est né d’une femme , Il a été sous la domination de la Loi de Moïse pour racheter ceux qui étaient sous la domination de la Loi et pour faire de nous des fils : envoyé par Dieu , l’Esprit de Son Fils est dans nos cœurs et Il crie vers le Père en l’appelant : ABBA . Ainsi , vous n’êtes plus esclaves , mais fils…Jadis , quand vous ne connaissiez pas Dieu , vous étiez esclaves de ces dieux qui n’en sont pas vraiment … mais maintenant que vous connu Dieu , comment pouvez-vous retourner de nouveau vers ces forces inconsistantes et misérables , dont vous voulez encore de nouveau être esclaves ?… » Les deux femmes d’Abraham , Agar et Sara , symbolisent la première , l’esclavage , tandis que la seconde symbolise l’élection . Paul conclut ainsi son épître : « Si le Christ nous a libéré , c’est pour que nous soyons vraiment libres . Alors, tenez bon, ne reprenez pas les chaînes de votre ancien esclavage.» Exhortation qu’il reprend 13 versets plus loin (Gal 5,1 et 13) . Pour Paul, reprendre les traditions juives, c’est se mettre sous un nouveau joug, qu’on croyait révolu, celui des coutumes juives, alors que la foi au Christ apporte la libération. (La circoncision, pour lui est un joug qu’on ne saurait imposer aux païens) Dans l’hymne aux Philippiens (Philippiens 2,6 à 11), Saint Paul nous dit : « Lui, qui est de condition divinen’a pas revendiqué son droit d’être traité à l’égal de Dieumais, Il s’est dépouillé prenant la condition d’esclave … »( c’est la traduction de la Bible de Jérusalem , la traduction liturgique a voulu sans doute ménager certaines susceptibilités actuelles concernant le mot esclave , en parlant de serviteurs ; mais , dans l’antiquité , il n’y avait pas de serviteurs , seulement des esclaves : doulos chez les grecs , donc des êtres qui n’avaient , ni liberté , ni salaire ) En Colossiens 3,11 : « Il n’y a plus d’esclaves , ni hommes libres , il n’y a plus que le Christ ; en tous , Il est tout. » En Ephésiens , Saint Paul avertit : « Vous , les esclaves , obéissez à vos maîtres d’ici-bas comme au Christ , avec crainte et tremblement … » ( ce n’est pas très différent de ce qu’il nous dit ailleurs , par exemple en Colossiens (Col 3,22 ) ou en Timothée (1 Tm 6,1 ) « S’ils ont des maîtres croyants , qu’ils ne les méprisent pas , puisque ce sont des frères ; qu’ils les servent plutôt . ») En Tite 3,3 « Car , nous aussi , autrefois , nous étions insensés , révoltés , égarés , esclaves de toute sorte de désirs et de plaisirs … » Dans l ‘épître aux Hébreux , l’auteur cite plusieurs fois cette libération de forces opposées :« Ainsi donc , puisque les hommes ont tous une nature de chair et de sang , Jésus a voulu partager cette condition humaine : ainsi par sa mort , Il a pu réduire à l’impuissance celui qui possédait le pouvoir de la mort , c’est à dire le démon . Il a rendu libres ceux qui par crainte de la mort passaient toute leur vie dans une situation d’esclaves . » (Hé 2,14-16) Dans les Epîtres de Pierre : En 1 Pierre 2,16 « Soyez des hommes libres , sans dissimuler votre méchanceté derrière cette liberté : soyez plutôt les esclaves de Dieu. » En 2 Pierre 2,19 « Ils ( les débauchés ) leur promettent la liberté , alors qu’eux-mêmes sont esclaves de la pourriture : car l’homme est esclave de ce qui le domine… » * Dans Gaudium et Spes , le concile Vatican II nous avait dit : « Ce monde a été fondé et demeure conservé par l’amour du Créateur : il est tombé certes sous l’esclavage du péché , mais le Christ , par la Croix et la Résurrection… l’a libéré pour qu’il soit transformé selon le dessein de Dieu et qu’il parvienne ainsi à son accomplissement. » (G.S. 2) Dans Véritatis Splendor ( n° 103 ) , Jean Paul II nous dit :« Le Christ nous a rachetés ! Cela signifie : Il nous a donné la possibilité de réaliser l’entière vérité de notre être. Il a libéré notre liberté de la domination de la concupiscence.»(Cité aussi dans Eglise, Drogue et Toxicomanie n° 287 ) Il y a donc un « divin » esclavage , comme le disait Saint Louis-Marie Grignon de Montfort …, ( mot qui choque certainement beaucoup de nos contemporains préoccupés des droits de l’homme ; mais, bien sûr, il ne s’agit pas du même esclavage … Dans l’Hymne aux Philippiens, le mot « esclaves » est souvent traduit en « serviteurs » : il y a un divin esclavage d’amour et cet « esclavage » est libre , répétons-le et il nous empêche toutes sortes d’esclavages liés à nos passions . Il nous rend libres. Il rejoint ce que nous disait Saint Paul dans l’épître aux Romains, au chapitre 6) Saint Paul nous avait dit dans l’épître aux Galates :« Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi … » (Gal 2,20) « Est-ce la plus grande aliénation ou la plus grande liberté ? » poursuit encore le Père Alain Matthews dans les Conférences de Carême de Notre-Dame de Paris 2007. Nous avons entrevu la réponse lorsque nous avons dit, que c’était un esclavage certes , mais un esclavage d’amour . Car, il y a de nombreux esclavages. On pourrait même dire que toute notre vie, il nous faudra lutter pour ne pas nous laisser soumettre à un nouvel esclavage … D’ou l’importance des paroles de Paul dans l’épître aux Romains. La liberté est une qualité qu’on acquiert peu à peu ou qu’on retrouve . Le Catéchisme de l’Eglise Catholique, au n° 1828, cite Saint Basile : « Ou bien, nous nous détournons du mal par crainte du châtiment, et sommes dans la disposition de l’esclave Ou bien nous poursuivons l’appât de la récompense et nous ressemblons aux mercenaires, Ou enfin, c’est pour le bien lui-même et l’amour de celui qui nous commande que nous obéissons (…) et nous sommes alors dans la disposition des enfants . » Jean Paul II, dans Centesimus Annus, au n° 41, nous parle de l’aliénation que peut provoquer la possession de biens (il n’emploie pas le mot esclavage, mais en fait, le sens est le même.) « … L’expérience historique des pays socialistes a tristement fait la preuve que le collectivisme, non seulement ne supprime pas l’aliénation, mais l’augmente plutôt, car il y ajoute la pénurie des biens nécessaires et l’inefficacité économique. Celle de l’Occident au contraire montre que si l’analyse marxiste de l’aliénation et ses fondements sont faux, l’aliénation avec la perte du sens authentique de l’existence est également une réalité dans les sociétés occidentales. On le constate au niveau de la consommation, lorsqu’elle engage l’homme dans un réseau de consommations superficielles et fausses, au lieu de l’aider à faire l’expérience authentique de sa personnalité… Il est nécessaire de rapprocher le concept d’aliénation de la vision chrétienne des choses pour y déceler l’inversion entre les moyens et les fins : quand il ne reconnaît pas la valeur et la grandeur de la personne en lui-même et dans l’autre, l’homme se prive de la possibilité de jouir convenablement de son humanité et d’entrer dans des relations de solidarité et de communion avec les autres hommes, pour lesquels Dieu l’a créé. En effet, c’est « par le libre don de soi que l’homme devient authentiquement lui-même » (G.S. n° 24) et ce don est rendu possible parce que la personne humaine est « essentiellement capable de transcendance ». L’homme ne peut se donner à un projet seulement humain sur la réalité, à un idéal abstrait ou à de fausses utopies. En tant que personne, il peut se donner à une autre personne ou à d’autres personnes et, finalement à Dieu qui est l’auteur de son être et qui seul peut accueillir pleinement ce don. L’homme est aliéné quand il refuse de se transcender et de vivre l’expérience du don de soi et de formation d’une communauté humaine authentique orientée vers sa fin dernière qu’est Dieu. … L’homme ne peut pas être libre s’il s’occupe seulement ou surtout de l’avoir et de la jouissance, au point de ne plus être capable de dominer ses instincts et ses passions ou de les maîtriser par l’obéissance à la vérité. L’obéissance à la vérité de Dieu et de l’homme est pour lui la condition première de la liberté et lui permet d’ordonner ses besoins, ses désirs et les manières de les satisfaire suivant une juste hiérarchie, de telle sorte que la possession des choses soit pour lui un moyen de grandir. Cette croissance peut être entravée du fait de la manipulation par les médias qui imposent, au moyen d’une insistance bien orchestrée, des modes et des mouvements d’opinion, sans qu’il soit possible de soumettre à une critique attentive les prémisses sur lesquelles ils sont fondés.» Plus tôt, le 19 octobre 1988, dans une audience hebdomadaire, il avait dit : « La tradition religieuse appelle « Dieu » la réponse faite à la question ultime et exhaustive sur l’existence. La Bible, où se trouve de manières variées et dramatiques la présence universelle du sens religieux dans l’homme, montre cette réponse fondamentale dans le Dieu vivant et vrai. Cependant, dans les moments de tentation et de péché, Israël fabrique l’idole, le dieu faux et inerte. » … Saint Paul réprimande sévèrement les Romains : « Dans leur prétention à la sagesse, ils sont devenus fous et ils ont changé la gloire du Dieu incorruptible contre une représentation d’oiseaux, de quadrupèdes et de reptiles » (Romains 1,2 ) Une semaine plus tard (le 26), il dit : « Quels sont les écueils sur lesquels vient le plus souvent s’échouer la barque de l’homme en route vers l’infini ? Dans une rapide synthèse, nous pourrions les classer suivant trois grandes catégories d’erreurs :Avant tout, il y a cette sorte d’arrogance, d’ « hybris », qui entraîne l’homme à méconnaître le fait qu’il est une créature et que, comme tel, il dépend structurellement d’un autre … moderne prétention à l’autonomie … Même celui qui ne connaît pas le Christ, mais qui affronte avec sérieux sa propre expérience d’homme, ne peut manquer de se rendre compte de cette vérité, ne peut manquer de percevoir, par toutes les fibres de son être, du fond de sa propre existence, cette présence d’un autre, plus grand que lui, de qui dépend vraiment le jugement et la mesure de tout bien. Saint Paul est catégorique en ce sens : il tient les Romains pour responsables de leurs péchés parce que « …ce qu’Il (Dieu) a d’invisible depuis la création du monde se laisse voir à l’intelligence à travers ses œuvres… » (Rom 1 ,20) L’homme prétend faire de sa raison la mesure de la réalité et considère comme inexistant ce qu’il ne peut mesurer. 2) Le deuxième type d’erreurs qui empêche une expérience humaine authentique est celle qui conduit l’homme à étouffer en lui-même toute demande et tout désir qui vont au-delà de son être limité, pour s’aplatir sur ce qu’il possède. C’est probablement la plus triste manière pour l’homme de s’oublier soi-même parce qu’elle implique une propre et véritable aliénation : on se rend étranger à son être le plus vrai pour se disperser dans les biens qu’on possède et qui ne peuvent se consommer … l’homme laisse mourir dans son cœur toute aspiration à cette vérité sur lui-même qui l’ouvre au don admirable de la Rédemption. 3) La troisième espèce d’erreur dans laquelle tombe l’homme en quête de son authentique expérience, se manifeste quand il engage toutes ses énergies dans une interminable, une exaspérante recherche portant seulement sur son intériorité … l’homme qui s’enferme dans cette solitude psychologique volontaire, devient incapable de n’importe quelle communication objective avec la réalité … mais celui-ci se dresse en dernière analyse contre son auteur, perdant la possibilité de trouver en Dieu la seule et unique réponse qui pourrait le satisfaire. » (On voit que, sans accuser forcément les parents, il y a un lien entre leur propre aliénation et la dépendance de leur enfant. C’est souvent parce que ceux-ci ne sont pas assez présents auprès de leurs enfants à des moments difficiles pour eux - l’adolescence – que ceux-ci fuient dans des situations dont il leur sera très difficile de revenir : drogue, pornographie sur Internet, ou sexe, et plus récemment, même à des âges précoces-15 ans !- pour rejoindre des groupes islamistes ! …) LES DEPENDANCES Le phénomène des dépendances connaît une escalade croissante, préoccupante et dramatique dans nos sociétés ... Il est à mettre en relation , pour une part , avec la crise des valeurs et du sens de la vie , dont souffre la culture actuelle « il y a un vide existentiel , dû à l’absence de valeurs et à un manque de confiance en soi , dans les autres et dans la vie en général » ( Jean-Paul II , aux participants à la Conférence internationale sur la drogue et l’alcool , 23 novembre 1991 ) et d’autre part avec le stress et les frustrations engendrées par l’efficience , l’activisme , et par la forte compétitivité anonyme pour l’emploi . ( Charte des personnels de santé n° 92 )Il y a presque chaque mois de nouvelles dépendances , beaucoup sont liées au développement de nos moyens de communications , mais aussi à une certaine solitude des jeunes : le développement d’internet , entre autres , entraîne de nouveaux asservissements , à une pornodépendance ou aux jeux vidéo , par exemple . Il y a un esclavage des médias, à tous les âges ( souvent, il y a une double dépendance : dépendance à Internet et à la pornographie ou dépendance à Internet et aux jeux Vidéo…) On peut classer ces Dépendances en 2 types : -Dépendances matérialisables, comme le tabac, l’alcool, le jeu ou le sexe Et Dépendances non matérialisables (virtuelles ? mais, bien sûr, c’est théorique, car tout passe par la matière …), autrefois, la télévision et maintenant, principalement Internet, il y a une cyberdépendance : on peut très facilement s’y épuiser sans trouver bien sûr de sens à sa vie ! Il peut y avoir même une double dépendance : cyber-pornodépendance ! Esclavage d’une drogue , qui peut-être plus ou moins sévère : toxico-dépendance : « La drogue ou toxicomanie est presque toujours la conséquence d’une évasion déplorable de ses propres responsabilités , d’une contestation à priori de la structure sociale que l’on refuse sans proposition productrice de réformes raisonnables , d’une expression de masochisme motivée par la carence des valeurs » ( Charte des personnels de Santé n° 93 ) « se droguer est toujours illicite , parce que c’est renoncer de manière injustifiée et irrationnelle , à penser , à vouloir et à agir en personnes libres » ( Jean-Paul II aux participants de la Conférence Internationale sur la drogue et l’alcool , le 23 nov. 1991 ) . L’asservi à la drogue vit sa condition comme un « pesant esclavage » dont il a besoin d’être libéré . Dans le langage spécialisé , on emploie plusieurs termes : accoutumance , addiction , asservissement ( d’où les mots « accro » , « addict » employés par les jeunes ), ce qui met bien en évidence l’esclavage que crée ce lien à la drogue . Il y a plusieurs stades dans la consommation d’une drogue ; 1. Usage simple 2. Abus 3. Dépendance … Seul ce stade correspond à ce que nous nommons « addiction » Mais ce stade est l’origine de toutes les perversions , en particulier d’une dégradation morale inéluctable pour se procurer l’argent nécessaire à l’achat de la drogue .Dans les toxicomanies , le docteur F.Farges ( Famille Chrétienne n° 1574 du 20 Janvier 2007 ) nous précise certains points des propriétés des drogues : l’héroïne est la plus dangereuse des drogues : la dépendance est très rapide , mais elle ne fait pas délirer ; par contre la cocaïne favorise les idées de persécution ; mais rend moins dépendant et moins vite . Pour ces deux drogues ( qu’on nomme à tort « dures » pour les différencier des drogues « douces » ) la dépendance psychologique est moins importante qu’avec certaines drogues nommées à tort « douces » , comme les cannabinoïdes : le manque pour elles peut « revenir » des mois voire des années après le sevrage ( des « flashs » ) .Moreau de Tours , au XIX° siècle , médecin , avait déjà dénoncé le risque du haschich et y avait consacré un mémoire ( rappelons que Haschisch vient de Haschischins , une secte « programmée » pour commettre des actes délictueux et ceci sous l’emprise de cette drogue )Citons Baudelaire : « S’il existait un gouvernement qui ait intérêt à corrompre ses gouvernés , il n’aurait qu’à encourager l’usage du cannabis. » et encore Soljénytsine : alors aux U.S.A. : « On détruit plus facilement une nation avec l’usage de la drogue qu’avec des miradors. » Le Cardinal A.Lopez-Trujillo dans le colloque tenu au Vatican les 9-10-11 Octobre 1997 « Solidaires de la vie » dit que le retournement est un temps essentiel dans la guérison du toxicomane « Dans la Parabole de l’Enfant Prodigue , il y a une clé de lecture , le terme grec ANASTASIS qui signifie résurrection , mais aussi se lever , se mettre debout , décision vitale de qui a été capable d’entrer en lui-même , de se rencontrer dans le dialogue réel , même s’il est plus caché , de la conscience ».Auparavant , il avait dit : « J’ai vu beaucoup de jeunes se transformer comme si en eux se reflétait la lumière du Verbe Incarné , l’image du Père … au cours de la première étape , douloureuse et pénible de leur libération , les toxicomanes disaient : « nous sommes en train de découvrir ce que nous sommes ».Au fond , chaque homme découvre continuellement ce qu’il doit être … » Se référant au toxicomane , le Souverain Pontife ( Jean-Paul II ) affirme qu’il faut le « conduire à la découverte ou à la redécouverte de sa propre dignité d’homme , … l’aider à faire ressusciter et croître , comme sujet actif , ces ressources personnelles que la drogue avait ensevelies … » puis le Saint Père poursuit : « … a été prouvée de manière concrète la possibilité de récupération et de rédemption de ce pesant esclavage … grâce aux méthodes qui excluent rigoureusement n’importe quel recours à des drogues - légales ou non – de caractère substitutif » ; puis , il conclut : « Ce n’est pas par la drogue qu’on peut vaincre la drogue . » (Allocution du Saint Père Jean-Paul II au VIII° Congrès Mondial des Communautés Thérapeutiques, 7 Septembre 1984) On ne peut parler de « la liberté de se droguer », ni « du droit à la drogue » car l’être humain n’a pas le droit de se nuire à lui-même il ne peut ni ne doit jamais abdiquer sa liberté personelle qui lui vient de Dieu (indisponibilité du corps humain : Note du rédacteur) » ( Jean-Paul II aux participants du VIII° Congrés mondial des Communautés Thérapeutiques ; 7 sept. 1984 ) Jean-Paul II à Carthagène (appel sur la tombe de St Pierre Claver , le 6-VII-1986 ) : « Le désir d’argent envahit le cœur de beaucoup de personnes ( c’est à dire les dealers , note du rédacteur ) , il les transforme en trafiquants de la liberté de leurs frères qui deviennent esclaves d’un esclavage beaucoup plus terrible que celui des esclaves noirs . Les négriers privent leurs victimes de l’exercice de la liberté : les trafiquants de drogue amènent leurs victimes à la destruction de leur propre personnalité.» Benoît XVI à la Communauté la Fazenda, près d’Aparecida au Brésil « Vous devez être les ambassadeurs de l’espérance… Je dis aux revendeurs de drogue de bien réfléchir au mal qu’ils sont en train de faire à une multitude de jeunes et d’adultes de toutes les couches sociales. Dieu leur demandera compte de ce qu’ils ont fait. La dignité humaine ne peut pas être foulée aux pieds de cette manière ; le mal provoqué mérite la même réprobation que celle que Jésus exprima à l’égard de ceux « qui scandalisent un seul de ces petits », les préférés de Dieu ( cf. Mt 18, 7-10 ) » « Mais , la drogue n’est pas le problème principal du toxicomane . La consommation de drogue n’est qu’une réponse trompeuse à la difficulté de trouver le sens positif de la vie.» (Conseil Pontifical pour la Famille, Du désespoir à l’espérance ,1992) L’Eglise annonce que Dieu sauve l’homme dans le Christ en lui révélant sa vocation et l’amour dont il est aimé.(cf. Gaudium et Spes n° 22 )L’Eglise se met au service de ceux qui sont sous ce nouvel esclavage (Eglise, Drogue et Toxicomanie p. 49), elle est « une force dynamique » et « promotrice de valeurs évangéliques entre les hommes » ( Redemptoris Missio n° 20) . C’est pourquoi l’Eglise « s’en tient toujours fermement au primat de la transcendance et de la spiritualité prémices du salut eschatologique …Qu’il soit clair toutefois que dans la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu , elle n’exerce aucune contrainte sur la liberté des hommes elle s'arrête devant le sanctuaire de leur conscience , elle propose , mais elle n'impose pas . » « La conviction sereine sur l’immortalité de l’âme, sur la résurrection future des corps et sur la responsabilité éternelle pour les actions propres est la méthode la plus sûre pour prévenir le mal terrible de la drogue , pour soigner et réhabiliter ses victimes , pour les fortifier dans la persévérance et dans l’engagement ferme sur la route du bien . » (Jean-Paul II aux participants de la VI° Conférence internationale du Conseil pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé , 23-11-1991 ) . Dans « Du désespoir à l’espérance » , le Conseil Pontifical pour la Famille ( et le Cardinal Lopez-Trujillo ) nous dit :« La vérité sur l’homme et sur le Christ, voilà le centre de la récupération intégrale » et citant Jean-Paul II : « Les hommes ont besoin de la vérité , ils se trouvent dans la nécessité la plus absolue de savoir pourquoi ils vivent , ils meurent , ils souffrent ! Et bien vous , vous savez que la « vérité » , c’est le Christ ! Il l’a Lui-même affirmé avec force « Je Suis la Vérité » (Jean 14,6 ) « Je Suis la Lumière du monde celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres ». ( Jean 8,12 ) . Aimez donc la Vérité ! Portez la vérité au monde ! Soyez les témoins de la vérité qu’est Jésus , avec toute la doctrine qu’Il a Lui-même révélée et qu’enseigne l’Eglise , assistée et inspirée de source divine . C’est la vérité qui sauve nos jeunes : toute la vérité , lumineuse et exigeante , telle qu’elle est ! N’ayez pas peur de la vérité et mettez toujours Jésus , et Lui seulement , en opposition à tant de modèles de l’absurde et du doute , qui sont susceptibles de fasciner sans doute , sans doute , mais qui inéluctablement , conduiront à la destruction » ( Homélie au Centro Italiano di Solidarità , 9 Aout 1980) Esclavage du jeu : on pense bien sûr à Camille de Lellis ou Dostoïevski , mais cette dépendance touche aussi nos contemporains . Mais là encore, cette esclavage est souvent lié désormais à un autre esclavage : Internet. Esclavage de l’alcool et du tabac « Les responsables politiques doivent faire un discernement indispensable quant à la différence essentielle entre les substances toxicomaniaques et la nature du tabac et de l'alcool. Il est vrai que le tabac et l'alcool conduisent aussi à la dépendance et l'asservissement. Mais cette situation est plutôt le résultat d’un abus de l’une ou l’autre substance pendant un temps plus ou moins long, alors que la toxicomanie est le simple résultat de l’usage qui conduit à un abus toujours plus contraignant et déshumanisant » ( Père B.Honings dans le colloque au Vatican « solidaires de la vie » ) . La différence entre toxicomanie et alcoolisme a été soulignée par le Saint Père Jean-Paul II : « Il existe, il est vrai, une nette différence entre le recours à la drogue et le recours à l’alcool : alors qu’un usage modéré de ce dernier ne s’oppose pas aux principes moraux- seul un usage abusif est condamnable – l’usage de la drogue est au contraire toujours illicite parce qu’il implique un renoncement injustifié et irrationnel à penser, vouloir et agir comme une personne libre. » (Colloque Alcool et Toxicomanie du 19 Juillet 1992 n° 1) « Alcoolisme et toxicomanie sont contre la vie. On ne peut pas parler de la « liberté de se droguer » ou du « droit à la drogue » parce que l’être humain n’a pas le droit de se détruire et ne doit jamais abandonner la dignité qui lui vient de Dieu ! (indisponibilité du corps humain : note du rédacteur. On peut dire la même chose de l’alcoolisme …) Ces phénomènes – il faut toujours le rappeler – portent non seulement atteinte au bien-être physique et psychique, mais privent la personne elle-même de sa capacité de communion et de don. » ( Jean-Paul II à la VI° Conférence du Conseil Pontifical pour la Pastorale des Services de Santé , le 23 Novembre 1991 ) « Toutefois , je note que le concept de licéïté concerne un usage modéré (pour le tabac et l’alcool ) , alors que tout abus est illicite et donc condamnable » ( Père B.Honings )L’alcool et le tabac ne sont pas du même ordre en ce qui concerne l’éthique que les stupéfiants, ces derniers entraînant une dépendance à peu près immédiate (usage) alors que avec les premiers la dépendance n’a lieu qu’en cas d’abus.Le tabac est encore moins grave, si l’on peut dire, puisqu’il n’entraîne pas d’altération de la personnalité . « L’illégalité éthique ne concerne pas l’usage du tabac, mais son abus . L’excès de tabac est illicite, car il est très nuisible à la santé et il conduit à une dépendance. Tous les consommateurs d’alcool et de tabac, surtout lorsqu’ils sont encore très jeunes courent le risque de devenir- en raison de l’abus – des dépendants , des asservis » ( Père B.Honings ) Lui aussi ( le tabac ), a ses propres complications somatiques , et en outre , il signale une certaine « incomplétude » de l’être … Esclavage de certains médicaments ( psycholeptiques ) Il faut souligner aussi l’esclavage redoutable de la prostitution , dans la dépendance d’un souteneur. Esclavage des conduites alimentaires (anorexie ou boulimie) Esclavage de l’exercice de la sexualité : la sexualité est la source d’un esclavage insoupçonné au départ … mais c’est là une illusion ( c’est sans doute la même illusion qui pousse à se droguer , on pense « je ne suis pas dépendant , je m’arrêterais quand je veux … » ) Mais, on est esclave, on s’en rend vite compte . Un des slogans de tous les mouvements libertaires qui ont fleuris partout en 1968 : « il est interdit d’interdire » a eu comme conséquence la « libération sexuelle » (et aussi l’emploi réclamé à grands cris des drogues dites douces …) ; 15 ans plus tard , l’épidémie de SIDA et son extension à travers le monde est venu refroidir ce vent de libéralisme. Sans doute, cela a correspondu à une certaine époque de plein emploi, qui n’existe plus, mais qui a laissé des empreintes dans les esprits … . Esclavage des sectes …. Mais , il y a aussi l’esclavage par l’argent ou le pouvoir , ce sont deux des trois concupiscences de St Jean ( 1 Jn 1,12 ) . L’esclavage par l’argent ou le pouvoir sont redoutables, car souvent sous-estimés : il ne touche pas seulement la génération qui nous précède et qui a souffert des dommages de la guerre, mais cette « ivresse » peut aussi toucher celles qui les suivent : c’est un mal éternel ! La Bible nous en parle quand Jésus nous dit qu’il faut choisir entre Dieu et Mammon … M.C. d’Welles (fondatrice et présidente de « enfance sans drogue ») , pour la prévention de la toxicomanie , présente 3 combats à mener , car la société est minée par 3 maux qui risquent de la détruire 1° La confusion du bien et du mal , qui est responsable d’une perte progressive du sens de la responsabilité . La conscience du bien et du mal est innée en l’homme et ne dépend pas de la religion. 2° fléau qu’il faut combattre : l’illettrisme (on peut s’étonner de la place de l’illettrisme : c’est sans doute par la lecture, qu’est ainsi ouverte la porte de la culture … , car la transmission orale n’a plus lieu, comme autrefois. ) le 3° fléau est la drogue « elle crée et accentue l’irresponsabilité … elle fabrique des êtres soumis à des pulsions incontrôlables de meurtre et de suicide. » (On pourrait dire la même chose en ce qui concerne le S.I.D.A (souvent, considéré comme la conséquence d’une sexualité incontrôlée – bien sûr, il y a des S.I.D.A. « immérités » ! -, ils expriment bien le désarroi de notre société et les enfants en sont bien souvent les victimes… la déstructuration de la conscience morale est un phénomène malheureusement de plus en plus répandu) Ainsi, on peut dire que tout esclavage en nous est une séquelle de notre péché des origines (perversion de notre liberté) « le péché du monde », conséquence du péché originel : Dieu nous a fait libres. Mais, en croyant nous libérer, nous tombons dans une dépendance encore plus grande … terrible piège !Saint Paul nous avait dit « Prenez garde ! Ne vous remettez pas sous le joug d’un nouvel esclavage … » (Galates 5,2). Dans l’épître aux Romains, il nous dit que « notre vieil homme a été crucifié avec le Christ pour que fût réduit à l’impuissance ce corps de péché et que nous cessions d’être asservis au péché. » (Rm 6,63) Il est sans doute bien difficile de rester libres ou de conquérir cette liberté … une fois encore , les Hébreux ont regretté leur sujétion en Egypte , Moïse a dû mettre 40 ans pour les éduquer . Beaucoup sont morts au désert , Josué cependant a conduit le peuple en Terre Promise … nous-mêmes , nous sommes destinés à cette Terre promise , mais notre liberté se conquiert tous les jours . Cette liberté est un bien donné avec notre nature, et c’est notre devoir de la reconquérir ( ou de la conquérir ). Cette libération des esclavages est douloureuse (mais cette croix est légère … « prenez sur vous mon joug et mettez vous à mon école …». Saint Jean et Saint Paul ne cessent de nous le redire).Il est sans doute bien difficile de rester libres ou de conquérir cette liberté : notre liberté se conquiert tous les jours . Pourtant, cette liberté est un bien donné avec notre nature, et c’est notre devoir de la conquérir (ou de la reconquérir). Notre nature est faussée, et c’est la conséquence du péché originel. Benoît XVI, dans une catéchèse sur Saint Paul (8 Novembre 2007) ; « Nous devons appliquer tout cela à notre vie quotidienne en suivant l’exemple de Paul .. . D’une part, la foi doit nous maintenir dans une attitude d’humilité constante face à Dieu, et même d’admiration et de louange à son égard. En effet, ce que nous sommes en tant que chrétiens, nous le devons uniquement à Lui et à sa grâce. Etant donné que rien, ni personne ne peut prendre sa place, il faut donc que nous ne rendions à rien d’autre ni à personne d’autre l’hommage que nous Lui rendons. Aucune idole ne doit contaminer notre univers spirituel ; autrement au lieu de jouir de la liberté acquise, nous retournerions dans une forme d’esclavage humiliant. » Paul, aussi, nous parle des tribulations qui durent encore (début de la 2° aux Corinthiens) ou encore du vêtement extérieur dont nous avons tant de peine à nous dévêtir ( 2° aux Corinthiens 5,4 ) . L’homme est un être libéré par Jésus-Christ, mais qui a tant de mal à devenir (ou à re-devenir) libre.Dans l’épître aux Galates, Paul nous avertit que la liberté que nous avons acquise peut toujours dégénérer « Si le Christ nous a libéré, c’est pour que nous soyons vraiment libres. Alors, ne reprenez pas les chaînes de votre ancien esclavage … Frères, vous avez été appelés à la liberté. Mais que cette liberté ne soit pas un prétexte pour satisfaire votre égoïsme. » (Galates 5 ,1 et 14) Rassurons-nous, « le péché et la grâce n’ont pas la même mesure » (Saint Paul aux Romains, surtout le chapitre 6). Ce que nous dit Saint Paul dans l’épître aux Romains peut nous choquer : choisir un « autre » esclavage que celui des passions … Le Christ (ou le christianisme) serait-il un tel esclavage ? N’est-ce pas une atteinte à notre propre liberté ? Rappelons que c’est un esclavage accepté ou choisi librement, un esclavage d’amour … (Me viennent à l’esprit les paroles que Jésus dit pour ceux qui choisissent le célibat librement, par exemple en Matthieu 19, 1-6 , en fait toute notre vie est faite de choix qui semblent restreindre notre liberté , et en fait la libèrent ). Ce que dit Jean-Paul II dans l’intervention qui suit le montre bien … A Jasna Gara, en Pologne, lors de son premier voyage en 1979, celui-ci avait dit : « L’acte (de consécration à la Mère de Dieu) parle de la « servitude » et contient un paradoxe semblable à celui des paroles de l’Evangile selon lesquelles il faut perdre sa vie pour la trouver ( cf. Mat 10,39 ) . L’amour , en effet , constitue l’accomplissement de la liberté , mais en même temps , l’appartenance , c’est à dire le fait de ne pas être libre, fait partie de son essence . Toutefois, ce fait de « ne pas être libres » dans l’amour n’est pas perçu comme un esclavage, mais bien comme une affirmation de liberté et comme son accomplissement. L’acte de consécration dans l’esclavage indique donc une dépendance singulière et une confiance sans limites. En ce sens , l’esclavage ( la non-liberté ) exprime la plénitude de la liberté , de la même manière que l’Evangile parle de la nécessité de perdre sa vie pour la trouver en plénitude. » (Homélie au Sanctuaire Marial de Jasna Gora , le 4 Juin 1979 ) .On pourrait dire la même chose du mariage , de la vie consacrée , du choix d’une profession …limitation certaine de notre liberté ; mais , paradoxalement , l’homme trouve son accomplissement dans cette limitation … Dans le chemin de Croix 2005 , alors qu’il n’était pas encore pape ( Jean-Paul II vivait alors ses derniers jours ), le cardinal Ratzinger au cours de la 11° station nous dit : « Aide-nous à nous laisser lier étroitement à Toi . Aide-nous à démasquer la fausse liberté qui veut nous éloigner de Toi. Aide-nous à accepter Ta liberté liée et à trouver dans ce lien étroit avec Toi , la vraie liberté » . Une année plus tard, alors qu’il est devenu Pape, il nous dit : « L’homme qui s’abandonne complètement entre les mains de Dieu ne devient pas une marionnette de Dieu, une personne consentante ennuyeuse : il ne perd pas sa liberté . Seul l’homme qui se remet totalement à Dieu trouve la liberté véritable, l’ampleur vaste et créative de la liberté du bien. L’homme qui se tourne vers Dieu ne devient pas plus petit, mais plus grand, car, grâce à Dieu et avec Lui, il devient grand , il devient divin , il devient vraiment lui-même .» Dans l’Hymne aux Philippiens ( Philippiens 2,6 à 11), Paul nous dit : « Ayez entre vous les dispositions que l’on doit avoir dans le Christ-Jésus Lui qui était dans la condition de Dieu n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu Mais, au contraire, Il se dépouilla lui-même et prenant la condition d’esclave … » Saint Jacques parle aussi ailleurs d’une « loi de liberté » ce qui peut sembler deux mots antinomiques … « Au contraire, l’homme qui se penche sur la loi parfaite, celle de la liberté … » (Jacques 1,25 et 2,12) Il nous semble que les mots « esclavage » et « liberté », voire « libération », sont absolument inconciliables (cf. l’homélie de Jean-Paul II à Jasna Gora). Peut-être que le lien entre eux deux peut être le mot « obéissance », mot qui semble à notre époque absolument inconciliable avec celui de liberté ; et pourtant, c’est l’obéissance du Christ qui nous procure la liberté : l’épître aux Philippiens nous le dit d’abord : « Obéissant jusqu’à la mort et à la mort sur une Croix. » (Ph 2,9). L’épître aux Hébreux nous le redit : « Bien qu’Il soit le Fils, Il a pourtant appris l’obéissance par les souffrances de sa Passion; et ainsi conduit à sa perfection … » (Hébreux 5,8-9). En Romains (Rm 5 19) « Ainsi par l’obéissance d’un seul ( le Christ ), la multitude sera t-elle constituée juste » . Cette obéissance qui différencie l’esclavage de servitude de l’esclavage d’amour est le fruit d’un consentement ; c’est pourquoi cet esclavage est libre. « A travers cette obéissance (au Père), le Fils de Dieu entre dans le monde. La Croix elle-même est déjà mystérieusement présente à l’instant de l’Incarnation, au moment de la conception de Jésus dans le sein de Marie. En effet , l’ecce venio de la lettre aux Hébreux ( cf. 10, 5-9 ) est l’acte d’obéissance primordial du Fils au Père , c’est déjà l’acceptation de son Sacrifice Rédempteur « lorsqu’il entre dans le monde. »(Jean-Paul II , lettre aux familles Montfortaines , le 8 Décembre 2003 ) . Saint Paul dans l’épître aux Romains (Rm 6,16-18 ) met bien en évidence ce lien entre obéissance et liberté ( voir un peu plus loin ). Jean-Paul II, dans l’homélie de Jasna Gora citée plus haut nous rappelle les liens entre amour et limitation de notre liberté. Dans la vie du Christ ; la Croix est le signe de cette obéissance du Christ (« obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix » Philippiens 2) S’il y a un esclavage intérieur (les dépendances), cette perte n’est pas définitive, notre liberté demeure toujours, même si elle semble recroquevillée ou si elle a pu ne jamais apparaître au jour Si la liberté extérieure est opprimée ( les prisonniers d’Opinion sont là pour en témoigner , mais des prisonniers de Droit Commun se sont aussi convertis pendant leur incarcération ) , il y a aussi une liberté intérieure qui demeure :Saint Paul nous le dit : « C’est pourquoi nous ne perdons pas courage , et même si en nous l’homme extérieur va vers sa ruine , l’homme intérieur se renouvelle de jour en jour . » (2 Corinthiens 4,16). Ceux qui sont emprisonnés un long temps le savent bien. Pour l’homme, apparemment, il ne saurait y avoir une seule liberté, cette liberté extérieure dont nous parle le psaume 123 :« Comme un oiseau, nous avons échappé au filet du chasseurLe filet s’est rompu : nous avons échappé… »Ce sens est ici sans doute seulement symbolique. Mais, répétons-le : notre liberté n’est pas seulement extérieure, elle est principalement intérieure. Sinon les prisonniers d’opinion ne seraient plus libres ! C’est la liberté du Christ à la Croix qui est toute intérieure. (cf. la citation de Jean de le Croix sur le fil minime qui empêche l’oiseau de voler, et lui aussi compare notre liberté « extérieure » à celle d’un oiseau). Le combat le plus intense de Jésus lors de sa Passion, s’est sans doute passé à Gethsémani (les sueurs de sang), là où Il a dû remettre sa liberté intérieure à son Père (son acceptation). Dans l’Epître aux Romains , Paul met bien en évidence cet antagonisme entre toutes les libertés illusoires que nous croyons avoir , et la liberté que procure Dieu . Le chapitre 6, en 6,16-18, entre autres «Vous le savez bien : en vous mettant au service de quelqu’un pour lui obéir comme esclaves, vous voilà esclaves de celui à qui vous obéissez : soit du péché qui est un chemin de mort, soit de l’obéissance à Dieu qui est un chemin de justice. Mais, rendons grâce à Dieu : vous qui étiez esclaves du péché , vous avez maintenant obéi de tout votre cœur à l’enseignement de base auquel Dieu vous a soumis . Vous avez été libéré du péché, vous êtes devenus les esclaves de la justice » … Plus avant, il avait dit : «Nous le savons : l’homme ancien qui est en nous a été fixé à la croix avec Lui pour que cet être de péché soit réduit à l’impuissance, et qu’ainsi nous ne soyons plus esclaves du péché. Car celui qui est mort est affranchi du péché. » (ici encore, nous avons cette notion d’obéissance) En Romains 8,1, « Ainsi pour ceux qui sont dans le Christ Jésus, il n’ y a plus de condamnation. Car, en me faisant passer sous sa loi, l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus m’a libéré, moi qui étais sous la loi du péché et de la mort » (Rm 8,1) , et plus loin « En effet tous ceux qui se laissent conduire par l’Esprit de Dieu , ceux-là sont fils de Dieu . L’Esprit, que vous avez reçu ne fait pas de vous des esclaves, des gens qui ont encore peur : c’est un Esprit qui fait de vous des fils : poussés par cet Esprit , nous crions vers le Père en l’appelant « Abba ! (Romains 8,12-13 et Galates 4,6), et plus loin : «Car la Création a été livrée au pouvoir du néant, non parce qu’elle l’a voulu, mais à cause de celui qui l’a livrée à ce pouvoir. Pourtant, elle a gardé l’espérance d’être elle aussi libérée de l’esclavage, de la dégradation inévitable, pour connaître la liberté, la gloire des enfants de Dieu » ( Rm 8,14-15 et 8,20-21 ) La notion d’esclavage est un thème central de discussion entre Jésus et les Pharisiens , nous l’avons vu , à la fin du chapitre 8 de Saint Jean : « Si c’est le Fils qui vous rend libres , vous serez vraiment libres » : ( Jean 8,36 ). Quelques versets avant, il nous avait dit : « Si vous demeurez dans Ma Parole, vous êtes vraiment Mes disciples, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres. » ( Jean 8, 32) Cette notion est reprise en l’élargissant à toutes les formes de servitude dans le 6° chapitre de l’Epître aux Romains. A notre époque aussi, l’esclavage prend toutes les formes comme nous l’avons vu, servitudes intérieures (la drogue), mais aussi des contraintes qu’on cherche à imposer, contraintes politiques, mais aussi servitudes économiques. C’est un des paradoxes ( apparents ) de l’Evangile , soulignés par Jean-Paul II ( cf. son homélie à Jasna Gora), et Benoît XVI , que « esclavage » et « liberté » apparemment contradictoires ne le sont plus si l’on s’attache à Jésus-Christ … « liberté liée », esclavage d’amour cette fois. Jésus-Christ est venu pour nous libérer de toutes nos aliénations, servitudes, pièges et mensonges que le démon nous tend « pour nous faire croire que nous serions plus libres si … ? ». « La liberté est à libérer », nous dit Jean-Paul II « mais le Christ a libéré notre liberté de la domination de la concupiscence » (Veritatis Splendor n° 103). Jésus n’a jamais été aussi libre qu’à la Croix : toute sa « liberté extérieure » a été supprimée, mais sa liberté « intérieure » est totale (peuvent aussi en témoigner les prisonniers dont nous avons parlé). « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi. » disait Saint Paul aux habitants de Galatie (Gal 2,20) … Jean-Paul II, toujours, dans « sa Lettre aux familles monfortaines » (le 8-XII- 2003) : « L’esclavage d’amour doit donc être interprété à la lumière de l’admirable échange entre Dieu et l’humanité dans le mystère du Verbe Incarné. Il s’agit d’un véritable échange d’amour entre Dieu et sa créature dans la réciprocité du don total de soi . L’esprit de cette dévotion est de rendre une âme intérieurement dépendante et esclave de la Très Sainte Vierge et de Jésus par elle (Secret de Marie n° 44). Paradoxalement, « ce lien de charité », cet « esclavage d’amour » rend l’homme pleinement libre en lui conférant la véritable liberté des enfants de Dieu (cf. Traité de la Vraie Dévotion n°169 ) . Il s’agit de se remettre totalement à Jésus, en répondant à l’amour avec lequel il nous a aimés le premier : quiconque vit dans cet amour peut dire avec St Paul « Ce n’est plus moi qui vis, mais c’est le Christ qui vit en moi » (Galates 2,20) …» Pour reprendre ce même thème (plus grande aliénation ou plus grande liberté ?) , citons encore Saint Paul au chapitre 6 de l’épître aux Romains : « J’emploie ici un langage humain, adapté à votre faiblesse . Car, si vous aviez jadis offert vos membres comme esclaves à l’impureté et au désordre … de la même manière, mettez-les maintenant au service de la justice qui mène à la sainteté. Quand vous étiez esclaves du péché, vous étiez libres par rapport aux exigences de la justice. Qu’avez-vous récolté, à commettre des actes que vous regrettez maintenant ? En effet, ces actes conduisent à la mort. Mais, maintenant que vous avez été libérés du péché et que vous êtes devenus les esclaves de Dieu, vous y récoltez la sainteté , et cela aboutit à la vie éternelle . Car le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus notre Seigneur. » (Romains 6,19 à 23) C’est tout le paradoxe de l’Evangile : il fallait que Jésus meure en Croix pour nous obtenir cette définitive libération, il a fallu qu’il soit complètement immobilisé et perdre ainsi toute « liberté extérieure » pour qu’il nous procure cette liberté qui nous manquait, et qu’Il nous fasse comprendre qu’il y a une autre Vie : « Il faut que le grain de blé meure … » (Jean 12,24) La séparation entre les dépendances (nombreuses), esclavages de toute sorte que nous avons mentionné, et l’esclavage en Jésus-Christ est justement cette Croix du Christ . Citons encore Jean-Paul II dans sa Lettre aux Familles Montfortaines « Dans la spiritualité Monfortaine, le dynamisme de la charité est en particulier exprimé à travers le symbole de l’esclavage d’amour à Jésus, sur l’exemple de Marie et avec son aide maternelle . Il s’agit de la pleine communion à la kénosis du Christ, une communion vécue avec Marie, intimement présente dans les mystères de la vie de son Fils. Il n’y a rien parmi les chrétiens qui nous fasse plus appartenir à Jésus-Christ et à sa sainte Mère que l’Esclavage de volonté ... En effet, le Fils de Dieu, venu au monde en obéïssance au Père dans l’Incarnation (cf. Hébreux 10,7) s’est ensuite humilié, en se faisant obéïssant jusqu’à la mort et à la mort sur une Croix (cf. Ph. 2,7-8). Marie a répondu à la volonté de Dieu par le don total d’elle-même, corps et âme, pour toujours, de l’Annonciation à la Croix, et de la Croix à l’Assomption.» Au n° 72 du traité de la Vraie Dévotion, Saint Louis Marie Grignon de Montfort nous dit : « Le Catéchisme de l’Eglise de Trente ne nous laisse aucun doute quand il exprime par un terme qui n’est pas du tout équivoque, nous appelant mancipia Christi : c'est-à-dire « esclaves de Jésus- Christ. »Et au n° 73 du même Traité, Louis Marie continue : « Je dis que nous devons être à Jésus Christ et le servir, non seulement comme des serviteurs mercenaires, mais comme des esclaves amoureux, qui par un effet d’un grand amour se donnent et se livrent à le servir en qualité d’esclaves pour l’honneur seul de lui appartenir. Avant le Baptème, nous étions donc les esclaves du Diable ; Le Baptème nous a rendus esclaves de Jésus Christ ; ou il faut que les Chrétiens soient esclaves du diable ou esclaves de Jésus Christ. » Ceci rejoint ce que Paul dit dans le 6° chapitre de l’Epître aux Romains : il y aurait un « échange » irréductible entre les esclavages « passés » de nos passions, et l’esclavage de Jésus Christ ! C’est en ce sens que notre liberté est liée au sens où notre Pape Benoît XVI nous le dit. Saint Louis-Marie Grignon de Montfort parle d’un esclavage de Jésus en Marie … (rappelons toujours que cette forme d’esclavage est un esclavage d’amour, à la différence de ce qu’il appelle les esclavages de contrainte) ; « Il faut conclure de ce que Jésus Christ est à notre égard que nous ne Jean Paul II, et après lui, Benoît XVI, nous disent, au sujet du développement de l’agnosticisme et du relativisme dans nos sociétés :sommes point à nous, comme dit l’Apôtre (St Paul en 1 Corinthiens 6,19 et 12,27), mais tout entiers à Lui, comme ses membres et ses esclaves qu’Il a achetés infiniment cher, par le prix de tout son sang. Avant le baptême, nous étions au diable comme ses esclaves, et le baptême nous a rendus les esclaves de Jésus-Christ… » (n° 68 de Traité de la.Vraie.Dévotion.) Au n° 70 : « Il y a deux manières ici-bas d’appartenir à un autre, de dépendre de son autorité, à savoir la simple servitude et l’esclavage. Saint Augustin nous dit : « Dans la maison du Seigneur, l’esclavage est libre. L’esclavage est libre lorsque ce n’est pas la contrainte , mais la charité qui sert … que la charité te rende esclave puisque la vérité t’a rendu libre . Tu es en même temps esclave et homme libre : esclave, car tu l’es devenu, homme libre car tu es aimé de Dieu, ton Créateur : bien plus , tu es libre parce que tu aimes ton Créateur … tu es l’esclave du Seigneur , l’affranchi du Seigneur. Ne cherche pas à être libéré en t’éloignant de la maison de ton libérateur » (Enarratio in Psalmum XCIX , cité en Veritatis Splendor n° 87 ) * Aujourd’hui, il est important de réaffirmer avec force qu’il y a une vérité et que c’est notre devoir de la rechercher. Le problème majeur qui domine notre monde occidental est l’agnosticisme. Pourtant, ce monde a été largement baptisé ; certes, on ne pourrait pas le cataloguer d’indifférentisme, ce monde cherche « comme à tâtons » un sens à son avenir … Le mercantilisme n’est sans pas un choix ; et qui peut prétendre qu’il en est indemne ? Dans son Encyclique sociale, Benoît XVI (« Caritas inVeritatis ») note : « Dans son lien étroit avec la vérité, l’amour peut être reconnu comme une expression authentique d’humanité … ce n’est que dans la vérité que l’amour resplendit et qu’il peut être vécu avec authenticité. La vérité est une lumière qui donne sens et valeur à l’amour. Cette lumière est en même temps, celle de la raison et de la foi, par laquelle l’intelligence parvient à la vérité naturelle et surnaturelle de l’amour : l’intelligence en reçoit le sens du don, d’accueil et de communion. Dépourvu de vérité, l’amour bascule dans le sentimentalisme. L’amour devient une coque vide susceptible d’être artificiellement remplie. C’est le risque mortifère qu’affronte l’amour dans une culture sans vérité. Il est la proie des émotions et de l’opinion contingente des êtres humains ; il devient un terme galvaudé et déformé jusqu’à signifier son contraire. La vérité libère l’amour des étroitesses de l’émotivité qui le prive de contenus relationnels et sociaux et d’un fideisme qui le prive d’un souffle humain et universel. Dans la vérité, l’amour reflète en même temps la dimension personnelle et publique de la foi au Dieu Biblique qui est à la fois Agape et Logos : Charité et Vérité, Amour et Parole. » La course vers des spiritualités Orientales est un signe de cette recherche, mais sans doute nos concitoyens ignorent-ils que dans le Christianisme, depuis XX siècles, existent des trésors de spiritualité ! Refuser le Baptême, c’est refuser une Révélation qui nous est donnée, c’est admettre un agnosticisme et refuser « tout apport extérieur », penser que sa propre recherche personnelle prime tout … Dans un sens, c’est nier que Dieu lui-même s’est incarné (a pris chair) pour nous enseigner cette vérité. Dans un sens, nier cette incarnation, c’est nier la Résurrection du Christ, lui attribuer des qualités purement humaines … Nous ne sommes pas loin d’un arianisme qui a sévi aux premiers siècles. Et certes les médias ne sont pas innocents de cette dérive. Le néo-positivisme règne en maître dans nos médias et dans nos sociétés : on s’imagine que pour vivre ensemble, il est nécessaire de gommer certaines différences, même s’il s’agit de l’Incarnation de Dieu lui-même et de sa Résurrection. Au centre de ce conflit (entre liberté et vérité), intervient sans aucun doute, la place des religions non-chrétiennes dans les démocraties et aussi le phénomène de l’incroyance… c’est ici que se place la notion de droit naturel, nécessaire pour ne pas entrer en barbarie : bien sûr, toutes les organisations internationales sont confrontées au droit, même si elles ne sont pas chrétiennes, il y a un droit dans les pays musulmans, hindouistes, bouddhistes, indépendant de toute Révélation Judéo-Chrétienne, mais, bien sûr, il y a une ambiguïté à lever sur le mot naturel : ce qui est naturel est déjà le fruit de l’éducation, bien sûr, ce ne veut pas dire inné … Il y a des lois morales qui ne sont pas le résultat du Décalogue, mais qui peuvent être découvertes par toute civilisation. Jean Paul II dans un Message pour la XXXII° journée des Communications Sociales -1990- cité en « Eglise et Internet, Osservatore Romano en langue française du 12 Mars 2002) : « Le monde des Médias peut parfois paraître indifférent, et même hostile à la foi, et à la morale chrétienneC’est en partie parce que la culture médiatique est profondément imprégnée par un sens typiquement post-moderne qui affirme que la seule vérité absolue est qu’il n’existe pas de vérité absolue ou que s’il y en avait, elle serait inaccessible à la raison humaine, et par conséquent hors de propos.» BENOIT XVI, nouvellement élu, a enrichi ce discours sur cette liberté, qui est notre passage obligé, liberté qui nous différencie de toute gent animale ; son message est répercuté par ses collaborateurs : L’exemple, sans doute le plus frappant, de ceci est celui de Saint Pierre qui « perd » sa liberté lorsqu’il devient responsable de l’Eglise : « Pais mes brebis. Amen, amen, je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te liera ta ceinture … » (Jean 21, 18) C’est aussi affirmer que toute liberté ne libère pas l’homme ; elle peut, au contraire, être source d’asservissement : la drogue ou la sexualité, par exemple. Plus tard, il confie aux séminaristes de l’Institut Pontifical du Latran, le 20-II-2009 : « La liberté se réalise paradoxalement par le service… la licence est le résultat d’une liberté livrée à elle-même ; le moyen terme entre liberté et vérité est le service (qu’on pourrait aussi appeler d’autres noms : charité, don). … Au Siècle des Lumières, il n’y avait pas, croyait-on, d’autre voie possible que de se soumettre à un Dieu tyran ; ou bien, pour être vraiment libre, chercher l’indépendance vis-à-vis de ce Dieu. C’est ce que croyaient ces philosophes. Mais est-on bien sûr que Dieu est un tyran ?... La dépendance fatale ne serait telle que si le Dieu Créateur était un tyran et non un être bon… Si, au contraire, ce Créateur nous aime et que notre dépendance signifie être dans l’espace de son amour, dans ce cas, la dépendance signifie précisément liberté. » Dans l’Ecriture, au moins, 3 passages sont essentiels pour bien cerner ce que nous dit le Nouveau Testament de la liberté, 1) La première est en Saint Jean, dans son Evangile, dans la seconde partie du chapitre 8, diatribe que Jésus a avec les Pharisiens concernant la liberté « la vérité vous rendra libres » (Jean 8,32), puis : « Si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres » (Jean 8, 36) 2) La seconde concerne l’Epître aux Galates chez Saint Paul, au premier verset du chapitre 5, puis au verset 15, il nous dit très justement que la liberté acquise peut dégénérer en licence. 3) La troisième est dans l’épître aux Romains (Romains 8,18-21) montre bien cet avènement de la liberté : « J’estime , en effet, que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler en nous, car la Création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu : si elle fut assujettie à la vanité- non qu’elle l’eut voulue, mais à cause de celui qui l’y a soumise, c’est avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. » Dans la 1° aux Corinthiens (1 Co 9,19), il nous dit : « Oui, libre à l’égard de tous, je me suis fait l’esclave de tous » Dans la 2° épître aux Corinthiens (2 Co 3,17), il avait dit aussi : « Quand on se convertit au Seigneur, un voile tombe. Or, le Seigneur, c’est l’Esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. » Mais aussi, dans l’Epître de Saint Jacques (Jacques 2,12-13) : « Parlez et agissez comme des gens qui vont être jugés par une loi de liberté, car le jugement est sans miséricorde pour celui qui n’a pas fait miséricorde, mais la miséricorde se moque du jugement. » (Jacques cite Osée 3,3) La liberté n’est qu’un moyen ordonnée à une fin : la vérité . Ce n’est pas une divinité comme certains penseurs contemporains voudraient nous le faire croire, même si le mot « divinité » pour eux semblerait complètement incongru : la liberté n’existe qu’en fonction de la vérité ; il ne faut pas la sacraliser ! Cette quasi-sacralisation est l’origine du subjectivisme , dans nos pays principalement. Ce subjectivisme est responsable de cette mise en doute que la vérité est atteignable par notre intelligence et aussi par Révélation. Pour beaucoup, le Christianisme est un Fanatisme qui pourrait être aussi dangereux que d’autres ! Dire que c’est Révélation serait dangereux pourle Bien Commun. Sacraliser la liberté, c’est la porte ouverte à des aventures vite anti-démocratiques : la tolérance devient très vite intolérante ; elle cherche à promouvoir un agnosticisme, voire un athéisme, par la force sous couvert de laïcisme. Le Cardinal Julian Herranz souligne dans son article de l’ORlf du 17 Mai 2005, n° 20 : « Jean-Paul II : structure morale de la liberté » : « Tout le Magistère social de l’Eglise est guidé avant tout par la nécessité de défendre les consciences des chrétiens et de l’humanité tout entière contre le mal intrinsèque de deux grandes utopies idéologiques, devenues également deux systèmes politiques à l’échelle mondiale : l’utopie totalitaire de la justice sans liberté et l’utopie libertaire de la liberté sans vérité. En effet Jean-Paul II avait déjà dit à l’Université de Vilnius « Des totalitarismes de tendances opposées et des démocraties malades ont bouleversées l’histoire de notre siècle. ». Si la première utopie, celle de la justice sans vérité est en voie d’extinction, par contre, la seconde, celle de la liberté sans vérité est malheureusement en phase d’expansion croissante dans le monde démocratique. Celle-ci qui a mûri dans le contexte philosophique de relativisme agnostique a trouvé un puissant instrument législatif dans le strict positivisme juridique. »… plus loin, il cite à nouveau Jean-Paul II : « Il est urgent que nous oeuvrions afin que le véritable sens de la démocratie, conquête authentique de la culture, soit totalement préservé. Sur ce thème apparaissent, en effet, des dérives inquiétantes, lorsque l’on assimile la démocratie à une pure procédure, ou lorsque l’on pense que la vérité exprimée par la majorité suffit « tout court » à déterminer le caractère moral d’une loi. En réalité, la valeur de la démocratie se maintient ou disparaît en fonction des valeurs qu’elle incarne et promeut. Le fondement de ces valeurs ne peut se trouver dans des majorités d’opinion provisoires et fluctuantes, mais seulement dans la reconnaissance d’une loi morale objective. » « Ailleurs, Jean-Paul II écrit dans « Entrez dans l’Espérance » : la condamnation de Dieu de la part de l’homme ne s’appuie pas sur la vérité, mais sur l’abus de pouvoir, sur la conjuration sournoise… Et ne répétons-nous pas cette conjuration également dans les parlements démocratiques, lorsque, par exemple, à travers une loi promulguée en toute régularité, l’on condamne à mort l’homme qui n’est pas encore né ? »… « En effet, il faut constater avec Jean-Paul II que dans la seconde moitié du XX° siècle l’agnosticisme religieux et le relativisme moral et juridique, fruits amers de l’immanentisme philosophique ont façonné et modelé une société démocratique « malade », très largement matérialiste et permissive, détachée non seulement des réalités transcendantes, mais également des exigences de la morale naturelle. » « La liberté, nous dit Jean-Paul II, possède une logique interne qui la qualifie et l’ennoblit, elle est ordonnée à la vérité et elle se réalise dans la recherche et la mise en œuvre de la vérité. Séparée de la vérité sur la personne humaine, elle se dégrade en licence dans la vie individuelle, et dans la vie politique, en arbitraire des plus forts et en arrogance du pouvoir. C’est pourquoi, loin d’être une limitation ou une menace pour la liberté, la référence à la vérité de l’homme- vérité universellement connaissable par la loi morale inscrite dans le cœur de chacun- est réellement une garantie de l’avenir de la liberté. » (1995, Discours à l’ONU, ORlf du 10 octobre 1995, n° 41) En ce sens, a dit Jean-Paul II « La loi naturelle dans la mesure où elle réglemente les relations inter-humaines, vaut comme « droit naturel » et, comme telle, exige le respect des personnes dans le respect du bien commun. Une conception authentique du droit naturel entendue comme protection de la dignité éminente et inaliénable de tout être humain, est garante de l’égalité et donne un contenu véritable aux « droits de l’homme » qui constituent les fondements des Déclarations Internationales. Les Droits de l’homme, en effet, doivent avoir pour référence ce que l’homme est par nature, en vertu de sa propre dignité, et non ce qui est l’expression de choix subjectifs, faits par ceux qui jouissent du pouvoir de participer à la vie sociale ou par ceux qui obtiennent le consentement de la majorité. » et plus loin « cette référence à la vérité de l’homme sur laquelle doit reposer la loi, « loin d’être une limitation ou une menace pour la liberté » constitue en réalité « la garantie de l’avenir de la liberté » Etant donnée, en effet, la place centrale de la personne dans le droit (on pense par exemple à la « Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ») et étant donné que la personne humaine est ce qu’elle est- et non pas ce qu’une majorité ou l’autre d’opinions pense qu’elle soit-, on en déduit que la loi réellement juste ne peut pas reposer sur une vérité de convention ou d’opinion, mais doit nécessairement tenir compte de la vérité ontologique de la personne humaine : sa nature d’être, non pas uniquement animal et instinctif, mais intelligent, libre et possédant une dimension transcendante et religieuse de l’esprit qui ne peut pas être ignorée ou bafouée par la loi. » (Discours de Jean-Paul II à l’Académie Pontificale pour la Vie, le 27-II-2002) « Jean-Paul II, en développant ce qu’il avait écrit au n°101 de Veritatis Splendor sur le risque de l’alliance entre démocratie et relativisme éthique : « Si après la chute des systèmes totalitaires, les sociétés se sont senties libres, presque simultanément est apparu un problème de fond, celui de l’usage de la liberté…le danger de la situation dans laquelle on se trouve aujourd’hui consiste dans le fait que dans l’usage de la liberté, on prétend faire abstraction de la dimension éthique, c'est-à-dire de la considération du bien et du mal moral . Une certaine conception de la liberté, qui trouve à présent un vaste écho dans l’opinion publique, détache l’attention de l’homme des responsabilités éthiques. Ce sur quoi l’on s’appuie aujourd’hui est la seule liberté. On dit : ce qui importe, c’est d’être libres, détachés de tout remords et de tous liens, afin de pouvoir agir selon nos propres jugements, qui en réalités ne sont souvent que des caprices. Cela est clair : un libéralisme de ce genre ne peut être qualifié de primitif. Son influence est potentiellement dévastatrice. » (Mémoire et identité) « En évoquant les pressions politiques sur certains Parlements afin qu’ils reconnaissent les unions homosexuelles comme une forme alternative de famille, Jean-Paul II se demande, « L’on peut et même l’on doit se demander si n’est pas ici à l’œuvre une nouvelle idéologie du mal, peut être plus sournoise et cachée qui tente d’exploiter, contre l’homme et la famille jusqu’aux droits de l’homme eux-mêmes. Pourquoi tout cela a-t-il lieu ? Quelle est la racine de ces idéologies post-philosophie des Lumières ? La réponse en définitive est simple, cela a lieu parce qu’on a rejeté Dieu comme Créateur, et donc comme source de la discrimination entre ce qui est bien et ce qui est mal. On a refusé la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue comme êtres humains, c'est-à-dire la notion de nature humaine comme « présupposé réel », que l’on a remplacé « par un produit de la pensée » librement formé et librement modifiable selon les circonstances. » (Mémoire et identité) « Il ne fait aucun doute que nous nous trouvons actuellement à un carrefour de l’histoire où est devenue particulièrement importante et urgente la nécessité de bien mettre au clair quelle est la réalité de la personne humaine… » Mgr. Mamberti dit : « Nous ne devons pas nous cacher du fait que dans la société mondialisée d’aujourd’hui le contact avec les « différences » peut créer une incommunication de fond et la tentation d’imposer l’espace public comme « neutre ». Toutefois, si l’on veut étendre au maximum la liberté de tous …, il faut se reconnaître publiquement dans un code éthique commun. Mais pour que cela arrive pleinement, il est indispensable de reconnaître la dimension publique de la liberté religieuse. Cette liberté, en effet, est porteuse de valeurs éthiques, capables de féconder la démocratie et d’engendrer la culture. » Alexis de Tocqueville disait : « Le despotisme n’a pas besoin de la religion, mais la liberté et la démocratie, si. » (cité par Mgr.Mamberti au Colloque de Rimini 2.008 ). L’absence de liberté aboutit au totalitarisme ! Le même Mgr. D.Mamberti prononce le 29 Août 2008 au même meeting de Rimini (ORlf du 24.IX.2008) : « La dignité de l’homme se fonde sur sa capacité de vérité. ». Il cite Saint Ambroise ubi fides, ibi libertas. Le danger à l’heure actuelle est de considérer que la vérité n’existe pas et qu’elle est à rechercher sans cesse ! Il faut rechercher un consensus (introuvable, bien sûr) entre croyants de diverses religions ‘(Christianisme, Judaïsme, Islam, Religions Orientales, Agnosticisme, voire Athéisme. Serait-ce que la Parole de Jésus « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jean 14,6) ne serait pas entièrement … vraie ? Jésus ne serait pas la Vérité ? Démission des philosophes modernes. Plutôt refus du christianisme qui apparaît à beaucoup sectaire et intransigeant ! Me reviennent les mots de Mgr. Lustiger fustigeant ceux qui voudraient que la vérité est comme un gâteau se divisant entre Christianisme, Judaïsme, Islam, Agnosticisme, etc. Dans un de ses discours à Prague, Benoît XVI dénonçait le relativisme actuel : « L’idée d’une éducation inclusive, fondée sur l’unité de la connaissance basée sur la vérité doit être retrouvée. Cela est nécessaire pour contrecarrer la tendance si manifeste dans la société contemporaine à la fragmentation du savoir. Avec le développement massif de l’information et des technologies, la tentation existe déjà de délier la raison de la recherche de la vérité. Détachée de l’aspiration humaine fondamentale vers la vérité, la raison commence à perdre son orientation : elle se flétrit, que ce soit sous l’apparence de la modestie en se contentant de ce qui est partiel ou provisoire, ou bien sous le dehors de l’assurance en exigeant l’abandon de toute exigence aux requêtes de ceux qui donnent une valeur pratiquement équivalente à toute chose. Le Relativisme qui s’ensuit crée un contexte propice où de nouvelles menaces sur l’autonomie des institutions peuvent se cacher. Alors que le temps des interférences de la part des totalitarismes politiques est révolu, n’arrive t’il pas qu’à travers le monde, l’exercice de la raison et la recherche académique, soient plus ou moins contraints de se soumettre aux pressions de groupes d’intérêt idéologiques ou de céder aux attraits d’objectifs utilitaristes ou pragmatiques à court terme ? Benoît XVI dans le Message de la Journée Mondiale de la Paix 2.012 (O.R.l.f. du 22-12-2011, pages 9-10) : « C’est seulement dans sa relation avec Dieu que l’homme comprend le sens de sa propre liberté. Celle-ci n’est pas l’absence de liens ou le règne du libre-arbitre, elle n’est pas l’absolutisme du « je ». L’homme qui se croit absolu, qui n’est dépendant de rien et qui croit pouvoir faire tout ce qu’il veut finit par contredire la vérité de son propre être et par perdre sa liberté. Au contraire, l’homme est un être relationnel qui est en relation avec les autres et avec Dieu surtout. (C’est la notion même de personne, note du rédacteur). La liberté authentique ne peut jamais être atteinte dans l’éloignement de Dieu. Kérygme : le Pape François n’a de cesse de répéter qu’il ne faut pas surcharger les vérités chrétiennes d’ajouts qui sont certes estimables, parce que élaborés au fil des temps et précisant les vérités chrétiennes au fil du temps, contre les hérésies qui ont vu le jour, mais qui peuvent décourager ceux qui viennent de découvrir la foi. Ce mot ( tombé en désuétude) est indispensable pour évangéliser « les périphéries », ainsi qu’il nous le dit ; comment évangéliser les banlieues des villes de tous les continents autrement qu’en annonçant le « noyau » de la foi : dans les banlieues de Buenos Aires, nous dit-il, les enfants ne savent même pas le Signe de Croix ! Saint Thomas d’Aquin disait déjà dans sa Somme Théologique : « Les préceptes donnés par le Christ à ses Apôtres sont très peu nombreux, et citant Saint Augustin, il notait qu’on ne doit exiger qu’avec modération les préceptes ajoutés ultérieurement pour ne pas alourdir la vie des fidèles, et transformer notre religion en esclavage, quand « la miséricorde du Seigneur a voulu qu’ « elle fut libre » (Somme Théologique I-II n° 107 , cité par le Pape François dans Evangelii Gaudium au n° 14) La liberté est une valeur précieuse, mais délicate,elle peut être mal comprise et mal utilisée « Aujourd’hui, un obstacle extrêmement menaçant pour l’œuvre d’éducation est constituée par la présence massive dans nos sociétés et notre culture de ce relativisme, qui en ne reconnaissant rien comme définitif ne laisse comme ultime ressource que son propre moi avec ses désirs , et sous l’apparence de la liberté devient une prison pour chacun, séparant l’un de l’autre et réduisant chacun à se retrouver enfermé dans son propre « moi ». Dans un tel horizon relativiste, une véritable éducation n’est donc pas possible, en effet sans la lumière de la vérité, toute personne est condamnée à un moment ou à un autre, à douter de la bonté de sa vie même et des relations qui la constituent, de la valeur de son engagement pour constituer quelque chose de commun avec les autres » (Benoît XVI, le 6-6-2.005 à Saint Jean de Latran) Et toujours dans ce Message : Pour exercer sa liberté, l’homme doit alors dépasser l’horizon relativiste et connaître la vérité sur lui-même et la vérité sur le bien et le mal. « Au fond de sa conscience, l’homme découvre une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il doit obéïr au contraire et dont la voix l’appelle à aimer, à faire le bien et fuir le mal, à assumer la responsabilité du bien accompli et du mal commis » (Gaudium et Spes n° 16). Pour cela, l’exercice de la liberté est profondément lié à la loi morale naturelle qui est de nature universelle. Elle exprime la dignité de chaque personne pour les bases de ses droits et devoirs fondamentaux, et par conséquent et en dernière analyse, du vivre ensemble juste et pacifique entre les personnes. Le juste usage de la liberté est donc central pour la promotion de la justice et de la paix. Nous ne sommes point à nous, comme dit l’Apôtre (St Paul en 1 Corinthiens 6,19 et 12,27), mais tout entiers à Lui, comme ses membres et ses esclaves qu’Il a achetés infiniment cher, par le prix de tout son sang. Avant le baptême, nous étions au diable comme ses esclaves, et le baptême nous a rendus les esclaves de Jésus-Christ… » (n° 68 de Traité de la.Vraie.Dévotion.) Dans le Nouveau Testament, au moins trois passages concernent la liberté : 1) La première est en Saint Jean, dans son Evangile, dans la seconde partie du chapitre 8, diatribe que Jésus a avec les Pharisiens concernant la liberté « la vérité vous rendra libres » (Jean 8,32), puis : « Si c’est le Fils qui vous rend libres, vous serez vraiment libres » (Jean 8, 36) 2) La seconde concerne l’Epître aux Galates chez Saint Paul, au premier verset du chapitre 5, puis au verset 15, il nous dit très justement que la liberté acquise peut dégénérer en licence. 3) La troisième est dans l’épître aux Romains (Romains 8,18-21) montre bien cet avènement de la liberté : « J’estime , en effet, que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler en nous, car la Création en attente aspire à la révélation des fils de Dieu : si elle fut assujettie à la vanité- non qu’elle l’eut voulue, mais à cause de celui qui l’y a soumise, c’est avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de Dieu. » Dans la 1° aux Corinthiens (1 Co 9,19), il nous dit : « Oui, libre à l’égard de tous, je me suis fait l’esclave de tous » Dans la 2° épître aux Corinthiens (2 Co 3,17), il avait dit aussi : « Quand on se convertit au Seigneur, un voile tombe. Or, le Seigneur, c’est l’Esprit, et là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. » Mais aussi, dans l’Epître de Saint Jacques (Jacques 2,12-13) : « Parlez et agissez comme des gens qui vont être jugés par une loi de liberté, car la miséricorde se moque du jugement » (Jacques citant Osée 3,3) La liberté est une valeur précieuse, mais délicate,elle peut être mal comprise et mal utilisée « Aujourd’hui, un obstacle extrêmement menaçant pour l’œuvre d’éducation est constituée par la présence massive dans nos sociétés et notre culture de ce relativisme, qui en ne reconnaissant rien comme définitif ne laisse comme ultime ressource que son propre moi avec ses désirs , et sous l’apparence de la liberté devient une prison pour chacun, séparant l’un de l’autre et réduisant chacun à se retrouver enfermé dans son propre « moi ». Dans un tel horizon relativiste, une véritable éducation n’est donc pas possible, en effet sans la lumière de la vérité, toute personne est condamnée à un moment ou à un autre, à douter de la bonté de sa vie même et des relations qui la constituent, de la valeur de son engagement pour constituer quelque chose de commun avec les autres » (Benoît XVI, le 6-6-2.005 à Saint Jean de Latran) Et toujours dans ce Message : Pour exercer sa liberté, l’homme doit alors dépasser l’horizon relativiste et connaître la vérité sur lui-même et la vérité sur le bien et le mal. « Au fond de sa conscience, l’homme découvre une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il doit obéïr au contraire et dont la voix l’appelle à aimer, à faire le bien et fuir le mal, à assumer la responsabilité du bien accompli et du mal commis » (Gaudium et Spes n° 16). Pour cela, l’exercice de la liberté est profondément lié à la loi morale naturelle qui est de nature universelle. Elle exprime la dignité de chaque personne pour les bases de ses droits et devoirs fondamentaux, et par conséquent et en dernière analyse, du vivre ensemble juste et pacifique entre les personnes. Le juste usage de la liberté est donc central pour la promotion de la justice et de la paix. Au centre de ce conflit, intervient sans aucun doute, la place des religions non-chrétiennes dans les démocraties et aussi le phénomène de l’incroyance… c’est ici que se place la notion de droit naturel, nécessaire pour ne pas entrer en barbarie : bien sûr, toutes les organisations internationales sont confrontées au droit, même si elles ne sont pas chrétiennes, il y a un droit dans les pays musulmans, hindouistes, bouddhistes, indépendant de toute Révélation Judéo-Chrétienne, mais, bien sûr, il y a une ambiguïté à lever sur le mot naturel : ce qui est naturel est déjà le fruit de l’éducation, bien sûr, ce ne veut pas dire inné … Il y a des lois morales qui ne sont pas le résultat du Décalogue, et qui peuvent être découvertes par toute civilisation. Le Cardinal Tarcisio Bertone à l’Université de La Havane, ORlf du 5 Mars 2008 n°9 ) déclarait, citant le Cardinal Ratzinger , peu de temps avant d’être élu Pape: « Le relativisme moral soutient qu’une affirmation éthique ne serait vraie que dans le contexte d’une culture déterminée. Il n’y aurait donc pas de convictions ni de principes éthique meilleurs que d’autres, et personne n’aurait le droit de dire ce qui est bien et ce qui est mal. » … et plus loin : « Le subjectivisme éthique porté à l’extrême conduit à la situation paradoxale de devoir admettre l’immoralité comme moralement bonne… » « La logique de ce dynamisme conduit à ce que Benoît XVI a appelé la dictature du relativisme…Il est donc nécessaire de renverser l’axiome du relativisme éthique et de postuler avec force l’existence d’un ordre de vérité qui transcende les conditionnements personnels, culturels et historiques et qui possède une validité permanente. Cet ordre est celui que la philosophie appelle « loi naturelle »… « De même que la société souffre lorsque la religion est reléguée au domaine privé, ainsi la société et les institutions civiles sont appauvries lorsque la législation- en violation avec la liberté religieuse- promeut l’indifférence religieuse, le relativisme et le syncrétisme religieux, les justifiant même parfois à travers une conception erronée de la tolérance. Au contraire, tous les citoyens bénéficient de la reconnaissance de traditions religieuses dans lesquelles tous les peuples sont enracinés, et avec lesquelles, les populations s’identifient généralement de façon particulière. » (Discours de Jean-Paul II à l’OSCE le 10 octobre 2003) que le Cardinal Bertone cite. … Le Cardinal Bertone poursuit : « La tentative portée à l’extrême, de façonner les choses humaines en se passant totalement de Dieu nous conduit toujours davantage au bord de l’abîme, vers la mise à l’écart total de l’homme. Nous devons alors renverser l’axiome des Philosophes des Lumières et dire même : celui qui ne parvient pas à trouver la voie de l’acceptation de Dieu devrait quoiqu’il en soit tenter de diriger sa vie veluti si Deus daretur (comme si Dieu existait.).Cela est déjà le conseil que Pascal donnait à ses amis non-croyants, c’est le conseil que nous voudrions donner à nos amis qui ne croient pas . Ainsi, personne n’est limité dans sa propre liberté… » (J.Ratzinger, à Subiaco, le 1° Avril 2005) . On sait que toute la civilisation moderne s’est bâtie, cependant sur la notion que, pour assurer la paix sociale, après les conflits entre catholiques et protestants et au Siècle des Lumières, il fallait faire « etsi Deus non daretur », c'est-à-dire, comme si Dieu n’existait pas, c’est ce que prônait Hugo Grotius au XVI° siècle… Depuis, Benoît XVI répète sans cesse que c’est l’absence de Dieu qui aliène l’homme, et non l’inverse (par exemple à la Messe du Mercredi des Cendres 2008). L’exemple, sans doute le plus frappant, de ceci est celui de Saint Pierre qui « perd » sa liberté lorsqu’il devient responsable de l’Eglise : « Pais mes brebis. Amen, amen, je te le dis, quand tu étais jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, mais quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te liera ta ceinture … » (Jean 21, 18) C’est aussi affirmer que toute liberté ne libère pas l’homme ; elle peut, au contraire, être source d’asservissement : la drogue ou la sexualité, par exemple. « La liberté, nous dit Jean-Paul II, possède une logique interne qui la qualifie et l’ennoblit, elle est ordonnée à la vérité et elle se réalise dans la recherche et la mise en œuvre de la vérité. Séparée de la vérité sur la personne humaine, elle se dégrade en licence dans la vie individuelle, et dans la vie politique, en arbitraire des plus forts et en arrogance du pouvoir. C’est pourquoi, loin d’être une limitation ou une menace pour la liberté, la référence à la vérité de l’homme- vérité universellement connaissable par la loi morale inscrite dans le cœur de chacun- est réellement une garantie de l’avenir de la liberté. » (1995, Discours à l’ONU, ORlf du 10 octobre 1995, n° 41) Le positivisme d’Auguste Comte a submergé notre monde, non pas tellement sous un plan philo-sophique que sous une forme pratique et mercantile. Le néo-positivisme est ce substitut et est particulièrement grave parce qu’il introduit subrepticement le matérialisme ; il tend à envahir non seulement les nations de l’Hémisphère Nord, mais aussi celles de l’Hémisphère Sud . Elle tend à mettre en péril toutes les cultures, limitant les échanges à des échanges commerciaux … (Des différences, faisons table rase comme si Dieu n’existait pas : « Etsi Deus non daretur », disait Kelsen, juriste et penseur de l’O.N.U. Mgr. Mamberti dit : « Nous ne devons pas nous cacher du fait que dans la société mondialisée d’aujourd’hui le contact avec les « différences » peut créer une incommunication de fond et la tentation d’imposer l’espace public comme « neutre ». Toutefois, si l’on veut étendre au maximum la liberté de tous …, il faut se reconnaître publiquement dans un code éthique commun. Mais pour que cela arrive pleinement, il est indispensable de reconnaître la dimension publique de la liberté religieuse. Cette liberté, en effet, est porteuse de valeurs éthiques, capable de féconder la démocratie et d’engendrer la culture. » Benoît XVI dans le Message de la Journée Mondiale de la Paix 2.012 (O.R.l.f. du 22-12-2011, pages 9-10) : « C’est seulement dans sa relation avec Dieu que l’homme comprend le sens de sa propre liberté. Celle-ci n’est pas l’absence de liens ou le règne du libre-arbitre, elle n’est pas l’absolutisme du « je ». L’homme qui se croit absolu, qui n’est dépendant de rien et qui croit pouvoir faire tout ce qu’il veut finit par contredire la vérité de son propre être et par perdre sa liberté. Au contraire, l’homme est un être relationnel qui est en relation avec les autres et avec Dieu surtout. (C’est la notion même de personne, note du rédacteur). La liberté authentique ne peut jamais être atteinte dans l’éloignement de Dieu. La liberté est une valeur précieuse, mais délicate,elle peut être mal comprise et mal utilisée « Aujourd’hui, un obstacle extrêmement menaçant pour l’œuvre d’éducation est constituée par la présence massive dans nos sociétés et notre culture de ce relativisme, qui en ne reconnaissant rien comme définitif ne laisse comme ultime ressource que son propre moi avec ses désirs , et sous l’apparence de la liberté devient une prison pour chacun, séparant l’un de l’autre et réduisant chacun à se retrouver enfermé dans son propre « moi ». Dans un tel horizon relativiste, une véritable éducation n’est donc pas possible, en effet sans la lumière de la vérité, toute personne est condamnée à un moment ou à un autre, à douter de la bonté de sa vie même et des relations qui la constituent, de la valeur de son engagement pour constituer quelque chose de commun avec les autres » (Benoît XVI, le 6-6-2.005 à Saint Jean de Latran) Et toujours dans ce Message : Pour exercer sa liberté, l’homme doit alors dépasser l’horizon relativiste et connaître la vérité sur lui-même et la vérité sur le bien et le mal. « Au fond de sa conscience, l’homme découvre une loi qu’il ne s’est pas donné lui-même, mais à laquelle il doit obéir au contraire et dont la voix l’appelle à aimer, à faire le bien et fuir le mal, à assumer la responsabilité du bien accompli et du mal commis » (Gaudium et Spes n° 16). Pour cela, l’exercice de la liberté est profondément lié à la loi morale naturelle qui est de nature universelle. Elle exprime la dignité de chaque personne pour les bases de ses droits et devoirs fondamentaux, et par conséquent et en dernière analyse, du vivre ensemble juste et pacifique entre les personnes. Le juste usage de la liberté est donc central pour la promotion de la justice et de la paix. La subjectivité ne conduit à l’objectivité qu’avec l’aide de la foi, et cette dernière est tributaire de la vérité. Sans doute, pour passer du premier au second, faut-il un décentrement de soi … La confiance en un Autre que soi ? Il faut le souligner : l’opposition foi/ loi, telle que Saint Paul l’exprime dans l’Epître aux Romains (mais aussi dans l’Epître aux Galates qui traite des mêmes thèmes) n’est pas rédhibitoire ; la foi n’est pas contraire à la loi même si beaucoup le croient !... Jésus n’est pas venu abolir la loi, Il le dit, mais l’accomplir … » « Pas un seul petit trait de la loi » n’est voué à disparaître ; Il est seulement venu délivrer le peuple du carcan insupportable des 632 préceptes imposés par les Pharisiens, de sorte que le peuple ne peut les suivre et « se retrouve comme des brebis sans berger ». Paul dans cette Epître aux Romains, nous dit que dans l’Ancienne Alliance déjà, la foi prédominait sur la loi ; il prend l’exemple d’Abraham : sa foi précède la circoncision et non l’inverse ! Il part de cet exemple pour montrer que l’homme est justifié par sa foi et non par ses ouvres. C’est la raison pour laquelle Paul enseigne que sa foi juive est incomplète si elle n’aboutit pas à la Croix du Christ … Dans les chapitres 9, 10 et 11 de l’épître aux Romains, il enjoint ses co-religionnaires juifs à dépasser la lettre de la loi pour aboutir à la foi au Christ Ressuscité. Les païens qui acceptent d’être sauvés précéderont ceux qui sont persuadés d’être des justes et ainsi justifiés … (l’enseignement de Jésus s’appuie sur la Parabole du Fils Prodigue. Le dépit du fils aîné est l’illustration de ces juifs qui se croient justifiés par leu œuvres seules ! ) Ailleurs, Paul nous dit dans la 1°lettre à Timothée que « la loi est bonne quand on l’utilise comme une loi, qui est là, on le sait bien, non pas contre le juste mais contre les ennemis de la loi … » (I Timothée 1, 8-10). En Romains, il nous avait dit (Romains 3,3) : « Sommes-nous en train d’éliminer la loi au moyen de la foi ? Absolument pas ! Au contraire, nous la confirmons ! » Le plus grand danger actuel dans nos sociétés est celui du relativisme moral. Mais, comment arriver à la vérité ? Comment passer du subjectif à l’objectif ? C’est à dire sa reconnaissance. Est-ce un saut gratuit ? Non. « Credo quia absurdum » disaient certains littérateurs du XIX° siècle, sans doute avec pas mal de provocation … (la formule initiale était « Credo, quia absurdum non credere »). Le monde aurait-il beaucoup changé ? C’est là la source du fidéïsme , que de croire en des choses irrationnelles ; certains penseurs de la fin du XIX° siècle revendiquaient ce droit contre les excès du rationalisme ; mais, Jean Paul II l’a redit dans Fides et Ratio, la Foi et la Raison sont faites pour marcher ensemble …). Au n° 6 du texte « Dei Verbum » du Concile Vatican II, il est dit : « Le Saint Concile reconnaît que Dieu, principe et fin de toutes choses peut être connu avec certitude par la lumière naturelle de la raison humaine à partir des choses crées » (Romains 1,20), mais, il enseigne qu’on doit attribuer à la Révélation « Le fait que les choses qui dans l’ordre divin ne sont pas en soi inaccessibles à la raison humaine, peuvent aussi dans la condition présente du genre humain, être connues de tous facilement, avec une ferme certitude et sans mélange d’erreur » (Vatican I, De Fide Catolica) Dans ce texte, est bien signalé la nécessité de rechercher la vérité et que celle-ci est accessible par « des voies humaines » Le Relativisme moral est un mal qui atteint toute société et toute religion et pas seulement la société occidentale et la religion chrétienne ; pour témoin, ces mots du Rabbin R. Krishné à Notre Dame de Paris au cours des Conférences de Carème : « On picore, je dirais même, on piccole, à droite, à gauche ; on prend ce qui nous intéresse dans chaque spiritualité … ». La trop grande importance d’informations a sans doute provoquée cette « hypoesthésie » du sens moral … je me souviens d’une dame, pourtant assez agée, du Morbihan, disant être pour l’avortement tout en étant chrétienne ! Pour faciliter le dialogue entre les hommes, l’Eglise Catholique parle loi naturelle. Cette loi existe depuis toujours, depuis la création de l’Homme et elle permet le dialogue entre les civilisations, entre autres non-chrétiennes. Entre autres, le Christ dans l’Evangile dit que c’est à cause de l’endurcissement du cœur de l’homme que la loi primitive a été modifiée : « Homme et femme, Il les créa » (Matthieu 19,1 à 10). LA LOI NATURELLE Dans le Catéchisme de l’Eglise Catholique dit au n° 1954 : « La loi naturelle imprime le sens moral originel qui permet à l’homme de discerner par la raison ce que sont le bien et le mal, la vérité et le mensonge » Au n° 1955 du Catéchisme de l’Eglise Catholique « La loi divine et naturelle » montre à l’homme la voie à suivre pour pratiquer le bien et atteindre sa fin … cette loi est dite naturelle non pas en référence à la nature des êtres irrationnels, mais parce que la raison qui l’édicte appartient en propre à la raison humaine … la loi naturelle n’est rien d’autre que la lumière de l’intelligence mise en nous par Dieu : par elle, nous connaissons ce qu’il faut faire et ce qu’il faut éviter. Cette lumière ou cette loi, Dieu nous l’a donné à la Création (Saint Thomas d’Aquin). Cette loi naturelle est universelle en ses préceptes et son autorité s’étend à tous les hommes. Elle exprime la dignité de la personne et constitue la base de ses droits et de ses devoirs fondamentaux … dans la diversité des cultures, c’est la loi naturelle qui demeure comme une règle, reliant entre eux les hommes et leur impose au-delà des différences inévitables, des principes communs (rappelons-le c’est elle qui permet aux hommes de se rencontrer dans les Réunions Internationales, à ceux-ci de faire des transactions commerciales ou de collaborer sur le plan scientifique ou technologique, tout en étant de culture et de religion différentes). La loi naturelle est immuable (Gaudium et Spes n° 10) et permanente à travers les variations de l’histoire ; elle subsiste sous le flux des idées et des mœurs et en soutient le progrès. Les règles qui l’expriment demeurent substantiellement valables ; on ne peut ni la détruire, ni l’enlever du cœur de l’homme. (au n° 1958) Œuvre très bonne du Créateur, la loi naturelle fournit les fondements solides sur lesquels l’homme peut construire l’édifice des règles morales qui guideront ses choix … (au n° 1959) Les préceptes de la loi naturelle ne sont pas perçus par tous d’une manière claire et immédiate. La grâce et la révélation sont nécessaires à l’homme pécheur pour que les vérités religieuses et morales puissent être connues de tous. (au n° 1960) Benoît XVI insiste beaucoup sur cette loi naturelle, d’autant que sous certaines latitudes, il y a une réelle désaffection du christianisme et que ce dernier est même rejeté par certains baptisés … A l’Université Pontificale du Latran le 12 février 2007, il prononçait un important discours : « La loi naturelle est la source dont jaillissent, avec les droits fondamentaux, également les impératifs éthiques qu’il est nécessaire de respecter. Dans l’éthique et la philosophie actuelle du Droit, les postulats du positivisme juridique sont largement présents. La conséquence est que la législation ne devient souvent qu’un compromis entre divers intérêts : on tente de transformer en droits des intérêts privés ou des désirs qui s’opposent aux devoirs découlant de la responsabilité sociale. Dans cette situation, li est opportun de rappeler que tout ordonnancement juridique, tant sur le plan interne qu’international, tire en ultime analyse, sa légitimité de son enracinement dans la loi naturelle, dans le message éthique inscrit dans l’être humain lui-même. La loi naturelle est, en définitive, le seul rempart valable contre l’abus de pouvoir ou les mensonges de la manipulation idéologique. La connaissance de cette loi inscrite dans le cœur de l’homme augmente avec le développement de la conscience morale. C’est pourquoi la première préoccupation pour tous et particulièrement pour celui qui a des responsabilités publiques, devrait donc être celle de promouvoir cette conscience morale … La loi inscrite dans notre nature est la véritable garantie offerte à chacun pour pouvoir vivre libre et respecté dans sa propre dignité. » … Le 5 Octobre 2007, à la Commission Théologique Internationale, il déclarait : « … Le problème qui se pose n’est donc pas la recherche du bien, mais celle du pouvoir, ou plutôt de l’équilibre des pouvoirs. A la racine de cette tendance se trouve le relativisme éthique, dans lequel certains voient même une condition de la démocratie, car le relativisme garantirait la tolérance et le respect réciproque des personnes. Mais s’il en était ainsi la majorité d’un moment deviendrait la source ultime du droit. L’histoire démontre avec une grande clarté que les majorités peuvent se tromper. La véritable rationalité n’est pas garantie par le consensus d’un grand nombre, mais seulement par la compréhension qu’a la raison humaine de la Raison créatrice et par l’écoute commune de cette source de notre rationalité. Lorsque les exigences fondamentales de la dignité de la personne humaine, de sa vie, de l’institution familiale, de la justice, de l’organisation sociale, c'est-à-dire les droits fondamentaux de l’homme sont en jeu, aucune loi faite par les hommes ne peut renverser la règle écrite par le Créateur dans le cœur de l’homme, sans que la société elle-même ne soit dramatiquement frappée dans ce qui constitue sa base incontournable. La loi naturelle devient ainsi la véritable garantie offerte à chacun pour vivre libre et respecté dans sa véritable dignité et à l’abri de toute manipulation idéologique et de toute décision arbitraire ou d’abus du plus fort.. Personne ne peut se soustraire à cet appel. Si, en raison d’un obscurcissement tragique de la conscience collective, le scepticisme et le relativisme éthique parvenaient à effacer les principes fondamentaux de la loi morale naturelle, l’ordre démocratique lui-même serait radicalement blessé dans ses fondements. Contre cet obscurcissement, qui est à la base de la crise de la civilisation humaine, avant même que chrétienne, il faut mobiliser toutes les consciences des hommes de bonne volonté, laïcs ou appartenant à des religions différentes di christianisme, pour qu’ensemble et de manière concrète, ils s’engagent à créer, dans la culture et dans la société civile et politique, les conditions nécessaires pour une pleine conscience de la valeur inaliénable de la loi morale naturelle. C’est en effet du respect de celle-ci que dépend le développement des individus et de la société sur a voie de l’authentique progrès, conformément à la juste raison, qui est une participation à la Raison Eternelle de Dieu. » Et le 16 juin 2010 : « Lorsque la loi naturelle et la responsabilité qu’elle implique sont niées, on ouvre de façon dramatique la voie au relativisme éthique sur le plan individuel et au totalitarisme de l’Etat sur le plan politique. La défense des droits universels de l’homme et l’affirmation de la valeur absolue de la dignité de la personne présupposent un fondement. Ce fondement n’est-il pas la loi naturelle avec les valeurs non-négociables qu’elle indique ? … » Le Cardinal Tettamanzi indique trois niveaux pour la morale :La morale naturelle, chez ceux qui ne connaissent pas le judéo-christianismeLa morale « mosaïque » chez ceux qui se réfèrent à l’Ancienne Alliance et la Révélation à Moïse en haut du SinaïEt la morale de l’Evangile pour ceux qui se réfèrent au Discours sur la Montagne et aux Béatitudes prononcées par Jésus. Beaucoup actuellement, surtout dans notre monde, refuse toute Révélation, même s’ils ont été baptisés, se réfugiant dans un agnosticisme sans recherche de vérité, persuadés que celle-ci n’existe pas. Le Cardinal J.M. Lustiger dans « Dieu merci, les Droits de l’Homme » nous dit « Parler du fait religieux parait un manquement à la laïcité. En fait, le taire est un manquement à la culture » Mais aussi : « Le rôle de l’Eglise dans les Démocraties est seulement de toujours contester et discuter toute tentative d’araser ce qui dans l’homme passe l’homme » (id.) « Le Christianisme n’a pas disparu devant sa négation opérée par certains de ses enfants, pas plus que le judaïsme n’est mort lorsque parut le christianisme » « Le combat spirituel contre le paganisme qui marque tout homme en sa naissance charnelle est l’objectif permaent de l’Evangile. » Toute sa réflexion a été pour démarquer nettement « le post-modernisme », la culture moderne, du Christianisme : son combat a été inlassable, lui qui venait d’une culture juive et dont la mère a disparu dans le Camp d’Auschwitz : sa conversion au Christianisme représentait quelque chose pour lui. Toues les avancées technologiques de notre monde et l’émergence d’un monde sécularisé n’était pas la fin du christianisme même si on avait annoncé « la mort de Dieu » . Dans son discours de Réception comme Docteur Honoris Causa à l’Université d’Augsbourg (5 Mai 1987) ( in. Dieu merci, les Droits de l’Homme, éditions Critérion 1990) « La nouveauté du Christ et la post-modernité » : il dit encore « nous respirons encore l’atmosphère du siècle dernier (le XIX°) où, par exemple en France, le positivisme d’Auguste Comte a fini par imposer comme une évidence la succession des âges théologiques puis métaphysiques et enfin positif , le dernier périmant les deux premiers. Depuis lors, les grands philosophes du XX° siècle … ont enregistré la domination de l’objectivité et du formalisme scientifique sur la pensée moderne … la foi chrétienne expulsée du cosmos et de l’histoire effective, devrait se réfugier dans l’intériorité pure (les sacristies ?) : sécularisme, laïcisme, « christianisme civique », « mort de Dieu », toutes ces attitudes semblent autant de variantes surgies d’une même conviction : la Révélation chrétienne, surgie du passé, est restée prisonnière à l’avenir qui se joue sans elle. Cette évidence supposée me paraît aujourd’hui vaciller. « Où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté » (2 Corinthiens 3,17): cette phrase de Saint Paul, pour Jean Marie Lustiger, semble résumer toute la démarche que nous devons avoir ! « Ce paganisme sophistiqué » dit-il encore dans la même conférence, en parlant de ceux qui croient la religion périmée ! Le Christianisme n’a pas disparu devant sa négation opérée par certains de ses enfants, pas plus que le Judaïsme n’est mort lorsque parut le Christianisme Dans la même Conférence, le Cardinal Lustiger insiste sur le rôle de la mémoire. Il est certain que les moyens de communication actuels tendent à rendre notre société amnésique à force de privilégier les moyens de communication immédiate: Internet, tablettes, téléphones portables et autre gadgets… En conclusion d’une autre Conférence donnée à l’Université Loyola, à Chicago, le 8-04-1994, il nos dit : « Il existe un conflit entre l’universalisme séculier venu d’Occident et la diversité des cultures et des religions, en fait deux faces d’un universalisme. J’appelle universaliste la considération de l’humanité non seulement comme espèce humaine, mais en tant qu’unité des vivants et des morts, communion des personnes confiées à la même mémoire et à une espérance commune.L’humanité est une et homogène en raison de sa solidarité native. Cette première unité du genre humain fonde l’ambition universaliste de rassembler tous les hommes en les respectant dans leur diversité : « Tous les peuples forment, en effet une seule communauté : ils ont une seule origine puisque Dieu a fait habiter toute la race humaine sur la face de la terre ; ils ont aussi une seule fin dernière, Dieu dont la providence, les témoignage de bonté et les desseins de salut s’étendent à tous, jusqu’à ce que les élus soient réunis dans la cité sainte, que la gloire de Dieu illuminera et où tous les peuples marcheront à sa lumière » (Nostra Aetate n°1) . La Révélation annonce l’universalisme du Salut fondé sur le dessein créateur et rédempteur de Dieu l’Unique.L’humanité ainsi mesurée à la grandeur et à la transcendance de Dieu se trouve révélée à elle-même. Sa puissance s’affirme. Elle nourrit la juste ambition de refaçonner par sa raison l’univers qui lui est confié. Ce projet n’est pas outrecuidant : il porte ses fruits …et donc culturels.Les 2 niveaux de l’universalisme ont été cités dans l’ordre de leur apparition dans l’histoire. Les religions révélées (c'est-à-dire judaïsme et christianisme N.D.R.) ont inscrit leur mission universelle dans l’histoire des hommes et des peuples. . Elles ont du même fait, attesté leur singularité irréductible au regard des autres religions. Elles ont, par la foi, instauré une infranchissable distance entre les cultures humaines et le culte véritable. Seules les religions révélées, en espérant pour tous, ont permis la naissance de l’universalisme séculier… Loin de se contredire, les deux visages de l’universalisme expriment l’unité du genre humain en dépit de ses divisions. L’universalité de la raison et l’universalité de la Révélation sont historiquement liées l’une à l’autre : elles reçoivent de leur origine l’assignation de leur finalité au service du genre humain et de la communion divine. Dès lors apparaissent les véritables conflits de l’avenir. Il y aura encore une lutte entre l’universalité de la raison et la diversité des cultures et des religions … Le projet rationnel sur lequel se bâtit la civilisation mondiale peut devenir à son tour luciférien Il peut faire de lui-même son absolu, et, par là, enchaîner l’homme au lieu de le libérer. Un universalisme idolâtrique tombe sous le jugement opéré dans les souffrances du Messie. La raison ne peut remplir sa mission dans l’histoire qu’à condition de ne pas renier ni combattre son origine. Cette humilité est la condition de sa vérité : elle lui découvre ses limites et sa destinée : elle respecte la condition d’une humanité naturellement divine, puisque promise à la communion divine. « L’heure n’est plus pour les chrétiens à prêcher des humanismes équivoques qui sont des complicités avec l’idolâtrie du temps. Elle est de rappeler que Dieu seul est Dieu et que tout ce qui se construit en dehors de Dieu est voué à la destruction et sera consumé dans le feu du jugement».( Cardinal Jean Daniélou, qu’il cite)» Péguy, s’adressant à Bergson en 1914, quelques mois avant de partir au front (et d’y mourir), disait : « Vous avez rouvert les sources de la vie spirituelle ». Il faut dire que celles-ci avaient été obstruées par le positivisme d’Auguste Comte. Vous avez réintroduit l’honneur de philosopher et de réintroduire la nécessité d’ « une instance supérieure » (Bergson a fait de même pour l’antisémitisme, objet des menées de Drumont) Péguy, peu avant de mourir au front, s’est réconcilié avec Bergson qu’il portait pourtant en haute estime. Celui-ci avec « les Deux Sources de la Morale et de la Religion semblait avoir porté une estocade définitive au positivisme … Mais, celui-ci (ce qu’on appelle désormais le néo-positivisme) de régner en maître sur tout le XX° siècle et maintenant. Alors ? (les acquis technologiques de ces dernières années semblent le confirmer !) Pourtant, Bergson semblait avoir raison et réduire ce néo-positivisme ? Sans doute, les hommes préfèrent un certain confort et « s’engourdir » dans la consommation … On est tenté de suivre Montaigne et son ami La Boétie : « L’homme préfererait une servitude volontaire. J’entends ce mot, je cris qu’il est de Peguy : « Le positivisme a les mains propres, mais il n’ a pas de mains » . C’est tout le drame de notre époque moderne qui exclut tout esprit non matériel, « l’Eprit Saint, si on est chrétien ! Et, pourtant, ce que l’on qualifie de « néo-positivisme » imprègne toute l’évolution du monde Occidental et même, des pays inter-tropicaux : celui-ci est facilement synonyme de matérialisme ou de mercantilisme … Le scientisme semble avoir gagné la partie. Je dis bien « semble », car « Dieu n’est pas mort », et Monseigneur Lustiger a laissé nombre d’élèves ! Il y a un lien très net entre subjectivisme et relativisme moral. Il y a le refus de toute Révélation (c'est-à-dire de toute Transcendance) : est-ce vraiment nécessaire (pensent-ils) ? Nous sommes là dans une philosophie qui était celle de Mai 68 et qui remonte beaucoup plus haut puisqu’elle s’origine dans la Philosophie des Lumières et la Révolution Française ! Il fallait faire disparaître cette notion de Révélation, revenir à une déesse Raison et rendre l’homme à l’homme (enfin !). Mais, le présent nous le montre, la mort de Dieu signifie inéluctablement la mort de l’homme. En Matthieu 11,25-30, puis Luc 10,20-22 Jésus jubile et dit : « Je Te remercie Dieu Père, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents, et de l’avoir révélé aux tout petits ». Plus loin, et seul Matthieu le précise, Jésus termine : « Prenez sur vous mon joug et mettez vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur. Oui, mon joug est facile et mon fardeau léger ! » Est-ce que ce monde refuse Dieu ? Sans doute non ! La suffisance est la conséquence d’un pêché d’orgueil (auto-suffisance) chez l’homme moderne. Le 3° chapitre de la Genèse explicite bien ce processus d’orgueil, mais là encore, l’homme moderne n’y voit que « mythe » dénué d’application. On peut retrouver ce manque d(humilité dans la culture grecque : quand il s’est agi d traduire la Bible Hébraïque en Grec (version des Septante, avant Jésus-Christ, dans la culture grecque, aucun mot ne pouvait traduire humilité ou pauvreté, qui n’étaient pas des valeurs dans le monde grec, ainsi a été forgé le mot tapeïnosis par les juifs d’Alexandrie : cette notion de pauvreté était déjà une grande valeur chez les juifs de l’Ancienne Alliance ( par exemple dans les Psaumes), Jésus n’a fait que souligner cette valeur première : « Je ne Suis pas venu abolir la Loi… » L’humilité est donc première dans le Christianisme. Jean Paul II le rappelle, par exemple, dans le live d’entretiens qu’il a eu avec A. Frossard « N’ayez pas peur ! » éditions R .Laffont. Il semble que le seul moyen d’échapper à ce conflit entre transcendance et subjectivité est d’admettre que Dieu s’est Révélé en Abraham et en Moïse dan l’Ancienne Alliance et en Jésus définitivement C’est ainsi qu’on peut mettre fin au relativisme moral qui mine notre société et son subjectivisme. Mais, redisons-le, c’est un péché d’orgueil qui mine notre civilisation ; elle s’est laissé entraîner dans des idées rousseauistes (l’Emile), comme quoi la société s’est laissé abuser par des idées judéo-chrétiennes et qu’elle devait revenir à ce « bon sauvage ». Pascal nous dit, commentant l’Evangile : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout petits », que l’Evangile n’est pas accessible à la raison seule, « Le cœur a se raisons que la raison ne comprend pas ». Les sages et les intelligents, en ne se sentant pas exclus sont en fait victimes d’une nouvelle gnose (le Nouvel Age ?) . Dans les œuvres complètes de Saint Jean de la Croix (traduction du Père Cyprien O.C.D., édition établie par le Père Lucien-Marie de Saint Joseph O.C.D.) : il nous est dit : «Saint Jean de la Croix, lui, sait que « Dieu est Amour » (1 Jn 4,8) et que ce n’est pas lui qui eût opposé la transcendance de Dieu à sa tendresse. Le commentaire des strophes de la Vive Flamme sait, à chaque page, que la sagesse de Dieu est transcendante, comme sa sagesse et sa puissance. Saint Jean de la Croix nous enseigne avec tant de force, c’est qu’aucune science terrestre ne vaut une parcelle de ce Dieu infiniment parfait. S’il bataille durement contre les sceptiques, c’est que leur attitude est une négation pratique de la transcendance de Dieu S’il cingle les orgueilleux maladroits qui se mêlent d’entreprendre ce qu’ils ignorent, c’est qu’ils compromettent une œuvre de valeur presque infinie et usurpent un rôle qui n’appartient qu’à Dieu. S’il met tant de patiente bonté à guider les âmes, c’est que l’arrivée d’une seule à l’union divine est de tant de prix aux yeux de Dieu De cette foi en la Transcendance de Dieu, une conviction découle : la seule chose qui importe c’est d’arriver à l’union avec Dieu Père, Fils et Saint Esprit : « C’est pourquoi, c’est une affaire de grande importance pour l’âme d’exercer en cette vie les actes d’amour afin que se perfectionnant en peu de temps, elle ne s’arrête ici-bas ou là-haut sans voir Dieu face à face. » (Vive Flamme I, 6) Elle n’aime pas Dieu seulement pace qu’il est libéral, bon et glorieux etc. à son endroit, mais beaucoup plus puissamment parce qu’Il Est en Soi ; elle le loue pour ce qu’il est en Soi, parce que parce qu’encore que l’âme n’ait reçu aucun contentement, elle le louerait pour ce qu’Il est ; et si elle remercie Dieu, c’est sans doute pour les biens qu’elle a reçu de Lui, mais elle trouve une excellence plus forte et plus délicieuse à Le remercier « seulement pour ce qu’Il Est » Voilà ce que la vie de St. Jean de la Croix comporte de meilleur, ce qu’il voudrait pour ceux qu’il connaît et pour tant d’autres qui restent en route, faute de guide qui sache ce que c’est que l’esprit. » « Oh ! Combien il est nécessaire (à cette âme qui expérimente en elle la présence de Dieu de se retirer des choses, de s’éloigner des affaires et de vivre avec une très grande tranquillité, de peur qu’avec la moindre inquiétude elle ne trouble ou remue le sein du bien aimé ! » (Vive Flamme IV, 3) Pureté de la vie contemplative, fondée sur la transcendance de Dieu. L’Evangile l’avait déjà dit, mais il ne manque jamais d’apôtres agités pour protester contre l’oisiveté de Marie. » (p. 699) (Préface aux Œuvres de Saint Jean de la Croix, éditions D.D.B.) . Pour poursuivre l’entretien de Jean Paul II avec André Frossard : «Quant à l’agnosticisme religieux et à l’athéisme tout court, l’origine de leur développement est à chercher selon le Pape dans la subordination des problèmes ontologiques aux problèmes épistémologiques, l’ontologie concernant l’être des choses, l’épistémologie se rapportant plutôt à la manière de les connaître. L’agnosticisme et l’athéisme sont des produits de l’épistémologie positiviste. L’homme contemporain la met couramment en pratique … lorsqu’il met en œuvre ce qu’on appelle la connaissance expérimentale ; cette forme de connaissance s’est emparée des esprits et les a coupés de tout ce qui est « trans-matériel » C’est cet état d’esprit que vise l’expression « mort de Dieu » (C’est alors André Frossard qui parle) : « Le positivisme est engendré par le doute, et le doute est le sous-produit des petites réductions du « moi » : si la foi est bien comme la « porte », ainsi que Jean Paul II nous le dit, si c’est un engagement de la personne entière vers le Père, où est le doute ? Ni Dieu, ni l’homme dans la philosophie de Jean Paul II ne s’expliquent sinon par son opposition catégorique au positivisme. » Puis, c’est Jean Paul II :« … Cela ne signifie nullement que je rejette les progrès de la science et de la technique, ni que j’avalise leurs conquêtes. Il s’agit de tout autre chose ! Je n’admets pas la règle positiviste. Je ne suis pas d’accord parce qu’elle a de la vie une notion rétrécie et de ce fait erronée qui prive l’homme de réalités accessibles à la connaissance. Je crains que la prochaine étape de cette épistémologie ne soit après la « mort de Dieu » la « mort de l’homme » que nous voyons poindre à l’horizon de notre culture et de notre civilisation. »« … Mais, ce n’est qu’une explication négative, il y a une explication positive qui m’oblige à revenir sur un pont mentionné plus haut, c'est-à-dire la grande expérience, presque le bouleversement intellectuel qu’avait provoqué en moi au début de mes études mon premier contact avec un simple manuel de métaphysique ou de philosophie de l’être,( qui devait être essentiel) … cette découverte intellectuelle d’autrefois que l’on pourrait définir selon Aristote comme une découverte de la « philosophie première » ; Thomas d’Aquin n’est pas seulement un commentateur d’Aristote dans le domaine de la philosophie première, il a rénové et réformé celle-ci ainsi que l’ont montré des thomistes français comme Maritain et Gilson … » Entre les deux (la subjectivité et l’objectivité), il y a la FOI. Passer de la première (c’est à dire de la subjectivité) à la seconde (c’est à dire à l’objectivité), c’est faire un acte de foi, passer de notre liberté (purement humaine) à une vérité qui nous dépasse, c’est faire acte de foi. (Dans les Foyers de Charité, il est dit que si le désir n’existe pas, il faut avoir le désir du désir !) Entre les deux, il faut un changement de perspective : passer de notre propre point de vue à celui d’un Etre qui nous dépasse … mais, le subjectivisme n’est pas un cul de sac ; il est appelé à s’ouvrir à une vérité première, c’est le chemin que nous propose Jésus-Christ : la vérité nous rendra libres et Il est la vérité. Si bien qu’entre ces deux termes, il y a la Foi. Cette foi est le fruit d’une Révélation ; Révélation d’abord exprimée à Abraham (la FOI et non la circoncision en premier !), ensuite à Moïse sur le Sinaï, Révélation que Jésus accomplit … c’est seulement ainsi, en l’admettant, que pourra s’estomper ce relativisme moral qui mine nos sociétés. Mais, on connaît les réticences de l’homme occidental, qui aurait le sentiment de démissionner (nous y reviendrons) … là réside pourtant notre espérance, et dont la contagion s’étend au monde intertropical ! Ce relativisme moral st à la source de notre subjectivisme. L’homme contemporain, qui a toujours peur du fideïsme justement et se refuse à toute vérité, l’a conçoit un peu comme une abdication de sa raison, il refuse (et se refuse à) toute notion de transcendance et toute réalité révélée.. La philosophie que propage le monde anglo-saxon dans le monde et plus seulement dans « le premier monde » est essentiellement une philosophie matérialiste, issue d’une vision néo-positiviste du monde. On peut dire que la vision d’Auguste Comte était en un sens prophétique, mais ce qu’il prévoyait, c’était un culte de la science, alors que c’est plutôt un culte de l’argent ! En philosophie (Jean Daujat), 3 grands courants se partagent la conception de l’homme et des idées ... (outre le nominalisme que nous allons voir, il faut signaler le platonisme et ses dérivés, et l’idéalisme, dont les succédanés les plus importants ont été le marxisme, le structuralisme et l’existentialisme) Le premier groupe est donc celui du nominalisme. A celui-ci se rattache le positivisme et son groupe. Le positivisme par l’extension liée à la mondialisation a essaimé à travers le monde entier. Si bien que le positivisme que défendait Auguste Comte est devenu Néo-Positivisme et s’est identifié à un scientisme qui est un mélange de positivisme et de matérialisme. Ce qui spécifie le positivisme d’autres systèmes de connaissance, c’est qu’il exclue la métaphysique (c'est-à-dire un ordre supérieur de connaissance) de toute connaissance objective, la reléguant au rang de connaissance arbitraire. Toute abstraction, pour lui, est un choix arbitraire. Seule compte la connaissance par nos sens. La métaphysique est aléatoire En ce sens, il méconnaît complètement toute philosophie de l’être de l’homme (ontologie). Cette tendance n’était pas nouvelle puisqu’elle avat été celle de penseurs grecs avant J.C. (Héraclite, Epicure, Démocrite). Elle s’est « épanouie » en Europe avec Occam au XIII° siècle (principal contestataire des idées de Saint Thomas d’Aquin), Berkeley, Hume, Stuart Mill et Spencer. Ces idées seront à l’origine des Révolutions Européennes, rejetant toute idée de Transcendance. Tout l’utilitarisme moderne est en germe dans cette vision positiviste. On pourrait penser que la lutte contre le positivisme chez le Cardinal de Lubac dans « Le drame de l’humanisme athée » est secondaire- en fait, le positivisme que professait Auguste Comte allait irriguer tout notre XX° siècle, même si maintenant nous l’appelons plutôt « néo-positivisme ». « Nous ajouterons pour les lecteurs Catholiques que le nominalisme est très dangereux pour la foi chrétienne » (J. Daujat), en tant qu’il va considérer la foi comme une confiance arbitraire, non motivée, irrationnelle, finalement contredisant les exigences de la raison : c’est le fidéïsme. Il y a une opposition absolue entre (néo-)positivisme et métaphysique, puisque dans le positivisme manque la capacité d’abstraction.( L’intelligence est la possibilité d’abstraire : intus-legere (lire à l’intérieur; en elle, l’homme découvre la possibilité de saisir l’être des choses et on peut dire que ce travail se fait chez l’homme dès 6 ou 7 ans : c’est une capacité totalement méconnue par le positivisme). Le scientisme en est la dérive, et il est fréquent : il est suivi par beaucoup qui se retrouvent exclus du progrès : nihilisme qui peut conduire au suicide. « Le positivisme, on le sait, produit comme fruits l’agnosticisme dans les domaines théoriques (métaphysiques) et l’utilitarisme dans les domaines éthiques et pratiques » (Jean Paul II dans « La Lettre aux Familles, au n° 13 ».) La culture moderne s’est auto-limitée dans le sens où elle est devenue trop timide envers la vérité : elle est capable d’étudier beaucoup de vérités (au pluriel), mais, elle est incapable de connaître la vérité, le Cardinal Ratzinger nous le rappelle toujours … Mais, la FOI est une vertu théologale et donc un don de Dieu. L’homme est-il donc responsable de son manque de foi ? Certes, c’est un don de Dieu, mais encore faut-il le désirer. C’est une grâce qu’on n’a peut-être pas, mais il faut la demander, quelquefois avec obstination. Faut-il rester au niveau de notre seule subjectivité ? Luther (accusant l’Epître aux Hébreux qu’il avait mal comprise et, que d’ailleurs, il n’aimait pas) fait de la foi quelque chose de purement subjectif, mais ses successeurs eux-mêmes dans l’Eglise Luthérienne admettent qu’il faut dépasser ce point de vue, et que la foi a quelque chose d’objectif. « La foi n’est pas seulement une tension personnelle… elle nous donne déjà maintenant quelque chose de la réalité attendue … Elle attire l’avenir dans la présent, au point que le premier n’est plus le pur « pas-encore ». Le fait que cet avenir existe change le présent. » (Benoît XVI dans Spe Salvi, fin du n° 7) « La foi est un don de Dieu, c’est aussi un abandon de la part de l’homme » (Benoît XVI) La liberté est soumise à des dangers, mais notre vérité est vivante … « Je Suis le Chemin, la Vérité, la Vie … » (Jean 14,6), nous dit Jésus. Ce n’est plus une idée, mais une personne, ce qui change toute perspective et périme toute spéculation et aussi toute idéologie (beaucoup de ces idéologies ont été très mortifères au XX° siècle …) Répétons-le : passer du subjectivisme à l’objectivité, c’est aussi passer de la liberté à la vérité. La première (la liberté) peut être assimilée au subjectivisme et serait la destin de l’homme seul (étranger à toute transcendance « l’homme unidimensionnel » de H.Marcuse et l’idéologie de Mai 68, celle de Wilhelm Reich, par exemple : « il est interdit d’interdire », libération sexuelle dont la conséquence a été le S.I.D.A., né aussi en Californie) . En fait, il semble qu’on vive toujours, et même de plus en plus, de cette « unidimensionnalitè ». Ce qui veut dire entre autres que la dimension verticale a disparu … le positivisme aurait-il gagné ? La seconde (la vérité) est le fait, l’attribut du Divin, notre objectivité…Entre les 2 , il faut un changement de perspective … Entre subjectivisme et objectivité , il y a nécessairement la foi . Mais, on peut être de bonne foi, et ignorer toute transcendance …Le subjectivisme court comme un fil rouge à travers toute notre civilisation occidentale depuis le XVI° siècle : tout a commencé par la contestation de Saint Thomas d’Aquin par Ockham, et Descartes lui a emboîté le pas. Toute la civilisation européenne a fait de même « Je pense, donc je suis » … n’est-ce pas là la source de notre subjectivisme ? (Quelqu’un disait avec humour qu’il vaudrait peut être mieux dire « Je pense, donc je suis … pensé » ) . Descartes a mis l’homme au centre des choses sans se douter qu’ainsi avec le temps, on reléguerait Dieu, voire on l’exclurait. Le Père Hans Urs von Balthasar dans « Si vous ne devenez comme cet enfant » (à la page 53) souligne cette nécessité de « renaître », ce que Jésus nous enseigne au chapitre 3 de Saint Jean (entretien avec Nicodème), il nous faut redevenir comme des enfants (ce qui exclut évidemment tout infantilisme ou puérilité) ; c’est bien sûr la nécessité de la conversion (revenir à la source) ; il dit : « Ce n’est pas seulement le matérialisme qui croit pouvoir sauver l’homme à ses propres yeux grâce au dogme de l’athéisme, mais aussi le positivisme qui interdit toute question philosophique authentique et délimite l’horizon du penser qui aurait sens exclusivement à partir des faits constatables » Le Cardinal Danneels à Notre-Dame de Paris au Carême 2004 souligne la vieille objection du Siècle des Lumières « L’homme et Dieu sont des concurrents : la dépendance de l’homme est incompatible avec son autonomie : il lui faut donc « tuer » Dieu … mais est-on bien sûr que l’homme et Dieu sont incompatibles ? … Le diamant et le soleil sont-ils incompatibles ? Le diamant a besoin de la lumière du soleil … Il y aurait donc une troisième voie ? ? ? …: la subjectivité de notre époque est incontournable, mais elle doit être dépassée : c’est souhaitable, c’est même nécessaire … « Une seule voie, retrouver l’esprit d’enfance, et donc revenir à Jean-Baptiste, c’est un passage obligé: la voie de la conversion du cœur demande un esprit d’enfance . » La foi est une grâce, mais, répétons-le, si nous ne l’avons pas, demandons-la ; Dieu saura bien nous l’accorder. On connaît un peu les réticences de l’homme occidental : il ne veut pas démissionner, et ne veut pas non plus s’abandonner ; résultat, il s’enferme. Dépasser la notion de consensus, c’est possible, c’est même nécessaire ( vient de nous dire le Cardinal Danneels ) ; ce consensus introduit nos démocraties dans un relativisme moral qui les mine... ce régime ; malade- pourtant le meilleur, nous avait dit Churchill - est soumis à la « dictature » du relativisme : le monde est persuadé qu’il n’y a plus de vérité possible… et , il s’est livré à une liberté sans limites et sans contrôle : en fait, cette liberté s’est muée en esclavage, triste paradoxe, esclavage de la consommation ou esclavage sexuel . Même nos philosophes ont renoncé à cette recherche de la vérité, ou bien ils absolutisent la liberté. Monseigneur Dominique Mamberti le soulignait au Meeting de Rimini (ORlf n° 38 du 23-9-2008) : la première valeur de nos démocraties est la tolérance, mais n’est-ce pas là la source de notre relativisme moral ; ne vaudrait-il pas mieux que ce soit la vérité, ou à défaut sa recherche ? Il dit « La dignité de l’homme se fonde sur sa capacité de vérité. Absolutiser la tolérance est en revanche se retirer devant cette dignité. Absolutiser la tolérance, en effet, signifie la transformer en valeur suprême, mais cela met inévitablement la vérité au second plan et la relativiser. Le renoncement à la vérité, quant à lui, livre l’homme au calcul du plus fort, de l’utile ou d l’immédiat en privant la personne de sa grandeur. » Il cite plus loin Alexis de Tocqueville (déjà cité plus haut) : « Le despotisme n’a pas besoin de la religion, mais la liberté et la démocratie, si. » (mais, ce peut être une dérive utilitariste). Au fond, ce relativisme moral s’origine dans la philosophie du droit énoncé il y a quelques 250 ans « etsi Deus non daretur » : il faut faire « comme si Dieu n’était pas concerné » ( en fait, c’était sans doute la philosophie des Lumières qui inspirait cette assertion ), ne faudrait-il pas mieux dire ; c’est Mgr Ratzinger qui le suggère à Subiaco avant qu’il ne soit élu Pape :« Veluti si Deus daretur » …La recherche d’un consensus est le drame de toutes nos démocraties et en particulier de nos Comités de Bioéthique. (Le Père J.M. Petitclerc, éducateur de jeunes, dit que pour les jeunes,il importe plus de parler de respect que de que de parler de tolérance ; il vaut mieux parler de respect, qui est une notion plus positive pour les jeunes … ) Jean-Paul II disait dans l’encyclique « Veritatis Splendor » qu’on ne peut pas inverser les 2 termes de « vérité-liberté » ; donc cette liberté, si elle est prise comme un absolu peut facilement dégénérer en licence ou en libertinage, elle nous sert à chercher Dieu. La prendre pour un absolu est une très forte tentation, au moins pour l’homme occidental (plusieurs philosophies en sont la preuve) . Jean Paul II appelait à Issy devant les évêques français en 1980 cette méta-tentation : d’occulter Dieu et de faire de l’homme la seule mesure de son destin … C’est retomber dans la tentation d’Eve au Jardin : « le Serpent lui dit : vous serez comme des dieux ». Si Dieu se réserve un arbre dans le Jardin d’Eden (bien sûr, ce langage est symbolique), c’est qu’Il veut établir des limites à l’homme – ce sont des glissières de sécurité, si l’on veut ; mais beaucoup penseront que c’est l’Eglise qui cherche à opprimer l’homme et l’empêcher d’être libre … . Comme nous l’avons dit, Jésus s’est défini comme étant « le Chemin, la Vérité, la Vie » (Jean 14,6). La Vérité n’est donc plus une idée, mais un Homme, Lui, Jésus-Christ ; et elle ne peut plus être dissociée de la Vie. Dieu lui-même est vivant … Cette affirmation aurait dû écarter toutes les idéologies et tous les totalitarismes qui ont fait tant de mal au siècle passé (et qui nous menaçent encore !) Descartes a sans doute ouvert la voie à toutes ces aventures périlleuses , car il a mis le primat sur la subjectivité de l’homme , et a sans doute renversé la perspective : ce qui prédomine , c’est sans doute pour lui d’être de l’homme ( l’exister ) ; ce faisant, l’être ( l’esse ) a été négligé … il a sans doute évité à l’homme tous les dogmatismes religieux , mais il a permis aussi tous les totalitarismes d’état . C’était aussi ouvrir la voie à toutes les dérives qui peu à peu ont fait du profit leur veau d’or. Monseigneur Lustiger a dit que notre XXI° siècle serait une période extrêmement dangereuse, mais passionnante. Il nous faut passer du subjectivisme ambiant à une objectivation de notre foi : changer de perspective en somme. Pour passer du subjectivisme à la vérité, il nous faut nous décentrer et laisser le cœur de notre moi à un Autre que nous … « Décentrement de soi qui commence par la reconnaissance de notre misère et la prééminence d’un Autre à implorer » (Sœur F. Billoteau, ermite bénédictine) . Ce décentrement de soi n’est pas une évacuation de son être, mais son remplacement progressif par Jésus-Christ, au point de dire comme Saint Paul : « Je suis crucifié avec le Christ. Ce n’est plus moi qui vit, mais le Christ qui vit en moi (Galates 2,16.) » Jean-Paul II souligne l’inversion impossible de la vérité et de la liberté … (il faut insister ici, car bon nombre de mouvements philosophiques contemporains- sous prétexte de véracité sans doute -–prétendent que la liberté est une valeur absolue …) mais c’est conduire à la licence ou au libertinage, ou à l’autoritarisme quand les deux précédents ont échoué (l’anarchie ouvre la voie aux totalitarismes) …. « C’est la vérité qui doit orienter la liberté et non l’inverse … la vérité n’est pas une création de la liberté. » (Veritatis Splendor du n° 28 au n° 83 , surtout le N° 35 ) Cette quête de la morale est d’autant plus urgente que l’on croyait que le savoir technologique allait périmer la recherche d’une vérité … bien sûr , il n’en est rien ( seule une certaine naïveté aurait d’ailleurs pu faire croire le contraire ... ) La toxicomanie et le S.I.D.A. montrent qu’on ne peut faire l’impasse d’une éducation morale , si bien qu’il est nécessaire de répandre une « formation morale de base » , en particulier pour prévenir des dérapages dramatiques , d’adolescents en particulier . Il est bien sûr que, dans l’histoire de l’humanité, il n’est pas du tout indifférent que le Décalogue ait été promulgué par Dieu lui-même, pour que celui-ci serve de code pour la conduite de ceux qui cherchaient comment se diriger … Avant que le Catéchisme de l’Eglise Catholique ne soit promulgué, beaucoup se sont demandé s’il n’aurait pas mieux valu que le Magistère parle d’emblée des Béatitudes plutôt que du Décalogue. Les décades qui ont suivi le Concile ont montré la pertinence de ce choix , car nous sommes bien souvent en deçà du Décalogue , à une phase où , très souvent , il faut une éducation morale qui le précède ( la « morale naturelle » permettrait d’avoir un code de conduite indépendamment de l’enseignement de la religion ( cf. Romains 2,9 à15 ) ; comme le disait Léon Bloy, la morale du Décalogue s’élève comme un barrage face à toute l’humanité . On pourrait ajouter que la morale chrétienne élève un deuxième barrage … (C’est à dire que la morale judaïque s’élevait déjà comme un premier barrage et la morale des Béatitudes a affiné ce premier barrage.) Mais les acquis de la morale ne sont d’aucune religion, et si le Décalogue est à juste titre revendiqué par le monde juif, les grands principes qu’il promulgue sont ceux de tous les hommes, qu’ils aient une religion ou non. C’est ce que Saint Paul au chapitre 2 de l’Epître aux Romains appelle « morale naturelle » (C’est la base des discussions dans les Réunions Internationales … ne pas croire qu’en deçà de la « morale naturelle », il y a une éducation de tout homme, c’est s’attacher à une « barbarie » : je pense à ce moment au « gang des barbares ».) Dans l’épître aux Romains ( et aussi celle aux Galates ) , on pourrait croire que la foi a éliminé la Loi, mais , bien sûr que non, Saint Paul nous dit que la Loi est bonne ( l’épître aux Romains en 7,7 dit , par exemple « Que dire alors ? Que la loi, c’est le péché ? Absolument pas : je n’aurai pas connu le péché s’il n’y avait pas eu la Loi ») … Il nous redit même que celle-ci « doit être utilisée comme une loi, c’est à dire non pas contre le juste, mais contre les ennemis de la loi : insoumis, parricides, etc ». (I° lettre à Timothée 1, 9) Dans le monde judéo-chrétien , la morale repose : Sur le code Deutéronomique : « Je te propose de choisir, ou bien la vie et le bonheur , ou bien la mort et le malheur … » ( Deutéronome 30 , 15 et sq. )Cette invitation est reprise ensuite : malheur à ceux qui entretiennent la confusion ( en Isaïe 5, 21 à 23 ) , ainsi qu’en d’autres prophètes ( « Malheur à ceux qui appellent le mal , bien et le bien , mal … » )Puis Jérémie, au cours de la Déportation à Babylone dit qu’il y aura une Nouvelle Alliance (Jérémie 31, 31 à 36) . Ezéchiel nous dit la même chose en 36,28.Cette nouvelle Loi sera entérinée par Jésus. L’épître aux Hébreux nous en donne le témoignage (Hébreux 8,8-12, qui cite Jérémie 31,31-36), mais auparavant, les Prophètes de l’Exil ont souligné notre responsabilité personnelle (Jérémie 17, 5-8 ; 31, 29-30, Ezéchiel 14, 12 à 23 ; 18, 1 à 33 et 33,10 à 20) En Jérémie 17 5-9 , en particulier , le prophète nous dit : « Maudit soit l’homme qui met sa confiance dans un mortel … Béni soit l’homme qui met sa confiance dans le Seigneur, dont le Seigneur est l’espoir . » Jusque là, était surtout soulignée la responsabilité collective de l’homme. Mais, l’homme peut se fermer à toute manifestation extérieure, comme il l’a fait au cours des siècles et comme il s’est fermé aux incitations du prophète Isaïe (Isaïe 6, 9-10) « Va t’en (c’est Dieu qui parle) et tu diras à ce peuple : Ecoutez, écoutez et ne comprenez pas Regardez, regardez, et ne discernez pas Appesantis le cœur de ce peuple, rends-le dur d’oreille, englue lui les yeux de peur que ses yeux ne voient, Que ses oreilles n’entendent, que son cœur ne comprenne, qu’il ne se convertisse et ne soit guéri » (cité aussi en Matthieu 13,17-18, Marc, Luc et Jean 12,40) Et, en Isaïe toujours (Isaïe 29 ,18-19, repris en Matthieu 15, 8-9, et les autres Synoptiques) : « Le Seigneur a dit : parce que ce peuple est près de moi en paroles et me glorifie de ses lèvres, mais que son cœur est loin de moi et que sa crainte n’est qu’un commandement humain, une leçon apprise, eh bien, voici que Je vais continuer à étonner ce peuple par des prodiges et des merveilles. La sagesse se perdra et l’intelligence des intelligents s’envolera. » Ce texte est repris dans l’évangile de Matthieu, parce que ce problème menace tous les peuples, et toujours, nous sommes enclins à l’assoupissement et à la sclérose (Benoît XVI nous l’a redit dans le Chemin de Croix qu’il a médité avant la mort de Jean Paul II) Il y a nécessité pour les Chrétiens comme pour les Juifs, et tout homme, d’un code moral qui ne soit pas une contrainte seulement extérieure, c’est l’objectif des chapitres 9, 10 et 11 de l’épître aux Romains. L’élargissement du salut aux « païens » est provoqué par l’endurcissement (non définitif !) du cœur du peuple élu (le pharisaïsme guette aussi toute personne qui a reçu la révélation - Saint Paul parle des branches greffées qui risquent aussi de dégénérer, c’est une « sclérose » qui nous enferme dans nos certitudes, alors qu’au contraire elle devrait nous « ouvrir »… C’est un don , non pas un dû .) La FOI du peuple juif reposait sur les ordonnances de Dieu au Sinaï à Moïse : c’est la Révélation au Peuple Juif d’une LOI qu’il devra suivre : les 10 Commandements du Décalogue. Mais ces 10 Commandements (Saint nous le dira et spécialement aux chapitre 9,10, 11 de l’épître aux Romains ont eu tendance à se scléroser, à perdre vie en devenant un pur légalisme. Saint Paul, après le Christ, se fera le grand instigateur de l’ouverture des valeurs juives aux païens (d’ailleurs, cette « ouverture » était déjà annoncée dans les chants du Serviteur, par exemple). C’est l’Incarnation de Jésus qui permettra cette « ouverture » aux païens : le passage de la loi à la foi au Fils de Dieu. Mais, en particulier, c’est la Résurrection de Jésus qui changera les mentalités, bien différente des résurrections que Jésus avait pratiqué au cours de sa vie mortelle (celles du fils de la veuve de Naïm, celle de la fille du chef de la Synagogue de Capharnaüm, enfin celle de Lazare), mais la Résurrection du Christ est bien différent, puisque le Christ est mort et ressuscité pour vivre éternellement. Il ne mourra plus, Il est passé de la mort à la vie et la vie éternelle : Il a rejoint le Père. Mais, et c’est le résultat de son passage sur terre, Il nous a emmené avec Lui, au moins ceux qui ne le rejettent pas. Il nous adopté, c’est « notre adoption filiale » « Je remonte vers mon Père et votre Père » (Jean 20,18). La foi est indispensable pour accepter un cheminement qui peut être long et incompréhensible, car il n’a rien d’instantané: celui d’un cheminement qui peut être douloureux « La femme qui enfante est dans la peine parce que son heure n’est pas encore venue, mais lorsque son enfant est né, elle ne souvient plus de son angoisse dans la joie qu’elle éprouve du fait qu’un être humain est né dans le monde … » (Jean 16,21). Il n’y a pas opposition entre les Révélations à MoÏse et L’Incarnation D’ailleurs, Jésus nous dit « qu’Il n’est pas venu abolir mais accomplir » Dans la première épître, Saint Jean nous dit que cet enseignement n’est pas différent du précédent, mais cependant il est complètement différent (1 Jean 2,1). En quoi est-il si différent ? Sa différence tient à la Force qui va envahir les Apôtres et leur permettre de diffuser ce message aux 4 coins du monde ; c’est la force qui permettra à ces humbles pêcheurs de Galilée de diffuser ce message jusqu’au centre du monde connu : Rome. L’Esprit Saint, qui est une Personne distincte du Fils et du Père, réside complètement en Jésus auu cours de Sa Vie terrestre et en Lui seul. Cependant, au chapitre 7 de Saint Jean (Jn 7, 37-39), c’est l’évènement de la Pentecôte : les Apôtres par la voix de Pierre s’adressera à tous ceux qui sont là ; ils seront remplis d’une force, dans ce même Cénacle où ils s’étaient enfermés peureusement, mais où Jésus avait célébré la dernière Cène. Jusque là, ils n’avaient pas la force de porter cette vérité. Jésus leur avait dit : « Quand Il viendra Lui l’Esprit de Vérité, Il vous enseignera la Vérité tout entière. » (Jean 16,13) « Tant qu’Il n’est pas encore glorifié, Jésus ne peut encore répandre son Esprit sur les Apôtres. C’est du cœur de la Trinité que l’Esprit doit descendre sur les hommes , mais Il ne peut être donné que par l’humanité glorifiée du Christ. Jésus doit donc traverser la mort glorieuse, être exalté à la droite du Père pour transmettre l’Esprit d’amour qui les unit l’Un à l’Autre dans ce mystère Pascal. Le mystère Pascal s’achève vraiment le Jour de Pentecôte : « Tous furent remplis de l’Esprit Saint » (Actes 2,4) Il faut souligner l’antagonisme apparent entre loi et foi, antagonisme apparent seulement. L’épître aux Romains de Saint Paul (et de même l’épître aux Galates, qui reprend les mêmes thèmes …), montrent que cet antagonisme est apparent seulement, car la foi n’est pas opposée à la loi, bien que beaucoup le croient. Jésus dit qu’ « Il n’est pas venu abolir la loi, mais la parfaire » Pas un seul petit point de la loi n’est périmé. Il est seulement venu délivrer le peuple du « carcan » des 613 préceptes qui rendaient son exécution quasi impossible. La foi existait avant Jésus-Christ : Abraham, père des croyants a eu foi en Dieu et Saint Paul dit bien que ce n’est qu’ensuite qu’il reçut la circoncision (l’épître aux Hébreux, au chapitre 11, décrit tous les hommes de l’Ancienne Alliance qui ont vécu de la foi …). Paul part de l’exemple d’Abraham pour montrer que l’homme est justifié par la foi, et non par les œuvres. C’est la raison pour laquelle Paul dit que sa foi, lui juif, est incomplète, si elle n’aboutit pas à la croix du Christ … Les chapitres 9, 10, 11 de l’épître aux Romains sont une exhortation de Paul à ses frères juifs pour qu’ils reconnaissent la divinité de Jésus et sa Résurrection. En Romains 10 ,9 et 10, il nous dit : « Donc, si tu affirmes dans ton cœur que Jésus est Seigneur, si tu crois dans ton cœur que Jésus l’a ressuscité d’entre les morts, alors tu seras sauvé. Celui qui croit du fond de son cœur devient juste, celui qui de sa bouche affirme sa foi parvient au salut. En effet, l’Ecriture dit : Lors du jugement, aucun de ceux qui croient en Lui n’aura à le regretter (Isaïe 28,16) » L’enseignement de Luc dans la parabole de Fils prodigue (Luc 15,11 à 32) nous enseigne la générosité du Père vis-à-vis de ce fils en perdition. C’est l’illustration de ce Dieu généreux envers tous, même si certains se croient justifiés par leur œuvre ; la jalousie du fils aîné est conséquence de la miséricorde du Père. En Romains 3,31, Paul nous dit : « Sommes-nous en train d’éliminer la loi au moyen de la foi ? Absolument pas ! Au contraire, nous la confirmons.»La Lettre aux Romains sert à expliciter le salut apporté aux païens, effet de la grâce ; le salut n’est pas le résultat d’efforts, c’est un don, il n’est pas la conséquence de bonnes œuvres. C’est ainsi que dans l’Evangile, nous voyons le Christ magnifier la foi du publicain eu égard au pharisien ou bien l’enseignement sur les invités à un grand dîner : les invités se récusent les uns après les autres …. On connaît la suite …( Luc14, 15-24). Saint Paul nous invite à penser que « tout est grâce », et en aucune façon, un dû. Plus tard, St. Paul nous dit dans la première lettre à Timothée (1 Th 1,8-10) : « Or nous savons que cette loi est bonne quand on l’utilise comme une loi qui est là, on le sait bien, non contre le juste, mais contre les ennemis de la loi …. » Est-ce affirmer que l’Ancienne Alliance est abolie par la Nouvelle ? Absolument pas ! L’Eglise a toujours affirmé que son enseignement s’enracinait dans son passé et que cette fin ne constituait que l’aboutissement de Révélations antérieures ; et elle a condamné fermement ceux qui prétendaient que la Révélation apportée par Jésus-Christ annulait les apports du passé (Marcion a été condamné par l’Eglise) EN DEHORS DE CE MONDE JUDEO-CHRETIEN : la morale, par exemple dans les réunions internationales est ordonnée au bien commun ; elle peut être liée à un code religieux, que ces peuples ont. C’est la morale naturelle dont parle Saint Paul. La morale naturelle ( Rm 2, 9 à 15 ) est souvent interprétée à tort comme la morale de « la nature » ; alors que la nature elle-même n’a pas de morale ( puisqu’elle n’a pas de conscience ) ; l’ambiguïté repose donc sur le mot « nature » ; la morale suppose liberté et choix ( quelle que soit la religion qu’on puisse avoir ) ; la morale naturelle a une importance immense , c’est elle entre autres qui permet à des hommes de cultures et de religions très diverses de parler ensemble ( qu’on pense aux Organisations Internationales et à d’autres aréopages ) . C’est le fruit de l’éducation : le mot « naturel » est la source de confusion, puisque beaucoup de gens s’imaginent qu’elle s’appelle comme ça parce qu’on la trouve « dans le berceau », alors qu’elle est le fruit de l’éducation. Bien sûr, au sens strict, c’est déjà de la culture. « Naturelle » signifie que c’est une morale qui transcende les religions, et qui permet à d’autres religions que la religion chrétienne de s’exprimer. Dans le monde agnostique actuel (l’agnosticisme est la négation de l’idée de transcendance et de celle de fins dernières, Jean Daujat démontre bien- et avant lui, d’autres auteurs comme Saint Thomas d’Aquin- que cet agnosticisme est une illusion de la pensée puisque affirmer qu’aucune vérité n’est atteignable par la raison est déjà une affirmation ; pourtant cette affirmation prétend que cette affirmation est vraie ; n’est-ce pas là une contradiction justement ? Pour Jean Daujat, il n’est nul besoin d’une Révélation, judéo-chrétienne ou non, pour adhérer à des valeurs transcendantes, le vrai, le bien ou le beau, l’intelligence seule suffit, ce sont des notions purement philosophiques ou métaphysiques si l’on préfère ! On voit ainsi que l’agnosticisme est non seulement contradictoire, mais impossible plus précisément. Il n’y aurait qu’une manière possible d’être agnostique, c’est celle de Protagoras dénoncée par Aristote, ce serait de cesser de penser, c'est-à-dire de devenir végétal, car dès que la pensée existe, elle affirme quelque chose …) Ce monde qu’on appelait autrefois païen est toujours présent, et le néo-paganisme actuel est beaucoup plus virulent que l’ancien, il suffit de penser au système nazi, par exemple, héritier de la pensée nietzschéenne …et pour beaucoup de nos contemporains, ce mot païen a sans doute une connotation trop négative , cette morale naturelle est déjà signe d’un choix et donc d’une liberté intérieure , elle n’est pas déterminée ( par nos chromosomes , par exemple,). Cette morale naturelle est la morale d’autres religions non chrétiennes , des grandes religions, d’Etats qui peuvent s’exprimer dans les grandes assemblées internationales … C’est la morale de tous les peuples religieux, entre autres asiatiques. Rien à voir, donc, avec ces faits divers affreux dont les médias nous abreuvent. Entre la morale et la nature, il y a la place d’une éducation : la morale naturelle de Romains 2 ,14-15 n’a rien à voir avec un soi-disant « spontanéïsme ». Il ne faut pas non plus croire que le christianisme seul est porteur de morale. Ni non plus disqualifier le christianisme pour cette raison de moralisme (qui serait vu comme quelque chose de purement négatif) Si l’on passe du plan philosophique au plan théologique, il faut signaler qu’intervient un troisième personnage », même si celui-ci est indésirable : le malin . C’est le privilège de notre liberté d’avoir toujours à choisir entre le bien et le mal … Dans la morale, à côté de Dieu et nous, intervient un acteur supplémentaire. Car, ce mal, est aussi un être personnel et libre, le Mal ou le Malin. Jésus l’affronte plusieurs fois dans les Evangiles (entre autres, à la Tentation au Désert, et aussi à Gethsémani). Le mal dû au Malin n’est pas le fruit d’une imagination excessive ou maladive. Paul nous le dit bien dans son Epître aux Romains, à la fin du chapitre 7 : « Je ne fais pas le bien que je veux, par contre je fais le mal que je ne veux pas… » Les œuvres du Démon passent au cœur de notre être. Jésus , à l’invitation des Apôtres d’enlever l’ivraie qui s’est mélangé au bon grain , dit qu’il faut la garder jusqu’à la récolte , sinon on risquerait de tout perdre …( Matthieu 13,3 à 9 , puis 36 à 44 ) Donc , il y a bien trois protagonistes , et nous sommes « doubles » jusqu’à notre mort. Comme le monde vit dans un mode « horizontal », tout sens est dénié à la souffrance, puisqu’il est entièrement soumis à des explications psycho-sociologiques: on est très vite taxé de « masochiste », si par hasard, on tend à attribuer de la valeur à la souffrance; notre monde est devenu hédoniste : toute complaisance à la souffrance est devenue suspecte …réaction sans aucun doute à l’excès doloriste du XIX° siècle ; l’hédonisme actuel est l’hériter de l’épicurisme des grecs, de même que le dolorisme est l’héritier du stoïcisme ; mais, entre les Antiquités et l’époque moderne , il y a eu Jésus-Christ et la Croix, le mystère de la souffrance ne tire son explication que parce qu’elle a été assumée par le Christ à la Croix. Nos sociétés « aisées » (au moins Occidentales, mais ce monde tend à contaminer le Tiers-Monde par le biais du consumérisme ) ne ressentent pas la nécessité de la foi ( celles du Tiers-Monde la ressentent certainement plus : ils n’ont pas nos sécurités souvent fallacieuses, qui peuvent nous abuser ; sécurité sociale , gratuité des soins , indemnités en cas de mauvaises récoltes … les sociétés du tiers monde ont plus le sentiment d’un « au-delà » parce qu’ils n’ont pas cette sécurité qui vient de l’Etat ). Il est sûr que la nécessité de la foi se fait moins sentir dans nos sociétés d’abondance : mais aussi, ce serait sans doute limiter la foi à un rôle socio-psychologique qui n’est pas le sien … Le rabbin Rivon Krishné, à N.D. de Paris pendant les Conférences de Carême 2010 notait ces dérives actuelles de la morale : « Je fais mon marché au supermarché spirituel. Je picore je dirais même mieux, je picole … », on « flirte », on « surfe » , mais on ne s’engage pas ; on va au commerce du spirituel, comme à celui des spiritueux. Dans le monde actuel, on peut être touché par un « agnosticisme fonctionnel », comme le signale Mgr. Wingle, évêque canadien ; le Christianisme enseigné au cours d’un catéchisme qui se voudrait « définitif » est vite détrôné par des intérêts mercantiles ou même de simple survie. Et à côté de cet agnosticisme fonctionnel existe quelque chose de bien plus grave qui est l’apostasie silencieuse de beaucoup de pays d’ancienne culture chrétienne, surtout occidentaux … Constatée par les derniers Papes (par exemple, Benoît XVI à Prague), elle a aussi été soulignée par beaucoup d’autres, par exemple Frère Aloïs de la Communauté de Taizé à Berlin où on ne compte plus que 30% de baptisés … Il y a un lien très fort entre ce qui se passe surtout en Europe et la mémoire du passé. Dans la société actuelle, submergée par le mercantilisme, les jeunes ont en fait besoin de ne pas être amnésiques et qu’on leur restitue une certaine mémoire (il n’est qu’à souligner la soif qu’ont les jeunes d’écouter les témoignages de déportés, qui quelques fois les emmènent voir des camps d’exterminations nazis. Malheureusement, les survivants de ces camps deviennent de plus en plus rares ! Ils ont besoin de comprendre que tout n’est pas qu’une affaire d’argent !) Raviver la mémoire est essentiel en cette heure où les moyens de communication auraient tendance à rendre les gens amnésiques, sans mémoire du passé. « La foi , pour quoi faire ? » Cette question posée par Monseigneur Vingt-Trois interpelle tous les Evangélisateurs que nous pouvons être en ce début de XXI° siècle, surtout en Occident. Cette question ramène à celle de Jésus dans l’Evangile de Saint Luc ; « La foi existera t’elle quand Je reviendrai sur la terre ? » (Luc 18,7) Il est vrai que la foi en la religion chrétienne et dans le Christ n’est plus du tout évidente dans notre monde consumériste (surtout si les Européens qui ne sont pas sortis de leur continent) … la religion chrétienne est alors mise au même plan que d’autres religions, orientales ou islamique , par exemple . Mais, là encore, on peut ne voir que le côté utilitariste de la religion Alors, comment l’atteindre ? Comment favoriser son apparition et sa croissance. ? « Le Chrétien ne croît pas au Dieu des Philosophes et des Savants, mais en celui d’Abraham, Isaac et Jacob », nous dit Blaise Pascal. Il reprend l’exultation de Jésus en Matthieu 11, 26 et en Luc 10,20 : « Je te remercie, Père, d’avoir caché cela aux Sages et aux Intelligents, et de l’avoir révélé aux tout-petits. » Donc, prions … Mais, c’est l’esprit d’enfance qui manque le plus aujourd’hui ; et cet esprit d’enfance, c’est Jean Baptiste qui peut nous le donner ; comme nous le dit le Cardinal Danneels. Tout cela est le fruit d’un subjectivisme ambiant ; l’important, c’est de se conformer à une sincérité immédiate ; notre monde est devenu utilitariste ; cet utilitarisme ne concerne pas seulement la morale conjugale, mais recouvre tous les aspects de la morale ; cet utilitarisme est l’antithèse du don de la gratuité, c’est ainsi l’antithèse de l’Esprit Saint, rien de moins, puisque celui-ci est L’ESPRIT DU DON. On peut donc dire que l’utilitarisme a été le principal allié du positivisme. Le positivisme a été l’allié et est le principal responsable de la déchristianisation, puisqu’il soutenait que la religion chrétienne n’était rien d’autre qu’une philosophie … excluant la Résurrection, bien sûr). Mais, l’issue du positivisme est souvent l’athéisme, puis le suicide … « Le drame spirituel que le Concile Vatican II considère comme l’un des faits les plus graves de notre temps (Gaudium et Spes n° 19) se situe dans l’éloignement silencieux de populations entières de la pratique religieuse, et de toute référence à la foi. L’Eglise est davantage confrontée à l’indifférence et à la non-croyance pratique, qu’à l’athéïsme en recul dans le monde. L’indifférence et la non-croyance se développent dans les milieux culturels imprégnés par le sécularisme. Ce n’est plus l’affirmation publique de l’athéïsme, à l’exception encore de quelques états dans le monde, mais une présence diffuse, quasi omniprésente, dans la culture. » (Mgr. Poupard et Conseil Pontifical de la Culture : Où est-il ton Dieu ? Editions Salvator ) ; auparavant, il avait été dit dans la même publication : « Depuis la chute des régimes athées, le sécularisme lié au phénomène de la mondialisation, se répand comme un modèle culturel post-chrétien « Lorsque la sécularisation se transforme en sécularisme (Evangelii Nuntiandi n° 56 ), il en résulte une grave crise culturelle et spirituelle dont l’un des signes est la perte de respect de la personne et la diffusion d’une sorte de nihilisme anthropologique qui réduit l’homme à ses instincts et à ses tendances. » Pourtant, les jeunes ont soif de cette transmission qu’ils n’ont pas eue : leur agnosticisme est seulement « fonctionnel », pour reprendre une formule de Mgr. Wingle, évêque au Canada ( Dolentium Hominum n° 55 , n° 1 de l’année 2004 ) . Cet agnosticisme est d’ailleurs souvent étiqueté « athéisme ». « nous vivons une culture de l’acedia- que l’on aurait bien tort de limiter au domaine religieux. Les jeunes sont confrontés à une culture où est privilégié le rendement économique, si bien qu’ils vivent « une névrose existentielle » où tout ce qu’ils ont appris concernant leur existence ( s’ils l’ont appris ) est « gommé » au profit du rendement économique. Le fait d’éviter ces questions existentielles ne les fera pas disparaître, au contraire ! » ( méfions-nous, l’Afrique du Nord, mais aussi le Moyen-Orient, puis la Turquie sont devenues Musulmanes après avoir été dans les premières contrées évangélisées ; l’Europe pourrait le devenir aussi, mais qu’elle sache alors que c’est pour plusieurs siècles … l’Afrique du Nord, pourtant évangélisée par de grands Docteurs de la foi, et Saint Augustin entre autres, est passé en quelques 150 ans à des hérésies pélagiennes, puis ariennes, pour finalement se tourner vers l’Islam. (L’extension aussi rapide de l’Islam a sans doute été le fruit de la division des Chrétiens). Sans doute, nos contemporains ignorent complètement les mots « pélagianisme et arianisme » ; pourtant, c’est là où leur foi bute … Mais, sans doute, vaut il mieux être musulman qu’agnostique : l’Afrique Noire nous le montre tous les jours et je peux en témoigner !) « Le sujet décide de ce qui lui semble acceptable d’un point de vue religieux, et la conscience subjective devient en définitive l’unique instance éthique » (Benoît XVI à l’Université de Ratisbonne ORlf n° 38 du 19 Septembre 2006). Le subjectivisme éthique porté à l’extrême conduit à la situation paradoxale de devoir admettre l’immoralité comme moralement bonne … La logique de ce dynamisme a conduit à ce que Benoît XVI a appelé la dictature du relativisme « L’on est en train de mettre sur pied une dictature du relativisme , qui ne reconnaît rien comme définitif et qui donne comme mesure ultime uniquement son propre ego et ses désirs. » (Homélie lors de la messe Pro Eligendo Romano Pontifice , ORlf n° 16 du 19 Avril 2005) Le Pape Benoît XVI le notait aussi au cours de son entretien avec les prêtres du diocèse de Rome : il avait rencontré des évêques d’un pays où la moitié de la population se déclare athée ou agnostique : « Ils m’ont dit : en réalité, les gens ont tous soif de Dieu. Cette soif existe de façon cachée. Aussi, commençons d’abord avec les jeunes que nous pouvons rencontrer ? » (O.R. l.f. n°7 du 19-2-2008). Ceci est corroboré par un prêtre entendu sur RCF disant que les jeunes croient en majorité à une vie après la mort, mais sans doute aussi se méfient-ils de l’Eglise , parce qu’ils se méfient de tout dogmatisme … La tolérance est devenue une vertu estimable et hautement républicaine ; rappelons la conférence de Monseigneur Mamberti, au Meeting de Rimini, citée plus haut : la tolérance est devenue la vertu principale de nos démocraties, mais n’est pas là leur faiblesse justement, ne faudrait-il pas que ce soit la recherche de la vérité ? (Au passage, souvenons-nous de ce mot de Paul Claudel à qui on reprochait certainement son manque de tolérance ; « Tolérance, tolérance ? ? … Il y a des maisons pour cela ». Les maisons de tolérance étaient, avant la loi Marthe Richard qui les abolit, des maisons de … prostitution) . Mais, cette boutade en dit plus qu’on ne le penserait, au moins sur la tolérance. Cette tolérance n’est-elle pas, en effet, souvent synonyme de relativisme … ? (rappelons le mot du Père J.M. Petitclerc, Salésien de Don Bosco, éducateur de jeunes en difficulté, « pour ceux-ci, le mot respect est un mot plus juste que le mot tolérance, ce dernier étant mal connoté, car trop neutre, voire négatif ; il ne viendrait pad à l’idée à un jeune de dire à un autre jeune :je te tolère !» ; je pense aussi à ce que disait Engelhardt, moraliste allemand : quelle différence si tout était égal entre un médecin nazi de Camp de Concentration, et le Docteur Albert Schweitzer ? C’est sans doute une position extrême, mais est-on sûr que la tolérance est la valeur supérieure ? Ne serait-ce pas plutôt la recherche de la vérité et « une fois qu’on l’a trouvée, s’y tenir … », comme le rappelle le Cardinal Newman, cité par Jean Paul II en Veritatis Splendor.) Comme le dit Monseigneur Vingt-Trois , « les religions se sont réfugiées dans le domaine privé , au moins depuis les Guerres de Religion , seul moyen d’assurer la paix sociale ». Mais, peu à peu, notre monde s’est habitué à un certain relativisme , persuadé qu’il n’y avait pas de vérité , ou que celle-ci était « privée » . « A chacun sa vérité ? » dit le titre d’une pièce moderne. S’agit-il d’un relativisme moral généralisé ou d’une démission voire, pour certains chrétiens , une forme dégradée de respect de l’autre ? ) . « C’est pourquoi, dit encore Monseigneur Vingt-Trois, notre société est devenue relativiste » (Conférence de Carême à N.D. de Paris 2007) Mais est-ce là l’enseignement de Jésus, poursuit-il ? « Je Suis le Chemin, la Vérité, la Vie »… « Je Suis la Vérité » nous dit Jésus (Jean 14,6) . Jésus nous avait dit, juste avant l’intervention de Pilate « mais, qu’est ce que la vérité ? » : « Je ne Suis venu que pour rendre témoignage à la Vérité, et tout homme qui appartient à la Vérité écoute ma voix » (Jean 18,37) Depuis qu’Il s’est incarné, cette vérité n’est plus une idée ou un système (pourtant, les totalitarismes du XX°siècle en ont vécu !) Cette vérité est un homme Elle est vivante C’est Jésus, Dieu Incarné Et la Croix n’est pas sa mort, mais la mort de la mort. Au lieu de chercher avec désespoir la vérité partout, nos civilisations chrétiennes feraient peut-être bien de se souvenir que notre Dieu s’est incarné en se disant : « Je Suis la Vérité… », et qu’il n’est peut-être pas besoin de la chercher ailleurs . Je ne résiste pas au plaisir de vous citer la lettre écrite par un « cadre » français au Courrier des lecteurs du journal « La Croix » (c’est une sorte de parabole) : « Je me trouvais devant une porte (celle du paradis : note du rédacteur), j’essayais de l’ouvrir, mais en vain. A la fin, complètement découragé, je tentais de l’ouvrir de toutes mes forces , même à coups de pieds, j’allais abandonner, quand tout à coup, la porte s’ouvrit, mais de l’intérieur, dans l’autre sens … » C’est tout un symbole dans notre recherche de la vérité : cette vérité est une grâce et un DON miséricordieux (parabole du Père Miséricordieux, en Luc 15, et la non-justification de la grâce dams l’épître aux Romains ). La foi est un don de Dieu, que beaucoup d’Européens l’ont reçu lors du baptême : à eux (et à nous) de le faire fructifier. Et si l’on pense qu’elle s’est « évaporée », il faut prier pour en être encore conscient … Si nous n’avons pas eu cette grâce d’être baptisé, alors cherchons cette vérité, ne nous réfugions pas dans cette démission de croire que la vérité est « hors de portée, ou bien une recherche illusoire »Alors, la foi, pourquoi faire ? Pour quoi faire ? Nous ne quittons pas une vision utilitariste des choses … Il faudrait passer d’un subjectivisme souvent délétère à un objectivisme plus roboratif, seul moyen d’échapper à une morale essentiellement utilitariste .( pour y échapper , un seul moyen : le décentrement de soi , ce qui ne veut pas dire épouser toute opinion, mais remplacer, ou chercher à remplacer, notre propre être par la personne de Jésus « Avec le Christ, je suis fixé à la Croix … Ce n’est plus moi qui vis … », nous dit Saint Paul en Galates 2,2. L’utilitarisme, morale née avant tout dans le monde anglo-saxon, tend maintenant à se répandre dans le monde entier … On peut dire que l’utilitarisme a envahi notre monde, y compris le monde intertropical. C’est une doctrine directement opposée à la morale chrétienne et répandue par des penseurs qui avaient un lien très lointain avec le monde chrétien (Jeremy Bentham) : on peut dire que c’est l’inspirateur des pouvoirs financiers qui régissent notre monde. La crise bancaire récente en est un symptôme inquiétant … C’est l’antithèse du don préconisée par Benoît XVI, qui est synonyme de l’Esprit-Saint ( voir l’Encyclique Dominum et Vivificantem de Jean Paul II, qui est malheureusement si peu connue ! ) : on peut donc dire que l’utilitarisme est le principal adversaire de l’Esprit Saint et le meilleur vecteur du Positivisme - qu’on aurait tort de sous- estimer, en tant que théorie du passé … Le scientisme du XX° siècle en est l’héritier- Ce serait renier l’Esprit … au profit … du profit justement. « Il faut choisir Dieu ou l’argent », nous dit Jésus. On peut dire que cette morale utilitariste est omniprésente. La morale enseignée par l’Eglise est une morale du don, et que, sans ce don, l’Esprit Saint a du mal a être présent, puisqu’il est lui-même don ; la troisième personne de la Trinité serait donc absente. L’évolution de notre monde moderne est assez inquiétante, puisqu’elle favorise la consommation, et par là même un matérialisme pratique ; en cela, l’Esprit-Saint a beaucoup de mal certainement « à se frayer un passage ! ». Pour citer le Cardinal Danneels, encore, « l’homme moderne n’est plus capable de s’extasier devant « l’être » de l’arbre, il réfléchit tout de suite au bénéfice qu’il pourrait en tirer : combien de planches ou de meubles ? » L’utilitarisme est absolument étranger à la morale chrétienne. Emmanuel Kant disait que la fin de nos actions devait être la personne ! Celle-ci ne devrait jamais être un moyen. Jean Paul II dans Amour et Responsabilité (pages 227 à 231) critique cet utilitarisme. Or celui-ci a envahi tout notre système commercial ! Le profit a remplacé la personne. Ce système commercial est d’origine anglo-saxon, mais tend désormais à envahir le monde entier. Son origine est dans un protestantisme dévoyé … Signalons seulement que pour l’Eglise, il est Trois Personnes en Dieu ; l’Esprit Saint en est la troisième, un de ses synonymes est d’être don. Encore une fois, il faut permettre à ce don de se frayer une voie … Beaucoup de nos difficultés viennent de ce que notre monde a confondu « libéralisme et liberté ». Non seulement ces deux termes ne sont pas synonymes, mais ils sont même opposés. Bernanos a senti ce danger mortel à son retour du Brésil, et au lendemain de la 2° guerre mondiale… « Monde libéré pour quoi ? Est-ce pour tomber dans un nouvel assujetissement, économique , cette fois . » . L’autonomie que recherche l’homme moderne est une illusion adolescente : pour sortir de cette illusion (que l’homme croit nécessaire s’il veut atteindre l’indépendance …), il lui faut parvenir à une « théonomie participée » nous dit Jean-Paul II dans « Veritatis Splendor » (plutôt que hétéronomie, qui pourrait faire penser à une perte de liberté) , parce que nous sommes appelés à partager la liberté et la vérité de Dieu . « La liberté a donc besoin d’être libérée . Le Christ en est le libérateur : il nous a libéré pour que nous soyons vraiment libres ( Gal 5 ,1 ) » nous dit-il au N° 86 ( mais, ne nous laissons pas aliéner par une autre forme d’esclavage …) . L’abbé Pierre nous disait que la foi est une « désillusion enthousiaste », désillusion parce qu’il faut d’abord avoir perdu toutes nos illusions, (y compris les illusions de lendemains qui chantent… ) ; notre conscience nous appelle à nous « jeter » dans une autre confiance, et à quitter nos marchands de rêve … en particulier de croire que le marché va résoudre tous nos problèmes ! Kant préconisait déjà le Primat de la Personne, que cette dernière était une fin et non un moyen, contre les tenants de l’utilitarisme. Comme le souligne le père M.Schooyans ( déjà cité ) , il y a une opposition entre libéralisme et liberté ; le premier par une confusion sémantique sans doute savamment entretenue est censé nous apporter la liberté , en fait il y a un tel antagonisme entre les deux que le premier nous conduit au nihilisme et à une nouvelle oppression plus terrible : « Le péril qui guette actuellement certains secteurs de l’Eglise, c’est qu’ils apportent une caution théologique à la dérive totalitaire du libéralisme , c’est une restauration des Lumières , dans laquelle les Chrétiens chercheraient les principes de discernement en vue d’accueillir les éléments de la modernité » ( M.Schooyans ,.idem. p.285, maintenant Monseigneur ) Gérard Leclerc au Colloque Anniversaire de l’Aide à l’Eglise en Détresse nous redit la même chose : le libéralisme conduit au nihilisme , et ce dernier au suicide . Bernanos disait pareillement en ce lendemain de la deuxième guerre mondiale (ce qui l’a amené à déserter les combats politiques quelques années après son retour en France à la fin de la guerre ; il estimait notre monde piégé par l’emprise de l’argent). Ce libéralisme va englober les religions traditionnelles et les remplacer par le pouvoir de l’argent : il y a une symétrie entre l’idéologie marxiste et l’idéologie libérale ( les deux sont aux 2 extrémités d’un même spectre), conséquences de ce libéralisme : un extrême mépris de l’homme , et une globalisation du marché ; cette mondialisation entraîne un consumérisme ; cette soif de consommer est responsable d’un matérialisme pratique , qui est une véritable « tâche aveugle » qui empêche toute transcendance ! ( leurs conséquences : suicide et insignifiance ) . Sa conséquence la plus grave est « l’évasion » de tant de jeunes dans la drogue ou les expériences sexuelles mortifères. La liberté sans contrainte débouche sur le laxisme ou la licence : Paul nous met en garde contre ces écueils dans la première partie du chapitre 5 de son épître aux Galates « Ne vous mettez pas sous le joug d’un nouvel esclavage » , cette liberté dévoyée est source d’un esclavage plus grand. Sur le plan économique, c’est le libéralisme qui s’oppose le plus fermement à la liberté : ce libéralisme sans frein conduit à une nouvelle oppression : la personne n’est plus centrale , c’est le profit qui l’est . Nos démocraties avaient établi des freins : elles savaient que la tendance naturelle étaient que les forts dominent les faibles, que les riches dominent les pauvres … (ce qui est le contraire de la morale évangélique !) . Et la démocratie a su se mettre au service du faible (l’enfant in utero ou nouveau-né, la personne handicapée ou agée). Sinon alors, il y a une crise de la démocratie, même si tout le monde reconnaît que c’est le meilleur des régimes ! Le capitalisme, s’il n’a pas de freins suffisants, conduit à ces excès: le libéralisme conduit à la domination des plus forts, et à une nouvelle loi de la jungle où il faut se soumettre ou disparaître (on voit là la condition que les économies capitalistes voudraient imposer aux économies du tiers-monde ). Elle peut induire le suicide de ceux qui ne se soumettent pas à cette loi . Sur le plan international , cette loi conduit à l’exclusion des pays pauvres après qu’ils aient été exploités , voire dilapidés de leur richesse naturelle et quelquefois contraints à la famine …( la crise actuelle des banques semble cautionner cette vision des choses ) « Nous vivons dans un monde extrêmement dangereux, mais passionnant », disait Mgr. Lustiger …nous l’avons vu … Le Père Lucien-Marie de Saint Joseph, O.C.D., en introduction au « Cantique Spirituel » de St. Jean de la Croix, vers 1955( !), D.D.B. Œuvres Complètes : « Car, il est des maux extraordinaires qui appellent des remèdes héroïques. Plus encore que le vampirique appétit de jouissance de nos contemporains, ce qui est redoutable, c’est une conception de la vie délibérément athée, où le culte de la matière, du progrès, de la jouissance physique atteint la profondeur d’une adhésion de foi. On a créé des mythes plus exigeants que le Dieu q’on a voulu éliminer par eux. Le matérialisme même peut devenir une religion, et peut comporter une sorte de spiritualité. L’orgueil, la jouissance, l’indéfini progrès de la technique, celui de la science positive ont aussi leurs fidèles, leur culte, leur rite. Et ces fidèles se glorifient de ce qu’ils exaltent comme un absolu. On songe à deux paroles redoutables de l’Evangile : « Quand le Fils de l’Homme viendra sur terre, croyez-vous qu’Il y trouvera encore la Foi ? » (Luc 18 ,8) et « A cause des progrès croissants de l’iniquité, la charité d’un grand nombre se refroidira. » (Matthieu 24,12) A cet état de choses, seul un spiritualisme intense, une foi vécue jusqu’à l’intransigeance, un amour réalisé jusqu’à la transformation, peuvent faire contrepoids. Si les Chrétiens ne savent plus se nourrir des réalités surnaturelles (…), ils n’auront plus rien à opposer à l’étrange force du matérialisme exalté au point de devenir un culte spirituel. Le matérialisme pratique, c'est-à-dire le capitalisme sauvage engendre un relativisme, lui-même facteur de confusion mentale et d’hédonisme. Le libéralisme , que l’on confond souvent avec la liberté est en fait directement opposé à lui , et en fait , est même son contraire ( beaucoup d’auteurs l’ont dit ou le disent, par exemple Bernanos , et actuellement G. Leclerc ; par exemple ) C’est la loi du « merchandising », du mercantilisme qui nous conduit en fait au nihilisme, à la dépression et finalement, souvent, au suicide … par « la loi du plus fort » et l’élimination du plus faible. C’est le retour à une loi pré-mosaïque, antérieure aux 10 commandements édictées par Moïse et reconnues naturellement par d’autres cultures … c’est un remake de l’idéologie nietszchéenne et nazie : suppression des plus faibles, des handicapés et des vieillards. Actuellement, ce sont les plus pauvres dans nos sociétés, et dans les pays du tiers-monde qui en subissent les désordres … (et aussi les enfants dans le sein de leur mère) C’est ce que disait prophétiquement le Père Gaston Fessard (note dans le livre Nature et Grâce du Père de Lubac, Editions Flammarion) « Le pouvoir que la technologie confère à l’homme sur lui-même et sur la nature étant essentiellement ambigu, sa croissance au cours du XX° siècle a produit un résultat diamétralement opposé à celui qui était attendu ! Au lieu de protéger les grandes valeurs humaines et d’en assurer en toute sécurité la réalisation, elle les a livrées à un risque plus redoutable. Psychologiques, sociologiques et politiques, les techniques permettent en effet l’écrasement de la personne, le viol de son intimité, la désagrégation des cités et l’asservissement des peuples. Biologiques, chimiques et physiques, elles menacent la santé des individus et l’existence même de l’espèce humaine. » C’est bien sûr, l’inverse que cherchaient nos démocraties. Le relativisme moral débouche sur un consumérisme, une soif de consommation, qui fait vivre dans l’illusion que l’extinction de cette soif va faire disparaître un « mal-être », que cette soif d’avoir va laisser la place enfin à l’être ? La société occidentale a fait croire (et continue de faire croire …) à la planète qu’il suffit de consommer, et l’introduit ainsi dans une morale de plus en plus individualiste où la « loi du plus fort » prédominerait. Au cœur de la morale , il y a la conscience morale ; et qui dit morale, dit liberté . Au cœur de la conscience morale, il y a donc notre capacité de choix … choisir le bien ou le mal. Il y a ainsi plusieurs stades dans le choix de l’accomplissement d’une action , c’est à dire notre conscience morale : 1° Phase d’examen et de délibération = le jugement de la conscience 2° Phase d’action et d’exécution Ces 2 phases peuvent être très rapprochées, voire précipitées s’il y a urgence. Au Concile Vatican II ( Gaudium et Spes n° 16 ), nous avons une explicitation de la conscience morale : « Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : « Fais ceci, évite cela.» Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme ; sa dignité est de lui obéir, et c’est elle qui le jugera. La conscience est le centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre … Par fidélité à la conscience, les chrétiens, unis aux autres hommes, doivent chercher ensemble la vérité et la solution juste de tant de problèmes moraux que soulèvent aussi bien la vie privée que la vie sociale. Plus la conscience droite l’emporte, plus les hommes s’éloignent d’une décision aveugle et tendent à se conformer aux normes objectives de la moralité. Toutefois, il arrive souvent que la conscience s’égare, par suite d’une ignorance invincible, sans perdre pour autant sa dignité. Ce que l’on ne peut pas dire lorsque l’homme se soucie peu de rechercher le vrai et le bien et lorsque l’habitude du péché rend peu à peu sa conscience presque aveugle. » Jean-Paul II en Dominum et Vivificantem ( n° 43 ) nous dit : « Le premier fruit d’une conscience droite est d’appeler par leur nom le bien et le mal comme le fait par exemple, la même constitution de Vatican II … En appelant par leur nom les péchés les plus déshonorants de l’homme, et en démontrant qu’ils sont un mal moral qui s’inscrit au passif de tout bilan du progrès de l’humanité, le Concile caractérise tout cela comme une étape « de la lutte combien dramatique entre le bien et le mal, entre la lumière et les ténèbres », qui caractérise toute la vie des hommes, individuelle et collective » (Gaudium et Spes n° 13 ) . Au n° 44 , il nous dit : « Au Cénacle, la veille de sa Passion puis le soir de Pâques, Jésus-Christ fait appel à l’Esprit-Saint comme à celui qui témoigne que dans l’histoire de l’humanité, le péché continue à exister. Toutefois, le péché est soumis à la puissance salvifique de la rédemption. « La manifestation du péché du monde » ne s’arrête pas au simple fait d’appeler celui-ci par son nom et de l’identifier pour ce qu’il est dans toute l’étendue de sa nature … De cette façon, on en arrive à mettre en évidence les racines du péché, qui se trouvent au cœur de l’homme, comme le souligne la même Constitution pastorale : « En vérité, les déséquilibres qui travaillent le monde moderne sont liés à un déséquilibre plus fondamental, qui prend racine au cœur de l’homme. C’est en l’homme, en effet, que de nombreux éléments se combattent. D’une part, comme créature, il fait l’expérience de ses multiples limites ; d’autre part, il se sent illimité dans ses désirs et appelé à une vie supérieure. Sollicité de tant de façons, il est sans cesse contraint de choisir et de renoncer. » La « mise en lumière du péché », qui accompagne la conscience humaine chaque fois qu’elle réfléchit en profondeur sur elle-même,conduit donc à la découverte des racines du péché dans la conscience elle-même au cours de l’histoire … l’Esprit Saint « met en lumière le péché »,par rapport au mystère du commencement, en indiquant que l’homme est un être créé et qu’il est donc en totale dépendance ontologique et éthique du Créateur, tout en rappelant la condition pécheresse héréditaire de la nature humaine. Mais c’est toujours en relation avec la Croix du Christ que l’Esprit Saint –Paraclet « met en lumière le péché ». Dans cette relation, le Christianisme exclut « toute fatalité » du péché … «Mais le Seigneur Lui-même est venu pour restaurer l’homme dans sa liberté et sa force. » (Gaudium et Spes n° 13). Loin de se laisser prendre au piège de sa condition de pécheur, l’homme s’appuyant sur la voix de sa propre conscience, doit donc « sans cesse combattre pour s’attacher au bien ; et ce n’est qu’au prix de grands efforts, avec la grâce de Dieu, qu’il parvient à réaliser son unité intérieure ». (G.S. 37 ). A juste titre, le Concile voit dans le péché le responsable de la rupture qui pèse sur la vie personnelle comme sur la vie sociale de l’homme ; mais en même temps, il rappelle la possibilité de la victoire. Au n° 45 : « Ces efforts de la conscience déterminent aussi les voies de la conversion humaine : tourner le dos au péché pour rebâtir la vérité et l’amour au cœur même de l’homme … On sait que non seulement la conscience commande ou interdit, mais qu’elle juge à la lumière des ordres et des défenses intérieurs. Elle est aussi la source des remords : l’homme souffre intérieurement à cause du mal qu’il a commis. … Quand l’Esprit de Vérité permet à la conscience humaine de participer à cette douleur (du Christ en Croix), la souffrance de cette conscience devient particulièrement profonde, mais aussi particulièrement salvifique. … Les efforts du coeur humain, les efforts de la conscience, grâce auxquels s’opère cette « metanoïa » ou conversion, sont le reflet du processus par lequel la réprobation est transformée en amour salvifique qui accepte de souffrir. L’auteur caché de cette force salvatrice est l’Esprit Saint : Lui qui est appelé par l’Eglise « lumière des consciences » pénètre et remplit « jusqu’à l’intime les cœurs humains. Par une telle conversion dans l’Esprit Saint, l’homme s’ouvre à la rémission des péchés… « Le sang du Christ purifie notre conscience des œuvres mortes pour que nous rendions un culte au Dieu Vivant ». (Hé 9,14) Devant le monde de la Culture à Lisbonne le 12 mars 2.010, Benoît XVI souligne à plusieurs reprises le lien entre la parole de l’Eglise et l’annonce de la vérité : « … La fidélité à l’homme exige la fidélité à la vérité qui seule est la garantie de la liberté (cf. Jean 8,32) et de la possibilité d’un développement humain intégral … cette mission de vérité est pour l’Eglise une mission impérative (Caritas in Veritate n° 9,9). Pour une société formée en majeure partie de catholiques et dont la culture a été fortement marquée par le christianisme, la tentative de trouver la vérité en dehors du christianisme s’avère dramatique. Pour nous Chrétiens, la Vérité est divine, elle est le « Logos » éternel qui a pris une expression humaine en Jésus-Christ lequel peut exprimer en vérité « Je Suis la Vérité » (Jean 14,6) ? La coexistence dans l’Eglise de sa ferme adhésion au caractère pérenne de la Vérité avec les autres « vérités » ou avec la vérité des autres est un apprentissage que l’Eglise elle-même est en train de faire ... chers amis, l’Eglise considère comme sa mission prioritaire dans le contexte de la culture actuelle de tenir éveillée la recherche de la Vérité et en conséquence de Dieu, de porter les personnes à regarder au-delà des choses qui passent et à se mettre à la recherche des choses qui demeurent. » Cela, il l’a dit à Belem (Lisbonne), mais il aurait pu le dire dans n’importe quel pays européen ! Le 19 Septembre 2010, il béatifiait à Birmingham John-Henri Newman dont on sait qu’il avait quitté l’Eglise Anglicane pour l’Eglise Catholique justement en raison des risques majeurs de « dérives » de sa propre Eglise et du risque mortel de relativisme qu’il notait. La redécouverte des Premiers Pères de l’Eglise l’ont aidé dans ce sens. Jean Paul II, dans « Dives in Misericordia », (Dieu riche en Miséricorde), au n° 15 : Plus la conscience humaine succombant à la sécularisation oublie la signification même du mot miséricorde, plus en s’éloignant de Dieu elle s’éloigne du mystère de la miséricorde, plus l’Eglise a le droit et le devoir de faire appel au Dieu de la miséricorde « avec de grands cris » (Hébreux 5,7). Ces « grands cris » doivent caractériser l’Eglise de notre temps ; ils doivent être adressés à Dieu pour implorer sa miséricorde que l’Eglise adresse à Jésus Crucifié et Ressuscité. C’est ce mystère qui porte en soi la Révélation la plus forte de la miséricorde, de l’amour plus fort que la mort, plus fort que le péché et que tout mal, de l’amour qui retient l’homme dans ses chutes les plus profondes et le libère des plus grandes menaces. L’homme contemporain sent ces menaces. Il s’interroge souvent avec beaucoup d’anxiété sur la solution des terribles tensions qui se sont accumulées sur le monde et qui s’enchevêtrent sur les hommes. Et, si parfois, il n’a pas le courage de prononcer le mot miséricorde, ou si dans sa conscience dépouillée de tout sens religieux, il n’en trouve pas l’équivalent, il est d’autant plus nécessaire que l’Eglise prononce ce mot … » Le Père Cottier, en post-face à Veritatis Splendor (encyclique de Jean-Paul II), écrit : « La conscience de la liberté qui est au centre de l’humanisme chrétien trouve sur sa route le défi majeur des idéologies et des philosophies qui font de la liberté un absolu. Il n’est plus question d’accepter sa condition de créature avec les dépendances que cela comporte. Bien plus, Dieu apparaît comme un rival, la liberté, autosuffisante et souverainement autonome, s’affirme en luttant contre Dieu, en le niant, ou simplement en l’ignorant et le mettant entre parenthèses. Le rapport à la vérité est inversé : la liberté, autofondatrice, est source de valeurs. » (Nous voyons ici des philosophies actuelles tendant à ériger la liberté en valeur absolue.) Plus loin, il continue : « Mais, cette exaltation de la conscience conduit à une impasse redoutable : la conscience ainsi conçue n’est plus le sanctuaire où la personne écoute les sommations d’une loi universelle reflétant les exigences de l’humanité, pour les appliquer à une situation singulière, qui lui est propre. Instance autosuffisante, elle devient la voix d’un individu différent des autres. Elle est comme l’écho qui renvoie chacun à sa propre voix. Tout se passe alors comme si la liberté s’opposait à la nature humaine, que d’aucuns d’ailleurs n’hésitent pas à nier ; et comme s’il y avait autant de valeurs que d’individus. Cet individualisme extrême, qui passe à l’état de tendance, devient ainsi l’ennemi de l’humanisme. Là encore, il n’est pas difficile d’en mesurer les conséquences au plan social et politique. » (Cardinal G.Cottier en post-face à Veritatis Splendor, théologien de la Maison Pontificale à l’époque.) Cependant, le Père de Lubac, dans son ouvrage déjà cité, dit encore : « Mais toujours triomphera au sein de notre asservissement, nous en avons la certitude avec le Christ, cette pauvre humanité faible et pécheresse, merveille blessée mais indestructible. » A la fin de son commentaire de l’encyclique Veritatis Splendor, A.Chapelle S.J. souligne que Jean-Paul II invoque Marie, Mère de Miséricorde : « Il n’est aucun péché de l’homme qui puisse annuler la Miséricorde de Dieu » ( V.S. 118 ). La miséricorde renoue et scelle l’alliance des libertés et de la Vérité. Seule la grâce du pardon accorde l’homme à la Loi de Dieu. Marie invite chacun à accueillir le Seigneur de cet éternel surcroît. « Faites tout ce qu’Il vous dira » (Jean 2,5). En CONCLUSION On pourrait sans doute mettre ce travail sur l’esclavage sous la protection de la Bienheureuse Joséphine (Giuseppina) Bakhita. Au Soudan, où elle est née dans une famille noire qui l’aimait, elle a été enlevée par des marchands d’esclaves, puis rachetée par un diplomate italien, et ramenée par lui en Italie. Là, elle est entrée dans une congrégation lombardo-vénitienne et y mourut en odeur de sainteté. Comment ne pas lui confier aussi toutes les exactions du Darfour, son pays ? Il y a un esclavage de contrainte et un esclavage d’amour. L’esclavage de sœur Giuseppina Bakhita est du premier type, celui célébré par Saint Paul dans l’épître aux Romains est du second . La propension de certains de nos philosophes actuels à ériger la liberté comme valeur absolue, et indépendante de la vérité, est sans doute une invitation –sans doute inconsciente- à la licence, voire au libertinage ? (les jeunes savent bien que l’on peut être esclaves, du sexe, ou de la drogue, entre autres) ... Mais, cette liberté n’est-elle pas perdue dans l’immensité, comme un « électron libre » ? Avons-nous une vue trop pessimiste quant à notre liberté ? Faut-il que celle-ci soit nécessairement « liée » à la vérité ? Oui. Jésus est la « Vérité », Il nous l’a dit (Jean 14,6), «Mettons-nous à son école, prenons son joug, car son joug est facile à porter et son fardeau léger » ( Matthieu 11,23-30 ) ; « Il nous faut renoncer à nous-mêmes et Le suivre » ( Matthieu 16,24 ) . Est-ce une voie de sacrifice ? Oui, la Porte est étroite, c’est Lui, et la voie de la perdition est large ; suivons-Le, car Il nous dit aussi : « Je suis la Voie, la Vérité, la Vie (en Jean 14,6). La liberté humaine est appelée à se fondre dans la Vérité, d’où le mot d’esclavage par amour. Elle est un Pédagogue. Si beaucoup de choses paraissent inconciliables : Déterminisme absolu pour les socio-psychologue et liberté desinsérée de tout lien avec la vérité (ou la société), pour certains courants philosophiques récents, ces difficultés certaines n’arrêtent pas nos contemporains entre déterminisme (je pense, par exemple, à l’importance du mercantilisme …) et cette liberté revendiquée de faire ce qu’on veut : il est « interdit d’interdire » disait Mai 68. L’homme ne peut se déterminer entre une - hétéronomie (dépendance) telle qu’elle est vécue dans l’enfance et une soif d’autonomie (indépendance) telle qu’elle est vécue au cours de l’adolescence.Ces oppositions n’existent que parce que l’on a limité l’homme à lui-même …( la Philosophie des Lumières a voulu faire croire que, entre la dépendance « adolescente » vis-à-vis de Dieu et notre liberté, il n’y avait pas de troisième voie … ) mais, l’homme doit s’échapper vers le haut : « théonomie participée ». La grâce divine a ce pouvoir de nous y aider … Ce qui est sûr, c’est que notre manque de liberté est conséquence du péché originel et de nos défaillances. C’est du péché originel que dérivent toutes les déviations de la liberté que nous avons cité plus haut : licence et libertinisme ; on peut s’y égarer en toute bonne foi, sans deviner au départ qu’on devient très vite esclave. « Le Christ nous a rachetés. Il a libéré notre liberté de la concupiscence » Jean Paul II en V.S. 103. La liberté a donc besoin d’être libérée. Le Christ en est le libérateur.« Si donc le Fils vous libère, vous serez vraiment libre » Jn 8,36Ainsi, cette liberté est différente de la première liberté citée par Maritain : liberté des oiseaux hors de leur cage. Jésus restitue une dignité à tout homme et à toute femme : par exemple, le Cardinal Schönborn le dit au cours de ses conférences de Carême 2004, à Notre Dame de Paris : la Samaritaine a été « libérée » de son passé et est allée voir les gens de son village dont elle s’était sans doute coupée « Jésus l’avait rendue libre … » Jésus libère les exclus.« C’est la proclamation du rapport extraordinaire de Jésus avec chaque homme qui permet de reconnaître en tout visage humain le visage du Christ, c’est la manifestation « du don total de soi » comme un devoir et comme lieu de réalisation plénière de la liberté » (Evangelim Vitae. 81)Dans l’existence morale, on voit aussi à l’œuvre le service royal du Chrétien :- plus il obéit avec l’aide de la grâce à la Loi Nouvelle de l’Esprit-Saint- plus il grandit dans la liberté à laquelle il est appelé en servant la vérité, la charité, et la justice (Veritatis Splendor. n°107) « Mais qu’est-ce que la vérité ? » Cette réponse perplexe de Pilate devant les accusateurs de Jésus, n’est elle pas aussi notre drame actuel ? Certains courants philosophiques, en effet, récents réclament de « désinsérer » la liberté de toute vérité, faisant de la liberté la source de valeur ? N’est ce pas là l’origine du subjectivisme qui mine notre monde occidental, mais qui contamine le reste du monde. La « perplexité désolée » d’un Pilate n’est il pas aussi notre scepticisme contemporain ? « La vérité et la liberté marchent ensemble, ou bien elles disparaissent toutes les deux » dit Jean Paul II dans Fides et Ratio. Nous avons vu que c’est un des axes de son pontificat.L’homme peut : - ou bien vouloir couper tout lien entre liberté et vérité au point de faire de la liberté, une créatrice de normes. Mais, n’est ce pas là la source de la licence et de la raison du plus fort ? - ou bien dire que la liberté est nulle, tellement sont fort les déterminismes qui nous conditionnent (et, c’est un danger actuellement, tellement les gens sont conditionnés par leur médias)… au point de dire que l’homme est un animal comme un autre … (cf. mouvement Gaïa et celui qui vise à dominer l’O.N.U. en relativisant l’homme, en en faisant un être au même titre que les animaux). D’où la détermination du Vatican à défendre la notion de personne, personne qui commence pour l'Eglise catholique dès la fécondation, dès le début de la vie embryonnaire … Ce qui explique aussi la fermeté de l'Eglise à défendre, les Droits de l’homme, même si ceux-ci ont été élaboré au cours de la Révolution Française comme « machine de guerre ». (à l’époque, on croyait défendre l’homme « contre » l’Eglise ). Mais, l’homme et ses droits s’épanouissent ou s’évanouissent selon que l’on « absente » Dieu. (Jean Paul II et Cardinal Lustiger). Ainsi, on a pu dire : L'Eglise n’est pas maîtresse de la vérité. Elle la reçoit du Christ crucifié. (J.L Bruguès, introduction à Veritatis Splendor. Mame Plon.) Mais, sans liberté, est-ce qu’il y a encore une morale ? « J’ai déjà exprimé cette conviction dans l’encyclique Veritatis Splendor. Il n’y a pas de morale sans liberté … s’il existe un droit à être respecté dans son propre itinéraire de recherche de la vérité. il existe encore antérieurement l’obligation morale grave pour tous de chercher la vérité, et une fois qu’elle est connue d’y adhérer » Jean Paul II dans Fides et Ratio n°25 citant V.S. n°24 La tâche est immense. Elle suppose un profond renouvellement de la théologie et de la pastorale. Elle exige la participation de tous. « Il est urgent que les Chrétiens redécouvrent la nouveauté de leur foi et la force qu’elle donne aux jugements par rapport à la culture dominante et envahissante » Veritatis Splendor, n°88, cité par J.L Bruguès O.P. dans l’introduction à l’encyclique Comme le signale Jean Paul II, le risque est grand pour notre époque de nous arrêter en chemin, c'est à dire sur le chemin de la subjectivité. … C’est sans doute le triste privilège de nos sociétés post-marxistes (et post-chrétiennes) de croire qu’il n’y a pas de vérité … le risque dénoncé par le Pape est celui d’un scepticisme débouchant sur le relativisme moral : « Qu’est ce que la vérité ? » attitude de Pilate … Les faibles sont toujours victimes des puissants, … on sait aussi que Pilate a mal fini … « La vérité nous rend libres ». Entre la vérité et la liberté, se situe justement la conscience morale : quand l’heure du choix est arrivée, la liberté a pour rôle de s’effacer.Jésus est l’accomplissement vivant de la Loi, en tant qu’Il en réalise la signification authentique par le don total de Lui-même : Il devient Lui-même la Loi personnifiée qui invite à sa suite, qui par son Esprit donne la grâce de partager sa vie et son avenir même et qui en donne la force nécessaire pour en témoigner par les choix et par les actes. (Jn 13,34-35) V.S. n°15« Ainsi, la Loi nous servit-elle de pédagogue jusqu’au Christ, pour que nous obtenions de la foi notre justification, mais la foi venue, nous ne sommes plus sous un Pédagogue » Gal 3,24-25« Grâce à la Loi qui a fait mourir le Christ, j’ai cessé de vivre pour la Loi, afin de vivre pour Dieu. Avec le Christ je suis fixé à la Croix. Je vis mais ce n’est pas moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi » Gal 2,19-20 cité en V.S. n°88 L'Eglise de notre temps, guidée par le sens de la responsabilité envers la vérité, doit persévérer dans la fidélité à sa propre nature, à laquelle se rapporte la mission prophétique reçue du Christ : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. Recevez le Saint-Esprit » (Jn 20, 21-22), cité en Redemptor Hominis n°19. Nous sommes devenus participants de cette mission du Christ Prophète, et en vertu de cette même mission, nous sommes avec Lui, au service de la vérité divine dans l'Eglise. La responsabilité envers cette vérité signifie que nous devons l’aimer en en cherchant la compréhension la plus exacte … cet amour et cette aspiration à comprendre la vérité doivent progresser ensemble … La théologie a toujours eu et continue d’avoir une grande importance pour que l'Eglise, Peuple de Dieu, puisse participer d’une manière créatrice et féconde à la mission prophétique du Christ. C’est pourquoi les théologiens en tant que serviteurs de la vérité divine consacrent leurs études et leurs travaux à une compréhension toujours plus pénétrante de celle-ci … Tous (spécialistes de diverses disciplines) en tant que membres du peuple de Dieu, ont leur rôle propre dans la mission prophétique du Christ, dans son service de la vérité divine, y compris à travers leur approche honnête de la vérité en tout domaine dans la mesure où ils forment autrui à la vérité et lui enseignent à grandir dans la justice et dans l’amour. Ainsi le sens de la responsabilité à l’égard de la vérité est un des points fondamentaux de rencontre de l'Eglise avec chaque homme … Jésus Christ va à la rencontre de l’homme de toute époque, y compris la nôtre, avec les mêmes paroles : « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jean 8,32). Ces paroles contiennent une exigence fondamentale et en même temps un avertissement : l’exigence d’honnêteté vis à vis de la vérité comme condition d’une authentique liberté ; et aussi l’avertissement d’éviter toute liberté apparente, toute liberté superficielle et unilatérale, de toute liberté qui n’irait pas jusqu’au fond de la vérité sur l’homme et sur le monde. Aujourd’hui encore, le Christ nous apparaît comme celui qui apporte à l’homme la liberté fondée sur la vérité, comme celui qui libère l’homme de ce qui limite, diminue, et pour ainsi dire détruit cette liberté jusqu’aux racines mêmes dans l’Esprit de l’homme dans son cœur, sa conscience … Et lorsque Jésus Christ lui même comparut comme prisonnier devant le tribunal de Pilate et fut interrogé par celui-ci, ne répondit-il pas : « Je ne suis venu dans la monde que pour rendre témoignage à la Vérité » (Jn 18,37). Par ces paroles prononcées devant Pilate à un moment décisif, il confirmait pour ainsi dire une nouvelle fois ce qu’il avait dit précédemment « vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres ». Tout au long des siècles et des générations à commencer par le temps des Apôtres, n’est-ce pas Jésus Christ lui-même qui a comparu tant de fois aux cotés d’hommes jugés à cause de la vérité, et qui est allé à la mort avec des hommes condamnés à cause de la vérité ? Est-ce qu’il cesserait d’être toujours le porte-parole et l’avocat de l’homme qui vit « en esprit et en vérité » ? (Jn 4,23) (Redemptoris Humanae. n° 12) Saint Pierre, dans sa 1° épître “ Vous ls savez: ce qui vous a libérés de la vie sans but que vous meniez à la suite de vos pères, ce n’est pas l’or et l’argent, car ils seront détruits, c’est le sang précieux du Christ, l’Agneau sans défaut et sans tache (1 P 1 , 19-20); plus loin il nous dit: “C’est par Lui (J.C.) que vous croyez en Dieu, qui l’a ressuscité d’entre les morts, Lui qui a donné la gloire ... en obéïssant à la vérité, vous vous êtes purifiés pour vous aimer sincèrement comme des fréres. D’un coeur pur, aimez-vous intensément les uns les autres, car Dieu vous a fait renaître, non pas d’une semence périssable, mais d’une semence impérissable Sa Parole Vivante qui demeure ... or cette Parole; c’est l’Evangile qui vous a été annoncé.”( 1P 1, 21-24) Dans Fides et Ratio, au n° 90, il nous dit: “Une fois la vérité retirée à l’homme: il est réellement illusoire de prétendre le rendre libre. Verité et liberté vont de pair ou bien, elles meurent misérablement ensemble.” Dans la « lettre aux familles », au n° 14 : « Nous arrivons au centre de la vérité évangélique sur la liberté. La personne se réalise par l’exercice de la liberté dans la vérité. O n ne peut comprendre la liberté comme la faculté de faire n’importe quoi : elle signifie le don de soi. De plus elle veut dire : discipline intérieure du don. A notre époque, on estime parfois de manière erronée que la liberté est à elle-même sa propre loi, que tout homme est libre quand il s’en sert comme il veut et qu’il est nécessaire de tendre vers ce but dans la vie des individus, comme dans la vie des sociétés. La liberté au contraire est un grand don seulement quand nous savons en user avec sagesse pour tout ce qui est vraiment bien. Le Christ nous enseigne que le meilleur usage de la liberté est la charité qui se réalise dans le don et le service. C’est par une telle « liberté que le Christ nous a rendus libres » . On a largement tendance à confondre « liberté » avec « licence » ou « libertinisme » : « il est interdit d’interdire » était un slogan de Mai 68. … la pleine vérité sur la liberté humaine est inscrite en profondeur dans le mystère de la Rédemption. L'Eglise sert réellement l’humanité lorsqu’elle conserve cette vérité avec une attention inlassable et lorsque, à travers la fidélité de chaque chrétien, elle la transmet et réalise dans la vie humaine. » ( RedemptorHominis, n°21) Si la Loi est un Pédagogue pour nous conduire à la foi (Galates 3,24), la liberté est un chemin pour nous conduire à la vérité. Mais ne prenons pas n’importe quel chemin : « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie » Jean 14,6 … Beaucoup de chemins qui paraissent à priori bons sont en fait des culs de sac … Ne prenons pas de chemins de sortie de route …« Quand Il viendra, Lui, l’Esprit de Vérité, Il vous conduira vers la Vérité toute entière » dit Jésus (Jean16,13) en son Discours d’AdieuIl est là … Prenons garde. N.B. Le concept de tolérance est devenu premier dans nos démocraties ; si bien que le premier devoir de l’homme, disait le Cardinal Newman, est de chercher la vérité, et une fois qu’il l’a trouvé de s’y maintenir (cité plus haut). Est-ce que c’est une « timidité excessive » des chrétiens occidentaux de nier que leur religion est celle de la vérité ? Quand dans l’Evangile de Saint Jean Jésus dit qu’Il est la Vérité (et non pas seulement le Chemin qui y mène… cf. Jean 14, 6), le Chrétien Occidental n’est pas loin de l’apostasie. (me vient à l’esprit, le mot de Jean Paul II rapporté par N. Buttet, à qui on plaidait pour l’Eglise du Silence : « l’Eglise du Silence, je crois qu’elle est plutôt du côté où on ne l’imagine pas » ) Jean Paul II à Issy-les Moulineaux, lors de son premier passage en France (en 1980) a parlé « d’une métatentation » qui guette notre temps : c’est celui de croire qu’on a plus besoin de Dieu et que l’homme peut se suffire à lui-même, c’est une « apostasie silencieuse » (mais, c’est bien sûr les gens aisés qui peuvent penser cela). Nietszche avait été le promoteur de cette idée (Je pense à lui parce qu’à Berlin, par exemple d’après le Frère Aloïs de la Communauté de Taizé, seuls 30% des gens sont baptisés !), Rappelons aussi le mot de Paul Claudel à qui on reprochait son manque de tolérance : « Tolérance, tolérance … il y a des maisons pour cela ! » C’était avant la Loi Marthe Richard, qui a supprimé, après la guerre 39-45, ces maisons, qui étaient des maisons de … prostitution. Notons aussi le mot de J.M.Petitclerc, prêtre dans des foyers de jeunes en difficulté dans la banlieue Nord-Ouest de Paris : pour ces jeunes, issus bien souvent de familles immigrées, le mot « tolérance » a une connotation trop neutre, voire négative, et préfèrent le mot « respect ». Le mot « vérité » est central dans l’Evangile de Jean : il y apparaît fois, et pour conclure, il faut rappeler le mot désabusé de Pilate à Jésus (Jean 18,38) : « Mais, qu’est-ce que la vérité ? ». Notre monde actuel débouche sur le même constat amer : scepticisme qui débouche sur un relativisme moral absolu. N.B. 2 LIBERTE RELIGIEUSE / DROITS DE L’HOMME : LIBERTE RELIGIEUSE La liberté religieuse est un des Droits de l’Homme reconnus par la Déclaration des Droits de l’Homme (San Francisco, 1948) ; elle est le Sommet de tous ces Droits (c’est son n° 18), et pourtant, c’est le plus méconnu et le plus négligé. Il conditionne cependant tous les autres droits : lorsqu’il s’écroulera, tous les autres Droits seront peu à peu altérés. Deux dangers le menacent : d’un côté, le fondamentalisme, qui n’est pas forcément musulman, mais peut être hindouiste, bouddhiste, chrétien … de l’autre, un laïcisme agressif. Une difficulté cependant est liée à l’Islam, qui a toujours pensé que le fin indépassable de toute Religion était l’Islam et donc toute tentative d’aller vers une autre Religion est une forme d’apostasie. Difficile, donc, de faire accepter une certaine liberté religieuse, si quelqu’un a été musulman. On connaît le cas des habitants de certains pays, Pakistan et Egypte, entre autres, de venir à la religion chrétienne quand ils ont été musulmans (mais, c’est aussi valable pour la plupart des pays musulmans). Difficile donc de faire admettre par l’Islam e n° 18 de la Convention Internationale des Droits de l’Homme. (Signalons que l’Arabie Saoudite n’a pas signé la Convention des Droits de l’Homme pour cette raison) La liberté religieuse est la plus mal défendue de tous les Droits de l’Homme, même si les pays qui adhèrent à la Convention promettent de la défendre ! Ils la violent sans arrêt … C’est un Droit Orphelin, « an Orphan Right » nous dit baronness Carolin Cox, membre de la Chambre des Lords en Grande-Bretagne, qui défend ces Droits dans le monde et qui nous livre son témoignage dans le livre sur « Les persécutions religieuses dans le Monde » (éditions XO, 2014) ; 80% de ces cas de persécutions concernent des chrétiens ce qui fait de cette religion la plus persécutée – citons entre autres l’Inde et la persécution des Chrétiens en Orissa, celles du Pakistan où les Chrétiens sont victimes d’exaction pratiquement tous les jours : entre autres, la mort de Chawaz Bakti, ministre des Affaires Religieuses, la détention de Azia Bibi (mère de famille qui est encore en attente de la commutation de sa peine de mort pour « blasphème ». En fait, on est en présence d’une véritable entreprise « génocidaire » selon les mots du Ministre des Affaires Etrangère Français, car les exactions ont pris une tournure très grave en Syrie – et au Nord-Est de l’Irak, au Nord-Est du Nigeria, au Mali et au Yémen entre autres. (Les Chrétiens ne sont pas les seuls touchés, puisque les Musulmans qui ne sont pas de la mouvance islamiste sont aussi « ciblés » aussi : Chiites, Sunnites modérés) de même, d’autres groupes religieux comme les Yésidis) Il faut dire un mot sur la liberté d’expression, entre autres dans ces temps qui suivent les attentats qui concernaient Charlie Hebdo : a-t-on le droit de tout dire en ce qui concerne les religions ? Sans doute pas …Cette liberté d’expression accélère la dégradation des mœurs et beaucoup n’ont pas un jugement suffisant pour savoir « ce qui est « bon ou mauvais » en matière de liberté d’expression, suite à une mentalité « soixante huitarde » et on peut douter de ce que l’Etat apportera aux jeunes en essayant de leur¨inculquer »un laïcisme déconnecté de leur famille ! Il faut ainsi faire un excursus sur la liberté de l’autre, sur le respect de ses croyances, sur notre « vivre ensemble » … Notre liberté religieuse est aussi communautaire, même si elle est individuelle. A l’heure où les attentats de Charlie Hebdo ont assassiné des caricaturistes talentueux, n’oublions pas les juifs morts à Vincennes dans l’attaque du Super Marché Cacher étaient aussi des hommes. Et comment oublier ces juifs tués dans des attentats terroristes de Synagogues à Toulouse, puis à Bruxelles (la persécution des juifs en Europe rappelle de très mauvais souvenirs…). Charlie Hebdo est-il innocent dans tous ces débordements ? La laïcité est-elle synonyme de laïcisme ? La seule parade à la religion est-elle de n’en avoir aucune. On a vu au Niger que certains groupes fondamentalistes s’en sont pris à la religion chrétienne en détruisant la plupart des églises, très vite on assimile Occident, mercantilisme et religion chrétienne. Heureusement, beaucoup de musulmans ne se trompent pas dans ce jeu malsain. Tout cela pour dire que la liberté d’expression n’est pas illimitée. Il faut dans la caricature quelque chose comme un respect de l’autre qui doit subsister. « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité Dieu veut le salut de tous par la connaissance de la vérité. Le salut se trouve dans la vérité Ceux qui obéissent à la motion de l’Esprit de Vérité sont déjà sur le chemin du salut ; Mais l’Eglise, à qui cette vérité a été confiée, doit aller à la rencontre de leur désir pour la leur apporter. C’est parce qu’elle croit au dessein universel de salut qu’elle doit être missionnaire. (Catéchisme de l’Eglise Catholique n° 851)
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